Ainsi tomba Thédas :: Songer au passé :: Vieux récits :: Prélude :: Thédas
Au berceau des cœurs - Solo
Personnage
Peuple : Humain
Âge : 23 ans
Pronom.s personnage : elle
Origine : Noblesse havenoise
Localisation : Tous les bons quartiers de Starkhaven, parfois Clattercraft, occasionnellement ailleurs. Habite au Downnoc.
Pseudo : Trèfle
Pronom.s joueur.euse : elle
Crédits : Germaine II by Zhang Jing Na
Date d'inscription : 10/03/2023
Messages : 170
Attributs : CC : 10
CT : 9
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Ag : 13
Vol : 15
Ch : 15
CT : 9
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Ag : 13
Vol : 15
Ch : 15
Classe : Civil niveau 1
Feuille
Joueur
Dim 27 Oct - 18:05
Mélisandre O'Hara
Noble de Starkhaven
Personnage
Peuple : Humain
Âge : 23 ans
Pronom.s personnage : elle
Origine : Noblesse havenoise
Localisation : Tous les bons quartiers de Starkhaven, parfois Clattercraft, occasionnellement ailleurs. Habite au Downnoc.
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Feuille
Joueur
Dim 27 Oct - 18:29
« Je m’en fiche, Mélisandre. Si c’est une fille, tu peux choisir le prénom qui te plaît. »
Un baiser sur le front pour assurer que l’intention est plus douce que les mots.
Un baiser sur le front pour assurer que l’intention est plus douce que les mots.
*
Il a les yeux tout aussi noirs et sauvages mais tellement plus doux, et une voix qui enveloppe sans étouffer ; la comparaison est ridicule mais elle ne peut s’empêcher, cherchant en vain que faire de cet homme si agréable, mais si étranger. Tu apprendras à l’aimer, lui assurent-ils tous, sans qu’elle ose répondre qu’elle y arrive presque sans apprendre.
*
Les nuits sont plus courtes, depuis que son bras endormi enserre sa taille – de si peu, quelques minutes seulement, avant que la fatigue ne cède au confort et n’emporte ses envies d’en profiter un moment encore.
*
Elle aurait cru qu’il lui manquerait, maintenant que son corps est sien à nouveau, mais allongée face au berceau, elle ne changerait de lit pour rien au monde. Le bébé est invisible, couvert par la nuit aussi sûrement que par l’édredon amoureusement brodé, mais sa présence lui suffit. Elle n’est pas seule, se convainc-elle, avec succès jusqu’à ce que l’ombre sous la porte ne lui rappelle qu’elle l’est moins encore.
*
Elle sait cette fois, sans l’ombre d’un doute, qu’il lui manquera, demain si ce n’est aujourd’hui, la semaine prochaine si ce n’est demain, mais sa main ne tremble pas alors qu’elle s’appuie sur la sienne pour monter dans la calèche ; son cœur tressaille d’impatience, nourri par les peintures de sa mère et les confiseries envoyées par ses tantes, mais son corps, tourné pour la première fois loin de sa cité natale, respire la paix.
Ils lui manqueront, et elle se retourne une fois, par bienséance plus que par envie – même si elle sait déjà qu’elle regrettera – mais dès les hauts murs disparus, son esprit les oublie pour ne penser qu’à ceux qui l’attendent. L’on les dit blancs comme le plus pur des marbres, fondus dans les rues qui jonchent le mont comme un immense fort enneigé ; l’on les murmure coupés de tant de vitraux qu’on peine à voir la pierre, et que d’un sous certains angles on voit à travers ; l’on les raconte aussi chargés de tant d’or que chaque année, le château s’enfonce un peu plus, disparaissant peu à peu du paysage. La description de sa mère, elle, change à chaque itération, tantôt féerique, tantôt saupoudrée de savoir architectural, si bien qu’elle ne sait presque plus quoi attendre ; assurément, Orlaïs devait obéir aux lois de ce monde, mais n’était-elle que le tas de pierres dépeint sur les fresques, vivant par ses masques seulement ?
Les premières campagnes seraient d’une familiarité décevante, si le ciel ne les avait bénies de sa douceur ; la nature se libère du joug marchéen longtemps avant les maisons, et quand elle demande à s’arrêter, c’est pour l’expérience surréaliste d’enfiler une robe d’été dans une remise glaciale sentant le whisky. Soleil et routes pavées s’allient pour la bercer, revigorant ses besoins autant que son âme jusqu’à la plonger dans une sieste profonde, les coussins avalant tout pour ne laisser dans la voiture qu’un silence paisible.
Elle est tirée de son somnolement par des grondements profonds et des sons de cloche désordonnées, au timbre si désespéré qu’elle s’étonne de les trouver calmants, et il lui faut un instant pour y reconnaître des vaches. Les premières orlésiennes qu’elle rencontre… La suivante assise face à elle rit à la remarque – une erreur, elles ne sont plus chez elle, il faut se méfier de ce qu’elle peut répéter – mais Mélisandre se contente de sourire en retour, confiante en l’avenir.
