Type de RP classique
Chapitre concerné chapitre 4
Date du sujet 24 Voiréale 5:13
Participants Lachlann Vaël, @Aethra
TW aucun
Résumé Après un jeu de pistes de plusieurs jours, Lachlann obtient enfin un rendez-vous avec un Corbeau.
Pour le recensement

Code:

[code]<ul><li><en3>24 Voiréale 5:13</en3> : <a href="https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t2155-sur-un-arbre-perches-aethra">Sur un arbre perchés</a></li></ul><p><u>Aethra, Lachlann Vaël</u> Après un jeu de pistes de plusieurs jours, Lachlann obtient enfin un rendez-vous avec un Corbeau.</p>[/code]

Je n’avais pas particulièrement prévu de partir en reconnaissance aujourd’hui, mais la discussion de mon maître avec un autre Corbeau m’avait interpellé. Ce fut assez pour que je me rapproche d’eux, afin d’en apprendre davantage sur le contenu de cette mystérieuse missive envoyée par un certain V qu’il avait en main. C’était bien entendu un alias, mais celui-ci ne me disait rien. Un nouveau client, peut-être ? Le contenu restait bien trop flou pour se faire une idée acceptable de ses réels besoins. Mon intérêt grandissant pour cette mission n’échappa cependant pas à Vincenzo, qui me proposa sans détour : « Tu veux aller à sa rencontre à ma place, Aethra ? » Je relevai un regard surpris vers lui, néanmoins honorée de cette preuve de sa confiance. C’était normalement lui, en tant que maître-assassin, qui allait rencontrer nos potentiels clients, avant de nous répartir les prochaines missions. Je devrais m’assurer à sa place que ce n’était pas un traquenard et mener ces négociations à bien. Je me sentais pourtant prête à le faire, après plus de quinze ans à rester dans son ombre. « Très bien. J’irais à sa rencontre. »

Le lieu du rendez-vous avait tout de grotesque et rien de recommandable, mais il me fallait agir masquée. On pourrait croire que les ruelles sombres et humides du Clattercraft offrait toute la discrétion dont un Corbeau pouvait rêver, mais je ne me sentais pas si sereine. En temps normal, je préférais justement me dissimuler dans une foule, en étant une ombre parmi d’autres, ou en forme féline sur une corniche. On paraissait plus insignifiant, moins redoutable…

Ironiquement, j’avais choisi un masque de chat pour couvrir mes traits, fait dans un bois noir et discret. Il restait toujours plus recommandable que celui d’un Corbeau par ces temps troublés. On ne m’associerait pas immédiatement à mon organisation, ou pire, à la Corneille que tout le monde recherchait vivement ces temps-ci. Ma capuche rabattue sur le haut de ma tête, les oreilles de l’animal étaient à peine visibles. Mes habits étaient d’un gris sombre plutôt que noir, pour plus de discrétion encore. Ne disait-on pas que la nuit, tous les chats étaient gris ?

Contre toute attente, notre client était ponctuel. Plutôt que de passer par la rue, je profitais du refuge des toits le temps de m’assurer qu’il était bel et bien seul… avant de me laisser retomber souplement au sol, sur le plancher des vaches, pour lui faire face. Je marquai un temps d’arrêt, le regard écarquillé, à reconnaître celui qui me faisait face. Il n’était pas dans ses atours de mage, mais ses regards en coin me laissaient penser que son chien de templier ne devait pas être si loin.

Lachlann.

Quelle ironie de le retrouver en de pareilles circonstances ! Que pouvait-il bien vouloir aux Corbeaux exactement ? Avait-il une cible à nous désigner ? Je l’avais vu si proche du prince, aux portes du Laurier Carmin, que je le soupçonnais d’être bien plus qu’un simple mage. De toute évidence, je n’étais pas la seule à ne pas avoir tout dit concernant mes allégeances.

