Type de RP Normal
Chapitre concerné Chapître 3
Date du sujet1er Réconfort 5:13
Participants Zaena & Lachlann
TW /
Résumé Maintenant au cercle, Zaena doit apprendre les règles, tout comme les mages doivent la tester. Pour se faire, Lachlann doit venir tester ses compétences dans les arts magiques.
Pour le recensement

Code:

[code]<ul><li><en3>DATE DU RP</en3> : <a href="https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1992-un-magicien-ne-revele-jamais-ses-craintes-pv-lachlann#23666">Un magicien ne révèle jamais ses craintes</a></li></ul><p><u>Zaena & Lachlann</u> Maintenant au cercle, Zaena doit apprendre les règles, tout comme les mages doivent la tester. Pour se faire, Lachlann doit venir tester ses compétences dans les arts magiques.</p>[/code]

Chaque jour qui passait, les murs de cette cage semblaient un peu plus petit, le ciel un peu plus loin et les chants des oiseaux un peu plus silencieux. Elle avait un lit tous les soirs, un toit, ne craignait plus la venue des templiers ou de la garde, maintenant elle ne pouvait contempler le ciel qu'à travers un mur de verre qu'elle ne pourrait peut-être plus jamais franchir. Elle avait compris, la vie qu'elle avait mené, celle dont elle rêvait et celle qu'elle voulait ne pouvaient désormais plus être la sienne. Ici, la sienne devait être celle d'une mage. Elle devait apprendre leur art, celui qu'elle avait toujours voulu éviter. Ici elle devait suivre leurs règles, ici elle devait apprendre leur foi. Il ne restait que peu de ce qu'elle était avant.

Le temps semblait plus long depuis ces quelques jours qu'il ne l'avait jamais été. Elle côtoyait des gens qu'elle craignait chaque jour, elle devait se soumettre à des leçons qui ne faisait qu'enlever encore un peu de ce qu'elle était, pour la changer à jamais. Lorsque personne ne venait pour la convertir, elle était seule à observer le monde extérieur, assise au sol en perdant son regard dans les nuages, au travers de cette maigre fenêtre qui était sa seule interaction possible avec le monde extérieur. Cruel était ce destin, elle pensait avoir fait preuve de bravoure en l'acceptant, mais au fond, elle ne pouvait que le regretter. En ce jour, quelqu'un qu'elle ne connaissait pas devait venir. Elle redoutait l'instant où il arriverait tout comme ce qu'il, ou elle, amenait. Pour l'instant, elle ne savait trop que faire de plus. Doucement elle se dressa, s'approchant de cette fenêtre, pour voir un peu plus du monde qu'elle perdait maintenant. Peut-être simplement espérait-elle voir quelque chose qui lui arracherait un bref sourire, qui suffirait à l'emmener loin de ce lieu, au moins pour un instant.

Cette quête du regard dura, tandis qu'elle ignorait comment briser l'ennui qui venait se mêler aux appréhensions en elle. Il n'y avait rien qui semblait capable de briser la peur s'engouffrant en elle, pas dehors. De longues minutes à chercher un peu de beauté dehors, bientôt focalisée uniquement sur les animaux dans le ciel, ceux qui avaient une liberté qu'elle enviait plus que jamais. Comme pour passer le temps qui s'écoulait si lentement, elle commença à siffler, un air emprunt d'un espoir futile mêlé à une nostalgie incontrôlée. Elle pensait, lorsque les sifflements devinrent petit à petit un fredonnement d'un air qu'elle voulait capable de lui tirer l'esprit des maux qui la hantait, la réflexion continua. Peut-être devait-elle accepter son sort finalement ? Peut-être ici allait-elle devoir suivre la façon d'être des mages, malgré tout ce qu'elle craignait à ce sujet. Peut-être au fond était-ce un mal pour un bien ? Peut-être y avait-il quelque chose à gagner à vivre parmi ceux qui pouvaient comprendre le mal qui la rongeait.

Elle avait juré de ne pas changer, de rester celle qu'elle était, de ne pas devenir comme ceux qui avait voulu lui enseigner la magie jadis. Maintenant les choix semblaient si réduits pour elle, qu'elle allait peut-être devoir choisir cette sombre voie.

La porte raisonna, tirant la dalatienne se ses songes, elle fit quelques pas, traversant la cellule en quelques pas, pour venir ouvrir la porte, les yeux rivés au sol.

« Bonjour. »

Le ton était timide, sans pouvoir cacher l’appréhension qui venait de reprendre tous ses droits sur elle. Quoi maintenant ?

Elle ne le connaît pas, il semble aimable, du moins autant que possible. La jeune mage s'écarte lorsqu'il l'invite à se mouvoir. De toute manière, ce n'était pas comme si elle avait réellement un choix ici. La dalatienne reste sur le côté de la porte, laissant le chemin grand ouvert au mage. Visiblement il n'a aucune intention d'attendre, ni de perdre beaucoup de temps en petites paroles. Si différent du premier enchanteur rencontré par la Dalatienne, ce dernier partage tout de même une noblesse et une prestance angoissante pour l'elfe si peu habituée à un tel milieu. Il se nomme Lachlann Vaël, c'est un enchanteur supérieur et il vient pour évaluer son niveau en magie.

Les yeux de l'elfe se ferment, voilà bien ce qu'elle voulait le moins faire, ni aujourd'hui, ni demain, tant elle craint les résultats d'une entrevue comme celle-ci. Elle n'en dit rien néanmoins, restant cloîtrée dans ce mutisme qui semblait maintenant lui ouvrir grand les bras. Ses yeux cherchaient à éviter l'enchanteur, probablement par crainte de l'homme qu'elle ne connaissait pas encore. D'un timide geste de la main elle l'invita à rentrer. Lui précisait qu'aujourd'hui ce ne serait que des sorts simples. Elle acquiesça.

