Type de RP Classique.
Chapitre concerné Chapitre 2.
Date du sujet 26 Gardien 5:13.
Participants @Paco Tohopka et Sioned Meahger.
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Résumé Une Sioned Meahger fraîchement déménagée hors du Laurier Carmin invite Paco Tohopka à sa première leçon d'écriture.
Pour le recensement

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[code]<ul><li><en3>26 Gardien 5:13</en3> : <a href="LIEN DU RP">TITRE DU RP</a></li></ul><p><u>Paco Tohopka et Sioned Meahger</u> Une Sioned Meahger fraîchement déménagée hors du Laurier Carmin invite Paco Tohopka à sa première leçon d'écriture.  </p>[/code]

Le déménagement avait eu lieu il y a une semaine et demie. Un plan qu’elle avait tissé depuis l’année dernière, mais qui n’avait eu lieu qu’après plusieurs mois de dépenses réfrénées, de salaires et pourboires bien économisés. Vera n’avait pas particulièrement apprécié cette nouvelle - Sioned le sentait - mais elle n’était qu’à deux minutes du Laurier Carmin, ce qui n'empièterai en rien son efficacité - et puis, (ce fut surtout sur cet argument qu’elle insista auprès de sa patronne) c’était toujours une toute nouvelle pièce qui pourrait servir à l’établissement!

Ce que personne ne savait, c’était qu’elle avait une envie folle de se retrouver seule, depuis le 8 Marchiver, depuis qu’un certain Chercheur était venue la trouver.
Les nouvelles concernant Callum avaient tout chamboulé. Après presque dix ans de veuvage, voilá qu’elle apprenait toute la vérité: son mari s’était remarié au Front, et avait engendré avec sa nouvelle épouse un enfant, juste avant de mourir.
Mais Sioned n’avait plus versé de larmes, non. Plus depuis qu’elle avait écouté le récit de Keith Farwell. Le choc avait été si grave, qu’elle s’en était presque prohibée.
Elle ne l’avait révélé à absolument personne. (Ni même de la tentative de subornation du Chercheur)

Après le déni, la colère, le marchandage, voilà que la dépression l’engloutissait peu à peu.

Ou presque. La seule pensée positive qu’elle avait était pour Paco. L’idée de le revoir était toujours une lumière au fond du tunnel.

Celui-ci avait déjà visité son petit logis, l’avait même aidée à déplacer l’un des meubles - et tous deux avaient même initié l’homme à la lecture (au grand dam de ce dernier). En effet, si Sioned avait été choquée d’apprendre son analphabetisme, elle s’était aussitôt décidée à l’aider. Loin d’être enseignante ou érudite, l’intendante espérait pouvoir lui apprendre quelque chose, comme elle tentait de le faire avec les enfants d’Arlisa. À leur rythme, sans pression…

“Ne serait-ce qu’écrire ton propre nom!” avait-elle néanmoins insisté auprès d’un Tohopka presque indifférent. “La semaine prochaine, lorsque j’aurai le petit bureau et toutes mes encres et plumes, on pourra commencer.”

De ce fait, au petit matin, elle avait chargé à nouveau son messager personnel (une connaissance elfe, un ami d’Arlisa) de retrouver Paco et de lui faire parvenir un autre petit billet. Il ne comprendrait pas, mais s’il parvenait à passer par-dessus son orgueil, il trouverait moyen que l’on lui traduise ce qui y figurait, quelque part.

La journée suivante, qu’elle avait réservée pour faire quelques courses rapides et mettre en ordre son petit bureau, était vite passée. Mais aucun signe du filou.

En fin d’après-midi, les deux pièces existantes étaient bien harmonieuses, sans aucun signe des émotions compliquées qu’elle affrontait. La vue de son petit salon la réconfortait désormais.
Ici, elle pouvait inviter qui bon lui semblait, à l’heure que cela lui convenait, sans un contexte professionnel auquel faire attention. La pièce commençait à bien se remplir - du moins, depuis la dernière visite de Paco: deux nouveaux petits meubles ornaient l’entrée, ainsi qu’une modeste coiffeuse dans sa chambre et un coffre de bois au pied du lit. Sur l'appui de la fenêtre, quelques objets décoratifs.