Les collines l’appellent de leur douce verdure, fraîches, chaudes, lisses et profondes à la fois ; elle aimerait s’y enfoncer pour ne plus revenir, laisser l’herbe avaler ses pieds et offrir sa tête aux feuilles, laisser le vert s’occuper de tout le temps de quelques années ; se laisser disparaître dans le silence bruyant de la forêt… Elle ferme les yeux, hume le parfum lointain du pétrichore couvert par l’odeur des animaux. La pluie bénit pourtant Starkhaven chaque jour, sans jamais l’attirer ; l’ancre des pierres détend ses chaînes derrière la frontière, et elle s’imagine seulement vivre loin du Melluaine, du Downnoc, du Promontoire – n’ouvrir la porte que sur les champs verdoyants, passer à côté d’un puits, sans chapelle à portée de vue… Ce n’est pas une vie pour elle, elle la rendrait folle au bout de deux jours, mais le rêve est doux, les heures qu’ils cavalent entre les villages.
Ils lui manqueront, et elle se retourne une fois, par bienséance plus que par envie – même si elle sait déjà qu’elle regrettera – mais dès les hauts murs disparus, son esprit les oublie pour ne penser qu’à ceux qui l’attendent. L’on les dit blancs comme le plus pur des marbres, fondus dans les rues qui jonchent le mont comme un immense fort enneigé ; l’on les murmure coupés de tant de vitraux qu’on peine à voir la pierre, et que d’un sous certains angles on voit à travers ; l’on les raconte aussi chargés de tant d’or que chaque année, le château s’enfonce un peu plus, disparaissant peu à peu du paysage. La description de sa mère, elle, change à chaque itération, tantôt féerique, tantôt saupoudrée de savoir architectural, si bien qu’elle ne sait presque plus quoi attendre ; assurément, Orlaïs devait obéir aux lois de ce monde, mais n’était-elle que le tas de pierres dépeint sur les fresques, vivant par ses masques seulement ?
Les premières campagnes seraient d’une familiarité décevante, si le ciel ne les avait bénies de sa douceur ; la nature se libère du joug marchéen longtemps avant les maisons, et quand elle demande à s’arrêter, c’est pour l’expérience surréaliste d’enfiler une robe d’été dans une remise glaciale sentant le whisky. Soleil et routes pavées s’allient pour la bercer, revigorant ses besoins autant que son âme jusqu’à la plonger dans une sieste profonde, les coussins avalant tout pour ne laisser dans la voiture qu’un silence paisible.
Elle est tirée de son somnolement par des grondements profonds et des sons de cloche désordonnées, au timbre si désespéré qu’elle s’étonne de les trouver calmants, et il lui faut un instant pour y reconnaître des vaches. Les premières orlésiennes qu’elle rencontre… La suivante assise face à elle rit à la remarque – une erreur, elles ne sont plus chez elle, il faut se méfier de ce qu’elle peut répéter – mais Mélisandre se contente de sourire en retour, confiante en l’avenir.
Les collines l’appellent de leur douce verdure, fraîches, chaudes, lisses et profondes à la fois ; elle aimerait s’y enfoncer pour ne plus revenir, laisser l’herbe avaler ses pieds et offrir sa tête aux feuilles, laisser le vert s’occuper de tout le temps de quelques années ; se laisser disparaître dans le silence bruyant de la forêt… Elle ferme les yeux, hume le parfum lointain du pétrichore couvert par l’odeur des animaux. La pluie bénit pourtant Starkhaven chaque jour, sans jamais l’attirer ; l’ancre des pierres détend ses chaînes derrière la frontière, et elle s’imagine seulement vivre loin du Melluaine, du Downnoc, du Promontoire – n’ouvrir la porte que sur les champs verdoyants, passer à côté d’un puits, sans chapelle à portée de vue… Ce n’est pas une vie pour elle, elle la rendrait folle au bout de deux jours, mais le rêve est doux, les heures qu’ils cavalent entre les villages.
*
L’elfe la réveille timidement – du moins ses yeux endormis voient des oreilles pointues, pris d’un doute aussi soudain qu’étrange – ne la connaît-elle pas depuis des années, suffisamment pour connaître ses origines ? – quand Val Royeaux apparaît à l’horizon, et elle se pousse sur son banc pour lui laisser la place, et elles regardent la capitale approcher ensemble – chacune par sa fenêtre mais côte à côte, partageant des exclamations sans sens et des rires sans cause. La ville n’est encore rien, mais la liberté du véhicule suffit à griser leurs cœurs trop longtemps restés derrière le mur.
« Ne vous penchez pas trop, madame ! » crie le cocher sans ralentir, passant l’orée de la ville à toute allure, devinant ses gestes avant qu’elle ne les esquisse seulement, et soudain ils sont dans la ville ; et conseil soit damné, elle ne peut s’empêcher de s’approcher de la fenêtre, le bout du nez presque dehors. Orlaïs ! Son cœur, enfin – Val Royeaux !