« Oui monseigneur. »

Politesse bienvenue ? Après tout, les Vaël étaient des gens importants ici non ? La politique était bien loin d'être quelque chose qu'elle connaissait, encore moins qu'elle aimait, malgré tout elle connaissait un peu le nom. Les mots de l'ancienne voleuse se voulaient polis, mais le ton tremblant qu'elle avait ne parvenait pas réellement à masquer la peur et l'appréhension qui dominait son cœur sur l'instant. Quels étaient les sorts simples ? Risquait-elle quelque chose ? Et après ? Que se passerait-il si elle était malheureusement douée ? Le mage continua, brisant la question suivante dans l'esprit de la jeune elfe.

Comment se sentait-elle ?

« Je... »

Elle redressa le regard, ne parvenant pas à cacher réellement son étonnement sur l'instant, ni à faire un choix, tant nombre de mots venaient se bousculer dans son esprit pour sortir.

Seule, effrayée, en colère, apeurée, irascible, rageuse, fulminante, tempétueuse, affolée, atterrée, effarouchée, abandonnée, délaissée, esseulée...

« Je... »

Abattue, accablée, mortifiée, craintive, terrifiée, inquiète, terrorisée, négligée, déprimée, démoralisée, prostrée, nostalgique, peinée, isolée...

« Étrangère... »

Le mot sortit tout seul, tandis qu'elle posait son regard sur le mage. Elle n'avait pas l'impression d'avoir quelque chose à faire ici, ce n'était si sa place, ni sa volonté. Elle ne connaissait personne, ni ne voulait connaître quelqu'un ici, les portes restaient closes et sa prison ressemblait plus à un monde inconnue qu'à un lieu qui deviendrait familier. Après quelques secondes de flottement, elle reprit la parole, tentant d'enterrer son mot précédent.

« Je me sens bien Monseigneur Vaël. »

Autant qu'elle pouvait peut-être, car le ton lui même peinait toujours à sembler sincère, elle se retourna et fit quelques pas, tirant une chaise pour l'enchanteur, puis une pour elle sur laquelle elle vint s'asseoir, fuyant le regard de l'enchanteur supérieur.

Surveiller une émotion en particulier ? Le regard de l'elfe se porta sur son supérieur, quel sentiment pouvait la pousser à fauter ? Où le danger pouvait-il se cacher en cet instant ? La colère était une réponse évidente pour elle, colère contre elle même, contre ce cercle, contre ce jour fatidique, contre ceux qui avaient décidés de l'enfermer ici. Pourtant cette réponse évidente ne semblait pas être la vérité pour elle, beaucoup d'émotions se confrontaient dans son esprit, l'une d'entre elle était la réponse, son regard se porta sur la table à laquelle elle était assise, fixant un long instant ses poignets, avant qu'une réponse ne vienne réellement.

« J'ai plus... Peur ? Je suppose je... »

Elle tourna la tête, fixant du coin de l’œil le soleil à travers sa petite ouverture vers le monde extérieur. Elle cherchait à expliquer, autant qu'à comprendre.

« J'ai juste l'impression que chaque jour le soleil semble un peu plus sombre que le précédent et... »

Son regard se retira de la fenêtre, fermant les yeux, sans pouvoir cacher toujours une certaine peur en elle, elle frissonna un instant.

« Et je crains le jour ou le soleil sera obscur à son tour. »

Elles croisa les bras, posant son menton sur sa peau, comme pour se protéger de quelques pensées sombres qui pouvaient lui traverser l'esprit. Le mage continua, dans tous les cas ils feraient cette évaluation, offrant simplement de l'adapter selon l'état de l'apprentie naissante. Elle se redressa doucement, secouant un peu la tête de gauche à droite.

« Non non, je suis désolée Monseigneur, je n'aurai pas du dire ça... »

Elle chassait ses mots, craignant maintenant qu'ils soient un poids pour elle ici, probablement valait-il mieux qu'elle cache ses émotions réelles, quand bien même celles-ci semblent très présente en elle dans l'instant présent. Un sort, maintenant, un sort sur lequel s'échauffer ? Interloquée elle dévisagea l'enchanteur quelques instants, cherchant la réponse dans les traits de l'humain face à elle.

« Euh... Je ne suis pas vraiment très... Versée dans la magie je ne sais trop que choisir... »

Son regard bifurqua, l'espace d'un instant, cherchant à chasser le souvenir de ses dernières prouesses magiques.

« Guère douée non plus monseigneur... Par quoi devrai-je commencer ? »

Peut-être une leçon théorique ? Ou un tableau d'un sort ? Quelque chose qui ne la force pas à en appeler à ses pouvoirs. Par Dirthamen, n'importe quoi pour lui éviter d'appeler à cette énergie qu'elle redoute. Peut-être même une leçon sur leur foi, si cela peut retarder cet immonde travail. Une fois de plus elle frisonne, sa tentative de le cacher semblant bien infructueuse, ses souvenirs remontant devant ses yeux, alors qu'elle mordille légèrement sa lèvre, comme pour éloigner ses pensées d'un jour obscur qu'elle aurait déjà souhaité oublié.

Les mots de la dalatienne ne le dérangeait pas, il ne semblait pas la juger, ni même trouver indigne, ni mauvais les paroles de l'ancienne voleuse. Elle redressa le regard, suivant l'enchanteur tandis qu'il parlait. Elle réfléchissait à sa question. Pouvait-elle penser la magie réellement capable d'un acte aussi terrible que d'éteindre le soleil ? En toute honnêteté, le doute était permis, mais au fond, son cœur lui criait une réponse qui ne tarda finalement pas à sortir, baignée dans un ton morose et apeuré.

« Je... Je le crains... Elle ne semble avoir de limite que ce que les puissants peuvent imaginer, lorsqu'il s'agit de détruire et blesser alors... »

Une de ses mains vint serrer son torse, comme tentant d'empêcher les battements de son cœur de retentir hors de sa poitrine.

