« … mais je suis obligé de l’admettre mademoiselle, votre sourire écarte tous les nuages du monde, » lançai-je à la jolie serveuse de l’auberge dans laquelle j’allais jouer ce soir. Ma main se posa sur la sienne, et elle gloussa.

La neige avait enseveli Starkhaven, et la bise glacée m’avait fouetté durant tout mon trajet jusqu’à la taverne. Mais ce n’était que l’expression de la nature elle-même, Meryaran me l’avait enseigné mieux que personne, alors autant l’accepter. Rien ne pouvait entacher ma bonne humeur, et encore moins cette magnifique jeune femme qui se trouvait face à moi.
L’auberge était déjà bruyante, mais je savais que lorsque nous nous mettrions à jouer, moi et ma mystérieuse acolyte, nous n’aurions plus de problèmes.. C’était toujours agréable de partager la scène.

Au loin, sans pour autant me déconcentrer, j’entendais le tavernier héler la musicienne en retard. Je l’entendais baragouiner sans trop y faire attention, puis ses pas se rapprochèrent de moi. Je lâchais la main de la jeune femme, pour me retourner vers la musicienne. Bien entendu, Ayrenn était la seule à avoir pris mon coeur, et il n’était pas négociable de le partager.
Derrière moi, une jeune femme aux longs cheveux roux magnifiquement noués s’avançait. Sa mine déconfite n'annonçait rien de bon, nous allions faire de la musique, donc forcément passer un bon moment. Je ne comprennais pas trop. Enfin bon, c’est comme ça, je n’allais pas la forcer à sourire.

« Bonsoir Finley. On pourra commencer juste après, le froid a désaccordé mon luth, expliqua-t-elle. Je le dis, parce que c'est important de dire les choses avant de faire une fausse note. »

Mon visage ne laissa rien paraître de ma stupeur. Cette femme m’était étrangère, mais elle semblait me connaître. La preuve, elle m’appelait par mon nom. Mais j’espérais changer ça rapidement. Je me levais pour m’approcher d’elle.

« Vous semblez déjà connaître mon nom belle dame, me ferez vous l’honneur de me partager le votre ? »

De toute façon, les présentations seraient courtes, nous avions une soirée à animer, et un lai à chanter. Mon violon était déjà accordé, il avait pu prendre la température de l’auberge, il ne restait plus qu’à s’accorder avec elle.