« V, je présume ? » J’engageai la discussion, en essayant de paraître le plus naturel possible. Avec un peu de chance, il avait tout oublié de cette petite apostate effrayée, jusqu’au son de sa voix. « Suivez-moi, nous allons trouver un meilleur endroit pour discuter. » Face à ses potentielles réticences, j’ajoutai : « Simple précaution d’usage. » Rester sur le lieu du rendez-vous initial aurait été idiot. Je l’invitai à me suivre, passant d’une ruelle à l’autre, en tâchant de ne pas le perdre, jusqu’à un petit jardin défraîchi derrière une taverne où la soirée battait son plein. L’endroit restait isolé, mais nous passions subitement pour deux jeunes gens qui cherchaient un peu d’intimité loin du tumulte qui couvrait pourtant nos paroles sans difficulté. « Vous vous êtes révélés particulièrement énigmatique dans votre demande… » Je croisai les bras, m’appuyant contre le mur de pierre de l’échoppe. « Parlons tout d’abord de ce que vous attendez de nous, avant d’aborder le prix que ça vous coûtera. » Je feignais une certaine nonchalance, mais difficile de dissimuler ma curiosité pour cet homme que j’avais déjà croisé par deux fois, et qui m’avait à chaque fois révélé une nouvelle facette de lui-même. Ce soir ne faisait pas exception non plus.

Je souris, sous mon masque, sans qu’il ne puisse le voir. Lachlann s’attendait certainement à me voir arriver depuis la rue, et non depuis les hauteurs. C’était pourtant un oiseau qu’il avait réclamé, n’est-ce pas ? Cette fois, c’était moi qui le prenais par surprise… et j’appréciais bien davantage quand les choses se déroulaient comme je l’avais prévu, à mon avantage. Me retrouver face à un mage qui m’avait percé à jour, avant de m’attraper par la peau du cou, n’avait rien eu de bien agréable. Aujourd’hui, c’était différent : nous avions tous deux décidés d’être là.

Ces retrouvailles étaient inespérées. Elles rendaient l’emploi de ce pseudonyme presque ridicule. Pourquoi V, et pas L, d’ailleurs ? Trop évident, peut-être. Il se montrait curieusement avare en parole. Plus surprenant encore, il se détendit uniquement après avoir perdu ses repères, en m’emboîtant le pas dans des rues parallèles. Saurait-il seulement retrouver son chemin après cette entrevue ? Est-ce que son chien de templier risquait de lui faire la morale ? Je ne devrais même pas me poser ces questions, qui ne regardaient finalement que lui-même. Ses problèmes ne seraient les miens que s’il me payait assez. Tout du moins, je cherchais à me convaincre que je ne lui devais rien.

Il était toujours aussi silencieux. Je rentrai dans le vif du sujet sans attendre, puisqu’il ne se décidait pas à prendre la parole… Pourtant, il me suffit de croiser son regard pour avoir de nouveau cette impression qu’il me transperçait, qu’il voyait clair à travers mes masques et les différentes formes que je pouvais revêtir, humaines ou animales. Et je ne savais toujours pas s’il m’agaçait ou me rendait curieuse. C’était certainement un savant mélange des deux. Quelque chose me disait que cet homme ne devait pas laisser grand-monde indifférent. Probablement qu’on pouvait l’aimer autant que le détester.

Et quand Lachlann se décida enfin à prendre la parole, ce fut bien pour assassiner un secret en cinq mots à peine. Mes yeux s’arrondirent sous le coup de la surprise, avant que je ne me surprenne à nouveau à sourire. Je décroisai les bras pour me tenir droite face à lui, sans plus le quitter du regard. « Et croyez-vous que le vol des Corbeaux s’arrête aux frontières antivanes ? » Sifflai-je, pour toute réponse. « Vous avez demandé une assassine, si je ne me trompe, et non une antivane. » Mais cette affirmation, assénée avec force, allait bien au-delà des simples apparences, d’une quelconque nationalité.

