Le Deal du moment :
Cartes Pokémon : la prochaine extension ...
Voir le deal


Un simple moment de détente - Miche

Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteCHAPITRE TROIS : ILS S'ELEVERONT QUAND S'ANNONCERA LA CHUTE

Type de RP Rp discussion et détente
Chapitre concerné Chapitre 3
Date du sujet 1 Floraison 5:13 des Exaltés
Participants  @Miche et @Dorne Wiergender
TW Alcool, drame et tragédie familiale, amour abusif, mention de chantage affectif
Résumé Partie pour une nouvelle escapade en dehors de la demeure de son épouse, Dorne se dirige vers Goldhead dans l’optique de trouver de nouvelles provisions pour les nécessiteux. Mais alors qu’il commence à chercher les marchands habituels, il repère une forme qu’il n’a pas vue depuis un long mois… Miche, son sauveur.
Pour le recensement


Code:
[code]<ul><li><en3>1 Floraison 5:13 des Exaltés</en3> : <a href="https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1827-un-simple-moment-de-detente-miche">Un simple moment de détente</a></li></ul><p><u>@"Miche" et @"Dorne Wiergender".</u> Partie pour une nouvelle escapade en dehors de la demeure de son épouse, Dorne se dirige vers Goldhead dans l’optique de trouver de nouvelles provisions pour les nécessiteux. Mais alors qu’il commence à chercher les marchands habituels, il repère une forme qu’il n’a pas vue depuis un long mois… Miche, son sauveur. </p>[/code]

Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteSe séparer pour mieux se retrouver

C’était incroyable à quel point sa femme pouvait être têtue. Alors que Dorne faisait tout son possible pour aider les personnes dans le besoin dans les Faubourgs ou certaines zones difficiles, alors qu’il se donnait corps et âme à une tâche noble et altruiste, il ne recevait que multitudes de critiques. A quoi bon aider ceux qui ne t’apporteront rien? Disait-elle à chaque départ. Encore une journée de gâcher! Disait-elle à chaque retour. C’est sûr, elle faisait sûrement bien mieux à dilapider son temps et l’argent de leurs familles respectives dans des repas mondains de la Haute. Même si le fils Wiergender en avait fait quelques-uns par effort pour nouer un véritable lien, difficile de comprendre ce que ça pouvait apporter hormis de l’hypocrisie et des ennuies futures. Enfin, il lui était tout de même bien plus facile, à présent, de lui tenir tête. Elle commençait à se faire loin, l’époque où la simple présence d’Edana le faisait trembler comme une vulgaire feuille. Après tout, c’est ce qu’il avait été une longue partie de sa vie. Quelque chose de fragile, facilement brisé et qui est emportée à la moindre secousse. Mais non, plus maintenant. Ce serait grandement exagéré d’insinuer que l’érudit était devenue un robuste et solide arbre de par son innocente façon d’être, ou même par son gabarit des plus fragiles. Mais il se sentait tout de même plus proche d’une jolie plante, commençant enfin à prendre racine.

Le noble n’aidait pas contre l’Enclin de la façon dont il l’avait initialement pensé, mais allons bon! Aider le peuple, quel que soit les moyens n’étaient-elle pas sa devise? Alors si leur apporter de la nourriture, fournir de la soupe, et se fatiguer à la tâche permettait d’améliorer la vie des gens en difficultés… Alors il n’y avait aucune honte à emprunter ce passage là plutôt que celui de l’enquête trop poussée et dangereuse. Après tout, Dorne s’en était bien plus souvent sorti avec des soucis que l’inverse. Et finalement, toute cette façon de faire. Cette nouvelle façon d’agir… Il le devait à une personne. Cet inconnu connaissant aussi bien le Névarran que lui-même. Cet inconnu qui lui avait sauvé la vie lorsque son heure était sûrement arrivée. Cet inconnu qui lui avait donné un précieux conseil qui lui trottait dans la tête et qui était devenu un cap. Miche. Difficile de savoir ce qu’il devenait d’ailleurs… Oui bien entendu son protecteur d’une nuit lui avait dit de le demander au Laurier Carmin, s’il voulait le revoir, mais… Le Laurier, vraiment? Le lieu était un poil trop inconfortable pour le noble qui avait en plus un très mauvais souvenir de ce qu’il avait subi juste à côté. Et hormis cela… Aucune chance de le croiser par hasard au détour d’une rue, si seulement le fils Wiergender était seulement capable de se rendre compte de ce qu’il se passait autour de lui.

Peut-être qu’un jour, quand le courage sera plus puissant chez Dorne, ou si la chance portait ses fruits, le reverrait-il. Mais pour l’heure, sa mission habituelle l’attendait. Le lieu qu’il devait rejoindre? Goldhead. Après tout, difficile de trouver de meilleurs produits à un coût parfait autre part que dans une zone marchande. Il ne fallut pas longtemps avant d’atteindre le secteur avec son cheval. Wolkenfrei. Un fidèle destrier qui connaissait par cœur le chemin à force de l’emprunter. Attachant sa monture, il ne fallut pas longtemps pour l’érudit de se diriger ensuite vers les marchands qu’il avait l’habitude de croiser et chez qui il était facile d’acheter à bon prix certaines choses. Un rapide tour, quelques achats, un nouveau tour et… Il ne fallut pas bien longtemps avant que le premier sac ne s’alourdisse considérablement. Au moins commençait-il à ressentir un minimum de muscles au niveau de ses bras à force de soulever autant d’aliments aussi lourds que variés.

Pourtant, alors qu’il projeta son regard vers une nouvelle destination commerciale, quelque chose perturba la rétine du jeune Névarran. Comme s’il avait reconnu… Quelqu’un. Cherchant alors ce qui avait pu ainsi le perturber, il fallut un moment avant que le cerveau ne percute convenablement. Mais oui bon sang. Forcément que, entre une pleine journée et la nuit, la perspective que l’on pouvait avoir de quelqu’un serait différente. Encore plus sur le fait qu’il n’allait pas porter la même tenue que la dernière fois. Mais cette aura forte, ce gabarit de protecteur, ce visage fermé… Il aurait fallut être le dernier des aveugles pour ne pas reconnaître Miche.  Souhaitant faire un saut de joie de retrouver quelqu’un qu’il voulait revoir depuis longtemps, le principe de gravité et de poids rattrapa rapidement le fils Wiergender qui faillit lâcher son sac de courses par surprise, ce qui aurait sans nul doute été profondément fâcheux pour les nécessiteux de recevoir quelques produits abimés. Mais voilà, sa “cible” avançait dans une toute autre direction, et avec la foule, si le jeune homme voulait pouvoir parler de nouveau à son sauveur, il devait faire vite. Soulevant de toutes ses forces son sac pour le mettre derrière son épaule comme un baluchon, c’est avec une marche rapide qu’il se dirigea vers Miche.

Il fallait garder les yeux droit sur lui, ne pas le perdre. Esquiver les autres citoyens. Marcher plus vite. Le souffle le manquant presque, commençant sans nul doute à devenir légèrement rouge, il fallut que quelque minutes pour Dorne d’arriver non loin de la personne qu’il poursuivait. Quand il déplaça son sac de provision de son dos à devant lui, il lança alors d’une voix forte et assurée :

- Miche! C’est un immense plaisir que de vous revoir! J'espère que vous ne m'avez pas oublié!

Portant le sac de la main gauche, faisant un signe de main de la droite, affichant son sourire presque enfantin dans la direction de son sauveur, souffle un peu plus fort pour récupérer de ce court et intense effort, le hasard ou bien le Créateur semblait enfin lui avoir souri pour avoir mit sur son chemin une personne qu’il considérait comme importante.

Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente

Aujourd’hui, j’ai décidé de donner un petit coup de main à Seamus. Je le fais de temps en temps, parce qu’il y a tant à gérer, et que je n’ai que ça à faire en-dehors du travail. Je suis donc parti, panier à la main, pour faire quelques courses non loin sur la place. Quelques fleurs pour la décoration, des plantes médicinales ou aromatiques, en fonction des besoins. Je parcours les stands, bavarde rapidement avec les marchands que je vois de plus en plus régulièrement, glisse une petite phrase coquette à l’herboriste dont ses yeux sont sans équivoques, jeune femme qu8i glousse discrètement après mon passage. Une journée normale, bien remplie.

Ce que je me garde de montrer en revanche, c’est que, parmi toutes ces fleurs d’un rouge vibrant ou d’un pourpre sensuel, y loge un petit bouquet de lys blancs. Bête tâche dans une telle composition, comme un tableau qui manque de peinture dans un petit coin. C’est pour moi, à vrai dire : petit geste éphémère pour des souvenirs lointains. Je me rappelle encore de ces jardins sauvages dans lesquels nous allions, qui en débordaient, .. Une façon que j’avais d’honorer mon passé, d’en faire le deuil.

Mais voilà que depuis quelques mois, la lueur qui les transcende au réveil n’est plus la même. Voilà que le sourire lumineux qu’elles m’évoquent avec douleur et mélancolie s’est vu changé, plus timide, plus âgé. Voilà que depuis quelques mois, Dorne est ici, que je l’ai retrouvé dans ces ruines de vie que je traîne à présent. Et voilà que depuis quelques mois, un doute déchirant m’envahit, à chaque pensée pour ce garçon. Que faire ? Lui dire la vérité, ou garder sa vie en un seul morceau ?