« Alors je ne pense pas que même le soleil soit hors de son influence. »

Peut-être avait-elle tord, mais au fond, le chaos engendré par les pouvoirs évoqués dans son clan ne semblait avoir aucune contrainte, tant ils parlaient de leur pouvoir comme d'une arme qui pouvait rendre à leur peuple une place disparue depuis longtemps. Ils y croyaient, voyaient ainsi leur salvation. Alors Zaena y croyait, voyait ainsi leur destruction. Le mage observa un peu le dehors qui manquait tant à la dalatienne, avant de continuer ses paroles. Il était emprunt d'une sagesse et d'un talent à l'oral que l'apprentie ne pouvait réellement suivre, mais elle y comprit tout de même un message, un qui, peut-être, pouvait être rassurant. Même si il ne pouvait ignorer la limite entre le monde extérieur et celui du cercle, il rappelait un fait simple, leur monde était similaire.

Certes, il n'avait pas tord au fond. Simplement, la question continuait de tourner dans l'esprit de l'elfe, pouvaient-ils seulement réellement profiter, ou même connaître ce monde, enfermés dans une tour d'or, loin de tout, le sort était-il plus enviable pour eux que pour celui enfermé sous un donjon pour le restant de sa vie ? Elle observa à nouveau la petite fenêtre. Celle-ci suffisait-elle vraiment à faire de cette vie quelque chose proche de la liberté ? Ou bien peut-être, fallait-il voir cela comme un sacrifice pour éviter à ceux dehors de souffrir, elle l'avait pensé. Elle avait évité qu'Hareas ne soit également prit pour cible par les templiers, mais était-ce là vraiment une raison valable ? N'était-ce pas au fond la présence du cercle elle-même qui était à questionner ?

La question pouvait-elle être posée sans en appeler à une quelconque force pour justifier sa présence en ces lieux ? Elle qui avait voué sa vie à prier Dirthamen peinait encore à discerner le dessin de sa divinité. Celui-ci l'avait guidé dans l'après il y a peu, pour la ramener dans le monde des vivants, peut-être était-ce ici une autre épreuve ? Peut-être un test au fond, ou bien un autre être avait-il décidé de l'emmener en ces lieux ? Ou peut-être avait-elle échoué, à un moment, en cédant à cette force qui l'avait traîné dans l'Après, peut-être le loup finalement était-il présent quelque part dans son âme, qu'ici elle devait apprendre à chasser cette présence ? Beaucoup d'interrogations qui ne semblaient trouver aucune réponse en cet instant.

Finalement, il était toujours temps pour cette épreuve terrible. Qu'avait-elle déjà fait ? Son regard s’assombrit, fuyant celui de l'enchanteur face à elle alors qu'il énumérait de petites manifestations magiques. Elle devait faire apparaître quelque chose, n'importe quoi, tant que cela montrait son lien avec l'après. Après cela, quelques autres petits sorts pour combler cette mauvaise journée. Il était toujours aimable, il semblait bien gentil et la soutenait. Malgré tout elle avait bien du mal à accepter les mots, le moment terrible arrivant. Elle acquiesça, sans enthousiasme.

« J'ai compris... »

Elle ferma les yeux, avançant timidement sa main, pointant sa paume vers le plafond. Elle inspira fortement, retenant des tremblements de son âme. Son esprit digressait, s'approchant de la barrière entre les mondes, tandis qu'elle tentait agripper un instant cette force qu'elle avait fuit depuis si longtemps. Lorsqu'elle sentit cette énergie l'envahir, le passé ressurgit, amenant avec lui d'immondes odeurs qui vinrent lui emplir les narines. Elle ferma doucement la main, comme enserrant quelques souvenirs douloureux. Ceux-ci semblèrent couler hors de sa poigne, tel le sang au sol lorsque la magie fut invoquée. Le visage de l'elfe se déforma, ne parvenant plus à maintenir ses émotions sous contrôle alors qu'elle se concentrait pour faire appel à ce talent refoulé depuis plusieurs années. Si seulement il avait disparu... Elle regrettait maintenant, alors qu'une faible flamme naissait dans le creux de sa main, convoquée de ses souvenirs de cette confrontation terminée, comme un souvenir sombre de ce feu qui la poursuivait à travers un lieu autrefois beau.

Le mage était là, à ses côtés, comme il avait promit, si les choses lui échappaient.

Le souffle de Zaena tourna court alors qu'elle observait cette arme, née de son passé et de ses émotions. La fine flamme ne pouvait guère blesser, mais elle suffisait à lui rappeler pourquoi elle avait fuit son domicile, il n'y avait que destruction et mort à gagner par ce pouvoir, deux choses dont elle n'avait jamais voulu. Quelques larmes s'échappèrent de ses yeux, pour ruisseler doucement le long de ses joues, elle se sentait traîtresse en cet instant, elle avait créé ce qu'elle voulait fuir, mais plus que tout, confirmait ses craintes : son pouvoir était toujours là et les mots de son clan lui revenaient en tête. Elle avait leur talent, leur capacité à détruire et blesser et pour ça, elle se haïssait.

La flamme disparue, emportée dans l'après à nouveau lorsqu'elle serra son poing, alors que perlaient de nouvelles larmes sur ses joues. Quelques mots semblèrent vouloir s'échapper de sa gorge, retenus par les émotions encore forte. Elle voyait encore les flammes, entendait encore les pleurs et sentait encore le sang, tout ce qui naissait de souvenirs sombres de son histoire.

« Comment faites vous face à... Ca... Sans... Sans penser à... »

Elle ferma les yeux, sans parvenir à effacer les quelques visages venus la hanter.

« A ceux qui ont souffert ? »

Les leçons du mage semblaient bien étrange pour la jeune elfe, les questions du mage avaient une signification certaine, tout comme il semblait visiblement avoir une vision intéressante du pouvoir, malgré leur possibilité, pourquoi agir ? Elle hésitait un peu sur sa réponse. Finalement, c'était plus une autre question qu'une réponse qui lui vint en tête.

« Ces règles, tous les suivent ? Car même si nous nous efforçons à les suivre, tous ceux ayant accès à un tel pouvoir vont-ils les suivre ? Je... Nous partageons ce même fardeau que tant de gens, pouvons nous croire que tous choisiront d'admirer le soleil ? 

