En cette belle journée ensoleillée, la jeune apprentie a convié Rita templière fraîchement arrivée au Cercle -enfin c’était relatif maintenant- pour une réunion thé et potins (lesquels elle ne sait pas, mais elles trouveront bien matière à discuter). Le but étant surtout de remonter le moral de la templière qui ne semblait pas être au beau fixe ces derniers temps, même si Ailis a pu constater une nette amélioration au cours des derniers jours. Les sourires songeurs de Rita lors d’un moment d’égarement lui en soient témoins.

C’est donc sans surprise aucune que ces pieds maladroits la menèrent au lieu habituel de ces rencontres autour d’une tasse de thé (dommage que Cadwell soit occupé). La petite table à l’ombre des peupliers, qui se dessine au loin, envoie un pic de nostalgie dans la poitrine de l’apprentie, la transportant quelques semaines en arrière, au milieu de la pluie et des confidences partagées. Elle chasse néanmoins bien vite ses pensées, quand des formes floues s’agitent dans son champ de vision.

Des apprentis qui profitent aussi du beau temps pour s’amuser dehors, encore plus loin elle distingue deux templiers.
Si au début un sourire a pris place sur ses lèvres, lorsqu’elle les voit s’affairer autour des fleurs et zigzaguer entre les arbres en chahutant.
Elle comprend bien vite que les paquets de feuilles et autres végétaux dans leurs mains ne sont pas aussi innocents qu’ils en ont l’air lorsqu’elle perçoit des chuchotements dans sa direction alors qu’Ailis continue de cheminer jusqu’à la table s’enfonçant dans le carré d’herbe.

Elle soupire, si seulement ils pouvaient prendre autant au sérieux les corvées ménagères du Cercle, que les recommandations de la Garde des Ombres. Elle envie toutefois leur naïveté, pour ces apprentis qui n’ont pas connu l’Enclin de près, ils sont juste assez jeunes pour passer en dessous de toute cette horreur- du moins pour l’instant.

Après qu’est-ce que quelques feuilles et pétales dans les cheveux ? Ca ne donnerait qu’une raison de plus à Lann pour critiquer sa coiffure, ou obtenir un la compassion de Cadwell face à ces jeunes turbulents.

Alors qu’elle s’apprêtait à jeter l’éponge, le bruit des pas précipités dans son dos, étouffé par l’herbe lui permirent d’entendre :
« -De toute façon, elle ne peut pas s’enfuir. »

Piqué au vif -ce n’est pas possible qu’il s’imagine qu’elle n’entende pas-, Ailis se tourne vers eux fronçant les sourcils, dans son mouvement elle aperçoit Rita s’approcher, très bien elle peut se permettre quelques fantaisies.
Même si elle avait réagi un poil trop tard, elle put renvoyer une partie de “l’attaque à l’envoyeur”, avec un petit sourire fier.

Ce qu’Ailis n’a pas prévu en revanche c’est la surréaction de surprise de ces 3 opposants, qui ne s’attendaient pas à ça visiblement.
Ces mouvements brusques et imprévus eurent raison de son équilibre et elle tomba en arrière, son réflexe fut de protéger son sac, contenant le thé au détriment du reste.

Et le cycle se répète comme à chaque chute, elle se retrouve pathétique le cul par terre, et son souffle qui lui manque sur l’instant, si bien qu’elle ne répond pas aux questions des 3 jeunes paniqués tout de suite.

Et elle se retrouve une énième fois face à son extrême fragilité, lui confirmant qu’il n’y avait pas de survie pour elle au-delà de l’Enclin. Il est beau le dernier rempart. Cloué au sol par des gamins qui n’ont même pas réellement attaqué.
Si elle a évité physiquement l’attaque, psychologiquement elle se l’est prise en pleine gueule et ça fait très mal, bien plus que les égratignures qu’elle a dû récolter.

Elle balaye d’un geste de la main, les inquiétudes des plus jeunes -désireuse de passer à autre chose rapidement- au moins ils ont eu la bonté d’âme de s’inquiéter de son état et de rester, au bien est-ce la peur de se faire réprimander par les templiers. Bien qu’elle n’aurait pas été contre qu’ils s’enfuient comme des lâches, avant de la voir aussi pitoyable.

Elle vérifie que le contenu de son sac n’a rien avant d’amorcer le moindre geste pour se relever -sentant les regards sur elles lui brûler le crâne- étudiant silencieusement et rapidement les choix qui s'offrent à elle.

L’instant de flottement précédant sa chute commence à s’estomper, la vie reprend son cours, au même titre que son corps, et à mesure que le temps passe, l’apprentie ressent pleinement les conséquences de sa chute.
A contrecoeur, elle va devoir accepter de l’aide. Heureusement, à part les 3 jeunes, c’est Rita qui a assisté de près à sa chute.

