Type de RP Classique
Chapitre concerné Chapitre 3
Date du sujet 15 Longnuage, 5:13 des Exaltés
Participants  @Lachlann Vaël  et @Elendîs
TW Prostitution (peut-être à actualiser en cours de rp)
Résumé Elendîs a bien besoin d’aide pour se sortir des griffes d’un baratineur qui ne semble pas avoir bien saisi le concept d’une maison close. L’Enchanteur supérieur sera-t-il son sauveur d’un soir?
Pour le recensement

Code:

[code]<ul><li><en3>15 Longnuage, 5:13 des Exaltés</en3> : <a href="https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1751-se-tirer-dun-mauvais-pas#20585">Se tirer d’un mauvais pas</a></li></ul><p><u>@"Lachlaan Vaël" et @"Elendîs"</u>Elendîs a bien besoin d’aide pour se sortir des griffes d’un baratineur qui ne semble pas avoir bien saisi le concept d’une maison close. L’Enchanteur supérieur sera-t-il son sauveur d’un soir?</p>[/code]

Son regard d’émeraude se posa d’abord sur une grande silhouette qui venait de passer la porte du Salon. Cette silhouette, Elendîs la connaissait bien, de loin, et elle n’en attendait rien de particulier. Elle continua donc son observation, tombant à nouveau sur la tenancière du bar qui lui renvoya un petit haussement d’épaules incertain. Ah ben merci…

Du coin de l’œil toutefois, elle perçut un mouvement alarmant, venant de la silhouette: des mouvements de capes et une démarche délibérée dans leur direction. La courtisane le regarda alors approcher avec inquiétude et curiosité, la voix de l’Elfe marchand s’étant transformé en un bourdonnement lassant dans son oreille.

Que faisait-il donc? Il ne recherchait jamais sa compagnie d’ordinaire. Et l’inverse était vrai aussi: par peur qu’il établisse un lien entre elle et Ithildir, la jeune Elfe gardait scrupuleusement ses distances avec l’Enchanteur.

« Messer… », salua-t-elle avec sa douceur coutumière en l’observant s’installer avec tout le naturel du monde.

Elle eut un petit moment de doute à la mention d’une réservation et se repassa mentalement la planification de la soirée. Non, définitivement pas de Prince déshérité au programme. Mentait-il pour venir à son aide? Ou avait-il trouvé la situation suffisamment amusante que pour s’en mêler?

L’expression de l’Enchanteur ne laissait cependant rien paraître et un sourire un peu crispé vint étirer les lèvres de Dîs. Quoi qu’il en soit, elle était reconnaissante de son intervention, que celle-ci se transforme en réelle réservation ou non. Et la proposition du mage alluma une petite étincelle d’amusement dans son regard. Si le petit nouveau était aussi assommant dans une chambre qu’en paroles, que le Créateur les en préserve.

Elle reporta donc son attention sur l’Elfe sans âge qui était toujours assis à ses côtés, curieuse de voir sa réaction à la boutade de l’Humain. Et elle ne fut pas déçue. Son teint clair s’était coloré d’un beau rouge cramoisi, peu seyant à ses cheveux blond clair, et une expression de pure stupéfaction marquait ses traits autrement élégants. Il était maintenant clair pour Elendîs que l’homme était entré dans cet établissement sans vraiment savoir où il mettait les pieds… Probablement avait-il effectivement mis la main sur une certaine somme d’argent et s’était-il dit que ce serait un moyen comme un autre de flamber ce petit magot, sans pour autant connaître les us et coutumes de ce type d’établissements.

« Mais vous êtes qui, vous, d’abord? », éructa-t-il alors, entre surprise et indignation, tout en gardant le volume de sa voix sous contrôle et une main fusant pour agripper le fin poignet de la courtisane. Elendîs grimaça intérieurement, sans trop réagir. Le geste n’avait pas été violent et la prise n’était pas douloureuse. On aurait plutôt dit une sorte de réflexe possessif. Mais elle s’inquiétait un peu du reste de la discussion. Elle avait déjà compris que l’ennuyeux personnage ne venait pas de Starkhaven, ni même des Marches libres d’ailleurs. Il était donc fort probable qu’il ne sache pas qui était Lachlann Vaël. Le nom ne lui dirait certainement même rien.

« Me… Me joindre à vous? », ajouta-t-il, ses yeux passant successivement de l’Enchanteur à la courtisane avec interrogation. Le pour quoi faire? sous-entendu était presque comique et si Elendîs n’avait pas été si tendue de se retrouver prise entre les egos de deux hommes, elle aurait peut-être pu en rire. Elle pouvait presque voir les rouages du cerveau de l’Elfe tourner, jusqu’à ce que la réalisation le frappe et qu’il rougisse encore plus, si c’était possible.

N’étant pas certaine du jeu auquel l’Enchanteur voulait jouer au juste, la courtisane choisit de se taire et s’en remit à lui. Elle n’était pas douée pour les confrontations et l’Elfe n’avait pas l’air de vouloir se laisser faire.

L’ignorance de l’Elfe était à la fois désespérante et vexante, autant pour le Laurier, qu’elle ou le Prince, et Elendîs ne pouvait être que reconnaissante de la retenue dont ce dernier faisait preuve. Elle était certaine qu’il aurait pu être bien plus direct dans sa communication.