« Qu’êtes-vous vraiment venu chercher, Lachlann Vaël ? » Croyait-il être le seul à avoir la connaissance ? Enchanteur Supérieur, vêtu dans ses beaux atours du Cercle. Premier né des Vaël, soutenant son père qui défaille aux portes du Laurier Carmin. Lachlann, uniquement pour moi… du moins au début. J’avais eu le temps de mener ma propre enquête auprès des miens. J’aurais normalement dû savoir à quoi m’en tenir… mais en vérité, toujours pas. Connaître son identité ne m’aidait pas à cerner ses intentions réelles, ni pourquoi il avait un jour partagé son repas avec une apostate en fuite et affamée. Lachlann Vaël était juste toutes ces facettes à la fois. Et, aujourd’hui, il m’en montrait une autre, bien plus sombre encore.

Lachlann était toujours aussi détestable, à l’évidence. Je me demandais s’il en faisait exprès ou si c’était simplement naturel chez lui. Il respirait la même suffisance que tous les nobles, après tout. C’était à croire que le geste de compassion qu’il avait eu envers moi, des mois plus tôt, n’était qu’une simple erreur de parcours à ses yeux. Sûrement, même. Comme c’était une erreur de ma part de rester par simple curiosité. Il était peut-être vraiment celui qu’il prétendait être, en fin de compte.

Mon regard se fit blasé sous mon masque de chat. Il prétendait avoir fait appel aux Corbeaux uniquement parce que la majorité venait de ce pays désormais rayé de la carte par l’Enclin. Je ne pouvais cependant pas lui reprocher de méconnaître la maison Stazzo. Un soupir franchit la barrière de mes lèvres, avant de lui indiquer : « Très bien. La mission sera confiée à un Corbeau d’origine antivane. » Je croisai les bras, sans m’en aller pour autant. « Je vous écoute, que leur voulez-vous exactement ? »

Son identité révélée, Lachlann Vaël siffla comme un beau serpent avec dédain, ce qui m’arracha un sourire en coin sous mon masque. « Nous sommes seuls. » Lui rappelai-je, pour le conforter un peu. Ce serait effectivement fâcheux que quelqu’un apprenne les tractations de Lachlann Vaël avec les Corbeaux, n’est-ce pas ? Sauf qu’il oubliait que ce serait une tragédie pour moi aussi. Employer son vrai nom n’était qu’une mise en garde, une menace voilée, qu’il m’avait forcé à utiliser puisqu’il avait cherché lui-même à rendre les choses plus personnelles.

Mon regard se plissa, sous le coup d’une certaine perplexité, quand il me révéla enfin la raison de sa présence. Lachlann voulait des informations sur un antivan, ce qui faisait subitement sens face à son insistance à en avoir un sous le coude. « Quel est le nom de la cible ? J’imagine qu’il ne s’agit pas de n’importe quel antivan qu’un autre antivan pourrait approcher… ce serait trop facile. » Et surtout, il n’aurait pas besoin de prendre de tels risques en sollicitant les Corbeaux.

Depuis quand se souciait-il de mes propres sentiments ? Je fronçai les sourcils sous mon masque, sans bien savoir comment réagir, alors qu’il me remerciait avant de m’assurer que ce n’était rien de personnel. Il était subitement bien trop aimable pour que ce ne soit pas vraiment important pour lui. Aurait-il réagi autrement s’il n’avait pas besoin de mon contact ? Probablement… pas. Il n’avait eu aucune raison de me venir en aide, par le passé. Pourtant, il l’avait fait. Je commençais à me dire que Lachlann dissimulait quelques élans de bonté comme on le ferait d’une faiblesse honteuse, sous une couche de sarcasme et de suffisance.

Et même s’il connaissait ma véritable identité, Lachlann avait toujours cet air peu confiant, comme si quelque chose risquait de lui tomber dessus à l’improviste. J’imaginais que cette attitude était tristement celle de tout mage, traqué ou non. Il avait beau eu me claironner la grandeur du Cercle, il se comportait comme un criminel tout juste en sursis.

Mais il ne me fallait pas pour autant le sous-estimer, car le Vaël faisait bien parti de ces nobles qui aimaient à conspirer. Je les détestais tellement. Pourtant, je continuais de prendre sur moi, comme s’ils étaient un mal nécessaire. Leurs jeux d’influence pouvaient aussi bien tous nous condamner que nous nourrir pendant des années. Nous avions besoin de leur or, même si nous aurions bien voulu nous en passer.