Ce pouvoir est un mal en soit, car personne ne devrait simplement pouvoir faire de tels choix. Peut-être ses pensées étaient-elles naïves et ridicules, elle qui il y a peu prier pour une dangereuse apostate. Mais qu'importe, même si elle croyait en ce pouvoir, ici il était coupable de l'avoir enfermé à jamais derrière d'épais murs de pierre. Son âme se perdit doucement, convoquant un peu du pouvoir tant craint, ce maigre flammèche était bien loin de pouvoir se vanter de rivaliser avec le plus grand des astres, pourtant elle avait un poids certain sur la jeune elfe, au moins sur son âme. Le mage la félicita, elle ne prêta guère attention à cela, concentrée sur cette destruction convoquée dans le creux de sa main. Incanter une telle arme fut difficile pour son cœur, qui continuait de résister, mais son âme elle avait accepter de ramener ce pouvoir enfoui, enfoui avec d'autres qu'elle craignait plus que tout. Il y avait dans ce pouvoir certains des souvenirs les plus douloureux de la Dalatienne. Les siens, les humains, ils avaient tous usé de ce pouvoir pour commettre tant de mal, dans cette maigre lueur, résidait le pouvoir maudit à l'origine de tout ça. Certes, aujourd'hui certains pouvaient s'en servir avec un but louable en tête, mais sauver une vie ne rattrape jamais les milliers détruites. C'était cela que cette maigre flamme lui rappelait, ce pouvoir était pire encore qu'une lame souillée par le sang d'une centaine d'innocent, il portait la charge de bien plus de maux qu'elle ne pouvait supporter.

Son regard se releva une fois la flamme éteinte, étonnée de voir le mage lui tendre ce verre. Le geste était gentil, elle accepta d'un court hochement de tête, vidant un peu de son contenu un bref instant après. Son regard se déposa à nouveau sur la main qui avait convoqué ce pouvoir maintenant toujours là. C'était une arme bien trop dangereuse, elle le savait, elle l'avait vu, elle l'avait senti jadis. Le mage ne lui demanda pas de replonger les mains dans ce bain de sang, s'interrogeant sur les mots de l'elfe. Tremblante, elle répondit sans pouvoir cacher ses émotions. Le ton restait triste, presque vaincu.

« Je... Ceux qui ont subit la magie je... Je sais ce que ce pouvoir a fait... Ce qu'il peut faire... J'entends toujours les râles de ceux que j'ai vu... »

Elle ne put continuer guère plus, plongeant à nouveau son regard dans sa main, dégoûtée comme si celle-ci était couverte du sang de ceux que ce pouvoir avait blessé.

« Ce pouvoir est la mort, destructrice de mondes, comment faites vous pour ne pas y penser ? »

Elle ferma le poing à nouveau, secouant légèrement sa main comme pour en enlever le liquide poisseux déposé dessus par son imaginaire.

« Mon clan disait que c'était une bénédiction, cette capacité qui fait de nous des... Monstres... »

Elle releva le regard, pour le poser sur l'enchanteur, laissant son cœur prendre le contrôle de ses mots.

« Nous avons sur les mains le sang de tous ceux que nous avons tués... Hier, aujourd'hui et demain. »

Elle détestait la magie, elle craignait la magie, mais plus que tout, elle craignait ce que le magie pouvait faire d'elle, car il n'y avait pire sentiment que celui après avoir prit une vie.

Elle acquiesçait doucement. Peut-être avait-il raison, ils avaient de grands pouvoir et pouvaient peut-être arrêter le mal avant qu'il n'arrive. Que la raison de chercher le pouvoir était de devenir plus fort ? Pour cela la jeune elfe doutait. Doucement elle réfuta, doucement elle rejeta, doucement elle répondit.

« Je ne pense pas. Chercher le pouvoir ne peut mener qu'à un désastre, car il fournit les outils pour les pires catastrophes. »

Qu'importe l'individu, celui qui cherche à toucher le pouvoir d'un dieu, qu'il soit bon ou mauvais, finit toujours mal. Le loup attends les plus fous, ceux qui se lancent dans cette chasse seront un moment ou un autre des armes servant à frapper les autres, ou bien se perdront dans leur quête, devenant à leur tour un mal à arrêter. Il n'y a pas d'autre fin possible pour ceux maudits par ce pouvoir, elle y croyait, tant ceux qu'elle avait jadis aimé furent perdu dans ce chemin pour la puissance. Alors non, elle ne voulait pas devenir plus forte, elle l'était déjà bien plus qu'elle ne pouvait le vouloir. Elle avait déjà ce qu'il fallait pour faire mal, c'était déjà bien trop pour elle.

Ce pouvoir si simple, une simple flamme qui peut tant dégénérer. Sans surveillance ou avec de mauvaises intentions, cela ne serait qu'une arme de mort parmi tant d'autres. Un don qui ne pouvait servir qu'à détruire, qu'à tuer, qu'à blesser. Les larmes continuaient de couler lorsque le mage répondit. Il n'avait jamais tué. L'elfe resta muette, étonnée par les mots du mage. Lui, puissant enchanteur supérieur n'avait jamais prit de vie ? Il y a encore peu, jamais elle n'aurait cru en ses mots. Son cœur ouvert sur cet instant ne lui permit néanmoins pas de doute. Il continua, affirmant qu'il pouvait mais n'avait aucune raison de le faire. Alors pourquoi ? La question resta collée dans l'esprit de l'elfe. Lui qui avait tant de pouvoir n'avait jamais tué, elle qui n'en avait que si peu l'avait déjà fait. Alors pourquoi? Peut-être était-ce alors déjà trop tard ? Cette voix qui l'invitait au pire lorsque la magie se réveillait en elle, peut-être était-ce la preuve que tout était déjà perdu, qu'elle était déjà devenue ce qu'elle craignait. Elle tenta de balbutiait une réponse au pourquoi de l'humain, sans y parvenir, les mots s'étranglant dans sa gorge.