Ce n’était en réalité pas la première fois que ce genre de personnes trouvaient le chemin du Laurier, et la jeune Elfe trouvait toujours ça terriblement gênant. Ces nouveaux riches présentaient bien et avaient de l’argent à jeter par la fenêtre, aussi étaient-ils autorisés à entrer. Mais le fait était qu’ils n’avaient généralement fréquenté que des lieux sordides, qui tenaient plus de la taverne avec quelques chambres à l’étage (quand il y avait des chambres tout court) où les filles étaient payées à la passe et pas à l’heure. Cependant, dans les établissements comme le Laurier, les choses étaient différentes: le temps des courtisanes était précieux, à hauteur du service. Mais Dîs, et sa peur de se prendre un mauvais coup, était bien incapable de remettre les malotrus à leur place. D’autres le faisaient d’ordinaire bien mieux qu’elle.

Puis, l'indice posé sur la table attira le regard du marchand et ajouta à sa confusion. Elendîs en profita par ailleurs pour se dégager le plus discrètement possible de la prise du bonhomme distrait d’une légère torsion du poignet. Le haussement de sourcil de Lachlann ne lui avait pas échappé et elle ne tenait vraiment pas à ce que ça tourne mal. Elle ne fit pour autant aucun mouvement vers la table, refusant de s’interposer physiquement entre les deux hommes, même pour une fraction de seconde.

L’Elfe marchand sembla toutefois bien trop occupé par le mage pour s’en rendre compte. Ça avait d’ailleurs quelque chose de satisfaisant, de le voir se décomposer face à l’Enchanteur, à la mention d’une autre fille, et enfin d'un petit passage par l'accueil.

Le sourire que l’Enchanteur accorda ensuite à la courtisane avait quelque chose de rassurant, et elle le lui rendit avec sincérité.
« Bien sûr que non, nous avons une réservation après tout… C’est toujours un plaisir de vous revoir, Messer. »
C’était faux, bien entendu. Il n’y avait pas de réservation et la présence du mage la laissait d’ordinaire de marbre. Elle détestait mentir. Mais elle n’en pouvait plus de ce petit affrontement, tout à son bénéfice soit-il, et préférait donc abonder dans le sens de l’Enchanteur pour bien signifier au marchand que la discussion s’arrêtait là.

« Que… Mais…Que… »

Un flot ininterrompu de mots sans queue ni tête sortit des lèvres fines du marchand qui s’était relevé et regardait autour de lui, comme s’il cherchait quelqu’un pour le soutenir ou lui expliquer ce qui était en train de se passer. Puis, ce fut comme s’il commençait à comprendre, enfin!, les indices et paroles du mage. Le changement se marqua sur sa physionomie, alors qu’il intégrait peu à peu sa bêtise.

« L’accueil… Oui, l’accueil, c’est ça… », ajouta-t-il alors, comme dans une transe, en commençant à s’éloigner, sans même saluer ses interlocuteurs. Alors elle venait de l’écouter déblatérer sur ses satanés bateaux pendant près d’une heure et il n’était même pas fichu d’être poli?!

Elendîs le regarda toutefois faire quelques pas vers le bar sans rien dire tandis qu’il abandonnait sa bière intacte sur la table, bien trop contente de se débarrasser de l’assommant personnage. Puis un léger soupir de soulagement lui échappa et elle tourna ses grands yeux verts emplis de curiosité vers l’Enchanteur, incertaine quant à ce qu’il attendait d’elle maintenant.

« Merci… », fit-elle simplement, toujours dans un souffle de peur que l’Elfe ne fasse demi-tour et revienne à l’attaque.

« Dîs, Messer. », répondit-elle avec simplicité et sans malice. La jeune Elfe n’utilisait plus que rarement son nom complet depuis qu’elle travaillait dans ce milieu, même s’il n’était pas un secret pour autant.

« Ma réservation a été annulée… », confia-t-elle alors avec une moue presque boudeuse. « Il avait bloqué toute la soirée. » Elle se trouvait donc sans client régulier, à devoir aller à la pêche. Elle avait horreur de ça.

Jetant un oeil vers le bar, elle y vit le marchand qui gigotait toujours en lui lançant parfois des regards incendiaires. Elle tenta bien de les ignorer mais la jeune Elfe ne se sentait pas à l’aise sous ce regard et décida de s’y soustraire.

Se levant du fauteuil déserté par son précédent interlocuteur, elle contourna la table pour rejoindre le mage et prit place à ses côtés, sa main si légère se posant brièvement sur le coude du Prince comme pour se retenir, invitation discrète et silencieuse à la fois. Elle n’irait pas plus loin dans la proposition mais c’était son métier après tout. Elle ferait une bien piètre courtisane si elle n’ouvrait pas la porte à plus. Elle replia ensuite une jambe sous elle, comme souvent - elle était incapable de tenir assise correctement bien longtemps, c’était déjà un miracle qu’elle ait survécu à l’autre somnifère sans gesticuler dans tous les sens - et se tourna vers Lachlann comme pour signifier qu’elle lui accordait toute son attention. Pour le moment.

Dans son mouvement, elle en avait profité pour passer en revue la salle et ses occupants du regard et n’y avait rien repéré de très réjouissant. Ceux qui n’étaient pas déjà occupés étaient des habitués d’autres filles qui n’allaient pas tarder à redescendre des chambres.
« Ils sont déjà tous pris. », répondit-elle donc honnêtement à sa proposition d’aller voir ailleurs.

