Eiric,

Lorsque tu liras cette lettre, tu seras marié. Marié. Cela me fait tout drôle d’écrire ce mot. J’ai l’impression qu’hier encore, tu me poursuivais dans les jardins du château juste pour me faire rire, et maintenant, notre famille se lie à une autre et accueille un nouveau membre.

Je suis sincèrement désolée de ne pouvoir être là en un jour si important pour toi. Tôt ce matin, j’ai mis le ruban que tu m’as offert pour mon anniversaire, et je me suis rendue dans la chapelle du Cercle. Là bas, j’ai essayé de vous imaginer. Toi, très beau devant l’autel ; ta future épouse te faisant face, la voix solennelle de la révérende-mère, les murmures des invités… Ainsi, j’avais l’impression d’être un peu à tes côtés.

Raconte-moi ta journée. J’aimerai pouvoir me représenter cet heureux évènement, alors je te saurais gré de m’en donner autant de détails que possible. (En revanche, si vous avez lâché des colombes, ne te sens pas obligé de le mentionner.) Comment était la robe d’Eibhlin ? Qui a officié la cérémonie ? Aviez-vous écrits vos propres vœux ? Quelles fleurs avez-vous utilisées pour la décoration ? Qui, de nos cousins et cousines, étaient présents ? (J’espère que personne n’a échappé de bougie cette fois.) Y-a-t-il eu des pleurs ? (De joie bien entendu.)

Et surtout, es-tu heureux ? J’espère que oui.

Que le Créateur te garde.

Isbeil

P.-S. Il y a dans ma chambre un recueil de poèmes à la couverture bleue. Pourrais-tu le donner à Eibhlin de ma part en cadeau de mariage ?

Cercle de Magie
Downnoc, Strarkhaven
Le 10 Justinien 5 :09

Eiric,

Tu n’as pas idée à quel point ta lettre me fait plaisir. L’idée de te savoir heureux et ta description de la cérémonie me comblent de joie. Ne m’en veux pas, toutefois, si je te demande de m’en reparler lorsque tu me rendras visite. Ce n’est pas tous les jours que mon grand frère se marie, et je suis sûre qu’aiguillé par les bonnes questions, tu pourras me fournir de l’évènement un portrait encore plus minutieux. Peut-être viendras-tu avec ton épouse ? Je ne doute pas qu’Eibhlin est une très belle personne. Avant, je l’avoue, t’imaginer seul au château me rendait parfois triste, et le savoir peuplé d’une nouvelle présence me ravit. Si tu l’aimes, je l’aime déjà également, et je suis contente qu’elle ait rejoint notre famille.

Mes journées au Cercle suivent toutes la même composition, et j’ai peur que les quelques variations qui se présentent parfois ne soient pas très divertissantes. J’ai rencontré un chat hier, et n’ai réalisé qu’un peu tard qu’il pouvait s’agir d’un mage métamorphosé. Andrasté soit louée, je ne pense rien lui avoir raconté de trop personnel pendant que je lui grattais les oreilles.

Il est encore tôt, et je t’écris en observant le jardin du Cercle. Te souviens-tu de l’époque où je croyais que de petits êtres ailés vivaient dans les fleurs ? Je crois que ce serait une matinée parfaite pour faire leur rencontre. Leurs pétales sont de toutes les teintes de l’arc en ciel, et je les soupçonne fortement de rivaliser de couleur pour attirer notre attention. On dirait les grands coups pinceaux vigoureux d’un peintre enthousiaste. La prochaine fois que tu viendras, peut-être pourras-tu les admirer en compagnie de

Ta sœur qui t’aime.