Il n'y pensait pas, car il n'en avait ni l'envie, ni le besoin. Alors pourquoi y pensait-elle tant ? La magie ne faisait que lui rappelait ces talents sombre pour prendre la vie, cette obsession terrible de son clan pour un talent meurtrier, qu'elle ne voulait pas. Le pourquoi continuait de raisonner dans sa tête, jusqu'à ce que les prochains de l'humain arrivent à ses oreilles. Avait-elle tué beaucoup de monde ? Elle se figea, tout autant que son cœur, tandis que les visages qu'elle avait éteint par le passé revenaient devant ses yeux. La sensation de poisse permanente, l'odeur du sang, de la peur et de la haine, cette petite voie tout au fond lui intimant d'employer ses pouvoirs de la plus vil des façons, puis cette fin prématuré pour un autre qu'elle. Ses deux vinrent porter sa tête, tandis qu'elle baissait le visage, laissant de nouvelles larmes couler.

« Oui... »

Beaucoup peut-être penseraient que non, après tout il y avait des meurtriers au tableau bien plus fourni qu'elle en dehors, mais beaucoup, ce mot était valable lorsque le chiffre était au-dessus de zéro pour elle. Le mot était sorti avec toute la tristesse qui contrôlait son être à cet instant, peinant à ressembler à un mot tant il était plein d'émotions.

« Et je me souviens de chacun... »

Les derniers mots, les dernières expressions, l'endroit, l'heure, le temps, les personnes autour, ainsi que ce que son cœur avec crisé lorsqu'elle avait commit le pire.

« Et je ne veux plus jamais. »

Comme à chaque fois, malheureusement le destin semble prendre un malin plaisir à l'envoyer sur des chemins toujours plus dangereux.

Ne tuer personne ici ? Par tous les dieux jamais ! Ni ici, ni ailleurs. Il semblait sérieux, chose qui ne manquait de peiner un peu plus la jeune elfe, se sentant ici accusée pour ce qu'elle détestait le plus d'elle-même. Aux mots de l'enchanteur elle secoua la tête de gauche à droite, laissant ses cheveux être emportés par la force du mouvement, elle n'avait à peine beaucoup de calme restant, terrifiée par le pouvoir invoqué il y a peu, ainsi que haineuse envers ses propres actes passés. Les mots qui sortaient de sa bouche étaient faits autant pour la persuader elle que l'homme face à elle.

« Par Dirthamen, jamais ! »

Elle tenta de reprendre son calme, essuyant difficilement ses larmes avant que les suivantes n'arrivent.

« Jamais... »

Jamais plus. Elle avait déjà promit cela à son cœur il y a des années, promesse brisées par une nuit sombre qu'elle avait cœur à oublier. Une à l'origine d'un deuil à peine fermé pour la jeune elfe. Un deuil pour ses amis, disparus, ainsi que pour sa victime, dont le sang semblait encore la coller, alors que lui n'avait que faire de celui des elfes accompagnant la jeune voleuse à l'époque. Elle détestait l'homme pour ce qu'il avait fait, aujourd'hui encore, pourtant elle se détestait encore plus d'avoir prit sa vie. L'enchanteur lui posa une question qui semble la briser un instant. Quand. Le dernier. Le visage de l'humain remonta, son air emprunt de rage à la vue des elfes, de fierté à la vue de leur sang, puis de peur à la vue de son prendre sang. Quand ? Cela lui semblait si récent, les images semblaient encore vives devant ses yeux. Elle frissonna en y repensant.

« 3 mois... Demain. »

Son regard de dégoût se posa à nouveau sur sa main, comme si elle portait encore la lame qui avait percé l'homme il y a quelques semaines. Les larmes revinrent à leur tour, lorsqu'elle observait devant elle, elle semblait à nouveau voir le corps sans vie de ses amis, puis elle sentait le regard lourd, terrifiant de l'homme qu'elle avait abattu. Son souffle sembla devenir court, alors qu'elle perdait petit à petit pied. Des souvenirs qu'elle voulait laisser enfermer à jamais, des images qu'elle voulait oublier à jamais, venaient à nouveau s'imposer devant elle. Elle lâcha sa dague imaginaire pour venir plaquer ses mains contre ses yeux, tentant de se protéger d'images gravées dans son esprit. Sa voix tremblante sortit à peine.

« Je ne veux plus en parler... »

Cela pouvait sembler presque comme une demande qui n'acceptait pas de refus, jusqu'à ce que la voix douce et triste qu'elle avait quelques instants avant revienne.

« S'il vous plaît... »

Elle tenta, petit à petit, de reprendre sa respiration, chassant difficilement les images de sa tête. En cet instant elle voulait voir un visage amical, quelqu'un, quelque chose à quoi se raccrocher. Un amis à serrer contre elle, un animal contre lequel se blottir, n'importe quoi qui lui rappelait encore qui elle était, au-delà de la meurtrière qu'elle contemplait maintenant. L'enchanteur était encore là, la magie devait revenir. Sa gorge se serra. Elle ne voulait pas. Après le feu, la foudre ? La mort ? Le chaos ? Que pouvait-il demandait d'autre ? Elle fut intriguée au mot soin. Soigner ?

Elle dégagea ses yeux, essuyant à nouveau les larmes, pour fixer le petit animal dans le bocal. Soigner ? La petite mouche n'était que peu blessée, mais comment réparer cela ? Soigner ? Elle sembla se calmer un peu, approchant doucement sa main de la petite bête.

« Je... Je ne sais pas comment faire... »

Doucement elle posa sa main sur le bocal, comme si une mince étincelle d'espoir sommeillait dedans. Soigner ? Comment ? Elle n'avait jamais vu, ni réellement envisagé d'utiliser ces pouvoirs ainsi. Dans son clan, ce n'était guère la façon mise en avant.

« Comment faites-vous ? »

Une pointe d'intérêt réelle semblait naître, il était réellement possible de faire cela ? Comment ? Peut-être que... Peut-être qu'elle avait ici quelque chose qui ne causerait pas seulement la destruction et la douleur autour...