La question suivante la surprit un peu et un rire léger, loin des éclats forcés que certaines pouvaient produire, lui échappa au souvenir du discours du nouveau riche.
« Et bien, j’imagine que pour quelqu’un qui se passionne pour la collecte, le transport et la vente de peaux de mouton, cela pourrait l’être. » Son sourire s’accentua légèrement et cette petite étincelle se ralluma au fond de ses yeux verts.
« Cela aurait-il pu vous intéresser? »

Son ouïe aiguisée capta alors à nouveau la voix traînante et plaignante de l’Elfe. Elendîs était bien contente de ne plus l’avoir en ligne de mire mais elle pouvait l’entendre se plaindre de l’interruption dont il avait été la malheureuse victime et saisit sans problème la réponse donnée d’une voix grave précisant que les réservations avaient toujours la priorité. Au moins les autres jouaient-ils le jeu aussi, parce qu’il n’y avait pas un employé du Laurier pour réellement croire que Lachlann Vaël avait posé une réservation avec elle…

Manquerait plus que l’Elfe place une réservation avec elle dès ce soir, tiens…

« Souhaiteriez-vous quelque chose à boire? », demanda-t-elle ensuite en le voyant jouer avec le verre abandonné. Elle préférerait attendre que le geignard se soit éloigné, voire ait quitté les lieux, avant de s’extraire du recoin sombre dans lequel ils étaient tapis pour faire une incursion au bar mais s’il le fallait… On ne viendrait pas dire qu’elle laissait les clients du Laurier carmin avoir soif!

Alors que le mage complimentait son surnom, la jeune Elfe sourit doucement, un peu touchée. Il était des choses qui font partie de nous et dont la reconnaissance faisait toujours plaisir.

Puis il évoqua la possibilité d’avoir la soirée libre aux frais de son client, ce lâcheur, et Elendîs extériorisa sa frustration d’un sec et vif souffle par le nez, accompagné d’une imperceptible grimace. Ce serait trop beau pour être vrai…

« J’imagine qu’il doit avoir une bonne excuse… Au moins a-t-il eu la décence de prévenir. », tempéra-t-elle toutefois, bien consciente qu’une réservation auprès d’une courtisane n’était pas toujours la priorité. Il s’agissait par ailleurs d’un très bon client, régulier et correct, et elle était à peu près certaine qu’il saurait se faire pardonner cette indélicatesse. Elle chassa donc sa contrariété d’un geste de la main. Au moins avait-elle trouvé, ne serait-ce que temporairement, quelqu’un capable de la distraire plaisamment à sa place.

Le sarcasme quant au lassant malandrin étira ensuite son sourire et elle rebondit avec adresse, prolongeant un instant l’amusement.
« Je peux aller le rechercher pour vous, si vous le souhaitez… », fit-elle donc, la dérision s’entendant dans son ton. Non, elle ne lui ferait pas cela, voyons…

« Je serais surprise si la moitié du quart de ce qu’il a raconté est vraie, pour être honnête… », expliqua-t-elle alors en retrouvant un peu de sérieux. « Je suis généralement bon public mais le baratin a tendance à me perdre… » Car c’était bien là que se trouvait le problème. Si un prodige du commerce avait tenté de lui expliquer les méandres d’une réussite mercantile, elle aurait fait un effort. Parce qu’aussi ennuyant puisse être le discours, une bonne idée ou un succès restait intéressant. Mais lorsqu’on mêlait ennui et mensonges, elle décrochait complètement.

Il était cependant indéniable que l’Elfe marchant avait brusquement mis la main sur le genre de sommes d’argent qui vous ouvraient les portes du Laurier… Et ça, ça aurait peut-être fait une histoire intéressante au lieu des bobards qu’il racontait pour justifier sa soudaine richesse. Rah, elle était curieuse maintenant!

L’Enchanteur lui proposa alors de s’hydrater à son tour, suggérant que l’épisode traînant aurait pu l’assoiffer. Ce n’était pas faux, mais Dîs avait développé une très haute tolérance à ces désagréments au fil des ans. Elle pointa par ailleurs un doigt vers l’une de ses propres oreilles effilées en référence à son ouïe affûtée.
« Je préférerais attendre que la voie soit libre… », répondit-elle avec circonspection, sans oser se retourner pour regarder plus avant dans la salle.
Elle pouvait en effet toujours entendre l’Elfe, mais les mots étaient devenus inintelligibles. Il était donc proche de la sortie et s’il avait finalement posé une réservation - la courtisane s’était concentrée sur son interlocuteur et n’avait pas suivi toute la discussion - se serait, avec un peu de chance, avec une autre.

Mais la deuxième partie de la réflexion du mage la surprit quelque peu et l’étonnement dut se marquer sur ses traits, avant qu’elle ne s’en rende compte et tente de le cacher. Voilà qui était rare et… curieux. Elle ne se souvenait pas d’avoir rencontré un patron qui l’invitait à parler, plutôt qu’à écouter (et avec attention, s’il vous plaît). Dîs se prit donc à se demander sérieusement ce qu’elle pourrait bien avoir à… dire. À Lachlann Vaël, Prince déshérité de Starkhaven et Enchanteur supérieur, en plus.