Mais voilà que le Créateur, une fois de plus, en sa qualité de vieux cynique, déploie son humour toujours plus tordu.

- « Miche! C’est un immense plaisir que de vous revoir! J'espère que vous ne m'avez pas oublié! »

Je redresse la tête, pris au dépourvu, et balaie les alentours, priant étrangement pour une bête hallucination de ce cerveau à moitié fonctionnel. Mais il est bien là : lourdement chargé, il me fait un geste de la main, reprenant visiblement son souffle. Occupé à ranger ce bouquet de lys blancs, je prie pour qu’il ne remarque pas. Mais malgré la terreur et les questions qui assaillent mon esprit continuellement depuis des mois, un sourire se dégage, tandis que je lui renvoie son geste avec une certaine mollesse.

- « Tiens, salut petit. »

Evidemment que je ne t’ai pas oublié. Comment aurais-je pu ?

Quelque chose a cependant changé, dans son attitude. Curieux, je m’approche, panier en main, tendant l’autre pour le saluer d’une poignée de mains.

- « Eh bien eh bien, regardez-moi ça. J’ai l’impression que t’as plein de choses à me raconter, depuis la dernière fois. »





"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteSe séparer pour mieux se retrouver



La réaction de Miche fût... Amusante, aux yeux de Dorne. S'il espérait un jour prendre au dépourvue quelqu'un d'aussi imposant et menaçant que son sauveur, il ne l'aurait jamais crue! Généralement, la seule personne qu'il prenait au dépourvu... C'était lui même. Il aurait bien fait une observation sur cela, mais il se tût, attiré par la précipitation de son nouvel interlocuteur, ce dernier cachant rapidement un étrange bouquet de fleurs aux couleurs bien distincte. Si habituellement le fils Wiergender n'était pas capable d'assimiler des informations quand ça touchait des individues, lorsque cela concernait d'autres éléments, et qu'en plus il était éveillé et non pas dans ses pensées, il devenait bien plus difficile à berner par une feinte. Au milieu du rouge, au milieu du mauve, il y avait du blanc. Petit bouquet de Lys ressortant d'une plus grande composition, petit bouquet d'un souvenir vif et aussi éblouissant que ces délicates fleurs. Petit bouquet, mémoire de jardins des temps anciens. Ressentant son cœur manquer un battement, il entrouvrit légèrement la bouche d'une surprise. Allons, ça ne pouvait qu'être une coïncidence, le lys blanc était une magnifique fleur après tout.  Mais des coïncidences, vis à vis de cet homme qui était normalement un étranger... Il y en avait peut-être beaucoup actuellement.

Reprenant un air attentif face au sourire et au signe de main de son interlocuteur, l'érudit aurait pût sauter de joie s'il n'était pas aussi lourdement chargé. Miche ne semblait pas quelqu'un qui souriait beaucoup. Ni qui semblait respirer la joie de vivre. Alors obtenir ce petit sentiment de bonheur par un geste pourtant si simple qu'un sourire était une joie négligeable. Dans la vie, il fallait parfois se satisfaire de toute les victoires possibles non?

- « Tiens, salut petit. »

Qu'il lui répondit, son sauveur. Petit? Face à ce diminutif, le jeune Névarran vint à se gratter la tête en affichant une mine prouvant qu'il était pris au dépourvu lui aussi. Sans savoir réellement pourquoi il réagissait ainsi. Enfin, si, il le savait. Se surnom la, on ne lui avait pas sorti depuis longtemps. Depuis... Son enfance en faite. Sûrement le terme le plus affectueux qu'il pouvait recevoir en règle général comme il n'en avait jamais réellement reçu de ses parents. Hormis fils, comme ses parents l'appelaient en règle général Dorne comme si jamais un semblant d'amour n'avait transpiré de ses géniteurs. Bah, il n'allait pas tergiverser intérieurement sur quelque chose d'aussi futile alors qu'il était face à son sauveur, et surtout l'homme qui lui avait donné l'un des meilleurs conseils possible pour relancer un minimum sa vie! Alors qu'il sortait entièrement de ses pensées, Miche s'était déjà bien rapproché de lui, tendant une fière poignet de main, sûrement pour la serrer comme de véritables salutations.

- « Eh bien eh bien, regardez-moi ça. J’ai l’impression que t’as plein de choses à me raconter, depuis la dernière fois. »

Fût une phrase qui frappait définitivement juste. Oui, il avait plein de choses à raconter car il y avait plein de choses qui avaient changés. Enfin, pas dans des quantités incroyable, il fallait savoir doser les choses, mais pour le fils Wiergender cela restait des pas de géants dans bien des domaines. Tendant à son tour sa main, il vint agripper celle de son sauveur, avant d'agiter de bas en haut son bras avec douceur. Après tout, on ne refaisait pas la gentillesse d'une personne insouciante comme Dorne.

- Oh, vous n'avez pas idée! Je n'aurai jamais crue voir ma vie changer ainsi positivement! Et cela, grâce à votre précieux conseil! J'ai essayé d'apprendre à connaitre cette ville, et ces gens. Les marchands, les démunis... J'ai commencé à faire mes propres routines! Et ça, c'est sans compter les personnes, comme vous, incroyable que j'ai rencontré!

Continuant d'agiter son bras de haut en bas tout en parlant, le regard de l'érudit se posa sur son mouvement qu'il devait sûrement avoir un peu trop longtemps maintenue, le stoppant net dans les aires avant de lâcher la main de Miche, légèrement honteux. Bon sang, il arrivait un peu mieux à gérer les contactes physiques, mais ne pas passer pour un imbécile quand il essayait de se faire passer pour un individu habitué à tout cela, c'était pas gagné. Soupirant délicatement pour reprendre son sérieux et ses esprits, le souvenir du lys revint en force dans son cerveau. Oui, les fleurs... Cet homme... Et si... C'était plus qu'un énième hasard?

- D'ailleurs... Je vous pris de m'excuser quand à ma curiosité mais... Pourquoi avoir caché votre bouquet de fleurs? Du lys blanc en plus non? Très bon choix, vraiment. ça me rappel beaucoup de choses... Je ne risque pas de vous les manger vous savez! Je préfère les fruits, c'est plus comestibles je trouve.

Fini alors Dorne, sur ses paroles, avec une certaine pointe d'humour qu'il essayait de développer. Son sourire enfantin toujours affiché sur son visage. Bien qu'intérieurement, c'était la réponse de son interlocuteur qu'il attendait avec une certaine impatience. C'est vrai que cette action était légèrement mystérieuse. Finalement, un peu comme Miche. Mais au fond, il espérait ne pas fouiller de trop avec ce genre de question au risque d'ennuyer ou peut-être même de blesser l'homme qu'il considérait comme importante. Il était déjà une déception pour sa famille, pas besoin d'être une blessure pour ses amis.

Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente

la lueur dans ses yeux dansent, change de couleur en fonction de l’angle. Un coup la joie, un coup la surprise, un coup .. merde. Remontant le fil de cette conversation qui commence à peine, j’ai laissé filer un mot bien traître. “Petit”. Je peux cacher ce débordement derrière une coïncidence, mais jusqu’à quand cette mascarade tiendra-t-elle la route ?

Mais je suis content de le revoir. Il tient bon.

La poignée de main que je propose est des plus maladroites, aussi. En même temps, je dois prétendre ne pas savoir, donc .. Donc finalement ce n’est pas si mal. Même si je sais qu’il ne s’y attardera pas, ou se sentira fort mal à l’aise de le faire ou non. Je prends sur moi cette culpabilité de lui infliger ça, mais qu’est-ce que j’y peux ?

Ma surprise fut donc des plus grandes et des plus ravies quand je sens sa main s’emboîter dans la mienne sans la moindre hésitation. C’est bête quand on y pense. Un geste si simple, si commun, ça ne devrait pas me mettre dans des états pareils. Sa poigne est correcte, son mouvement est aussi doux que fluide. Ce n’est pas une tentative de convaincre, de faire le bonhomme, c’est simplement lui. Une brume tenace de fierté recouvre mes sens, l’espace d’un temps. J’en oublie même qu’il me parle. Un sourire attendri s’échappe, tandis que j’observe son geste.

Je me rappelle encore de ces étreintes, qui ont laissé place petit à petit à la terreur. Terreur que je n’ai jamais pu chasser.

- « Oh, vous n'avez pas idée! Je n'aurai jamais crue voir ma vie changer ainsi positivement! Et cela, grâce à votre précieux conseil! J'ai essayé d'apprendre à connaitre cette ville, et ces gens. Les marchands, les démunis... J'ai commencé à faire mes propres routines! Et ça, c'est sans compter les personnes, comme vous, incroyable que j'ai rencontré! »

Le petit s’épanouit. C’est bien.

Son geste s’arrête cependant, dans une espèce de gêne. Je me racle la gorge, en profite pour me ressaisir également. Sa main lâche la mienne, mais plus par embarras de s’être trop attardé que de réel malaise. Mais quelque part, savoir qu’il juge que c’est grâce à moi ne me laisse pas indifférent. Je me frotte la nuque, le regard égaré, pensif.