La veuve avait entretenu, au sein du foyer un feu crépitant - comme toujours - pour combattre le climat tempéré de ce mois humide; le feu grésillait agréablement, réchauffant tout l’intérieur et conférant à la petite maison une lueur orangée. L’encens brûlait au fin fond de la salle, pour que l’odeur agréable et épicée de myrrhe puisse atteindre chaque recoin de l’habitation.

Sioned venait d’allumer toutes ses bougies, ainsi que de l’encens, lorsqu’elle entendit quelqu’un finalement toquer à la porte. Serait-ce son invité?  

“ J’arrive! ” - exclama-t-elle, ajustant son châle contre elle avant de venir lui ouvrir avec le plus grand sourire de la semaine. “ Tu arrives juste quand il y a presque aucune lumière pour ta leçon!  ” Sioned ouvre grand la porte, le laissant entrer.

@Paco Tohopka

Un elfe était venu à sa rencontre. Paco avait hésité à lui rentrer dedans car ils s’connaissaient pas, donc l’inconnu n’avait aucune raison de venir l’importuner pendant que le pirate ne faisait strictement rien de sa matinée. Mais finalement, en voyant le petit papier que l’elfe tenait en main, sa curiosité fut piquée. Haussant un sourcil pendant que l’émissaire lui tendait la missive, Paco croisa silencieusement les bras, le forçant à lui lire le message.

Demain je ne travaille pas. Retrouve-moi chez moi. Il y aura des biscuits. Sioned.

La porte se referma derrière le pirate, les laissant enfin seuls. C’était ce que les deux avaient toujours eu difficile à avoir : un peu de solitude pour se retrouver ensemble. Cela n’avait jamais été véritablement possible avant que Sioned ne déménage, pour avoir son propre petit cocon à chérir. Entre les fois où ils se croisaient au marché, se contentant d’un regard au loin comme salutations, ou les visites nocturnes de Paco qui se risquait à brutaliser une des fenêtres du Laurier Carmin… tout ça faisait vraisemblablement parti d’un passé qui ne manquerait pas à Paco. Il avait d’ailleurs ressenti une certaine peur, lorsqu’il comprit que l’intendante allait habiter seule. Le laisserait-elle entrer dans son intimité ? Ne serait-elle pas effrayée à l’idée de rester en sa compagnie, sans personne pour venir lui porter secours si ce pirate sauvage lui faisait du mal ? Mais sans même le savoir, Sioned mit fin à ces pensées qui lui torturaient l’esprit, en l’invitant sous son toit, en lui offrant la possibilité de combler les lacunes d’un apprentissage que jamais il n’avait eu la chance de suivre.

C’est parce que tu l’as souligné que j’y ai prêté plus attention… grommela-t-il dans sa barbe inexistante. Ce n’était pas tout à fait vrai, il avait reconnu la boucle de l’écriture de la brune, qu’il trouvait aussi jolie qu’elle. Jamais il ne pourrait avoir pareille plume, mais il s’disait que tant qu’il pouvait s’faire comprendre, c’était le principal. Quoiqu’ils étaient encore loin d’un tel résultat.

Appréciant le baiser de la jeune femme sur sa joue, il retint son soupir d’aise et alla déposer les bois près de la cheminée. Il en profita pour nourrir davantage le feu, même si cette tâche sembla avoir été faite il y a peu. Paco aimait bien accomplir ces petits gestes ; ils faisaient partis d’un éventuel quotidien qu’il se plaisait à imaginer de très loin, car jamais le pirate ne se donnerait l’opportunité de vivre aux côtés de celle qu’il aimait. Avec la vie trépidante mais dangereuse qu’il menait, cela serait inconscient de sa part. En se relevant, il ôta son long manteau qu’il lança par réflexe près d’un coin sur le sol et releva les manches de sa chemise. Son apparence générale et les vêtements propres portés ce soir, étaient les signes évidents que la qualité de sa vie avait augmenté derechef, pour le plus grand plaisir de sa dignité et l’image de soi. En vérité il s’était toujours fichu pas mal de puer le poisson, ou que ses bains étaient espacés de plusieurs semaines, que ses mains soient noircis par le labeur du travail et sales coups de larcin. C’était parce que ses sentiments pour Sioned s’étaient développés que Paco commença à se poser la question de l’hygiène, l’apparence, voire même l’intelligence. Apprendre l’alphabet et l’écriture ne lui avait pas tant que ça tenu à cœur, mais la voir si prête et si motivée à lui ouvrir les portes de la connaissance, lui faisait plaisir. C’était une preuve parmi tant d’autre qu’elle tenait à lui, n’est-ce pas ?