En réalité, elle mourrait d’envie de lui poser une myriade de questions. Sur les mages, sur le Cercle, sur Ithildir aussi. Mais oserait-elle l’entraîner sur ce terrain? Ne venait-il pas au Laurier justement pour se soustraire au Cercle l’espace d’un instant ? Avec l’annonce de l’Enclin cependant, le désir d’au moins tenter de reprendre contact avec son frère se faisait de plus en plus sentir...

« À dire?… Mh… Probablement. Mais je ne suis pas certaine que m’écouter ‘parler boutique’ soit très intéressant non plus. Pas beaucoup plus que les peaux de mouton en tous cas… », fit-elle donc avec franchise et une pointe d’humour après un moment de réflexion. « Je ne sors plus beaucoup, vous savez. Le Laurier, c’est pour ainsi dire toute ma vie maintenant. »

Était-ce triste ou pathétique? Elendîs se posait souvent la question lorsqu’elle se trouvait seule face aux réalités de son quotidien.

Assise de biais pour faire face au mage et préférant toujours ne pas prendre le risque de croiser le regard de l’autre Elfe (tout à fait du genre à voir des signes là où il n’y en avait pas), Elendîs fit confiance à son interlocuteur pour lui décrire la situation et ne se retourna donc pas. Elle se demanda quand même si l’homme ainsi chassé, et probablement blessé dans son égo, avait continué à épier leur petit coin d’ombres ou s’il avait définitivement changé de cible. Quoi qu’il en soit, il serait bientôt parti et, avec un peu de chance, elle ne le reverrait pas de sitôt. Qu’on lui apporte son manteau, bon sang!

L’Enchanteur la mettait étrangement à l’aise et cela se ressentait dans sa posture. Peut-être parce qu’il ne donnait pour l’instant pas l’impression de vouloir quelque chose d’elle, si ce n’était poursuivre la conversation. C’était rafraîchissant et tellement à l’opposé de ceux qui voulaient prendre, arracher même parfois, et toujours plus. La jeune Elfe se blottit donc un peu plus sur le canapé, s’appuyant de l’épaule contre le dossier du fauteuil et repliant ses deux jambes de côté entre eux, sans toutefois toucher le mage. Il ne manquait pas grand chose pour pour que ses jambes soient pressées contre la cuisse de l’Enchanteur mais puisqu’il n’avait pas l’air plus intéressé que ça, elle n’allait pas initier de contact physique non sollicité.

Lachlann continua alors sur sa lancée, souhaitant, pour une raison qu’elle ne parvenait pas à saisir, l’entendre parler et elle admit d’un petit sourire que oui, le Laurier, et les bordels de manière générale, était un nid à désordre, parfois amusant, parfois… épique.  Mais la mention du ‘temps où elle sortait’ la tendit légèrement et sa main gauche se serra inconsciemment autour de son poignet droit, le plus abîmé des deux.

Il proposa ensuite de répondre à ses questions en retour et Dîs tenta à nouveau de masquer sa surprise derrière un sourire. Venait-il de lui offrir une fenêtre sur le Cercle et sur Ithildir, juste comme ça?

« Très bien… Une réponse pour une réponse.», plia-t-elle donc immédiatement, sans le contredire de front quant à de possibles histoires sur l’extérieur tant l’espoir lui était rapidement monté à la tête. « Mais pas de noms! », ajouta-t-elle aussi vite avec un brin d’empressement. Car si elle devait raconter des anecdotes du Laurier, l’anonymat, tant des autres filles que des clients, était essentiel. Un établissement comme celui-ci ne pouvait pas atteindre une telle excellence en répandant tous les petits secrets collectés à droite à gauche. La confidentialité était de mise.

« Une question pour une question donc… Sur le Laurier, ou tout ce que vous voulez. »
Peut-être devrait-elle émettre des réserves sur son passé, sur l’avant-Laurier? Il n’y avait pas grand chose de réjouissant dans ces récits, que des souvenirs de violence et de chagrin. Mais l’Enchanteur était un homme malin, elle n’en doutait pas une seconde. Il devait forcément avoir une petite idée du quotidien des filles dans des établissements de piètre qualité, voire dans la rue. S’il voulait l’en entendre parler, ce serait à ses risques et périls.

« Vous avez une question en tête? Ou vous préférez que je vous raconte… », elle fit une pause, prenant un air pensif un peu forcé pour la plaisanterie tout en repensant aux derniers rebondissements qui avaient secoué le Laurier, « le drame tragi-romantique de la semaine passée? »

Des rires gras, tant masculin que féminin, retentirent alors, plus forts que le volume, souvent pourtant déjà élevé, habituel. Elle n’eut aucun mal à déterminer leur source. Ce client particulier aimait bien les filles humaines, grandes et jeunes ce qui mettait Dîs heureusement hors course, et prenait toujours un malin plaisir à tester la marchandise plus que de raison en public.
Elendîs eut une petite moue - ça ne faisait que commencer - et osa un:
« Vous êtes sûr de ne pas vouloir monter? »
Ils seraient plus au calme, qu’importe ce que Lachlann voulait d’elle au final. Et une carafe de vin l’attendait toujours dans sa chambre. Mais il avait dit attendre quelqu’un alors…

La demande de Lachlann la surprit et elle ne s’en cacha pas.