- « Oh allons, je n’ai pas fait grand-chose. Ravi d’apprendre que ça va mieux. »
- « D'ailleurs... »

Merde.

- « Je vous pris de m'excuser quand à ma curiosité mais... Pourquoi avoir caché votre bouquet de fleurs? Du lys blanc en plus non? Très bon choix, vraiment. ça me rappel beaucoup de choses... Je ne risque pas de vous les manger vous savez! Je préfère les fruits, c'est plus comestibles je trouve. »

Merde merde merde.

Je pousse un soupir, glisse un regard auprès de mon panier bien garni. Des couleurs dans tous les sens, et en son centre, un bien humble bouquet. Tous les prétextes sont bons pour tenter d’esquiver le sujet, mais combien de temps je vais tenir dans cette posture ?

- « Oh c’est pour .. c’est pour un proche. »

Techniquement, je ne mens pas. Mais je ne m’attarde pas longtemps sur mes achats, chassant le sujet désagréable pour focaliser sur autre chose.

- « T’es bien chargé toi par contre. J’imagine que c’est pour ta fameuse routine ? »

J’observe les alentours, en quête d’un échappatoire, ou d’un meilleur endroit pour discuter tranquillement. J’effectue un geste du pouce en direction d’une taverne non-loin.

- « Si t’as le temps et l’envie, on peut aller boire un coup. Bien mieux que de discuter dans une foule. »





"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteSe séparer pour mieux se retrouver



- « Oh allons, je n’ai pas fait grand-chose. Ravi d’apprendre que ça va mieux. »

Une des choses que trouvait amusant le jeune Dorne, c'était la modestie des gens de biens. Enfin, des gens qu'il considérait comme étant bon. Accomplir un acte qui pouvait changer la vie de quelqu'un? Accomplir une action héroïque pour sauver la veuve et l'orphelin? Et pourtant, ils agiront toujours comme si finalement, c'était peu. Oh, bien entendu, certains profitaient de cela plus pour se mettre en avant, mais pour Miche... Non, aux yeux du Névarran, ce type la n'était pas ainsi. Alors oui, il faisait bourrue. Alors oui de premier abord sans le connaitre il faisait peut-être un peu peur car s'il décidait de vous mettre une torgnole vous repartiriez sûrement avec une dent en moins... Mais il semblait vraiment avoir un bon cœur. Et cela embêta encore plus le fils Wiergender que de voir ainsi son sauveur gêné après la question sur les fleurs. Soupir, regard qui se déplace. Phrase évasive parlant de quelque chose de personnel. Bravo, Dorne, pensa l'érudit, l'impression alors d'avoir quelque peu mis mal à l'aise Miche avec une question probablement indiscrète. C'était juste... Que le garçon souhaitait en savoir plus sur son sauveur, comme on chercherait normalement à en apprendre plus sur quiconque tourne un peu dans sa vie! Mais... A chaque question un poil profonde, la réponse était soit rapide, soit évasif.

- Oh... Je vois... Cette personne sera sans nul doute ravie de recevoir quelque chose d'aussi beau.

Bah, pas grave. Tout le monde n'était pas obligé de s'ouvrir, le principal, c'était qu'ils aillent bien... Et leur monde avec, non? Fermant cette parenthèse en essayant d'être le plus respectueux possible, Dorne affichait simplement un délicat sourire en fermant les yeux pour faire paraitre son visage plus lisse. Bon, on y voyait bien facilement encore les traces de cernes assez typiques du jeune homme qui veillait tard à lire et étudier, ainsi que la fatigue de celui qui travaillait pour aider les gens, mais l'innocence derrière tout cela? C'était quelque chose qui ne comptait pas bouger, jamais.

- « T’es bien chargé toi par contre. J’imagine que c’est pour ta fameuse routine ? »

Le fils Wiergender ouvrit doucement les yeux, battant rapidement des cils comme s'il ne comprenait pas la question avant de poser son regard sur son sac remplit. Oh oui! Pendant un court instant l'érudit avait totalement oublié, bien trop pris sur ce moment sympathique avec Miche. Reposant son regard sur celui de son interlocuteur, il reprit alors la parole avec une certaine joie dans sa voix, même, une certaine fierté.

- Exactement! J'ai décidé d'aider les plus démunis de la ville et du Faubourg! Quand ma charmante épouse me laisse suffisamment de moyens, je pars faire des courses. Pour leur donner. Ou faire de la soupe parfois avec la Chantrie... Pour améliorer un peu le quotidien vous voyez?

Toujours le petit sourire délicat et innocent. C'était sûrement quelque chose de simple à faire, mais c'était sa petite fierté ces quelques moments d'entraides. Voir des gens sourires, voir des gens qui pourraient avoir enfin à manger après tant d'attentes pour quelques familles. Ou juste améliorer un repas très rustique. Les connaissances c'était bien, aider les gens avec encore mieux. Mais au fond, le principal, c'était de les aider tout court.

- « Si t’as le temps et l’envie, on peut aller boire un coup. Bien mieux que de discuter dans une foule. »

La proposition était... Pas inattendu, mais frappante. Pour Dorne, une telle proposition était si... Rare. Rare? Finalement, pire que ça, est ce que ça lui était déjà arrivé qu'on l'INVITE à boire et discuter? Oh, dans un sens si, les nobles mais... C'était souvent dans des discussions hypocrites où tout le monde s'invitait autour de X ou Y stupidités mondaines. En d'autres termes, l'horreur. Mais la, c'était une proposition amicale, par quelqu'un de confiance, de façon simple sans rien en retour que de passer un moment de détente. Comment refuser?

- Oh, j'ai tout le temps qu'il faut! De toute façon, hélas, je ne pense pas que la pauvreté disparaisse le temps d'une boisson...

S'exprima t'il, une moue légèrement triste sur le visage. Quoi qu'il fasse, ça ne diminuait pas, et ça ne diminuerait pas vraiment. Il fallait changer les choses plus en profondeur, plus de moyens, de forces. Mais ça, il n'en était pas capable, alors autant au moins améliorer un peu les choses. Quoi qu'il en soit, observant la direction pointé par son sauveur, Dorne hocha la tête avec panache avant de s'y diriger en premier, faisant signe à Miche de le suivre.

- En parlant de boisson, je m'y connais un peu plus maintenant! J'ai décidé de... Faire un effort avec Edana, vous comprenez?

Commença t'il à expliquer, affichant une mine assez fier de lui comme un enfant pensant changer le monde.

- J'ai dépensé un peu de ma fortune en vendant des livres précieux pour lui acheter des bijoux et de belles robes. J'ai accepté de venir à des dîners mondains ou des fêtes avec elles... Et j'ai eu l'occasion de toucher à un peu plus de vins. Et de breuvages alcoolisés! C'est délicieux franchement, surtout bien accompagné niveau repas!

Un léger rire s'échappe de la bouche de Dorne, mi amer mi sincère.

- Je prendrai sûrement les choses d'une bien meilleur façon si je n'avais pas l'impression d'être un chiot récompensé car il sait remuer la queue.

Si le sac qu'il tenait n'était pas aussi lourd, il sautillerait sûrement, le coeur léger, comme si rien ne pouvait lui arriver de négatif en cette douce journée. Puis de toute façon, pourquoi quelque chose de négatif arriverait? Il faisait beau, il était en bonne compagnie, sa journée prévoyait une bonne action et ce soir il passerait sûrement un repas solitaire pour décompresser un peu.

- Oh, d'ailleurs, en parlant de choses positives ou extraordinaire!

Dit-il, s'arrêtant d'un coup avant de se retourner, l'air aussi surpris qu'heureux, ne se rendant même plus compte qu'il monopolisait sûrement beaucoup trop la parole de par sa joie.

- J'ai enfin reçu une lettre de ma famille! En... Euh... Six mois, je crois? Et la chose la plus extraordinaire? La signature, sur la lettre... C'était marqué "Ta chère et tendre"

Une certaine fierté se lisait sur le regard de Dorne, comme si son monde était finalement devenue quelque chose de bien plus merveilleux à regarder.

- D'habitude, elle signe toujours d'un froid "Frieda Wiergender". Au début j'ai crue qu'elle s'était trompée de destinataire et que le tout était prévue pour Siegfried, mais il y avait bien quelques fois mon noms marqués dessus! Et pas celui de mon frère! Si je me souviens bien, la dernière fois que j'ai eu le droit à un "chère et tendre" de sa part c'était... C'était...

Jamais.

Non.

Jamais.

Le regard du jeune homme s'éteignit presque quelques secondes après avoir arrêté de parler, se rendant compte de l'absurdité de la situation. Quel parent était aussi froid avec son enfant? Réalisant d'un coup que ce n'était pas possible, il y avait quelque chose de bizarre dans cette lettre. Pourquoi maintenant? Pourquoi d'un coup d'un seul elle le considérait comme son enfant et pas comme un objet à vendre comme d'habitude? La désillusion frappa si fortement le fils Wiergender qu'il se senti un instant destabilisé", le coeur serré, les larmes qui semblaient monter légèrement. En rentrant, il relirait la lettre... Un détail lui avait sûrement échappé, c'était obligé...Après tout, elle n'avait pas précisée réellement qui était le destinataire réel de la lettre. Sûrement Edana, elle, sa mère l'aimait bien. Qui d'autre, sinon? Pour faire bonne figure, il se tourna d'un coup, de nouveau vers la taverne, reprenant avec une voix un peu plus étouffée.