Ce pourquoi je les apporterai APRÈS qu’on ait au moins fait quelque chose. Tu te rappelles de comment écrire ton nom ? Allez… viens! A cette phrase, Paco souffla du nez. Ca avait été trop beau pour être vrai, évidemment ! Ah oui, comme ça, direct ? Pas de câlin, pas de bière ? Pas de biscuits ?! rétorqua le pirate en haussant les sourcils d’un air outré. On ne m’avait jamais arnaqué de la sorte. D'habitude c’est moi qui fais ça. Il sourit tout en la suivant sur cette chaise, y posant son séant sans grande conviction. Rien qu’à voir les papiers ainsi éparpillés, Paco avait envie de s’échapper auprès du feu en emportant la brune avec lui. Les flammes des bougies dansaient sur la table, illuminant le plan de travail où Paco errait son regard. Il observa un instant ses premières tentatives dont il avait si honte. Pourquoi ne les avait-elle pas jeté au feu de cheminée ? Personne ne voulait voir pareille indélicatesse. Le voleur comparait ses premiers essais à un singe gribouillant des absurdités. hmpf.. tu pouvais les jeter, je compte pas accrocher ça avec fierté quelque part, lâcha-t-il en tenant la plume sous sa pulpe. C’était si déstabilisant de tenir quelque chose d’aussi léger et fin entre ses doigts. Lui avait l’habitude de gros outils de pêche ou d’un couteau, d’une hache, des cuisses gracieuses d’une femme. Pas une fichue plume qu’on sentait à peine !

Avec concentration, motivé par les paroles rassurantes de sa maîtresse qui se tenait à ses côtés, il réécrit son prénom en tentant de faire les mêmes boucles parfaites de l’intendante. L’échec était certes cuisant, mais ces nouvelles tentatives étaient plus lisibles que lors du premier cours. Sioned lui avait appris de quelle lettre était composé son prénom, et il savait aussi les prononcer séparément. Pé, a, ko. Intérieurement, il s’était d’ailleurs dit que c’était une chance inouïe d’avoir un prénom si simple et si court à la prononciation. Après plusieurs essais, le papier était noirci d'encre. Les minutes s'étaient écoulées lentement pour l'élève, qui malgré le travail effectué, voyait la montagne qu'il restait à franchir. Il y avait bien d'autres lettres à connaître, bien d'autre mots compliqués à venir. A cette allure je n'risque pas d'écrire mon premier bouquin de si tôt. Il tourna la tête vers Sioned, la déconcentration pointant son nez, je t'en avais déjà parler ? "Comment voler le cœur d'une femme en dix leçons." Son rire fit écho dans la petite maisonnée, tandis que ses lèvres vinrent prendre la bouche de la brune en otage. Remarque, ça pourrait être très simple. Page 1 : Paco entrer dans Laurier Carmin. Page 2 : Paco voir Sioned. Toucher fesses de la femme. Femme faire semblant lui déplaire. Page 3 : recommencer acte viril page 2... A nouveau, son rire s'éternisa, faisant bouger ses épaules alors que l'humour du bonhomme semblait doucement remplacer la concentration que la pauvre intendante avait peiné à mettre en place.

Sioned avait retrouvé en elle un courage renouvelé, à chaque fois que le destin lui avait présenté Paco.
D’une façon ou d’une autre, notre cher filou avait proportionné une toute nouvelle Sioned.

D’abord, avec la raclée magistrale qu’elle lui avait administrée avant même de le dévisager, il y a des années de cela. Jamais elle n’avait frappé quelqu’un comme ça -(encore moins, quelqu’un bien plus grand qu’elle, et qui aurait pu lui faire sacrément mal). Jamais elle n’avait fixé des limites aussi fermement qu’à ce moment-là. Jamais, aussi rapidement. Des années à toquer timidement à la porte, des années à ravaler les larmes lorsque sa famille prétendait mieux savoir, des années à ne jamais dire ‘non’.
La brûlure que la paume de sa main avait ressentie était bien lointaine. Plus jamais je me laisserai faire.
Depuis qu’elle apprenait petit à petit à le connaître, elle se retrouvait à découvrir d’autres pensées, à s’attendre à d’autres développements, à faire différent. Peu importait le regard des autres, peu importait ce qu’ils pensaient.
Quelque chose a changé, chez toi.