« Inaperçu? », répéta-t-elle, tout en réalisant qu’elle était étonnée, certes, mais agréablement. Le mage parvenait toujours à la surprendre, tout en finesse, et la jeune courtisane appréciait plus qu’elle ne l’avait imaginé cet étrange échange.

Et puis, l’accord de monter, une main tendue, et Elendîs emmena l’Enchanteur à l’étage, dans son petit monde à elle.

Chaque chambre du Laurier était un peu différente et la sienne ne faisait pas exception. Cela faisait après tout près de trois ans que l’Elfe s’était approprié les lieux. Quelques plantes, pour se rappeler discrètement son frère. Des voilages, pour donner un peu de dimensions à la pièce. Un peignoir de soie toujours négligemment posé sur la chaise qui faisait face à une coiffeuse parfaitement ordonnée. La première fois qu’elle avait l’impression d’avoir un petit chez elle depuis bien longtemps.

Une fois entrés, elle laissa Lachlann découvrir les lieux tandis qu’elle refermait la porte. Mais pas à clé. Jamais à clé, au cas où. Elle se débarrassa ensuite de ses chaussures et se dirigea vers la petite table de bois foncé sur laquelle trônait une carafe de vin et deux verres sur un plateau.

« Bien sûr… J’espère que le vin épicé vous convient… »

N’ayant pas l’intention de faire des aller-retour entre eux et la carafe pendant leur petit jeu de questions/réponses, Dîs vint déposer le plateau sur la table de chevet du côté où le Prince s’était installé. Elle remplit alors un premier verre qu’elle tendit à son compagnon d’un soir, puis elle remplit le second plus modérément. Elle se savait de faible constitution et ne tenait pas à finir éméchée devant l’Enchanteur supérieur…

Dîs fit alors le tour du lit pour le rejoindre. Au fond, c’était presque amusant, de ne pas savoir où cette soirée allait mener. Presque, oui, parce que cela voulait aussi dire qu’elle ne savait pas exactement comment se comporter autour du mage…

Ne sachant donc pas sur quel pied danser, elle vint s’asseoir à ses côtés, proche mais toujours sans le toucher, face à la tête de lit et ses jambes repliées sur le côté. Ils pouvaient ainsi discuter face à face, mais elle était aussi à portée de main s’il se décidait à autre chose.

« À votre bonne santé, Messer… », salua-t-elle alors en levant brièvement son verre avant d’y prélever une gorgée du liquide carmin.

« Alors… L’histoire qui est passée au second plan, mh?… » Elle réfléchit quelques instants, faisant le tri dans les événements de la semaine et éliminant les récits les plus sordides. Ah… Peut-être… « J’ai bien une idée mais cette histoire est juste tragique, j’en ai bien peur. »

Elle fit une moue un peu gênée, qu’elle savait par ailleurs tout à fait adorable. Vera ne serait pas contente d’apprendre qu’elle parlait de cette affaire alors qu’elles travaillaient toutes d’arrache-pied pour qu’elle ne s’ébruite pas. Mais si elle voulait obtenir des informations de Lachlann… C’était donnant-donnant.

« Une des plus jeunes, toute nouvelle la pauvre, est tombée amoureuse d’un client. » Ça commençait mal. Grave erreur professionnelle.

« Il lui promettait monts et merveilles bien évidemment et, comme elle est encore novice mais aussi très naïve… elle l’a cru. »
Les hommes racontaient des tas de choses sur l’oreiller… Par pure affabulation ou, pour certains, par un étrange besoin de créer l’illusion d’une réelle relation afin d’apaiser leur honte de fréquenter de tels établissements. C'était pourtant l'une des règles de base: ne jamais croire un seul mot de ce qu'ils racontent.

« Elle est tombée enceinte. Ce n’est pas un accident, elle a calculé son coup. »
Les accidents arrivaient bien sûr. Même la jeune Elfe n’y avait pas échappé en six ans de ‘carrière’. Mais la fille était tellement certaine que c’était bien le bébé du client en question que le hasard n'était pas possible…

« Elle a semble-t-il demandé à un autre de ses clients réguliers de le suivre pour découvrir où il vivait et lui faire une suprise. Elle s’est donc rendue à son domicile pendant son jour de repos. »
Elendîs prit une nouvelle gorgée de vin en osant un petit regard entendu à Lachlann par dessus le verre. Le reste tombait sous le sens.

« Elle est tombée sur sa femme, bien entendu. Depuis, c’est… compliqué. L’épouse n’est pas vraiment surprise, elle savait que son mari fréquentait ce type d’établissements. Mais une grossesse, c’est tout autre chose. Le client est justement outré. Et c’est comme si cette pauvre fille ne veut pas comprendre ce qui se passe. »
Elle haussa légèrement les épaules pour souligner son propos. Elle avait elle-même discuter avec sa collègue, mais s’était heurtée à un mur de profondes désillusions qu’une professionnelle ne pouvait tout simplement pas se permettre.

« Je ne sais pas encore quand ni comment cette situation sera réglée mais… Je vous le ferai savoir. », ajouta-t-elle avec un petit sourire amusé.

« Mais vous voyez? Rien de bien phénoménal au Laurier. », conclut-elle sur le ton de l’excuse, vraiment pas certaine que ce genre d’histoires puissent intéresser un Prince. Mais bon, elle ne se voyait plonger dans les détails lugubres si vite.

