C’est une dure soirée. Le temps humide, l’humeur désastreuse du forgeron, rien ne va. Son seul réconfort, forger. Actuellement, Bennett crée de simples armes telles que des épées courtes et des dagues. Ces dernières ont été commandées par un groupe local qui souhaite établir un ordre dans la ville. Des gens comme eux, Starkhaven en connaît des centaines. C’est dans cette atmosphère qu’il sent un regard dirigé sur lui. Sans même lever les yeux, il est certain que quelqu’un l’observe. Alors, le jeune homme lève la tête de ses travaux et cherche dans la pénombre. Il aperçoit rapidement un humain, ou bien un elfe. Dur de le savoir avec la visibilité du moment. Comme à son habitude, Bennett est loin d’être impressionné. Cependant il aimerait savoir pourquoi cette personne le regarde et reste là, sous la pluie.

« Viens ici à côté de mon four, la pluie commence à devenir forte. Tu peux me regarder ici. »

Il n’était pas rare que des enfants dorment à côté du four lorsque Bennett cesse de travailler. Après tout, autant que cette chaleur soit partagée. Sans même regarder si son nouveau compagnon de soirée s’avance, Bennett retourne à l’intérieur de la forge. Après un court instant il revient avec deux bols de soupe.

« Viens. N’ai pas peur. Un peu de soupe te tente ? C’est une amie qui me l’a préparé. Tu veux partager avec moi ? »

Pourquoi un homme resterait là, au milieu de la rue, sous la pluie à regarder un forgeron de Clattercraft qui râle à chaque coup de marteau. Etrange situation que le forgeron souhaite améliorer. Après tout, peut-être que cette personne cherche un peu de réconfort ou alors souhaite obtenir quelque chose de lui ? Dans les deux cas, Bennett était prêt à l’échange et la discussion. Il était l’heure pour que cette soirée catastrophique devienne un peu intéressante !

Bennett avait rencontré bon nombre de personnes et donc découvert énormément de races qui ensemble créent ce magnifique monde. Cependant un petit elfe tatoué comme celui-ci est vraisemblablement une première pour le jeune homme. Et son regard plein d'étonnement ne trompe pas. Cela ne change rien. Ce nouveau compagnon du soir semble avoir besoin d’un peu de chaleur et de nourriture et c’est ce que Bennett lui propose. Ainsi le forgeron tend un bol de soupe à son invité.

« Tu ne me déranges pas. Assieds toi où tu veux et mange autant que tu le souhaites, ici tu peux être en paix. Dis moi, tu aimes la forge ? J’ai remarqué que tu m’observes depuis quelques minutes et que mon feu t’intrigue. Tu sais j’étais pas bien vieux lorsque je suis venu ici pour la première fois ! Un coup de cœur immédiat ! »

Le forgeron voit sans peine que son interlocuteur n’est pas des plus à l’aise et donc des plus bavards. L’esprit de Bennett se remplit de nombreuses interrogations. Les tatouages, ce physique, ce regard... Il n’a pas besoin de mots pour comprendre la vie de galère que doit être celle de l’elfe. Cependant il ne déroge pas à sa ligne de conduite habituelle et ne pose aucune question. D’abord il faut permettre au petit elfe de se sentir mieux, réchauffé et repu. Ensuite peut-être s’ouvrira-t-il à lui.

« Est-ce que cela te dérange si je travaille encore quelques heures pour finir ma commande ? Tu pourras dormir à côté du four ce soir si le cœur t’en dis. La période est propice aux affaires et j’ai encore eu le carnet de commandes plus gros que mes bras et mon sommeil !»

Le forgeron se mit à rire. Comme souvent ce dicton improvisé n’est pas très drôle mais cela l’amuse toujours autant de tenter quelques mots d’improvisation. A peine sa soupe finie, Bennett passe sa main dans sa barbe d’un air songeur puis reprend ses esprits et redonne un coup de fouet à son four. Une scène impressionnante qui voit quelques flammes sortir du four et un vent de chaleur parcourir la forge.