- Euh, c'est pas important, je suppose que c'est comme ça dans toute famille Névarran, ne pas montrer trop de sentiments hein? Haha, des durs à cuirs, les Névarrans... Oui... Sûrement ça... Jamais montrer de sentiments...

Passant une main dans ses cheveux toujours aussi peu entretenue, le jeune Dorne se gratta le crâne, comme à son habitude lorsqu'il était déstabilisé gardant finalement le silence, un visage ayant perdu de nouveau son sourire. Finalement, sa journée venait de virer d'un coup. Il prendrait sûrement un deuxième verre, voir un troisième...

Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente

Sa remarque sur les fleurs me passe volontairement au-dessus de la tête. Je préfère ne pas y penser. D’autant plus que le deuil est à présent paradoxal, bien étrange à gérer. Côtoyer ce qui était et ce qui est toujours à la fois. Une drôle d’impression.

Je redirige la conversation sur lui, mais ne peux m’empêcher de constater la douce bienveillance muette qui flotte sur son visage. Telle la modeste lumière qu’émet la lune au cœur des ténèbres nocturnes, qu’elle soit pleine ou à peine perceptible. Une douceur qui rassure, qui redonne espoir et, à bien y réfléchir, qui peut s’éteindre tout aussi abruptement. Ai-je seulement envie d’en arriver là ? Non. Et je commence à songer qu’en effet, j’ai bien fait de me taire.

J’attends avec patience qu’il revienne parmi nous, et à en juger de son regard soudainement hyperactif et pris de court, le voilà de retour.

- « Exactement! J'ai décidé d'aider les plus démunis de la ville et du Faubourg! Quand ma charmante épouse me laisse suffisamment de moyens, je pars faire des courses. Pour leur donner. Ou faire de la soupe parfois avec la Chantrie... Pour améliorer un peu le quotidien vous voyez? »

Ce ne sont pas uniquement ses actions qui élargissent mes lèvres sans réelle retenue. Du fait qu’il fait tant de choses, désormais, qu’il se donne les moyens pour l’accomplir, c’est surtout cette fierté et cette motivation si palpables qui me secouent un peu. Il a fait tant de chemin en si peu de temps. Le petit est grand, à présent. Et en forme. C’est rassurant.

On dirait bien que sa vie ne peut pas aller mieux que maintenant.

- « C’est super comme initiative. ça peut te sembler peu, mais l’essentiel est de commencer quelque part. »

L’humanitaire est toujours des plus décourageants, car on aspire à sauver le monde. Or, le monde ne peut jamais être sauvé, en particulier seul. Drôle de deuil que de se dire qu’on n’est pas la moindre divinité, et que les miracles nous échappent sans cesse. Mais chaque petit pas, si fait collectivement, nous rapproche de notre destination.

Dorne est une pipelette. Et du peu qu’il m’a été donné de voir, je sais qu’il a énormément de choses à raconter. Ainsi, l’idée de l’inviter à boire un coup ne me paraît pas si lunaire, une simple petite pinte, rien de bien dramatique. Et à constater son humeur actuelle, la conversation ne peut que bien se passer. N’est-ce pas ?

- « Oh, j'ai tout le temps qu'il faut! De toute façon, hélas, je ne pense pas que la pauvreté disparaisse le temps d'une boisson… »

Mais son enthousiasme à l’idée de boire un verre avec moi l’emporte déjà en direction de la taverne. Ses yeux sont rayonnants, inondés de malice et de pure bonne humeur. Comment résister à un tel état d’esprit ? Son attitude est contagieuse, il faut dire, et je le suis d’un pas discret, comme à mes habitudes. Et le revoilà à la charge, impatient de m’inonder d’anecdotes et d’histoires palpitantes.

- « En parlant de boisson, je m'y connais un peu plus maintenant! J'ai décidé de... Faire un effort avec Edana, vous comprenez? J'ai dépensé un peu de ma fortune en vendant des livres précieux pour lui acheter des bijoux et de belles robes. J'ai accepté de venir à des dîners mondains ou des fêtes avec elles... Et j'ai eu l'occasion de toucher à un peu plus de vins. Et de breuvages alcoolisés! C'est délicieux franchement, surtout bien accompagné niveau repas! »

Je hoche de la tête en signe de réponse de temps à autre, tandis que nous approchons de notre destination. La foule s’amincit dans les parages, ce qui nous laisse enfin respirer un peu. Je déteste la foule. Un bon moyen de camouflage, mais trop bruyant, trop imprévisible. Mais plus ses mots s’éparpillent dans chaque direction que le vent lui intime, plus je réalise que peut-être, j’étais un peu trop optimiste. Curieux, maintenant que j’y pense.

- « Je prendrai sûrement les choses d'une bien meilleur façon si je n'avais pas l'impression d'être un chiot récompensé car il sait remuer la queue. »
- « Du moment que t’y trouves ton compte, tu sais .. »

Et je hausse des épaules. Les modalités mondaines, c’est toujours une corvée. Certains savent tirer leur épingle du jeu, mais d’autres trébuchent beaucoup plus. Les règles ne sont jamais claires, et pourtant elles sont bien là. Son ton reste à peu près le même, et pourtant je sens que je n’ai eu que la surface d’un iceberg bien plus profond que soupçonné.

- « Oh, d'ailleurs, en parlant de choses positives ou extraordinaire! »

Il s’arrête si brusquement qu’un tremblement de surprise secoue mes épaules. Une telle impulsivité et joie brute n’est pas inhabituel chez le jeune homme, c’est juste .. ça fait longtemps que je n’ai pas vu une telle étincelle dans ses yeux. Un sourire aussi large.

Si seulement son euphorie était inébranlable.

En l’espace d’une phrase, tandis que je l’observe avec ce même sourire depuis le départ, mélange astucieux de fierté et d’une tendresse inconfortable pour mes sens, le rythme change. La danse se ternit.

- « J'ai enfin reçu une lettre de ma famille! En... Euh... Six mois, je crois? Et la chose la plus extraordinaire? La signature, sur la lettre... C'était marqué "Ta chère et tendre". »

Un coup de poignard en pleine poitrine.

Mon souffle se bloque, mon sourire s’évapore aussitôt. Une onde alerte parcourt mon crâne. Je l’observe, sous le choc, de grands yeux confus posés sur lui. Oh non. Oh non non non. Je m’efforce à froncer des sourcils, comme si je ne comprenais pas. Mais je comprends bien. Je comprends même trop bien. Mais Dorne ne semble pas avoir remarqué, continuant sur sa lancée pour, sans le vouloir, retourner ce foutu poignard dans la plaie qui, à ma grande surprise, ne s’était pas si bien refermée que ça.

- « D'habitude, elle signe toujours d'un froid "Frieda Wiergender". Au début j'ai crue qu'elle s'était trompée de destinataire et que le tout était prévue pour Siegfried, mais il y avait bien quelques fois mon noms marqués dessus! Et pas celui de mon frère! Si je me souviens bien, la dernière fois que j'ai eu le droit à un "chère et tendre" de sa part c'était... C'était… »

Jamais. C’était jamais.

Ce constat lui retire toutes ses couleurs.

Tandis que mon échine se glace pour de bon, le dos de Dorne se voûte un peu, ses yeux s’égarent. Pensif. Transparent soudainement. Tel un drôle de reflet déformé et simplement plus jeune. Un silence maladif se propage, tandis que la gravité empoigne nos épaules.

Je savais que ça arriverait.

Putain.

Chier.

Merde.

Je reprends alors mon souffle, réalisant que je l’avais coupé. Il faut sauver les meubles. Il est peut-être encore temps.

- « Voilà qui est .. curieux. »

Même ma voix, usuellement monotone et lasse, me trahit d’un tremblement d’effroi.

Ce nom à nouveau à mes oreilles.

Un autre frisson secoue mes épaules, tandis que j’essaie de reprendre les choses en mains. Mais Dorne se dit la même chose, reprenant le dialogue pour se débarrasser d’un démon tenace.

- « Euh, c'est pas important, je suppose que c'est comme ça dans toute famille Névarran, ne pas montrer trop de sentiments hein? Haha, des durs à cuirs, les Névarrans... Oui... Sûrement ça... Jamais montrer de sentiments… »

Cette frayeur qui électrocute chacun de mes muscles laisse place, dans cette brume infâme que j’avais quitté depuis longtemps, à de la colère. Une colère froide, ravalée, impuissante. Le voir dans cet état me donne envie de tout brûler. D’aller de moi-même les embrocher pour de bon. A pieds, s’il le faut. Mais comme je faisais toujours dans ces moments-là, je prends une grande inspiration, relâche mon souffle pour me détendre.

Un constat terrible me frappe.

Certes, sa vie va pour le mieux, mais les ombres planent toujours haut dans le ciel. Serait-il possible d’y remédier ? Y a-t-il quoi que ce soit que je puisse faire ? D’une certaine façon je préfère ne pas en savoir plus, mais pour savoir quoi faire, je n’ai pas le choix. Je dois pouvoir déterminer s’il est sage d’agir ou non. S’il vaut mieux qu’il demeure ainsi, ou dans un autre extrême bien plus flou.