« À mon tour! », enchaina-t-elle, une étincelle au fond de ses grands yeux verts alors qu’elle se penchait légèrement vers lui. Une fenêtre sur le Cercle, rien que pour elle… Mh… Elle se rendait bien compte de la chance qu’elle avait là. Mais que demander sans sauter directement sur le sujet d’Ithildir? Et puis, un air un peu indécis sur ses traits fins, elle osa:
« Qu’est-ce que ça fait, d’être mage? Je veux dire… Qu’est-ce que vous ressentez, au quotidien? Est-ce que c’est une sensation qui vous suit en permanence? Ou seulement quand vous faites appel à la magie? »

Ithil et elle n’en avaient jamais parlé. Il réprimait cet aspect de sa personne et elle l’avait nié avec brio dans l’espoir que, moins ils en discuteraient, moins ils en sauraient, moins il risquait de se faire prendre.
Aujourd’hui, elle regrattait tellement de ne pas avoir cherché à mieux comprendre ce que son frère traversait. Et qui de mieux que l’Enchanteur supérieur pour le lui expliquer?

Elendîs apprécia d’observer et de tenter de décoder les émotions qui se succédèrent sur l’élégant visage du Prince. Et sa question était tout à fait légitime. Elle l’avait d’ailleurs posée aussi, sans obtenir de réponse satisfaisante.

« Je ne sais pas si elle voulait lui ‘faire plaisir’ ou le ‘coincer’ en réalité… Quoi qu’il en soit, ça n’a pas fonctionné. »
Le client était furieux et ne voulait plus rien à voir avec le Laurier, la fille ou tout enfant à naître si elle décidait de le garder. Choix difficile pour cette pauvre petite…

Les assertions de l’Enchanteur à la fin de son petit récit la touchèrent fièrement et elle lui renvoya un sourire lumineux. Elle avait eu un peur de l’ennuyer… Au lieu de cela, l’aristocrate trouvait qu’elle racontait bien. C’était plaisant.

Lachlann commença alors à répondre à sa question et Dîs concentra toute son attention sur ses explications, fermant les yeux quand il le lui demanda et se laissant porter par sa voix.

C’était en fait assez difficile à imaginer mais le mage parvenait à décrire suffisamment ses sensations pour qu’elle ait le sentiment d’avoir compris, même si cela restait assez flou et qu’elle avait bien conscience qu’elle ne pourrait jamais vraiment en saisir toute l’ampleur.

Elle avait après tout vécu des années avec un deuxième faisceau de perceptions qui n’étaient pas les siennes. Elle savait à quel point cela pouvait être déroutant. Et fatiguant aussi, parfois.

Dîs se demanda alors quelles proportions le lien qui l’unissait à son frère avait bien pu prendre pour lui au fur et à mesure que sa magie s’affirmait. Et s’il lui était devenu insupportable? Et si elle lui était devenu insupportable? Ou, au contraire, le lien s’était-il noyé dans un maelstrom de nouvelles sensations ? Rien de bien réjouissant en tous cas. L’Elfe mit donc un terme à cette ligne de pensées, refusant de laisser sa négativité gâcher ce moment plutôt agréable.

Mais qu’est-ce que les mages entendaient, au juste? Que leur murmuraient ces voix venues d’ailleurs? Cela devait être extrêmement personnel et elle n’osa pas demander. Juste…
« Ce n’est pas… épuisant, parfois? Vous n’avez jamais envie de pouvoir mettre ces… perceptions, surtout les voix, en pause pendant un moment et de juste… souffler un peu? »

Elle s’avoua alors satisfaite de la réponse et acquiesça avec un doux enthousiasme avant de reprendre une gorgée de vin. Elle fit ensuite un petit signe de sa main libre vers sa personne accompagné d'un sourire engageant.

« À vous. Vous avez une question? Ou vous préférez une autre histoire? »
Mentalement, elle cherchait déjà une autre anecdote à raconter. Quelle question un Enchanteur supérieur pourrait bien avoir à poser à une fille comme elle?

Son catalogue d’histoires arrêta de défiler dans ses pensées et elle fixa un instant le mage, interloquée. D’abord, parce qu’il avait effectivement une question à lui poser. Et ensuite, parce que cette question était… bizarre. Oui, bizarre… Que voulait-il dire par là?

Tout le monde savait que le quotidien des mages du Cercle était plutôt restreint. Si Dîs ne s’était jamais renseignée plus que ça sur son actuel client par le passé, elle se doutait bien qu’il devait jouir d’un statut particulier, Enchanteur supérieur et Prince déshérité de surcroit, pour pouvoir ainsi se balader dans une maison close sans un Templier dans les pattes. Mais les autres, quand ils n’étaient pas confinés, étaient surveillés sans arrêt. Une situation que peu de gens trouvaient réellement enviables mais justifiaient de par la dangerosité des mages.