Bon sang, il avait eu raison.
Maintenant, c’était le dos de sa main qu’elle effleurait de ses doigts doux, le guidant à travers le bout de papier. Et c’était lui qui changeait aussi.
Qui l’aurait parié? Certainement pas elle.

L’effort magistral que le hors-la-loi faisait, sous les chandelles de la maisonnée, la faisait sourire de joie sincère. La plume ne lui glissait plus autant entre les doigts, il se tenait un peu plus moins tordu sur la chaise (oui, Sioned était chiante même pour sa posture) et malgré la force trop prononcée sur le bout de papier, l’évolution était évidente. Prenant les vieux brouillons, la brune les lui montra de plus près, satisfaite. “Regarde, je ne les ais pas jetés pour que tu puisses voir ton progrès… Tu vois comme c’est important?”
Paco, lui, trouvait déjà moyen de se glisser hors de la bulle de concentration.

Il voulait de la distraction? Soit. Sioned leva un sourcil, car deux pouvaient jouer ce jeu. D’abord penchée vers lui, elle lui lança : “D’abord, toi devoir savoir écrire Sioned. Ensuite…” elle lui souffla sur les lèvres, parvenant de justesse à se libérer de l’étreinte du pirate ; riant d’abord à ses propos bourrus, Sioned continua, soudainement sérieuse :
”Ce n’est pas du tout ça qui m’a intriguée, tu le sais très bien que je n’ai pas apprécié ton geste. ”  Car il ne fallait pas qu’il l’oublie, cela avait été de trop! Du moins, au Laurier Carmin, le consentement était la règle d’or. (Miche aurait bien eu sa peau pour moins!) ; elle pouvait rire à présent, mais elle avait été bien énervée à ce moment-là - pour ne pas dire, un peu apeurée.
”C’était ton regard, lorsque je t’ai demandé si tu avais découvert qui tu étais, en pleine mer. Et si tu avais changé.”
Sa main se glissa sur la joue prononcée de l’homme, rangeant deux de ses mèches derrière son oreille, observant comment sa peau brillait sous une certaine lumière. Chaque petit poil, chaque petit détail. Tellement de choses avaient changé depuis cette soirée. Se rappelait-il de sa robe? De la manière dont elle avait coiffé ses longs cheveux bruns?

”Tu m’avais semblé jusqu’alors comme un parfait insensible - mais quelque chose dans ton regard m’a crié que non. Que tu ne l’étais pas. Que tu es très loin de ça. Alors pourquoi? Pourquoi agir de la sorte? Tu as toujours respecté… Liley, et… puis les autres. Oui - elles me l’ont dit - shhh- “  Sioned rit à l’expression de Paco, mais ne le laissa pas l’interrompre. “Ça m’a intrigué. Je ne saurai pas t’expliquer pourquoi. Ni comment. Je suppose que tu n’es pas le premier homme sensible à franchir la porte du Laurier Carmin, et tu ne seras certainement pas le dernier.”  
La veuve le regarda droit dans les yeux, témoingnant qu'elle avait réfléchi longuement à la question. Elle s'était calée un peu contre lui, assise à ses côtés.
“Mais il y a des choses que ni même le Créateur pourrait expliquer, alors…”   la veuve souffla du nez, songeant aux mots de Keith. Callum m'a demandé de vous parler de la Vérité sur ses derniers jours. Des choses terribles qu'il a traversé, et surtout, des fautes qu'il a pu commettre.
Le regardant, Sioned avait envie de tout lui dire. De tout lui avouer. Peut-être rirait-il. Un templier qui se remariait au Front, c’était quand même franchement pas mal humiliant pour elle. Mais hélas, rien ne ressortit de ses lèvres. C’était peut-être mieux ainsi, après tout.  

Si Callum, un digne templier d’Andrasté, avait été capable d’un manque d’honneur pareil, et bien… qui était-elle pour juger un hors-la-loi? Qu’avaient-ils tous à lui reprocher son choix?   Qu’ont-ils tous à me juger de voir le bien là où il est juste… moins probable?

Car Sioned regardait Paco Tohopka et n’y voyait pas le meurtrier - qu’il était pourtant.
Elle voyait son envie trépidante de plaire. Elle voyait le regard nerveux d’un homme qui veut appartenir quelque part. Elle voyait sa cicatrice à la joue, si vieille - qu’il avait dû être un enfant lors de son occurrence. Elle voyait son effort à tenir la plume entre ses doigts cicatrisés, possiblement de toutes les maintes fois qu’il avait tenu entre ses mains des filets, probablement l’estomac vide.