Je pose une main prudente entre ses omoplates pour reprendre notre marche et enfin entrer dans la taverne. Une bonne boisson nous fera du bien, mais aussi un petit coin rien qu’à nous pour se pencher sur tout ça.

- « Allons, tu sais que ce n’est pas vrai. Viens, posons-nous avec une bonne pinte. »

Je l’entraîne à l’intérieur, méticuleux quant à ce contact avec lui. La taverne n’est pas si remplie que ça : quelques citoyens qui se sont arrêtés là pour manger un bout, un peu de musique en fond, quelques clameurs. Nous sommes loin de la soirée bondée, à en finir à moitié couvert de bière dans le meilleur des cas.

Nous trouvons une table, nous nous asseyons. Je fais un signe à une serveuse non loin, elle acquiesce et part en direction du comptoir. Bon, il faut en apprendre davantage. Sans vendre la mèche. Quelque chose me dit que cette étrange zone grise dans laquelle je me complais est sur le point de disparaître.

- « Et donc .. une lettre signée de façon inhabituelle.  »

Focalisons-nous sur les faits.

- « Ta famille ne t’écrit jamais, et te voilà avec une lettre de leur part. Et si je comprends bien, tu n’as pas l’impression d’en être le véritable destinataire. C’est vraiment étrange .. »

La serveuse arrive avec deux pintes de bière blonde, pas trop mousseuse. Je glisse une pièce dans sa main et la remercie d’un hochement de tête. Elle s’en va aussitôt, sourire aux lèvres, le plateau déjà bien chargé pour cette prémice d’après-midi. Mes avant-bras s’appuient contre la table, l’un d’eux se tord pour que je puisse avaler une bonne gorgée, puis retrouve sa position initiale.

- « Tu aurais la lettre sur toi ? On peut regarder ensemble pour en comprendre la signification. »

Et au pire, on peut faire une escale chez lui dans le cas contraire. Mais je dois savoir.





"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteSe séparer pour mieux se retrouver


Voyant que le sujet des fleurs semblait clos, Dorne préféra ne rien rajouter par dessus. Son but après tout n'était pas de s'étendre sur quelque chose qui ne semblait pas plus que cela faire réagir son interlocuteur. La peur de le rendre mal à l'aise, d'insister ou quoi... C'était définitivement hors de question. Aux yeux du jeune Nevarran, ce n'était pas quelque chose de correct. C'était pas forcément la personne ayant une capacité sociale digne d'un émissaire, même une bonne partie du contraire, mais il était au moins assez intelligent pour comprendre ça. Ainsi c'était il concentré sur la joie qu'il ressentait actuellement vis à vis des petites actions qu'il faisait pour le quotidien des autres. Et savoir qu'en plus il avait un retour positif de Miche? Par le Créateur, c'était tout bête, mais il appréciait. Après tout, c'était lui qui l'avait lancé sur cette piste.

- « C’est super comme initiative. ça peut te sembler peu, mais l’essentiel est de commencer quelque part. »

Le sourire enfantin de Dorne s'était amplifié d'avoir ce genre de compliment de la part de quelqu'un. C'est sûr qu'il n'allait pas recevoir quelque chose de ce genre par son propre père. Ni son frère. Ni sa m- Enfin bref, la liste pourrait continuer encore un peu dans ce genre d'environnement pas super positif. Cela dit, même si le fils des Wiergender aurait pensé le contraire, Edana avait arrêté de l'en dissuader. Même la dernière fois elle avait apporté un peu plus pour servir l’intérêt du peuple.  Même si elle ne disait rien à côté, c'était une certaine marque touchante pour le jeune noble. Parfois après tout, il n'y avait même pas besoin de mots...

- Merci. C'est bête mais... Recevoir l'approbation de quelqu'un, c'est toujours plaisant. Mon père ne me l'a jamais donné une seule fois. En quoi... Vingt-ans? Vingt-et-un ans? Alors venant de quelqu'un qui m'a sauvé la vie, j'apprécie.

On aurait pût croire que, comme à son habitude, les sentiments de Dorne auraient fait une sacré chute pour remonter tout aussi sec... Mais non. Il avait réussi à canaliser ses émotions, rester dans un ton plutôt serein, assez heureux. Pas comme s'il avait perdu l'espoir d'un jour entendre son père le féliciter pour quoi que ce soi de toute façon. Mais il n'avait jamais perdu l'espoir d'avoir quelqu'un qui l'appuie un jour, au contraire. Ce fût d'ailleurs sûrement un facteur encore plus puissant qui poussa le fils Wiergender à parler comme s'il risquait de ne plus jamais avoir l'occasion d'ouvrir de nouveau la bouche le lendemain. Après tout, c'était presque trois années de sa vie qui étaient passées où il ne se passa absolument rien, et dont quasiment aucun son n'était sorti de son corps. Peut-être que la peur que son état redevienne celui d'une loque le poussait à dire tout ce qu'il pouvait... Tout du moins quand il se sentait suffisamment en confiance. Comme actuellement avec Miche.

De toute façon, son interlocuteur n'était pas du genre très bavard. Cela permettait au Nevarran de parler pour deux sans problème. Au début, ces longs silences, ces rares hochements de têtes étaient plus étranges qu'autre chose lors de cette fameuse nuit de leurs rencontres. Maintenant, finalement, il s'y était habitué et trouvait même cela réconfortant. Presque comme un gardien silencieux mais à l'affût.  

- « Du moment que t’y trouves ton compte, tu sais .. »

Voilà justement une des phrases qui sortait presque du vide, faisant légèrement rire Dorne. Une voix rassurante, mais qui semblait malgré tout si souvent sur la défensive sur plein de points. C'était sûrement le fait de passer un moment plus calme avec le travailleur du Laurier qui permettait au jeune érudit d'un peu mieux l'analyser. Et y trouver des points aussi amusants qu'intéressants.

- Oh, j'y trouve totalement mon compte! En tout cas plus qu'en restant enfermé à ne rien faire hormis déprimer sur ma condition...

Dorne fit en sorte de rester légèrement en suspens. Réfléchissant s'il devait le dire ou non à Miche au sujet de ce qu'il avait pût discuter à une soirée restante. Si ça l'intéresserait vraiment au vue de l'échange qu'il avait pût avoir avec sa femme.

- Je... Je pense sincèrement qu'Edana mérite mieux de ma part. C'est bientôt notre anniversaire de mariage vous savez? Une nouvelle année à fêter avec elle... J'essaye de lui faire une fête pour l'occasion. J'espère... Que ça réussira à déclencher quelque chose, pour nous deux.

Le jeune Nevarran affichait un sourire plein d'espoir avant de continuer de marcher aux côtés de son sauveur et de parler. Enfin, jusqu'à l'annonce de la lettre qu'il avait reçue. Jusqu'à l'annonce de cette douce signature qu'il lui pensait être destinée. Jusqu'à la désillusion qui frappait plus fort qu'un carrosse et quatre chevaux. Pourquoi essayait-il seulement encore d'espérer un dénouement heureux avec sa famille qui l'avait abandonné? Trop perturbé pour remarquer les réactions de son interlocuteur, Dorne s'était juste recroqueviller mentalement sur lui-même. Un mauvais coup du sort qu'il connaissait si bien pourtant. La famille Wiergender hein? Est-ce qu'il en faisait réellement partie, de cette foutue famille pour ne jamais avoir reçu une moindre trace d'affection?

- « Voilà qui est .. curieux. »

Sorti d'un coup l'érudit de ses pensées bien plus sombre qu'à l'accoutumée. Curieux? Pourquoi sa voix semblait si particulière? Miche agissait si étrangement, comme s'il venait de croiser un fantôme et qu'il agissait comme si c'était faux pour ne pas paraître pour un fou. Un sourcil levé, interrogatif, le jeune homme décida alors de reprendre cela dit, effaçant un peu tout cela pour ne pas paraître lui-même trop pessimiste et essayer de redonner un côté plus neutre à la conversation. C'était dommage qu'elle devienne si... Froide d'un coup à cause de sa mère. C'était son histoire à lui, pas aux autres. Pourtant... Sentir cette main chaude sur ses omoplates, l'engageant à continuer de marcher était un regain de force et de moral qui faisait plaisir à recevoir. Ne sachant pas s'il devait rire, pleurer, sourire ou se frapper la tête face à tout cela.

- « Allons, tu sais que ce n’est pas vrai. Viens, posons-nous avec une bonne pinte. »

Il avait raison. C'était sûrement pas vrai tout cela... Peut-être juste qu'il... Sur-réagissait tout seul? C'est avec une voix timide que le jeune homme répondit alors.

- Vous avez sûrement raison... Un peu d'alcool fera du bien c'est ça?

Et quelques minutes après, les voilà attablés à deux dans une taverne peu bondée encore pour le moment. Heureusement, dans un sens. Dorne n'était toujours pas habitué à la foule. Ne pas subir un brouhaha constant et pouvoir s'écouter avec son interlocuteur, c'était tout de même bien mieux, non?

- « Et donc .. une lettre signée de façon inhabituelle. Ta famille ne t’écrit jamais, et te voilà avec une lettre de leur part. Et si je comprends bien, tu n’as pas l’impression d’en être le véritable destinataire. C’est vraiment étrange .. »

Face à l'interrogation de Miche, Dorne fit en sorte d'hocher la tête de manière affirmative alors que la tournée arrivait tout juste après qu'il eut fini, payant la serveuse.