Le nom tomba. Il avait bien les accents antivans. Mon maître devrait le reconnaître sans peine, si je lui parlais de la famille Mansilla. Pour moi, elle ne m’évoquait qu’un son familier. Je voyais déjà la déception dans son regard quand il comprendrait que je n’avais pas retenu l’importance de cette famille antivane. « N’importe quelle information sur cette famille, mais plus précisément sur un membre d’entre elle… compris. J’imagine que vous voulez surtout apprendre tout secret qui pourrait le compromettre, si c’est son passé qui vous intéresse, plus que son présent. » Je mettais des mots sur ce qu’il ne disait pas, parce que j’en avais besoin pour cerner la nature exacte de ce contrat. « Seulement des informations ? » Lui demandai-je en confirmation. La cible était à l’abri derrière les hauts murs du Cercle, mais il y avait bien des façons d’apprendre des informations compromettantes sur quelqu’un d’important, sans même l’approcher directement… Trouver des informations était mon domaine d’expertise. Avec Vincenzo à mes côtés, nul doute que je saurais discerner la meilleure approche pour répondre à ce contrat exigeant.

« Comment souhaiterez-vous être recontacté, dès que nous aurons récupéré ces informations ? » Je lui laissais le choix, mais il allait bien devoir payer la facture. Si ça ne tenait qu’à moi, je lui aurais déposé dans son lit, rien que pour lui faire une petite farce… mais le coût de celle-ci risquait d'être trop élevé, surtout pour moi.

Un sourire entendu naquit sous mon masque et réussit à atteindre mes yeux. De toute évidence, il était dangereux de ce faire un ennemi de Lachlann. Celui-ci avait très bien compris que le pouvoir résidait dans l’information. Il en savait déjà suffisamment sur mon propre compte pour me faire tomber, ce qui était loin de me plaire. Je feignais l’indifférence pour ne pas lui donner la satisfaction de croire qu’il avait une emprise sur moi. J’en avais également une sur lui, après tout. Cet accord scellait entre nous une étroite collaboration, profitable à nous deux, mais qui pourrait tout autant le compromettre que moi si elle venait à être révélée au grand jour.

« Je vous apporterais la vérité, crue et sale, sur son compte. » Lui soufflai-je comme une promesse scellée. Je ne lui ferais pas l’affront de jouer sur les mots, en lui faisant croire que je n’avais pas compris ses réelles intentions. Nous jouions également notre réputation, à chaque marché conclu. Un client satisfait signifiait bien souvent d’autres en devenir. « Seulement des informations, donc. » Lui confirmai-je, en m’inclinant devant lui.

Je tiquai un peu à l’idée de devoir me faire passer pour une relieuse afin de délivrer mon message à Lachlann. Si je pouvais revêtir bon nombre d’apparences différentes dans le cadre de mes contrats, tout ce qui touchait à l’art de l’écriture était proscrit pour moi. Je me ferais repérer presque immédiatement, uniquement sur la base de mon incapacité à lire correctement trois lignes d’affilée. J’enverrais peut-être Hareas qui paraissait encore plus inoffensif que je ne l’étais.

Il nous restait encore à discuter du prix. Lachlann remit la question sur le tapis, avec un certain pragmatisme. « En pièces sonnantes et trébuchantes, bien sûr. Je vous enverrais également la facture, glissée dans vos commandes. » L’aristocrate ne devait pas savoir que nous manquions cruellement de tout, actuellement. Cet argent serait très bien employé par les Corbeaux pour tenter de redresser la barre. J’espérais que ce contrat signerait une longue lignée d’autres contrats. Malheureusement, si je ne pouvais pas supporter les nobles, ils restaient un mal nécessaire. Ils nous chassaient de leurs rues, mais nous ne pouvions pas faire de même. Nous avions désespérément besoin de leurs jeux sordides pour subvenir à nos propres besoins. « L’affaire est donc entendue. »