Ce qui ressemblait de loin à des rivières de sang apparaît n’être qu’un assortiment de toits et de banderoles, comme si Orlaïs avait honte de son ciel bleu – partout des couleurs dansent, des guirlandes brillent, allumées malgré le jour encore jeune, partout des tourelles s’élancent et se concurrencent pour cacher les nuages. Elle jurerait les maisons construites avec la même pierre que Starkhaven, mais les parures ont rendu le squelette méconnaissable, et un rire surpris lui échappe quand une nuée d’oiseaux s’envole d’un toit impeccable ; colorés eux aussi, loin des ternes mais attachants moineaux havenois.
En haut, tout autour, la couleur, et plus bas les hommes qui n’ont de différent que leur veste et leur langue ; elle écoute avec intérêt les négociations d’un poissonnier alors qu’ils attendent qu’un convoi leur libère la route, fascinée par le sujet si barbant la semaine précédente. La langue rend tout plus nouveau et plus agréable, comme si elle entendait enfin le texte tel qu’il a été écrit.
Ils approchent le mur d’albâtre de si près qu’elle a un instant l’envie de le toucher, avant de s’en éloigner, glissant dans les ruelles où les elfes s’écartent, clopinant dans celles où les hommes se ramassent tranquillement. Évidemment qu’elle ne dormira pas au Palais – personne dans sa famille n’a jamais été si noble… Ni O’Hara, ni O’Bearáin, ni ceux venus avant. Par chance, la curiosité retient la déception, même quand l’inconfort d’heures d’immobilité la privent de patience. Elle est à deux pâtés de maison de demander une pause quand ils s’arrêtent enfin, devant une façade qu’elle aurait, malgré la créativité de ses décors, du mal à reconnaître parmi les autres. (Elle apprendra. Elle apprendra à reconnaître beaucoup de choses.)
Sa tante est là, guettant à la fenêtre un instant, devant la porte ouverte le suivant, dissimulée par un rideau de dentelle dedans et un masque dehors.
« Entre, entre ! Sois sans crainte, les domestiques s’occuperont de tes bagages. »
Le masque disparaît sitôt la porte fermée, abandonné sur le meuble d’entrée, et elle découvre pour la première fois le visage de cette Irène tant attendue. Si différent de celui de sa mère – pourquoi ne le serait-il pas, alors qu’elle n’est qu’une cousine et que leur ancêtre commun remonte à plusieurs générations ? Elle a été déraisonnable d’attendre un air familier seulement parce que ses cheveux forment la même couronne rousse…
« Nous t’avons préparé une chambre avec vue sur le palais, j’espère qu’elle te plaira. La route n’a pas été trop longue ? Ta mère a dit que tu préfères garder ta suivante près de toi, tu peux choisir entre la chambre d’en face et l’attenante… Mais d’abord, je t’ai fait couler un bain, tu dois être éreintée. Et tu es déjà si jolie ! Le dîner est prêt quand tu veux, mais tu veux peut-être qu’on t’apporte un plateau dans le bain ? Tiens, voici ta sonnette. Quelqu’un doit toujours arriver dans les trois minutes, alors n’hésite pas. Tu devrais peut-être te reposer sur nos gens le temps que ta fille se remette en état aussi, personne n’aime être servi par une souillon épuisée… Les autres lui montreront où. Oh, je suis si contente d’enfin te rencontrer ! Alors, est-ce que Starkhaven – excuse-moi, ça peut attendre. Je te laisse te reposer. Je serai dans le salon quand tu seras prête ! »
Andrasté lui pardonne. Elle n’est pas sûre d’aimer sa tante.
Ce qui ressemblait de loin à des rivières de sang apparaît n’être qu’un assortiment de toits et de banderoles, comme si Orlaïs avait honte de son ciel bleu – partout des couleurs dansent, des guirlandes brillent, allumées malgré le jour encore jeune, partout des tourelles s’élancent et se concurrencent pour cacher les nuages. Elle jurerait les maisons construites avec la même pierre que Starkhaven, mais les parures ont rendu le squelette méconnaissable, et un rire surpris lui échappe quand une nuée d’oiseaux s’envole d’un toit impeccable ; colorés eux aussi, loin des ternes mais attachants moineaux havenois.
En haut, tout autour, la couleur, et plus bas les hommes qui n’ont de différent que leur veste et leur langue ; elle écoute avec intérêt les négociations d’un poissonnier alors qu’ils attendent qu’un convoi leur libère la route, fascinée par le sujet si barbant la semaine précédente. La langue rend tout plus nouveau et plus agréable, comme si elle entendait enfin le texte tel qu’il a été écrit.