- Je payerais la prochaine tournée, si vous souhaitez continuer de boire après ce premier tour. Dit-il avec un léger sourire. C'est effectivement étrange... J'ai sûrement arrêté de penser de façon logique tellement la situation semblait proche d'un rêve... De plus, Edana ne semblait même pas au courant qu'on allait recevoir un courrier. D'habitude c'est elle qui gère toute ces choses vous savez... Merde... Je devrais sûrement l'aider un peu la dessus aussi...

Malgré tout, impossible pour Dorne de ne pas penser à sa chère épouse la dessus. Prenant une longue gorgée de bière. Elle n'était pas très amer, c'était délicat même. Finalement, elle devait même être moins amer que son cœur...

- « Tu aurais la lettre sur toi ? On peut regarder ensemble pour en comprendre la signification. »

La question de son sauveur vint à faire réfléchir Dorne qui pencha la tête en arrière, se grattant le crâne tout en réfléchissant où pouvait se trouver la lettre... Avant de fouiller méticuleusement dans chacune de ses poches. Pour ressortir la feuille en papier qui semblait avoir été déjà maintes fois pliées et dépliées par le lecteur, qui affichait un visage plutôt neutre amer.

- Je l'ai gardé, elle m'avait touché si fort que je voulais continuer de la lire encore et encore... J'aurai sûrement dû la brûler, finalement... Mais tenez, je sais pas ce que vous compter obtenir avec ça, cependant, c'est qu'une feuille avec de l'encre et un message stupide...

Après avoir donné le mot à Miche, il reprit une seconde gorgée, avant de soupirer et poser son coude sur la table, le regard un peu perdu dans le vide.


Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente

La conversation encore presque banale se poursuit encore un peu, avant le pire. Quelques pensées, quelques petits regrets de la part du jeune homme.

- « Je... Je pense sincèrement qu'Edana mérite mieux de ma part. C'est bientôt notre anniversaire de mariage vous savez? Une nouvelle année à fêter avec elle... J'essaye de lui faire une fête pour l'occasion. J'espère... Que ça réussira à déclencher quelque chose, pour nous deux. »
- « Si t’as besoin d’aide, n’hésite pas. Mais je suis sûr que tu vas bien t’en tirer. »

Si seulement nous continuions sur ce sujet. Ses problèmes avec sa femme, son manque de confiance en lui, son envie d’en faire plus, de contribuer plus. De prendre davantage sa place d’époux dans cette nouvelle famille. Nous pourrions en parler des heures et des heures, mais la conversation dérape, cette fois-ci pour le pire.

Une fois à l’intérieur, essayant de le rassurer au moins un peu, sa réponse me fait me dire que j’ai très probablement de bien terribles habitudes, dont le petit n’a pas particulièrement besoin.

- « Vous avez sûrement raison... Un peu d'alcool fera du bien c'est ça? »
- « Un peu et une fois de temps en temps, mais jamais en excès. Ça peut être très dangereux, sinon. »

Disons que j’ai nullement envie d’apprendre que je l’ai plongé dans l’alcool. Le pauvre.

Mais malgré la nature du sujet, soit le plus effroyable tabou de ce continent, j’ai besoin de savoir. Sans ces informations, difficile de décider quoi faire. Mon instinct est bien trop agité pour continuer la journée sans le calmer d’abord. Le rassurer. Ou confirmer ses craintes les plus obscures.

- « Je payerais la prochaine tournée, si vous souhaitez continuer de boire après ce premier tour. C'est effectivement étrange... J'ai sûrement arrêté de penser de façon logique tellement la situation semblait proche d'un rêve... De plus, Edana ne semblait même pas au courant qu'on allait recevoir un courrier. D'habitude c'est elle qui gère toute ces choses vous savez... Merde... Je devrais sûrement l'aider un peu la dessus aussi… »

Je lui adresse un sourire crispé, mais qui se veut rassurant. Sûrement que ça ne marche pas trop. Donc je complète un peu derrière avec quelques mots.

- « Chaque chose en son temps, eh. »

Edana n’était pas au courant. Une lettre secrète ? Est-ce que son époux traque encore son courrier, comme à l’époque ? Faut dire qu’elle était douée pour le contourner, et je ne serais pas surpris qu’Edana lui en touche un mot, ou alors pense qu’il est au courant. L’est-il seulement ? Lit-il son courrier ? Mystère.

Mais chaque chose en son temps. Cette histoire de lettre est bien plus pressante que tout le reste. Le reste viendra plus tard. Dorne en semble conscient, et d’une main un peu molle, il dégaine cette atrocité de papier et de mots. Me la tend gentiment.

- « Je l'ai gardé, elle m'avait touché si fort que je voulais continuer de la lire encore et encore... J'aurai sûrement dû la brûler, finalement... Mais tenez, je sais pas ce que vous compter obtenir avec ça, cependant, c'est qu'une feuille avec de l'encre et un message stupide… »

C’est une main tremblante qui s’en empare, et un regard des plus inquiets braqué sur ce simple morceau de papier. Je la connais. Ce n’est jamais que de l’encre et un message stupide. C’est toujours pire. Ou rien de bon. Je la déploie lentement, contrôlant mon souffle au mieux pour ne pas simplement sombrer dans la panique. Tous mes sens sont en alerte. Quelque chose ne va définitivement pas.

Mon chéri.

Je sais que cela fait longtemps que je ne t'ai pas écris. Très longtemps. Trop longtemps? Les dernières nouvelles d'Edana m'ont surprise de te revoir ainsi sortir des abysses, mais l'apprendre m'a emplit de joie. Starkhaven est donc une Cité pleine de mystère. J'espère que tu es resté, et que tu reste fidèle à tes principes comme a ton amour. Comme je l'ai été pour notre famille, pour ce futur. Je compte venir, pour te revoir. Voir si tout vas bien. Relancer une nouvelle entente.

Dorne, je suis si heureuse que tout cela ai servi à quelque chose. Tu ne te rend peut être pas compte encore, mais c'est une nouvelle vie qui nous attend. Pour toi, comme pour nous. Il reste encore beaucoup de choses à faire au domaine, je viendrais donc sûrement seule pour ne pas qu'il y ai de problèmes.

Ta chère et tendre.
Frieda

Le premier détail qui me frappe sont les libellés. Je m’interromps dans ma lecture, observe à nouveau, jette un vague regard du côté d’un Dorne simplement lessivé et occupé à boire tristement. Je souffle du nez, reprends ma lecture avec la bonne perspective. Car à mon plus grand désespoir, ce n’est pas à Dorne qu’elle parle.

Non.

C’est à moi-même.

Elle sait.

Chaque phrase me fait grincer des dents, ou avaler nerveusement ma salive. Elle espère que je suis encore dans les parages. “Relancer une nouvelle entente” ? Et puis quoi, encore ?

Mais c’est bien le second paragraphe qui fronce mes sourcils pour de bon. De quoi parle-t-elle ? En dehors de la bien sombre nouvelle de son arrivée éventuelle. Enfin. Elle viendra, mais aucune date n’est spécifiée. Une visite surprise, dans le secret. Comme cette foutue lettre.

A la fin de ma première lecture complète, j’attrape ma bière, avale une grande gorgée, me racle la gorge.

- « Quelque chose cloche .. »

J’entame une relecture. Son écriture est cryptique, il faut donc y repasser plusieurs fois, pour en comprendre le sens complet. Je me rappelle alors de ce qu’a précédemment dit le jeune homme. D’habitude, elle signe de son nom complet.

- « Étrange que son nom de famille n’est pas mentionné, si elle signe habituellement avec le nom de famille également. Aucune mention de ton père nulle part, également .. »

Mes yeux parcourent avec une frénésie folle ces foutus mots qui osent se suivre, cherche encore quelques détails qu’elle aurait pu cacher.

Et mon corps s’immobilise entièrement.

mes yeux sont grands ouverts, braqués sur ce fameux paragraphe incompréhensible. Je rapproche la lettre, comme si ça allait changer quoi que ce soit, avale une fois de plus ma salive, parcourt une fois de plus le reste ..

..

Elle espère que je reste fidèle. Elle cherche à me retrouver prochainement. Pour nous. Ce soit-disant futur.

Une nouvelle entente.

“Pour toi, comme pour nous.”

- « Oh non .. »

Une main sur ma bouche, tandis que l’autre retombe assez lourdement sur la table. Les yeux écarquillés reposent sur ces paroles maudites et le sens qui en émane. Un sens tordu, vicieux, souillé par le temps et la folie qui passent. Je me force à fermer les yeux un bref instant, quittant ce point que je fixais sans but.

Elle arrive.

Je passe une main sur mon front, dans ces cheveux grisonnants depuis.

Dorne est en danger.

Merde.

Je ferme les yeux à nouveau, me concentre sur mon souffle un instant. Souffle chaotique et douloureux qui soulève mes épaules pour les affaisser presque tout aussi brutalement. Mais je sens cette terreur qui se répand, qui grésille le long de ma peau, qui embrume mes yeux de panique, qui resserre mes dents les unes contre les autres avec tant de force que je soupçonne ma mâchoire de lâcher prochainement. mes mains se crispent en silence.

