Il faisait une nuance entre ceux causant le mal et les autres, mais elle ? Elle avait déjà tué, elle avait volé, menti, tant de choses mauvaises dont elle ne gardait aucune fierté. La question sembla tourner bien trop longtemps, l'appelant à douter, à se questionner sur sa propre nature. Ce pouvoir qui était le sien représentait une force capable de causer tant de mal aux autres, la raison pour laquelle elle le détestait tant. Pourtant ses autres actions venaient de ses actes, alors au fond, à quelle catégorie appartenait-elle ? Le doute finit par sortir, exprimer par quelques mots hésitants.

« Me le reprochez vous ? »

Elle avait une étrange lueur d'espoir dans le regard, drôle de comportement que de tant chercher à avoir l'approbation d'un autre. Pourtant, la question semblait lui tenir à cœur. Car elle se reprochait ces faits, ce pouvoir, ces morts, ces actes, tout ne semblait être qu'un poids qu'elle désespérait de voir un jour quitter sa poitrine.

Pas permanent ? Il ne savait pas ? Sûrement ? Bien sur, elle ne pouvait pas juste oublier les tords qu'elle avait causé aussi facilement. Mais, pas permanent ? Comment ? Elle avait fait du mal, cela resterait à jamais collé à son être en vérité, ça elle le savait. L'idée qu'un jour peut-être elle n'aurait plus à garder ça au fond d'elle était attrayante, autant qu'elle en doutait. L'enchanteur supérieur n'en était pas certain non plus, mais il affichait déjà plus d'espoir qu'elle. Prendre une vie ne fut pas difficile, non cela n'était pas le bon mot. C'était simple, si simple. Mais c'était mal, c'était quelque chose qui marquait à jamais l'âme de quelqu'un et la sienne était déjà bien trop entachée en si peu d'années.

« Je ne pense pas pouvoir oublier... »

Les visages, ils restaient gravés à jamais dans ses yeux, l'instant durant lequel elle avait prit ces vies ne pourra jamais réellement disparaître. C'est quelque chose qui fait partie d'elle, l'accepter peut-être un pas, aller de l'avant durement. Elle y avait pensé ce jour, dans l'Après. Accepter tout ce qu'elle est, tout ce qu'elle avait fait. C'était juste si difficile, être quelque chose de différent, laisser derrière les craintes qui avaient dirigés sa vie.



Elle nota, troisième étage. N'importe qui montrera, si elle en a besoin ? La pensée était rassurante, il connaissait ce qu'il fallait sur elle, il voulait bien l'aider, si elle en avait besoin. Elle pouvait donc compter sur lui ? Étrange sensation, jusque là bien peu de personnes avaient gagnés sa confiance, ceux-là comptaient plus que tout, pour elle qui semblait encore bien perdue dans ce monde.

« Je vais m'en souvenir... Je... »

Elle hésitait encore, parvenant difficilement à accepter ses propres mots.

« J'écouterai vos leçons, je vous le promets... »

Cela ne lui faisait pas plaisir, c'était aisé à voir, mais maintenant aucun autre choix ne semblait se montrer à elle.

C'était bien ? Garder en tête ces visages? C'était ainsi le meilleur moyen de s'en éloigner ? Le doute était lisible sur le visage de la jeune apprentie, ne serait-il pas mieux de se séparer à jamais de tels souvenirs, de ne plus avoir à être hanté ? Combler par de bonnes actions les actes qu'elle avait fait serait la clef ? La question semblait étrange pour elle, au fond n'était-ce pas égoïste que de faire le bien pour oublier le mal passé ? Ne fallait-il pas qu'il soit fait de manière désintéressé ? Mais si cela était vrai, alors son âme était à jamais tâchée. Le débat interne semblait plus la fatiguer, l'absence de réponse la frustrait et rien ne changeait les souvenirs douloureux.

Selon l'enchanteur supérieur, la mémoire aurait un pouvoir fort, se gardant se commettre à nouveau les erreurs passées, alors que l'oubli n'ouvrait qu'une nouvelle porte vers ce qui fut fait. C'était compréhensible, si elle n'avait jamais commit de telles choses, elle n'en aurait sûrement pas le dégoût fort qu'elle éprouve aujourd'hui, peut-être ainsi était-ce la preuve que oui, la mémoire était un bouclier pour éviter les erreurs. L'idée était intéressante, mais une notion restait trop lointaine pour la Dalatienne. Elle n'avait ni pardon, ni acceptance de ses actes. Ils continuaient d'être des poids qu'elle peinait à laisser derrière elle, par peur qu'ils ne se lancent dans une folle poursuite.

« Je comprends. »

Les blessures sur le corps se soignent, peut-être un jour également celles sur l'âme. Si s'en souvenir pouvait devenir une force pour s'en prémunir, il fallait accepter leur existence même, il fallait s'assurer qu'elle ne soit pas plus qu'un bouclier. Elle y travaillerait alors, si c'était ce qu'il y avait à faire, même si son cœur se serrait à l'idée de revivre ces instants détestés. Le mage continua, il écoutera si elle avait des idées. Elle esquissa un petit sourire, tout en acquiesçant. Ce n'était pas encore l'heure, les idées viendraient avec le temps, peut-être. Nerveusement elle commença à gratter sa nuque, tout en revivant les demandes du magicien d'aujourd'hui. Elle avait craint cette entrevue plus que tout. Mais étrangement, une partie d'elle semblait presque heureuse, calmée par cette entrevue.

L'entrevue était fini, il allait faire un rapport et elle avait réussi ? Elle doutait encore, quelques signes lui laissaient croire l'inverse, mais elle aurait tout le temps d'y penser dans cette cellule.

« Merci Monseigneur. »

Alors qu'il partait, elle se leva à son tour, allant se caler près de la fenêtre qui lui servait autant de miroir que de spectacle pendant ses longues heures à penser. Doucement elle commença à fredonner, la magie était passée, elle pouvait à nouveau rêver.