Ils approchent le mur d’albâtre de si près qu’elle a un instant l’envie de le toucher, avant de s’en éloigner, glissant dans les ruelles où les elfes s’écartent, clopinant dans celles où les hommes se ramassent tranquillement. Évidemment qu’elle ne dormira pas au Palais – personne dans sa famille n’a jamais été si noble… Ni O’Hara, ni O’Bearáin, ni ceux venus avant. Par chance, la curiosité retient la déception, même quand l’inconfort d’heures d’immobilité la privent de patience. Elle est à deux pâtés de maison de demander une pause quand ils s’arrêtent enfin, devant une façade qu’elle aurait, malgré la créativité de ses décors, du mal à reconnaître parmi les autres. (Elle apprendra. Elle apprendra à reconnaître beaucoup de choses.)
Sa tante est là, guettant à la fenêtre un instant, devant la porte ouverte le suivant, dissimulée par un rideau de dentelle dedans et un masque dehors.
Le masque disparaît sitôt la porte fermée, abandonné sur le meuble d’entrée, et elle découvre pour la première fois le visage de cette Irène tant attendue. Si différent de celui de sa mère – pourquoi ne le serait-il pas, alors qu’elle n’est qu’une cousine et que leur ancêtre commun remonte à plusieurs générations ? Elle a été déraisonnable d’attendre un air familier seulement parce que ses cheveux forment la même couronne rousse…
Andrasté lui pardonne. Elle n’est pas sûre d’aimer sa tante.
*
Sa suivante est son seul réconfort, oasis de silence au milieu du caquetage de ses tantes, gentilles mais tellement trop, tellement orlésiennes, tellement pas d’elle – mais en se baignant dans sa présence rassurante après des balades qu’à moitié reposantes, elle entend sa voix de plus en plus souvent, de plus en plus fort ; elle rit avec l’elfe orlésienne qu’on a envoyé l’aider, elle commente les robes, et rien n’est malvenu, mais tout est… différent. Ce n’est pas grave – si ce voyage permet de changer les idées d’autres filles qu’elle, elle s’en réjouit.
*
Orlaïs est une terre d’injustices, de rideaux couleur sang et d’étoiles enflammées, mais c’est avant tout une terre de musique, découvre-t-elle vite. Peu importe la qualité de la robe, si on ne sait danser, peu importe la richesse du masque, si on ne sait chanter. Elle a la chance d’échapper à l’un par son état et se prête suffisamment au second pour ne pas perdre la face, mais elle fuit le cœur des bals pour plus de sûreté ; des doigts glacés menacent de sortir des murs nus et des ombres des immenses tapis pendus, empêchant de s’effacer complètement, mais elle essaie, traçant le contour du parquet vernis de ses pas, parcourant les visages depuis l’extérieur ; les yeux, les bouches, les nuques dénudées qu’elle se sait pourtant incapable de reconnaître – la mode havenoise ne lui a guère laissé l’opportunité de les apprendre. Les masques cachent ce qu’elle aurait reconnu au premier coup d’œil, mais elle a toujours été perceptive – si les visages connus sont là, elle est certaine de les trouver. Elle l’espère autant qu’elle le craint, refusant les invitations prometteuses, acceptant celles qui le sont non moins, sans savoir ce qu’elle fera si ses attentes se réalisent.
Elle est chez elle. Elle n’y est pas. Sa famille lui manque. Elle rechigne à la retrouver. Elle aimerait que sa mère la borde comme avant, qu’on lui apporte son bébé à embrasser, que son père l’emmène pour une leçon de géographie en haut des remparts et que son mari la raccompagne ; elle aimerait ne jamais quitter les rues larges qu’elle a si vite appris, continuer d’entendre l’accent qui lui est devenu naturel, commencer chaque journée par la même balade champêtre. Starkhaven lui manque, elle aussi, parente au même titre que ses parents ; Orlaïs, qui a chanté son nom avec tant de ferveur à son arrivée, lui manquera-t-elle autant une fois partie, ou s’envolera-t-elle comme un rêve lointain ?
Elle est chez elle. Elle n’y est pas. Sa famille lui manque. Elle rechigne à la retrouver. Elle aimerait que sa mère la borde comme avant, qu’on lui apporte son bébé à embrasser, que son père l’emmène pour une leçon de géographie en haut des remparts et que son mari la raccompagne ; elle aimerait ne jamais quitter les rues larges qu’elle a si vite appris, continuer d’entendre l’accent qui lui est devenu naturel, commencer chaque journée par la même balade champêtre. Starkhaven lui manque, elle aussi, parente au même titre que ses parents ; Orlaïs, qui a chanté son nom avec tant de ferveur à son arrivée, lui manquera-t-elle autant une fois partie, ou s’envolera-t-elle comme un rêve lointain ?
*
– Je trouve ces soirées étonnamment tranquilles, pas toi ? Il suffit de trouver le bon coin, et on peut exister en paix. »
Les sourcils de sa tante désapprouvent visiblement.