« Je... »

Promettre ? Elle l'avait déjà promis, la première fois. Hélas cette promesse fut brisée. Pouvait-elle vraiment le faire et se dire qu'elle la tiendrait ? Tout son cœur lui criait que oui. Cette promesse, elle l'avait lié à son âme, elle avait juré pour elle même de ne plus sentir cet appel au pire, cette sensation terrible qui l'envahit lorsqu'elle prend une vie. Elle avait promit de ne plus utiliser ses pouvoirs non plus, promesse maintenant brisée. Sa volonté ne semblait pas parvenir à la guider à travers ses promesses. Mais aujourd'hui, il en est une qui reste gravée sur son âme, celle faite à un amis de ne pas changer, de ne pas abandonner.

« Je... »

En un sens, ses promesses à elle-même semblent toutes vouées à un échec qu'elle regrette à jamais, seules restent celles faites à un autre, seules restent celles auxquelles elle tient le plus, celles qui vont vers les autres. Alors cette promesse, en cet instant, elle l'adressa à l'enchanteur, relevant le regard, les yeux humides, avec une étrange volonté dans le regard.

« Je vous le promets. »

Elle avait cœur à tenir ceci, autant pour elle que par cet étrange lié fait de mots. Elle hocha doucement la tête, montrant une volonté qu'elle n'avait pas arborée depuis son épreuve dans l'après, sur la place maudite où elle avait tout perdu. Pour elle, cela pouvait même aller plus loin. Ne pas tuer, ne pas blesser, ne pas faire souffrir, tout cela autant que possible, car elle a encore à rencontrer quelqu'un à qui elle souhaiterait de tels malheurs. Non, cette fois, elle s'y tiendra. Des routes il y en a de nombreuses face à elle, mais cette promesse l'engage sur une qu'elle ne peut se permettre de regretter, car s'en est une encore liée à elle, malgré ce lieu qui cherche à ôter ce qui lui tenait tant à cœur, il y a encore quelques filaments de la voleuse qui résident en elle, ceux qui cherchent à éviter aux autres des souffrances qu'elle craint tout autant.

Son regard se pose sur le petit bocal. Si magie il y a, autant que celle-ci soit bénéfique. L'idée de tirer encore dans ces pouvoirs sombres ne la rassure pas, mais il ne semble pas y avoir d'alternative pour elle en cet instant. Alors à nouveau, si un choix il y a faire, il doit être celui né de sa volonté. Cette magie qui fut forcée en elle était un pouvoir de destruction, de mort et de chaos. Si elle peut encore faire de cela un outil pour soigner, alors soit. Le mage ne pratique pas de cette magie, admettant ne pas du tout être familier avec ces pouvoirs. Malgré tout il guide la jeune elfe comme il peut, le sort apparaît doucement comme une aide, plus qu'une arme. Aider un processus naturel... Aider, non pas conjurer un miracle, mais aider cette créature. L'apprentie plante son regard sur la bête, tentant de sentir, comme lui a demandé le mage. Elle puise dans ce pouvoir enfoui, remontant à nouveau des souvenirs douloureux. A nouveau elle entre dans ce territoire de destruction, lui rappelant qu'on lui a apprit cela pour une tâche toute autre que ce qu'elle cherche à accomplir. Elle tremble un instant, se concentrant autant que possible sur un aspect : aider. Petit à petit, cela semble marcher. La petite créature brille d'une feinte lumière, à peine perceptible à l’œil, tant c'est le cœur de l'elfe qui lui apporte la nouvelle.

Un mince sourire se dresse sur les lèvres de l'elfe lorsque la petite mouche semble se remettre de cette blessure. La dalatienne porte sa main sur le couvercle, libérant la petite bête pour la laisser virevolter, libre dans cette prison. Elle tente vainement de la suivre du regard avant de reporter son attention sur l'enchanteur supérieur. L'expérience n'était pas tout à fait plaisante, pourtant une certaine sérénité règne sur son visage, peut-être que ces sorts peuvent aider à oublier cette magie destructrice, pour oublier ces pouvoir terribles, pour remplacer les souvenirs de morts, par ceux de vie.

« Désolée, vous ne teniez pas trop à votre mouche ? »

Elle posa à nouveau son regard sur la table. Il avait parlé de plusieurs sorts, de plusieurs écoles. Si celle-ci semblait avoir une origine bonne, elle doutait fort sur les suivants.

« Les autres écoles... Apportent-elles la vie ou la mort ? »

Au fond son cœur lui murmurait la réponse, de toute manière, toute magie est coupable de mort, car son existence même est pervertie par des forces bien plus sombres qu'aucun mage.

Douée ? Peut-être... On lui avait déjà dit ça, mais l'air était différent. Le mot semble plus la déstabiliser qu'autre chose, non seulement elle ne voulait pas l'être, mais la dernière fois que quelqu'un lui avait dit cela, c'était pour faire d'elle un monstre, un outil voué au mal. Mais au moins, ici c'était sa capacité à soigner qui faisait naître ces éloges. En soit c'était mieux, bien mieux. Jugée pour un talent qu'elle acceptait de considérer bon, sans qu'elle n'est à ressentir cette horrible faim qui pouvait la tirailler en appelant les pouvoirs occultes de son clan. Malgré tout, elle en était triste, être douée là-dedans n'était pas quelque chose qu'elle avait souhaité.

Il y avait bien une partie d'elle qui était contente, une partie enfantine heureuse simplement que quelqu'un lui dise des mots aussi simple. Une partie d'elle qui fut confinée, cachée derrière l'ombre de celle craignant tant ses propres pouvoirs. La philosophie de peur de ses capacités, du potentiel meurtrier, ainsi que de perdre le contrôle avait dirigé sa vie depuis tant de temps, que l'étrange fait qu'un homme à ses côtés l'encourage à utiliser ses pouvoirs ne manquait pas de perturber sa perception des choses. Ses convictions restaient fortes, mais une sensation étrange commençait à naître, portée par une voix qui l'incitait à laisser cours à ses pouvoirs, qu'elle n'avait plus à se cacher, plus à mentir, ni à elle, ni aux autres.

L'enchanteur lui expliqua le pouvoir des écoles, expliquant que certaines étaient plus aptes à certains domaines, alors que toutes pouvaient avoir les deux côtés. La vision des choses était un peu simple pour lui, Zaena acquiesça doucement, cette étrange curiosité naissante manquant même de lui faire dire quelques mots.