Elendîs entendait bien les discours, bien entendu, sur les dangers des mages. Soit. Mais le fait était qu’elle avait vécu deux ans à proximité d’un mage apostat sans la moindre formation et qu’il ne s’était jamais rien passé. Peut-être son avis était-il biaisé, c’était une possibilité bien sûr. Peut-être que les circonstances qui entouraient Ithil à l’époque l’avaient protégé, peut-être que la proportion de mages prêts à perdre les pédales étaient écrasante… Elle n’en savait rien. Tout ce sur quoi elle pouvait baser son avis, c’était ses expériences personnelles et elle ne s’était jamais sentie en danger auprès d’un mage, qu’il se soit s’agit d’Ithil ou en ce moment-même. Par contre, il était des hommes sans aucune aptitude à la magie qui lui donnaient des sueurs froides d’un simple regard. Oh, elle ne doutait pas que l’Enchanteur supérieur soit redoutable, s’il le voulait. Elle espérait juste être du bon côté si cela devait arriver.

« Vous voulez dire… Qui auraient préféré être au Cercle plutôt qu’ici? Nonobstant les aptitudes magiques? »

Après avoir pris une nouvelle gorgée, et donc presque vidé son verre, elle le posa sur la table de chevet de son côté du lit. Débarrassée de l’objet dangereux qu’était un verre rempli de liquide, elle se réinstalla près du mage, posant une main sur le matelas pour se soutenir alors qu’elle s’inclinait légèrement vers Lachlann pour étendre un peu ses jambes, soulageant ses genoux.

« A part moi, je ne vois pas trop qui… Le Laurier… offre sécurité mais aussi plus de libertés que beaucoup d’établissements. Personne ne nous empêche de sortir et de faire ce qui nous plaît, une fois nos heures remplies. Est-ce qu’un mage de mon âge aurait ce luxe? »

Elle avait délivré sa réponse d’une voix pensive, comme si elle formulait sa pensée au fur et à mesure qu’elle l’exposait. Elle mit donc un moment à se rendre compte de ce qu'elle venait d'avouer au mage: qu'elle aurait préféré rejoindre le Cercle.

Le rose lui monta lentement aux joues et elle hésita un instant entre maintenir le contact visuel ou baisser les yeux. Elle opta finalement pour la première solution, essayant ainsi de ne pas attirer l'attention sur sa bourde, même si cela lui demanda énormément d'efforts.

Le mouvement de l’Enchanteur ne lui échappa bien évidemment pas, effleurement de mousseline sur sa peau nue à l’initiative d’une grande main chaude. L’expression du mage resta toutefois parfaitement impassible, aussi Dîs y répondit-elle d’un petit hochement de la tête en signe de remerciement, et peut-être d’un battement de cils un peu plus appuyé que d’ordinaire pour qui saurait l’observer.

La question suivante lui arracha un souffle amusé, à défaut du rire nerveux qu’elle parvint à contenir. Non, elle n’avait clairement pas besoin de sortir pour être heureuse…

« Je ne sors déjà pour ainsi dire plus, à moins que Miche ne m’accompagne. Le monde me… », quoi? dégoûte? effraie?, « dérange. Mais j’aime savoir que j’en ai toujours la liberté si je le souhaite. », avoua-t-elle, son regard accroché à celui de Lachlann pour s’empêcher de baisser les yeux vers ses poignets marqués. Si elle y parvint, elle ne put toutefois retenir un mouvement instinctif, ancré depuis plusieurs années, sa main libre allant enserrer le poignet de l’autre, toujours appuyée sur le matelas pour la soutenir, comme pour chasser les fantômes de désagréables sensations.

Pourquoi le Cercle, mh? Elendîs hésita un moment, son esprit cherchant toute à la fois les réponses à la question posée et une nouvelle interrogation à soumettre au Prince. Elle avait perdu le compte en fait, et ne voyait pas d’inconvénient à répondre à une sous-question. Celle-ci était toutefois un peu… compliquée.

« Ce n’est pas tant que le Cercle m’intéresse, pour être honnête. », confia-t-elle, la voix plus basse que précédemment et un peu moins assurée. « Je n’étais pas très douée mais c’est vrai que j’ai toujours aimé apprendre. J’aurais adoré pouvoir poursuivre mon éducation, magie mise à part. Mais les circonstances en ont voulu autrement. Non, c’est surtout que… Le Cercle m’a pris quelqu’un qui m’était très cher et fut un temps où j’aurais donné n’importe quoi pour le rejoindre, qu’importe les conséquences. Encore aujourd’hui, malgré les années qui sont passées, j’y pense parfois. »

Cela devait être la première fois qu’elle ne faisait ne serait-ce que mentionner Ithildir dans une conversation depuis très longtemps. Elle avait toujours trop peur que quelqu’un, en faisant la connexion entre elle et Thil, fasse également le lien avec Taralen. Oh, elle se demandait bien parfois si Vera n’avait pas déjà remonté la piste jusqu’à son père mais elle préférait ne pas savoir et n’avait jamais posé la question.

La franchise avec laquelle elle répondait au mage la surprit d’ailleurs un peu. Peut-être était-ce jeu de questions-réponses auquel le Prince se prêtait sans prétention qui la mettait en confiance. Et puis, il semblerait que l’annonce de l’Enclin l’avait suffisamment chamboulée pour que son jumeau reprenne sa place sur le devant de la scène et l’amène à prendre plus de risques.

Le bras sur lequel elle est appuyée s’endormant un peu, l’Elfe se redressa alors juste assez pour ne plus avoir besoin de support et la main ainsi libérée vint se poser tel un papillon sur l’élévation la plus proche, le genou du mage.

 »Mon tour, mon tour, mon tour… », murmura-t-elle ensuite, une étincelle de retour dans son regard, en essayant de gagner du temps.