– Ne t’en fais pas, je fais attention ! J’aimerais beaucoup dîner avec toi, d’ailleurs. »
Les soirées ne sont pas si fréquentes, d’ailleurs, entre celles qu’elle décline et celle qui ne l’invitent pas – « quelle réserve havenoise ! » rit sa tante quand elle entend l’excuse, attisant une fierté alors somnolente. Trop havenoise pour s’inviter là où le nom de ses bienfaitrices n’a pas suffi. Les semaines s’enchaînent et sa garde-robe diminue à vue d’œil, chantant la fin du séjour jusqu’à hurler ; chaque matin elle se dit qu’elle resterait bien encore un jour, mais le soir ses pensées appartiennent à Starkhaven et à sa famille.
Un dernier tour, et elle rentrera. Elle ne peut pas rester éternellement, étendre à l’infini ces mois qu’on lui a gracieusement prêtés…
Mélisandre O'Hara
Noble de Starkhaven
Personnage
Peuple : Humain
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Feuille
Joueur
Dim 27 Oct - 18:40
Garce. Folle. D’autres mots qu’elle ne devrait même pas penser mais que la panique lui impose. Enfermée dans sa chambre, le cœur battant plus forts que tous les coups à sa porte, elle ne laisse entrer personne, occupée à jeter maladroitement les robes dans sa malle, fébrile, désorganisée – ses colliers s’amoncellent dans la boîte à bijoux dans des hurlements stridents et des éclats hargneux, et quelques larmes s’échappent de ses yeux séchés par le froid qui a envahi ses os.
Elle a été imprudente. Orlaïs a été imprudente. Comment a-t-elle pu espérer que les rencontres seraient innocentes ? Que parce qu’elles étaient brèves, à peine de quoi s’appeler conversations, elles seraient sans conséquences ? Voilà ce qu’elle a gagné à titiller le dragon ; voilà où ses envies stupides l’ont amenée.
Seule entre quatre murs inconnus, incapable d’échapper à la haine des yeux noirs où elle cherchait la rage.
Là-bas, la fête doit encore vivre, si le duel ne l’a pas tuée avec son perdant. Dehors rien n’a changé, sauf pour elles et la domestique jetée aux loups – mais que pouvait-elle faire d’autre ? Sa simple vue la brûlait, pas comme celle du dragon, mais comme celle d’une chaîne trop serrée. Elle devait s’en défaire, pas pour l’honneur, mais pour la survie. Grand bien lui a fait – elle respire à peine mieux.
Quelques vers sournois grouillent sous la peur et la culpabilité, répétant des mots moins chauds, moins vivants ; pires, sûrement, parce qu’elle sait vivre avec la noirceur, la recherche même, mais cette grisaille sale et verdâtre lui est inconnue. Et insupportable. Si sa première réaction a été celle de scandale, comme tous les spectateurs, la seconde, qui dure et dure et dure et s’enfonce et dévore et dure, est la trahison, la déception, injustes toutes deux, mais trop profondément plantées pour être chassées.
Leurs vies suivent deux chemins parallèles. Leurs vies sont croisées en un vilain nœud où l’elfe s’en est mêlée. Le monde n’a plus de sens, entre ce qui est censé être et ce qui est, et elle n’a qu’une envie (deux envies), celle de retrouver les bras de son mari et tout oublier (elle n’oubliera pas).
Elle qui espérait tant qu’elles pourraient s’entendre, cette fois. Et la réalité qui est allée en son sens, se parant de traits si vifs, incomparable aux pâles rêveries de l’enfance.
Trois coups légers retentissent contre la porte, que cette fois elle entend. Qu’importe, elle n’ouvrira pas.
« Mademoiselle ?
– Madame, corrige-t-elle sèchement.
– Oui… Excusez-moi. C’est la comtesse. Pourrais-je avoir cinq minutes de votre temps ? Je suis désolée de vous déranger… »
L’embarras dans sa voix a presque l’air sincère. Poussant la valise défaite vers un mur, elle s’essuie les yeux, lisse sa robe – elle doit avoir l’air misérable, mais avec un peu de chance on mettra son état sur la colère – et entrouvre la porte. La gêne sur le visage comtal peinerait à faire plus vrai.
« Je suis navrée pour ce que mon fils a causé. Les mots me manquent pour… » Sa phrase se perd dans une grimace mal retenue. « J’aimerais vous présenter mes plus sincères excuses pour tout ce qui est arrivé. J’ai entendu dire que vous avez renvoyé la domestique en question…
– En effet. »
Entendu dire ? Plutôt entendu tout court. Elle devait y être, comme tout le monde.
Faites-en ce que vous voulez, a-t-elle envie de dire, qu’il l’épouse si ça lui chante – d’une logique tordue et instinctive, elle a la sensation que ça réparerait une partie des torts, alors que rien n’y prétend. Ça ne ferait que rejeter le blâme de l’homme infidèle à la fille facile, elle le sait – mais elle se sentirait plus libre, volée autant que celle qui a tout perdu. Un malheur qui rapproche. (Comme si elle en avait quelque chose à faire de perdre une domestique.)