Quel con.

Je n'aurais jamais dû le raccompagner chez lui.

Après la bouche, c’est au tour des yeux d’être enveloppés dans une main fragile de colère et de désespoir.

C’est ma faute, tout ça. Evidemment. Il fallait que je revienne, même un peu. Même un tout petit peu.





"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteSe séparer pour mieux se retrouver




Finalement, l'un des grands drames de Dorne, c'est sa douce capacité à voir le meilleur dans un événement, de s'y épanouir au maximum, d'y éprouver du plaisir et de la joie... Avant que tout ne s'effondre aussi fort par une mauvaise nouvelle et ne l'embarque dans une vague de profonde tristesse. Au moins aura t'il eu une bonne partie de ce maigre plaisir avec Miche.

- « Si t’as besoin d’aide, n’hésite pas. Mais je suis sûr que tu vas bien t’en tirer. »

Au moins avait-il eu une dernière phrase d'encouragement, de quoi continuer à lui offrir ce maigre bouclier d'espoir.

- Oh, je ne voudrais pas vous embêter pour cela... Mais merci, pour l'offre, et pour le soutien.

Qui ne met pas beaucoup de temps avant de se briser par l'histoire de cette maudite lettre. Le dernier des Wiergender n'était pas vraiment bien loti avec sa famille. Chaque maigre espoir qu'il avait d'obtenir, peut-être le moindre gain de leurs regards se soldaient bien trop souvent en un terrible échec. Bien entendu il n'espérait pas du jour au lendemain recevoir cadeaux, félicitations, une fanfare et une épée incrustée de pierres précieuses. Les rêves c'étaient bien beau, mais pour se réaliser... Non, il espérait juste... Plus de lettres déjà pour commencer. Des lettres véritablement pour lui. Enfin, heureusement restait-il de l'alcool.

- « Un peu et une fois de temps en temps, mais jamais en excès. Ça peut être très dangereux, sinon. »

Un léger rire s'échappa de la bouche de Dorne. Ce dernier étant même étonnamment franc au vue de la situation émotionnelle que subissait l'érudit. Dans un moment comme celui-ci, il ne s'attendait certainement pas à tout de même recevoir un conseil sur la consommation d'alcool excessive.

- Vous êtes une personne incroyable, Miche. Un sage sans nul doute pour ce genre de remarques. Mais un sage bienveillant pour un pauvre noble encombrant comme moi.

Mais malgré tout, cela ne l'empêchera pas de boire. Après tout l'homme qu'il avait en face de lui n'était pas son père. Même ce dernier pouvait faire quoi de toute façon? Le punir? En faisant quoi de pire? En l'oubliant totalement? C'était un peu le cas de toute façon. En le frappant? Bah, au vue de son âge qui avançait inexorablement, nul doute que sa poigne devait être moins forte qu'il y a quinze ans de toute façon, ça fera moins mal. Par contre une de Siegfried... Nul doute que celle-là, avec la haine qu'il devait encore ressentir d'avoir perdu son bras risquerait d'être autre chose. Bah... Tout ça pour quelques bières, l'esprit de Dorne vagabondait véritablement dans une certaine noirceur après tous ces faux espoirs stupides qu'il s'était fait. Mais au moins l'érudit ne voulait pas paraître impolie, en proposant de payer une tournée. En tant qu'enfant de la noblesse il avait un peu les moyens, ce serait embêtant de laisser quelqu'un d'autre tout payer. Vu tout ce que faisait déjà Miche pour lui.

- « Chaque chose en son temps, eh. »

Face à cette réponse, le fils Wiergender haussa simplement les épaules avant de boire. Puis de tendre la lettre à Miche. Bah, s'il voulait tellement cette lettre, il n'allait pas la lui refuser. C'était soit cela, soit elle allait finir brûler sans nul doute dans un léger moment d’énervement. Soupirant alors que son interlocuteur commençait à lire le message de Frieda, l'érudit continuait simplement de boire sa bière. Enchaînant les longues gorgées sans réellement faire de véritable pauses. Sentant alors l'amertume si légère des bières blondes s'engouffrer dans son organisme, et l'alcool dans son sang. Bon sang le bien que ça faisait. Il en avait besoin, d'essayer de se changer un peu les idées. D'essayer d'améliorer un peu son morale. Il ne savait pas trop ce que ça donnerait s'il sombrait vraiment dans un fort taux de boissons spirituelles finalement. Il avait pu rencontrer des gens mauvais, comme quand il avait failli mourir. Des nobles heureux. D'autres tristes. Lui, il ressemblerait à quoi? L'envie de le savoir par pur intérêt d'analyse vint à titiller son cœur, mais décevoir le conseil de Miche l'embêtait tout autant. Bah, il n'aura qu'a jouer avec les limites... Il avait des trucs à faire cette après midi de toute façon, il ne pouvait se permettre de toucher le fond, d'autres gens l'attendaient. Comme Edana ce soir.

En ayant terminé d'analyser sa propre personne et l'intérêt porté à l'alcool en finissant sa première bière, tout en recommandant une seconde, Dorne paya la serveuse tout en lui donnant une pièce. Miche avait à peine touché à la sienne. Il semblait encore si... Obnubiler par cette lettre. Cela se voyait, même pour une personne pas très adaptée socialement comme le fils Wiergender. Il avalait trop souvent sa salive pour quelque chose de naturel. Machoir crispé. Raclement de gorges...

- « Quelque chose cloche .. »

Le voir d'un coup réagir en buvant en plus sa bière vint à faire sursauter Dorne qui posa sa tête entre ses mains, continuant de regarder coups à coups la lettre puis son sauveur.

- Ah bon?

De nouveau, son interlocuteur semblait perdu dans la lettre. Bon sang, c'était qu'un vulgaire morceau de papier risible et inutile, pas le dernier ouvrage en vogue parmi la cours littéraire du Nevarran. Continuant de boire, les yeux de l'érudit ne quittèrent pas un instant ceux de Miche.

- « Étrange que son nom de famille n’est pas mentionné, si elle signe habituellement avec le nom de famille également. Aucune mention de ton père nulle part, également ..
- Vous savez, ma mère est quelqu'un d'étrange. Je n'ai jamais réellement sût la déchiffrer. Enfin pas comme si... Miche?

Alors que le jeune homme parlait, il voyait bien que son interlocuteur était troublé. Mais par quoi bon sang? Tout semblait bien montrer qu'il y avait un problème. Corps presque aussi raide qu'un mort après que les yeux soient devenus fous, tin qui paraissait presque livide... A moins que ce soit l'éclairage qui jouait des tours?

- « Oh non ..
- Oh non quoi? Miche, hou hou. Dorne à l'autre bout de la feuille.

Cela commençait à faire légèrement peur au jeune homme de voir ainsi un grand gaillard trembler devant une simple lettre d'une mère sans cœur. Le voir ainsi protéger sa bouche d'une main alors que l'autre semblait d'un coup manquer de vie. Pourtant, dans tout ce qui laissait paraître, Miche semblait partager entre une rage sourde et un désespoir profond. C'était marrant comme ces yeux en proie aux abysses disait quelque chose à Dorne... Quelque chose de si familier... Hochant la tête pour effacer cette idée, l'érudit vint à se lever de sa chaise, pour poser une main compatissante sur l'épaule du grand gaillard. Pourquoi c'était lui qui faisait ça alors que la lettre lui était destinée et que c'était Miche qui réagissait ainsi? Car c'était un ami, quelqu'un qui l'avait aidé. Il n'allait pas le laisser seul dans cet étrange moment.

- Allons Miche, on dirait que vous avez vu un esprit. Ce n'est qu'une lettre. Au vue du nombre de fois où vous avez lu cette foutue lettre en plus de votre réaction, on dirait que vous connaissez mieux ma propre mère que moi!

Un léger rire s'échappa de la bouche de Dorne qui dura quelques secondes. L'esprit embrumé par l'alcool sans aucun doute. Mais cela ne dura qu'un moment. Un léger éclair de lucidité venant frapper le fils Wiergender qui s'arrêta d'un seul coup. Avant de poser un regard interrogatif en direction de son interlocuteur. Non, ce n'était pas possible enfin... Mais pourtant, tout ce qu'il y avait autour de cet homme... C'était si étrange... Ce regard triste... Ce visage... Un Nevarran aussi impeccable... Comme si quelque chose voulait hurler dans l'esprit du jeune homme sans réussir à se faire entendre. Trop lointaine. Trop enfoui sous des années et des années d'oublies, de tristesses et d'horreurs. Mais il devait être sûr.

- Miche... Vous... Enfin... Vous... N'avez rien à me cacher, hein? Vous êtes quelqu'un de franc? Hein?

Demanda t'il, dans une voix qui manquait d'assurance, des yeux troublés par le doute, par le désespoir.


Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente

L’étau de ma propre conscience se resserre. Le passé me rattrape enfin, plantant ses serres rouillées dans ma chair. Si la façade était – relativement – facile à maintenir, les réels dangers ont tout bêtement détruit ces vaines tentatives.

Car il savait dans le fond, n’est-ce pas ?