« Si vous pouviez changer une chose, une seule, chez vous ou dans votre vie, qu’est-ce que ce serait? »

La question de l’Enchanteur supérieur la surprit un peu, et cela dut se voir sur ses traits.

Avec un sourcil légèrement arqué et un air amusé, elle baissa les yeux vers son propre corps d’Elfe. Elle avait toujours été petite et frêle. Rien que les bras de Lachlann devaient faire la même taille que ses fines jambes. Alors, sans même prendre en compte ses origines… Elle, Templière? Pourquoi pas Garde des Ombres tant qu’on y était?

Elle n’attira toutefois pas plus l’attention sur cette justification qui pouvait sauter aux yeux car les raisons étaient en réalité multiples, et les exposer aurait nécessité des détails qu’elle n’était pas prête à partager. L’abandon d’Ithildir lui avait brisé le coeur. Elle n’avait pas eu la force de rebondir. Mais elle avait aussi garder suffisamment de respect pour sa propre personne que pour ne pas se traîner derrière lui comme une suppliante. Et puis…

« Mon père me l’a interdit. »

Oh, elle aurait probablement pu fuguer. D’autant que Taralen ne lui avait pas juste interdit de rejoindre les Templiers, ce qu’elle n’aurait de toutes façons pas vraiment envisagé, non… Il lui avait imposé de ne même pas essayer de contacter Ithil de quelque manière que ce soit, si cela avait seulement été possible.

Le mage commenta alors sa confidence. Ça sonnait presque comme excuse et Elendîs laissa un sourire compréhensif étirer ses lèvres.

« Je sais… C’est pour cela que je ne vous l’ai pas demandé. », répondit-elle doucement, signalant ainsi qu’elle ne lui en tenait nullement rigueur. Au fond, voulait-elle vraiment en savoir plus sur la vie d’Ithil pendant ces onze années? Si une part d’elle espérait qu’il soit comblé, une autre nourrissait une réelle rancoeur à l’idée qu’il ait pu être heureux sans elle pendant qu’elle vivait un calvaire. Oui, c'était peut-être aussi bien de ne pas savoir, au fond...

Mais elle émis cependant un doute. Personne ne pouvait prendre soin d’Ithildir comme elle. Personne ne pourrait montrer la même dévotion qu’elle lui avait témoignée pendant tant d’années. Mais ça ne l’avait pas empêché de partir.

Dîs n’eut alors pas vraiment le temps d’être interloquée par la brève démonstration d’exaspération du mage tant il changea rapidement de posture. Son rire résonna dans la pièce, pour la première fois de la soirée, chaud et vibrant, et la jeune Elfe se força à rester parfaitement immobile, retenant un réflexe protecteur, quand il se pencha vers elle. Il y avait quand même des hommes dont elle ne s’inquiétait pas systématiquement du comportement et elle avait beau ne rien savoir de Lachlann une fois la porte d’une chambre close, elle doutait qu’il puisse être un client si régulier s’il avait eu des tendances violentes.

Il répondit alors à son interrogation, ses prunelles claires fixées aux siennes et elle ne marqua aucune surprise. Au contraire, peut-être une pointe d’amusement.

« Je veux bien mon verre s’il-vous plaît, Messer. »

Elle n’était plus très certaine de comment s’adresser à lui maintenant. Certains clients préféraient plus de familiarités après. Mais dans le doute, avec Lachlann, elle choisit de rester formelle. Elle se souvenait par ailleurs que son verre n’était pas vide, de sorte qu’il n’aurait même pas à le lui remplir, sans quoi elle ne lui aurait probablement même pas demandé. Mais leur échange lui avait donné soif alors…

Les courants d’air frais sur sa peau la gênaient déjà et Elendîs jeta un œil aux alentours. Sa robe était quelque part par là-bas, son peignoir toujours sur la chaise… et elle n’avait vraiment pas envie de se lever. Elle opta donc pour rabattre le drap sur son corps, l’arrêtant juste avant qu’il ne touche le mage. S’il souhaitait s’en couvrir également, il n’aurait qu’à tendre la main.

Dîs n’aimait pas s’agiter, dans les moments suivants une… transaction commerciale. Elle préférait laisser l’occasion à ses patrons de se poser un peu. Elle s’allongea donc sur le côté pour lui faire face.

« Non… La réservation annulée était pour toute la soirée, et une partie de la nuit. » Oui, c’était un bavard. « Je n’ai donc rien d’autre de prévu. »

Oh, elle pourrait redescendre au Salon et essayer d’harponner un autre client sans réservation. Mais la soirée s’annonçait plutôt calme et ce n’était vraiment pas son exercice préféré… Elle privilégiait largement le fait de passer un peu plus de temps avec celui qui avait réussi à lui faire déballer plus d’informations sur sa personne que n’importe qui au Laurier en trois années de bons et loyaux services…

Sans vraiment reprendre leur jeu de questions/réponses, Dîs rebondit donc simplement sur la question posée.

« Et vous? Des choses de prévues ce soir? »

Ses sourcils se froncèrent alors dans une moue curieuse un peu comique alors qu’une autre question lui traversait l’esprit. À quoi les mages passaient leur temps libre, au juste?

« Qu’est-ce que vous faites d’ordinaire? Le soir, au Cercle? Qu’est-ce que vous aimez faire? »