« J’aimerais vous compenser pour votre perte, si vous le voulez bien… Un remplacement n’est jamais parfait, mais j’espère que vous l’accepterez au moins le temps de trouver une suivante davantage à votre goût. »
Pour la première fois, elle remarque l’elfe discrète derrière la large robe de la matrone, et elle blêmit. Non. Plus jamais. Puis un mécanisme rouillé s’agite en elle, la faisant reconsidérer – si Sibeal retrouvait un fiancé, et que la nouvelle le volait une fois de plus… ce ne serait peut-être pas si mal. Elle s’apprête à refuser, détestant l’idée d’une espionne orlésienne dans sa maison, mais quelque chose, entre son espoir désespéré, le regard absent de l’elfe, et le visage ravagé de regrets de la comtesse change son avis. La compagnie semble soudain plus que tolérable, souhaitée, et la peine de la mère irrésistible.
« Bien sûr. Je vous remercie pour votre sollicitude. »
Il manque des mots, la politesse en voudrait plus, mais pour une fois ceux-ci suffisent. Bientôt, elle est seule dans l’embrasure de la porte, face à la domestique, seule dans le couloir. Le tourbillon paniqué semble l’avoir déserté, ne laissant qu’une peur vide, et elle se recule d’un pas.
« Entre donc. Tu as un nom ? »
Elle a été imprudente. Orlaïs a été imprudente. Comment a-t-elle pu espérer que les rencontres seraient innocentes ? Que parce qu’elles étaient brèves, à peine de quoi s’appeler conversations, elles seraient sans conséquences ? Voilà ce qu’elle a gagné à titiller le dragon ; voilà où ses envies stupides l’ont amenée.
Seule entre quatre murs inconnus, incapable d’échapper à la haine des yeux noirs où elle cherchait la rage.
Là-bas, la fête doit encore vivre, si le duel ne l’a pas tuée avec son perdant. Dehors rien n’a changé, sauf pour elles et la domestique jetée aux loups – mais que pouvait-elle faire d’autre ? Sa simple vue la brûlait, pas comme celle du dragon, mais comme celle d’une chaîne trop serrée. Elle devait s’en défaire, pas pour l’honneur, mais pour la survie. Grand bien lui a fait – elle respire à peine mieux.
Quelques vers sournois grouillent sous la peur et la culpabilité, répétant des mots moins chauds, moins vivants ; pires, sûrement, parce qu’elle sait vivre avec la noirceur, la recherche même, mais cette grisaille sale et verdâtre lui est inconnue. Et insupportable. Si sa première réaction a été celle de scandale, comme tous les spectateurs, la seconde, qui dure et dure et dure et s’enfonce et dévore et dure, est la trahison, la déception, injustes toutes deux, mais trop profondément plantées pour être chassées.
Leurs vies suivent deux chemins parallèles. Leurs vies sont croisées en un vilain nœud où l’elfe s’en est mêlée. Le monde n’a plus de sens, entre ce qui est censé être et ce qui est, et elle n’a qu’une envie (deux envies), celle de retrouver les bras de son mari et tout oublier (elle n’oubliera pas).
Elle qui espérait tant qu’elles pourraient s’entendre, cette fois. Et la réalité qui est allée en son sens, se parant de traits si vifs, incomparable aux pâles rêveries de l’enfance.
Trois coups légers retentissent contre la porte, que cette fois elle entend. Qu’importe, elle n’ouvrira pas.
– Madame, corrige-t-elle sèchement.
L’embarras dans sa voix a presque l’air sincère. Poussant la valise défaite vers un mur, elle s’essuie les yeux, lisse sa robe – elle doit avoir l’air misérable, mais avec un peu de chance on mettra son état sur la colère – et entrouvre la porte. La gêne sur le visage comtal peinerait à faire plus vrai.
– En effet. »
Entendu dire ? Plutôt entendu tout court. Elle devait y être, comme tout le monde.
Faites-en ce que vous voulez, a-t-elle envie de dire, qu’il l’épouse si ça lui chante – d’une logique tordue et instinctive, elle a la sensation que ça réparerait une partie des torts, alors que rien n’y prétend. Ça ne ferait que rejeter le blâme de l’homme infidèle à la fille facile, elle le sait – mais elle se sentirait plus libre, volée autant que celle qui a tout perdu. Un malheur qui rapproche. (Comme si elle en avait quelque chose à faire de perdre une domestique.)
Pour la première fois, elle remarque l’elfe discrète derrière la large robe de la matrone, et elle blêmit. Non. Plus jamais. Puis un mécanisme rouillé s’agite en elle, la faisant reconsidérer – si Sibeal retrouvait un fiancé, et que la nouvelle le volait une fois de plus… ce ne serait peut-être pas si mal. Elle s’apprête à refuser, détestant l’idée d’une espionne orlésienne dans sa maison, mais quelque chose, entre son espoir désespéré, le regard absent de l’elfe, et le visage ravagé de regrets de la comtesse change son avis. La compagnie semble soudain plus que tolérable, souhaitée, et la peine de la mère irrésistible.