La main de Sioned se trouvait à présent aplatie contre le visage de Paco, le regardant longuement, envoûtée par ce moment.

Elle voyait en lui toute la douceur du monde. Un futur réalisable ; la possibilité de croire que même les plus solitaires, avaient la chance de pouvoir voir naître un nouveau jour.
Elle ne voulait plus rien voir d’autre.  

@Paco Tohopka

L’étalage des brouillons, de leur précédent cours, ne parvenait pas à faire tenir Paco tranquillement sur sa chaise. Il avait déblatéré ses âneries dans le seul but de voir sa maîtresse rire à ses blagues et succomber à son charme négligé. Nul doute qu’il aurait fait un très mauvais élève, si sa vie avait pris un autre tournant… ou peut-être qu’il avait en lui une part d’un Paco dont il ne connaissait rien, mais qui sommeillait car jamais il n’avait été sollicité. Peut-être qu’il aurait été un tout autre homme, le genre à se tenir droit sur une chaise à écrire ses mémoires ? Cette simple pensée le fit souffler du nez. N’importe quoi ! Se concentrer autant lui faisait naître de sacrées idioties dans la tête. Faisant fi des égarements de son esprit, Paco se concentra sur les doigts de Sioned qui venaient effleurer les siennes. Il y attarda ses yeux et longea son regard sur le fin poignet, puis glissa vers l’épaule, avant de tourner vers ce magnifique visage. L’intendante était appliquée dans l’énoncé de ses remarques constructives, et tandis qu’elle énumérait les progrès de son élève, celui-ci se demandait si Sioned était au courant qu’il ne la méritait pas. Si le pirate devait prier pour une chose, ça serait celle-ci, pour que jamais elle ne s'aperçoive de cette évidence.

Le souffle chaud de Sioned qui vint s’écraser sur ses lèvres finissaient d’anéantir les derniers élans de motivation à tenir cette plume. N’avait-elle donc aucune idée de l’attraction qu’elle avait toujours exercée sur lui ? D’accord, d’accord. Peut-être que mon geste n’t’a pas intrigué, mais si j’ne l’avais pas fait, tu ne m’aurais jamais vu, et encore moins regardé, pas vrai ? Il haussa un sourcil, amusé de circuler en terrain miné. Mais Paco eut vite fini de chercher à la taquiner, car le ton de sa voix se fit plus doux et sérieux, alors qu’elle expliqua ce qui l’avait touché chez lui. Il déglutit en espérant masquer au mieux la surprise que cette révélation lui causa. Il avait envie de répondre sur un ton moqueur “dis tout de suite que c’est ma sensibilité qui t’as plu”, mais sa resta bloquée dans sa gorge. La suite des mots répondait de toute façon à sa question silencieuse ; les filles du  Laurier Carmin semblaient avoir parlé plus que de raison de son attitude envers elles, laissant à l’intendante de l’établissement aiguisé son avis sur ce pirate aux bottes boueuses et mains noircies par le travail. Il tira une tête de six pieds de long, pourtant il leur avait dit de ne pas saper sa réputation.

Assise à côté de lui, Paco entoura sa taille d’un bras et de l’autre main, glissa ses doigts dans ses mèches de cheveux. Un mimétisme qui répondait aux mêmes gestes attentionnés que Sioned lui offrait, munie de regard magnétisant. Il les rabattait derrière les épaules frêles, dévoilant au mieux la robe qu’elle portait ce soir. Et le voleur était certain qu’elle l’avait choisie et mise pour lui.

Tout comme lui, lorsque Paco se noyait dans les iris sombres de sa muse, il pouvait voir qu’un jardin secret recelait bien des tourments et vérités enfouies. Que savait-il sur elle, au final ? Pas grand chose, et sa princesse n’était pas la plus bavarde des femmes. Si cela lui convenait parfaitement avec celles dont il n’était intéressé que par une nuit sans lendemain, avec Sioned il s’agissait de toutes autres envies. Avec elle, Paco arrivait à entrevoir un futur, parce qu’elle ne s’était pas arrêtée sur la première impression rebutante qu’il lui avait causée. Au contraire, elle avait creusé et déterré des fragments d’un Paco enterré vivant, qui avait beau crier ; personne ne l’entendait. Sauf Sioned. Elle lui caressa la joue et il ferma les paupières, appréciant la douceur de son geste qui longea sa cicatrice. Quand elle y touchait, le pirate n’avait aucun flashback de la douleur ressentie au moment où on lui avait entaillé la chair. Il n’avait en esprit rien d’autre qu’une mer calme et cette présence bienveillante à son égard.