Le mage expérimenté continua, posant une question qui vint appeler une réflexion certaine à la jeune apprentie. Une école l'intéressant ? Très peu, mais l'intriguant, probablement plus. Le maigre sourire aux lèvres, la Dalatienne chercha, vainement, la mouche maintenant libre du regard.

« Je ne sais pas trop... Je ne connais pas grand chose mais... Si l'une de ces écoles permet plus de soulager les blessures que de les créer, probablement celle-ci. »

La petite voix revint, insistant jusqu'à ce que l'elfe continue, après quelques secondes de pause.

« Même si... Métamorphose semble être un mot bien intriguant... »

Elle dévia du regard, espérant un instant y trouver quelque chose d'autre à ajouter, rien ne vint. Elle soupira, croisant les mains, observant avec une attention particulière ses pouces.

« En vérité monseigneur je n'ai jamais voulu apprendre la magie et... Si j'avais le choix j'aimerais que cela reste ainsi... Je n'en ai ni besoin, ni envie... »

Elle s'immobilisa un instant, plissant les yeux un instant.

« Mais je n'ai pas vraiment le choix ? N'est-ce pas ? Alors autant que je favorise ce qui ne s'éloigne pas trop de qui j'étais avant de rentrer ici... »

Quelqu'un qu'elle ne sera plus jamais.

Pas de métamorphose. Dommage, peut-être cette magie était-elle également un tabou ici ? Bien que piquée en curiosité, la jeune apprentie ne poussa pas, les réponses n'étaient pas forcement bonne à avoir sur de tels sujets, tout autant qu'elles pouvaient se montrer dangereuses. Aucune chance donc d'apprendre ces pouvoirs, mais le soin lui était possible. La création. Nom très arrogant, pour la jeune elfe, possible mais long chemin d'après l'enchanteur supérieur. En être réduit à faire ce choix semblait être un coup du sort qu'elle acceptait maintenant, malgré tout ce que cela pouvait signifier pour elle.

Il ne comprenait pas, après tout comment lui en vouloir en réalité ? Il ne savait qui elle était avant, pour lui elle était une mage, l'avait toujours été probablement. Pour elle, non. Elle avait presque réussi à fuir cette vie, ou tout du moins elle l'espérait. Elle secoua la tête lorsqu'il évoqua ce qu'elle était. Ni feu, ni attaque. A dire vrai il n'y avait qu'un mot qui décrivait bien.

« Zaena... »

Car pour elle, le nom était toujours le sien, mais le reste de ce qu'elle était perdu pour elle, brûlé avec ses souvenirs dans l'après, quel mauvais coup du sort tout de même, victime de cela face au premier enchanteur... Une étape obligatoire peut-être, mais tout de même la fin d'un espoir fou de vivre en oubliant les pouvoirs dangereux qu'elle avait. L'enchanteur lui évoqua ce qu'il voyait dans l'arrivée au cercle. Visiblement, il avait une bonne opinion du lieu. Alors, peut-être un jour, elle aussi ? Peut-être ici y avait-il réellement une place. Malgré tout, un doute persiste. Sa curiosité mal placée l'emporte sur sa prudence lorsque la prochaine question vient.

« Monseigneur, avez-vous vécu déjà hors du cercle ? »

Il décrivait l'endroit comme une renaissance, une seconde chance, un endroit avec plusieurs chemins d'ouverts pour elle, apprendre la magie, sans se retourner. Il lui conseillait d'embrasser ces voix, sans se soucier d'hier et des conséquences fâcheuses que cela pouvait avoir. Bien sur, elle comprenait la sagesse ici, probablement avait-il raison. Certainement même, elle tenterait de s'y conformer, malgré le doute qui existait pour elle. La magie est un art effrayant, empli de surprises et de possibilités, l'explication qu'il apporte sur les pouvoirs de l'esprit semblent bien abstraites à la jeune apprentie, un art ésotérique qui semble, du peu qu'elle comprend, aussi précieux que difficile. La voix du mage arbore un étrange ton, renforcé par un pouvoir venant d'au-delà, des notes dissonantes pourtant si belles.

Elle frissonne un instant, ce sentiment pesant lui rappelle un peu cette petite voix qui semble surgir lorsque son cœur s'emballe, lorsque la situation appelle au danger et que ses pouvoirs s'annoncent volontaires pour agir. Non décidément, elle n'aime pas la magie. Le mage lui pose une question simple, dont elle semble difficilement discerner la réponse. Plusieurs mots lui viennent en tête, mais qu'elle refuse d'offrir au mage devant elle, détournant le regard pour cacher quelques vérités qu'elle préfère enfouie pour le moment.

« Des ombres, emplies de dangers... »

Elle maintient son regard sur un mur non loin, évitant d'offrir ses yeux emprunts d'une peur renouvelée pour un souvenir aussi blessant que réel.

« J'ai plus l'impression de voir un gouffre moqueur qu'une chance, qu'importe comment je le vois... »

Longtemps ? Combien longtemps ? Elle se retient de poser cette question, préférant en faire elle-même la réponse. Longtemps, alors cette renaissance pour lui était arrivée lorsqu'il était encore jeune, très jeune sans doute, comme le veut la regrettable tradition humaine. L'enchanteur supérieur offrait des leçons de sagesse et de philosophie nées d'une vie totalement différente de ce qu'avait connu l'elfe. Il avait connu l'endroit il y a longtemps. Il n'avait jamais tué car il ne l'avait jamais voulu. De sa main droite l'ancien apostate vint gratter sa joue, tout en exposant quelques points qui semble toujours importants pour elle.

« J'y ai vécu longtemps... Hors de... Du cercle, notre pouvoir est vu comme un pouvoir mauvais, vous le savez, mais surtout, les visions sont justes je... »

Elle hésite un peu à nouveau, à exposer ce qu'elle pense de ce pouvoir. Elle cherche du regard cette mouche perdue, sans succès.