« Bien sûr. Je vous remercie pour votre sollicitude. »
Il manque des mots, la politesse en voudrait plus, mais pour une fois ceux-ci suffisent. Bientôt, elle est seule dans l’embrasure de la porte, face à la domestique, seule dans le couloir. Le tourbillon paniqué semble l’avoir déserté, ne laissant qu’une peur vide, et elle se recule d’un pas.
« Entre donc. Tu as un nom ? »
Mélisandre O'Hara
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Âge : 23 ans
Pronom.s personnage : elle
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Dim 27 Oct - 19:03
« T’es-tu bien reposée ? »
Le passé l’a prise dans ses bras avant ses parents, dès qu’ils ont passé les murs de la cité, chaud et accueillant comme la ville n’osait l’être, posant sur ses épaules le manteau qu’elle avait si négligemment laissé choir dans sa fuite ; sa peau en épousait encore chaque pli, comme si les derniers mois n’avaient pas eu lieu, la brume effaçant l’inutile égarement pour mieux cadrer la dame dans sa scène. Dans l’étreinte familière des remparts, elle avait oublié de se détendre, toute inquiétude envolée comme les perroquets volages d’hier, ne laissant derrière elle qu’une ombre amère que Cian remuait sans le savoir, soulevant un nuage de poussière avec le balai de ses mots – mais déjà ses bras empêchent les grains de se poser sur elle, et elle dessine le sourire qu’elle sait lui devoir. Il n’a pas besoin de savoir qu’il vient plus de son retour que de son repos, quoiqu’il puisse s’en douter – comme il n’a pas besoin de savoir qu’elle voit, changée malgré tout, dans les recoins que le manteau n’atteint pas, l’effort qu’il fait pour garder sa voix neutre. Lui en veut-il, après tout ? Ce séjour était en partie son idée, et elle s’est maintes fois assurée que la rancune ne l’accueillera pas en lieu de mari – s’est-elle trompée ? S’est-il trompé, lui ? Elle refuse d’y penser, laissant Starkhaven émousser les sens qu’Orlaïs a exigé, et met tout son cœur dans ses yeux, ne voulant rien perdre de cet instant. Elle est ici chez elle. Que le reste de nostalgie ne vienne pas gâcher ça.
« Oui, merci. Tout s’est bien passé ?
– De ce que j’en ai vu. Cait t’en dira plus. » L’agitation des bagages et leur propre passage impose un court silence, avant qu’il ne la tire de son examen – rien n’a vraiment changé et le bébé n’est nulle part – d’une voix qui, elle réalise soudain, lui a terriblement manqué. « Aisling fait la sieste à l’étage. J’ai déplacé son berceau dans sa chambre – ça ne te dérange pas ? J’ai pensé qu’il était temps.
– Oui, bien sûr. Elle dort la nuit ?
– Presque toujours. »
Ils échangent un regard empli de fierté, dans une complicité nouvelle. Elle ignore qui a le plus élevé l’enfant en son absence – elle aura tout le temps de l’apprendre une fois ses quartiers retrouvés – mais elle a la certitude qu’il ne l’a, au moins, pas fui.
L’envie la démange de la rejoindre, quitte à la réveiller, impérieuse ; ses bras ont fêté leur liberté, mais l’absence de poids y est soudain insupportable. Elle n’a plus été sans sa fille depuis – depuis jamais. Les bains d’une dizaine de minutes, passés à guetter les pleurs par-dessus le bruit hâtif de la brosse, les repas mangés à deux mains à regret, yeux plus souvent sur le berceau que sur l’assiette, l’abandon du bébé dans les bras parentaux ou étranger sans que jamais elle ne quitte la pièce, tout lui revient et la reprend. Sûrement s’en est-on bien occupé en son absence ; sûrement n’a-t-elle pas plus souffert qu’elle de l’éloignement. Mais elle est rentrée, maintenant, et l’envie de jeter le précieux paquet qui lui ronge la poitrine n’est plus.
Elle veut sa fille.
Heureuse réalisation.
« Tu as changé de dame de compagnie ? interrompt pourtant Cian, et son regard quitte l’escalier.
– Oui ! Je te présente Morphée. Elle parle déjà très bien le commun.
– Qu’est-il arrivé à l’ancienne… ?
– Elle a eu un empêchement. Je te raconterai plus tard. »
Retenue étrange, devant une domestique payée pour tout entendre, mais elle n’y peut rien – Morphée est encore trop humaine à ses yeux, et elle aime trop parler à son mari en privé. L’elfe n’en prendra sûrement pas ombrage, leurs échanges pendant la route l’assurent de son professionnalisme même si elle ne la connaît encore que peu ; comme elle sait qu’elle ne la jugera pas de s’approcher pour embrasser son mari. Presque en privé – ne sont-ils pas chez eux ? Au fond, elle n’est pas fâchée de retrouver le lit marital après presque six mois d’exil.
Orlaïs n’est plus qu’un lointain souvenir, tout au plus un rêve qui glisse le long de son dos pour l’empêcher de dormir. Elle s’en veut de laisser ses doigts glacés sous sa chemise de nuit, le torse collé à son dos encore trop loin pour les chasser. Elle est bien une fille de Starkhaven… seulement, le monstre l’est aussi.