Ailis répond par un sourire mutin à la templière.

« En tout cas, je n'ai rien contre un peu de fraîcheur pour prendre le thé.

-Allons nous poser dans un coin à l’ombre. »

L’apprentie conduit sa comparse dans un endroit qu’elle connaît bien, l’un de ses coins préférés pour prendre le thé, et se reposer après avoir fini toutes ses obligations de la journée.
Elle pose en premier son sac sur la petite table et invite Rita à s'asseoir sur le banc.
Elle ouvre sa sacoche et déballe avec nostalgie les provisions rattrapée par des souvenirs qui l'envoient quelques années et quelques mois en arrière, lorsqu'elle pense à la première fois qu'elle a pris le thé avec Lann, et avec Cadwell, respectivement. Sans oublier les soirées entre filles avec Isbeil et Varina, même si ces dernières ne seraient plus comme avant.

« Je nous ai pris quelque chose de rafraîchissant pour aujourd'hui, thé à la menthe. Et pour la gourmandise j'ai réussi à chaparder un peu de pain et de miel. »

Elle pose devant Rita une tasse et la sert en thé, « De quoi veux-tu parler, je suis habituée à tous, à la pluie et au beau temps, comme à l'évaluation des différentes stratégies martiales déjà utilisées sur le champ de bataille. » sourit-elle alors qu'elle finit de la servir en lui tendant le pain au miel. « Nous pouvons aussi parler de chose plus personnelle, si le besoin se fait sentir. »

L'apprentie veut avant tout que son amie se relaxe, qu'elle décide de le faire en parler à cœur ouvert ou en décidant de s'amuser d'un autre sujet. Tout lui convenait.

Son sourire s’agrandit devant l’enthousiasme de son ami, avant de se faner quelque peu lorsqu’elle se heurta à un mur. Encore ça, encore ces mots…
Une impression de déjà-vu flotte au-dessus d’elle, mais elle avait fait une promesse à un ami qui lui est cher. Hors de question de flancher.

Elle envoya un sourire d’excuse : je voulais juste aider. Ayant peur que sa requête n’ait été trop invasive.
Ailis tendit le thé à Rita, chassant de son esprit les voix qui essayaient de semer le doute dans son esprit, « en vaux-tu seulement la peine ? Crois-tu vraiment pouvoir lui faire confiance ? »

« Je vais sûrement avoir un bleu » se plaint l’apprentie pour accéder à la requête de la templière, du moins en partie, alors qu’elle regarde sa hanche qui quelques minutes auparavant avait heurté le sol. Le refus de Rita avait un peu gelé l’envie d’Ailis -malgré elle- de partir dans de grandes envolées lyriques

La jeune femme essaya de gagner du temps et de l’inspiration dans la contemplation du liquide légèrement vert dans sa tasse avant de reprendre, « Il fait chaud aujourd’hui non ? » elle enserra sa tasse dans sa main « Ça nous fera du bien. » puisque Rita ne voulait pas se confier, Ailis décida de plus y prêter attention pour l’instant et juste d’essayer de profiter du moment « As-tu eu l'occasion de sortir un peu dans Starkhaven ? »

« J'irai bien te chercher quelqu'un qui maîtrise le givre, mais ça risquerait de dévoiler ton talent de tout à l'heure
-Ne t'inquiète pas, s’amuse-t-elle mon postérieur survivra, ce n’est pas la première fois qu’il rencontre le sol, et sûrement pas la dernière. » se désole la jeune femme en répondant au sourire de la templière.

Ailis remarqua bien la bataille mentale intérieure que s’infligeait la templière, et elle se sentit un brin coupable. On lui avait beaucoup reproché -ses frères les premiers- de se mêler de tout. Alors peut-être avait-elle franchi la limite aujourd’hui ?
Son inquiétude n’était peut-être que de la curiosité mal placée ? Elle aurait aimé que Niklaus soit là pour lui en parler.

« Et bien, figure-toi que j'ai commencé à voir une charmante dévote qui est folle de chats.
-Vraiment ? L’apprentie se redressa en direction de son amie, ses doutes repoussés dans un coin de sa tête. Des chats tu dis ? Dommage qu’elle ne puisse pas venir voir ceux du Cercle. sourit-elle tristement avant de remarquer les rougeurs sur les joues de Rita.

« Tu gardes ça pour toi, hein ? » Ailis mima sa bouche scellée par une clé imaginaire avant de la lui tendre dans un clin d'œil, mais… la serrure n’était pas résistante à l’intérêt de l’apprentie pour cette dévote.

« Pourquoi devrais-je garder cela secret ? Il n’est pas étonnant de rencontrer des gens dans une ville. » demanda-t-elle un petit sourire espiègle aux lèvres.