« Les histoires qu'on entend ne sont jamais celles d'un héros mage venu sauver les gens mais plus de... De ce qu'ils ont faits, hors des murs du cercle. De ceux qui sont nés du pouvoir cultivé ici. »

Elle se tait un instant, un peu soulagée de pouvoir exprimer quelque chose semble encore lui tenir à cœur, même ici, même maintenant.

« Je ne déteste pas la magie pour ce qu'elle est, mais pour ce qu'elle a fait... Monseigneur, pensez-vous que la magie a fait plus de bien que de mal ? »

Difficilement voyait-elle une autre réponse que la sienne à cette question, malgré le soin, malgré les capacités de se transformer, rien de tout cela ne semblait vraiment pouvoir occulter les pouvoirs de tuer et détruire nés de la magie. Tant de pouvoirs, que les ombres dansantes dans la magie semblaient maîtriser, avec une habilité hors du commun. Ces ombres, manifestation de la magie dans l'esprit de la jeune elfe avaient le pouvoir qu'elle craignait, celui tiré d'une histoire qu'elle ne souhaite pas raconter. Le mage cherche à comprendre, à connaître les ombres. Le jeune mage grimace, puis répond doucement.

« Elles... Sont comme nous ? Elles portent des masques de visage oubliés, elle proposent des solutions belles, faciles aux problèmes elles... Elles naissent du besoin, de la peur, de la colère... Elles murmurent des promesses tentantes et pourtant si horribles... Elles vont et viennes avec le temps, avec le soleil et la lune. Elles apparaissent quand né le doute, fuient quand née la volonté. Elles tirent leur être de l'après, pourtant elles semblent toujours attendre ici, là-bas, autour... »

Ces mots sortent sans réelle réflexion derrière, tandis qu'elle décrit les craintes, les peurs qui l'entourent lorsqu'elle vient à user de la magie. Elle croise les doigts, puis pince sa peau de ses doigts, avec une insistance au delà de la douleur, pour créer une autre voie que celle vantée par les ombres. Puis vint le gouffre, ainsi que ce qu'il renferme. Elle semble pincer plus fort lorsque l'enchanteur reprend.

« Quelque chose qui ne devrait pas en sortir. Comme... Comme une autre ombre, une qui porte le pire des masques, a la pire des voix et promet les pires miracles. »

Elle tremble, tandis que ses yeux se perdent à doucement visualiser cette ombre de crainte dormant dans l'après.

Les événements décrits, tous les connaissaient, ils étaient nés des pires intentions et avaient construits ce qui restait de pire dans ce monde. Ils avaient créé ce mal qui ravage les campagnes, celui qui aujourd'hui, à nouveau, menaçait le monde d'une ombre qui jamais ne disparaîtrait vraiment, peut-être vaincue pour un temps, avant de revenir briser tant de vies. Un tableau bien sombre qui ne servait qu'à alimenter ce pouvoir sombre, qui ne serait qu'à détruire les défenses de ceux qui la défendaient. Un tableau honnête, servit par quelqu'un qui n'oubliait pas ce que la magie pouvait faire de bon. Les faits d'histoires furent suivi par de simples anecdotes du quotidien. Il expliquait ce que la magie pouvait faire chaque jour pour aider. Aider à mettre au monde de nouveaux enfants, protéger, aider, réparer. Réparer. Le mot anodin semblait pourtant si important au cœur de ces mots. Elle pouvait réparer, corriger les problèmes. Pour lui la magie pouvait réparer les tords, pour lui elle n'était pas à l'origine du mal, mais les hommes eux avaient choisis d'en faire cette chose infâme que voyait Zaena.

Le regard de l'elfe se posa sur sa main. Peut-être bien oui, peut-être ce mal était plus né du bras brandissant l'arme que d'elle-même. Mais le poids des exactions pouvait-il vraiment disparaître avec un peu de bonne volonté ? Ses doigts vinrent masser sa paume, comme si elle cherchait à soulager une douleur naissante au sein même de son corps. Pour lui, la magie fut créée pour le bien, c'est les actes des autres qui avaient perverti ce pouvoir. Restait-il seulement une part non corrompue dans le monde ? Certains pouvaient-ils vraiment admettre connaître toute la vérité ? Ou bien cherchaient-ils à faire avancer leur avis, bravant de leur cœur les conventions et le passé si tumultueux de cet art dangereux ?

Elle plissa les yeux. Quelle chose n'avait causé que du bien ? Quelle chose était à l'antipode de la description bien sombre de la magie donnée par la jeune Zaena. Elle resta muette, sur ce point, même les années de réflexions ne lui offraient pas de réponse honnête et valable. Chaque exemple semblait briser par ce que certains avaient faits, pensés, ou par une vérité que personne ne pouvait ignorer.

« Alors... Alors c'est à tous qu'il faut reprocher le mal ? »

La question était sincère, autant pour elle que pour l'enchanteur face à elle. Il n'y avait pire malédiction que son pouvoir, elle y avait toujours cru. Il était à l'origine des pires craintes de l'ancienne voleuse, mais après tout sa vision était née des actes obscures d'une famille qu'elle ne pouvait que craindre aujourd'hui. Une douce larme quitta ses yeux, une emprunte de regrets et de nostalgie, si elle avait vraiment eu tord, pendant si longtemps, que restait-il vraiment de ses convictions passées ? L'enchanteur maintenant juste devant elle défendait une cause qu'elle n'avait jamais voulue comprendre, une que personne n'avait défendue devant elle avec d'autres arguments que l'autorité et l'expérience. Sa vision était bien différente de celle des Dalatiens qui l'avaient élevés. Il conseillait, expliquait, mais plus que tout il était sincère.

« Un héros ? »

Une autre larme coula. La notion lui paraissait tellement abstraite, tout le monde connaissait le mot, pourtant les descriptions ressemblaient plus à de vaines descriptions tirées de vieux contes. Un héros mage ? Ne pas détestait la magie lui semblait déjà si lointain, alors croire en un héros la manipulant, était-ce seulement possible ? Après tout n'étaient-ils pas condamner à vivre avec un poids né de l'après, un pouvoir mauvais que tous peuvent craindre. Une entité qui semble murmurer à ses oreilles à cet instant précis.