Toujours les paupières fermées, il murmura doucement, comme s’il s’agissait d’une confidence. Je veux tout connaître de toi, Sio. Il entrouvrit légèrement les yeux, assez pour la voir et détailler ses traits. En mer on se raconte souvent des histoires. Chaque pirate aurait sa propre sirène à lui, celle qui arriverait à l’attirer avec son chant, avant de le noyer cent mètres sous la surface. Ses yeux noirs étaient alors totalement ouverts, sa main s’était logée dans ce cou d’où émanait la chaleur corporelle de son égérie. Plein de camarades ont péri dans les vagues, attirés par une chose qu’eux seuls pouvaient voir. Je m’étais toujours demandé pourquoi moi, rien ne semblait vouloir m’emporter. Il se rapprocha des lèvres charnues de Sioned, ses mains serrant les hanches de sa demoiselle, qu’il tira doucement à lui pour l’attirer sur ses cuisses et l’invitant à se réchauffer contre son coeur. Maintenant j’le sais. C’est parce que ma sirène a quitté les eaux troubles, sourit-il en ne cessant de la fixer, pressant ses muscles dans une étreinte dont elle ne pourrait s’échapper. Tu as préféré me voir échouer sur la terre ferme. J’ignore encore pourquoi, souffla-t-il en capturant la bouche de l’intendante, son désir de la sentir se faisant trop viscéral.

Pourquoi mentionnait-elle le Créateur, alors que sa foi n’avait jamais aussi été si éteinte? Les bougies qu’elle allumaient n’honoraient plus l’engagement andrastien depuis presque deux ans. Sioned n’était pas sûre quels dieux pouvaient mouvoir Paco, mais l’idée mourut aussitôt leurs lèvres jointes. Pour la première fois, la jeune femme ne sentit plus cette peur vertigineuse à l’étreinte passionée, et ses mains ne repoussèrent ni freinèrent aucun des mouvements du pirate. Au contraire, elles l’enlaçaient un peu plus fort, un peu plus ardemment qu’avant.

La peur de cet enclin lui avait donné tellement de nuits blanches, qu’elle ne se rendait plus compte de sa fatigue mentale. De belles histoires de sirènes étaient la bienvenue, et l’intendante sourit à cette confession interdite. Elle avait eu ouïe-dire de ces créatures dangereuses et séductrices. Elle, une sirène? Sioned ne pouvait pas promettre que l’idée ne l’amusait pas, ni pouvait-elle nier que cette comparaison ne la rendait pas moins pudique. Un peu plus droite, ses cheveux longs retombaient un peu plus loin contre ses reins, ses épaules fines roulèrent doucement pour mieux lui faire face. Les beaux mots que lui soupirait le pirate, elle aurait tout donné pour les garder dans une petite boîte, se les répéter à l’oreille, ne plus les oublier, les réecouter avant la fin…

” Elle n’aime pas les eaux troubles, ta sirène… ” murmura-t-elle, attrapant doucement quelques mèches de cheveux du hors-la-loi entre ses fins doigts, comme une douce caresse. Puis plus bas encore, elle lui susurra ; comme une suggestion… - une suggestion si osée, qu’elle se surprit elle-même à l’entendre, son coeur s'accélèra de plus belle: ” Elle préfère un peu mieux un bon feu de cheminée… ”
Les yeux de Sioned ne pouvaient plus mentir. Ni son corps. Doucement, il l’avait accueillie contre son cœur, et pour la première fois elle ne le repoussait plus au moment où leur corps étincelaient l’un contre l’autre. Au contraire, l’intendante sentait cette envie débridée de le sentir davantage, de l’avoir que pour elle, mais aussi de se laisser découvrir, de l’attirer dans ses filets secrets, de lui montrer qui elle pouvait être.  
Sioned jeta un regard suggestif vers la fourrure qui gisait non loin, juste en face du foyer étincelant et rassurant. Au diable les leçons, au diable la vie dehors, au diable les responsabilités du lendemain.
Si elle était une sirène, alors elle n’avait à répondre à personne.  

@Paco Tohopka