Elle ferme les yeux contre la nuit, laissant les images passer comme des courants d’air.
Ça passera.
Le passé l’a prise dans ses bras avant ses parents, dès qu’ils ont passé les murs de la cité, chaud et accueillant comme la ville n’osait l’être, posant sur ses épaules le manteau qu’elle avait si négligemment laissé choir dans sa fuite ; sa peau en épousait encore chaque pli, comme si les derniers mois n’avaient pas eu lieu, la brume effaçant l’inutile égarement pour mieux cadrer la dame dans sa scène. Dans l’étreinte familière des remparts, elle avait oublié de se détendre, toute inquiétude envolée comme les perroquets volages d’hier, ne laissant derrière elle qu’une ombre amère que Cian remuait sans le savoir, soulevant un nuage de poussière avec le balai de ses mots – mais déjà ses bras empêchent les grains de se poser sur elle, et elle dessine le sourire qu’elle sait lui devoir. Il n’a pas besoin de savoir qu’il vient plus de son retour que de son repos, quoiqu’il puisse s’en douter – comme il n’a pas besoin de savoir qu’elle voit, changée malgré tout, dans les recoins que le manteau n’atteint pas, l’effort qu’il fait pour garder sa voix neutre. Lui en veut-il, après tout ? Ce séjour était en partie son idée, et elle s’est maintes fois assurée que la rancune ne l’accueillera pas en lieu de mari – s’est-elle trompée ? S’est-il trompé, lui ? Elle refuse d’y penser, laissant Starkhaven émousser les sens qu’Orlaïs a exigé, et met tout son cœur dans ses yeux, ne voulant rien perdre de cet instant. Elle est ici chez elle. Que le reste de nostalgie ne vienne pas gâcher ça.
« Oui, merci. Tout s’est bien passé ?
– De ce que j’en ai vu. Cait t’en dira plus. » L’agitation des bagages et leur propre passage impose un court silence, avant qu’il ne la tire de son examen – rien n’a vraiment changé et le bébé n’est nulle part – d’une voix qui, elle réalise soudain, lui a terriblement manqué. « Aisling fait la sieste à l’étage. J’ai déplacé son berceau dans sa chambre – ça ne te dérange pas ? J’ai pensé qu’il était temps.
– Oui, bien sûr. Elle dort la nuit ?
– Presque toujours. »
Ils échangent un regard empli de fierté, dans une complicité nouvelle. Elle ignore qui a le plus élevé l’enfant en son absence – elle aura tout le temps de l’apprendre une fois ses quartiers retrouvés – mais elle a la certitude qu’il ne l’a, au moins, pas fui.
L’envie la démange de la rejoindre, quitte à la réveiller, impérieuse ; ses bras ont fêté leur liberté, mais l’absence de poids y est soudain insupportable. Elle n’a plus été sans sa fille depuis – depuis jamais. Les bains d’une dizaine de minutes, passés à guetter les pleurs par-dessus le bruit hâtif de la brosse, les repas mangés à deux mains à regret, yeux plus souvent sur le berceau que sur l’assiette, l’abandon du bébé dans les bras parentaux ou étranger sans que jamais elle ne quitte la pièce, tout lui revient et la reprend. Sûrement s’en est-on bien occupé en son absence ; sûrement n’a-t-elle pas plus souffert qu’elle de l’éloignement. Mais elle est rentrée, maintenant, et l’envie de jeter le précieux paquet qui lui ronge la poitrine n’est plus.
Elle veut sa fille.
Heureuse réalisation.
« Tu as changé de dame de compagnie ? interrompt pourtant Cian, et son regard quitte l’escalier.
– Oui ! Je te présente Morphée. Elle parle déjà très bien le commun.
– Qu’est-il arrivé à l’ancienne… ?
– Elle a eu un empêchement. Je te raconterai plus tard. »
Retenue étrange, devant une domestique payée pour tout entendre, mais elle n’y peut rien – Morphée est encore trop humaine à ses yeux, et elle aime trop parler à son mari en privé. L’elfe n’en prendra sûrement pas ombrage, leurs échanges pendant la route l’assurent de son professionnalisme même si elle ne la connaît encore que peu ; comme elle sait qu’elle ne la jugera pas de s’approcher pour embrasser son mari. Presque en privé – ne sont-ils pas chez eux ? Au fond, elle n’est pas fâchée de retrouver le lit marital après presque six mois d’exil.
Orlaïs n’est plus qu’un lointain souvenir, tout au plus un rêve qui glisse le long de son dos pour l’empêcher de dormir. Elle s’en veut de laisser ses doigts glacés sous sa chemise de nuit, le torse collé à son dos encore trop loin pour les chasser. Elle est bien une fille de Starkhaven… seulement, le monstre l’est aussi.
Elle ferme les yeux contre la nuit, laissant les images passer comme des courants d’air.
Ça passera.
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