Comme si ces infernaux mots pouvaient encore me dissimuler de mes erreurs, comme si les flammes des démons étaient préférables à la vérité même, je ne peux que fixer cette lettre, m’y réfugier comme on retrouve ses maladives zones de confort. Là où on sait qu’on n’a pas à avoir peur, car on connaît déjà la menace, ou les risques.

Cette menace qui plane, cette ombre qui guette, qui étouffe. Ces allées et venues dans le secret, ces paroles mielleuses auxquelles je croyais avec ferveur, ces promesses ou ces menaces qui ne sont finalement jamais tenues. Ces obsessions, ces manies, ces jeux interminables et douloureux. Ces nuits à angoisser, à imaginer tous les scénarios possibles pour s’en sortir, sans trouver pourtant le moindre courage à leur réalisation. Ces nuits de mystères, remplies de larmes, de cris, de sang, de ces visions d’horreur desquelles on est le seul touché. Le seul à trouver ça anormal, le seul à trouver ça injuste.

Mais la main de Dorne qui se pose avec douceur contre moi me force à revenir. Me force à assumer. Et comme si ça ne suffisait pas, ses mots m’écrasent.

- « Allons Miche, on dirait que vous avez vu un esprit. Ce n'est qu'une lettre. Au vue du nombre de fois où vous avez lu cette foutue lettre en plus de votre réaction, on dirait que vous connaissez mieux ma propre mère que moi! »

Je suis foutu.

Je pose dans son regard soudainement troublé le mien. Un regard perdu, en miettes. Celui qui ne sait plus quoi dire, car tout ce qui reste est l’insupportable vérité. Celle qui ne cause que du mal, qui ravage tout, qui sabote tout. Lui qui a sa vie enfin relativement au complet, est-ce le moment de tout briser ? Est-ce le moment de lui retirer le peu qu’il a ? Est-ce une bonne, une mauvaise chose ?

- « Miche... Vous... »

Mais c’est un adulte, désormais.

- « Enfin... Vous... »

Sa famille est loin, elle ne peut pas lui causer le moindre tort.

- « N'avez rien à me cacher, hein? Vous êtes quelqu'un de franc? Hein? »

Et je lui dois une explication.

Je comprends dans sa demande qu’il lit parfaitement le cheminement de pensée qui parcourt mes yeux sans remords, ni direction. Il attend de moi la vérité. Ce qui est normal. Mais si j’ai bien interprété ces quelques foutus mots de l’enfer sur un simple bout de papier, il est en danger. Et il doit le savoir.

Je pousse un long soupir. Ferme les yeux un instant pour retrouver un certain contrôle. Empêcher ces larmes fossilisées de couler pour de bon. Le petit doit savoir. Il est temps.

- « Assieds-toi, Dorne. »

Savoir que la table nous sépare un peu m’aide, probablement. Une bête distance peut rendre les choses plus supportables, n’est-ce pas ? J’ai fui pendant longtemps, mais il me faut reconnaître quand je suis cerné de toute part. Et nous manquons sûrement de temps.

- « Cette lettre .. elle ne s’adresse pas à toi. C’est à moi qu’elle s’adresse. »

Sera-t-il déçu ? Trahi ?

- « Ta mère a dû comprendre que je me trouvais ici, suite à mon intervention la dernière fois .. C’est pour moi qu’elle vient. »

Comment expliquer une telle folie, maintenant que la lucidité a tout décortiqué ? Que chaque élément aurait pu être évité si facilement ? si bêtement ? Comment expliquer la stupide vingtaine ? Comment expliquer le piège dans lequel je suis tombé, et qui me poursuit encore aujourd’hui ?

- « C’est .. compliqué. Mais c’est une histoire que t’es en droit de savoir. »

C’est un adulte, désormais. Il aurait même dû le savoir plus tôt encore. Comment se reconstruire après une telle découverte ? Comment regarder ces visages si familiers mais pourtant inconnus ?

Je prends enfin une longue gorgée de ma bière, pour me donner un peu de courage comme pour gagner du temps dans le choix de mes mots. Non que je suis pressé, mais il faut dire que je ne sais pas du tout par où commencer. Ni par quoi. Encore moins par qui. Après la gorgée d’espoir, je passe une main sur mon visage, une main fatiguée. Un autre soupir s’envole, tandis que je m’efforce à parler, à confesser. Une fois le pire énoncé, le reste coulera tout seul, n’est-ce pas ?

- « Je .. je n’ai pas été entièrement honnête avec toi, la dernière fois. Il faut dire que le Créateur a un sacré sens de l’humour, mais ce n’est pas le sujet. »

Allez, merde. Il est en droit de savoir. En tes propres termes. Pas ceux de l’autre folle.

- « Je ne m’attendais pas à te voir dans cette ville. Mais .. mais on se connaît. Enfin. T’étais très jeune, je ne sais pas si tu t’en rappelles vraiment. »

Compte tenu de son regard, évidemment qu’il s’en rappelle. Du moins, je l’espérais. En tout cas, il ne m’avait pas reconnu, et à raison. Le temps, la misère, la mémoire de l’enfance, tout s’était distordu, tout s’était transformé.

Mon regard est dans le vague durant toute cette conversation, traînant loin de ces aveux difficilement assumés, et étrangement silencieux. Comment supporter la clarté de ses yeux vibrants après ce que je suis sur le point d’annoncer ? Ma main se referme, appuyée contre la table, les phalanges en blanchissent. Mes dents se serrent un instant, comme une tentative de concentrer toute ma force dans une poignée de mots.

- « J’ai préféré ne rien dire parce que j’ai simplement pensé que c’était mieux comme ça. Je continue de le penser. Mais .. j’ai l’impression que ta mère a des plans dangereux te concernant, alors .. Disons .. je n’ai pas envie de prendre le moindre risque, alors .. »

Je ferme les yeux un instant, sentant les larmes revenir. Mes épaules en sont secouées, mon souffle se crispe l’espace d’un instant. Quand je repense aux horreurs, aux effrois, aux inquiétudes .. Tout ça à cause d’une erreur de jeunesse que certains glorifient dans les livres.

- « Je .. C’est moi. C’est Mikaal. »

Et je croise son regard, les larmes de regrets et d’amertume qui creusent ce visage meurtri par le temps et les actes. Un sourire léger s’étire, étrangement tendre, comme apaisé d’avoir enfin pu dire ce qu’il avait à dire.





"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteSe séparer pour mieux se retrouver




La situation semblait devenir si pesante d'un coup. Deux regards troublés s'observant l'un l'autre. Pourquoi Miche agissait-il de manière si étrange avec cette foutue lettre? Cela n'avait aucun sens. C'était donc normal de lui poser une telle question. Il manquait quelque chose, il manquait des informations. On ne pouvait pas résoudre une énigme s'il n'y avait aucune indication. Ici, dans l'esprit de Dorne c'était à se demander s'il y avait déjà une base tellement tout semblait flou et absurde. Puis voir ce grand protecteur aussi perturbé, cela donnait presque un tableau surréaliste.

Mais voilà, Miche vint à soupirer, se reconcentrer en fermant les yeux. C'était plus qu'un mauvais pressentiment qui frappait l'esprit du jeune Wiergender, mais tout une fanfare de mauvais présage. Pourtant, impossible de s'arrêter là. Il lui fallait une véritable réponse. L'érudit ne fuirait pas ce sujet comme il avait fuit trois années de sa vie. Pourtant, impossible de ne pas sentir cette douleur à l'estomac comme si l'on tordait ses boyaux.

- « Assieds-toi, Dorne. »

Levant un sourcil, le jeune homme s’exécuta, retrouvant alors sa place initiale, séparé de son interlocuteur par une simple table et deux pintes ayant été plus ou moins dégustées pour le moment. Il semblait d'un coup si éloigné ce grand gaillard. Et pourtant, il restait amplement à distance d'un simple contact.

- « Cette lettre .. elle ne s’adresse pas à toi. C’est à moi qu’elle s’adresse. Ta mère a dû comprendre que je me trouvais ici, suite à mon intervention la dernière fois .. C’est pour moi qu’elle vient. »

Le jeune homme resta un moment immobile, choqué. Il pensait bien que cette lettre n'était pas forcément dirigée vers lui sur certains sujets, après tout pour le peu que sa mère en avait à faire du Nevarran... Mais cela semblait si gros pour être vrai. Trop gros même. C'était un inconnu, un parfait inconnu de la famille Wiergender. Un parfait inconnu pour Dorne avant ce sauvetage inespéré proche du Laurier...Pourtant... Ce n'était pas ce que disait une étrange sensation dans un recoin de l'esprit de l'érudit.

- « C’est .. compliqué. Mais c’est une histoire que t’es en droit de savoir. »

Une histoire à savoir? Bon sang, rien qu'entendre ces mots amplifiait la douleur à l'estomac du pauvre jeune homme dont le regard semblait encore dans une certaine incompréhension. Incompréhension couplée à la frustration de voir ainsi Miche se désaltérer avec sa bière. Bon sang, par le Créateur, l'attente était plus frustrante et douloureuse qu'un coup de poing qu'on attendait, mais qui ne venait que par surprise. Mais impossible de parler. Une peur. La peur qu'interrompre ainsi ce protecteur l'arrêterait dans ses explications et qu'il n'y aurait plus jamais la chance de savoir ce qu'il en était... Ou alors, de le savoir que trop tard.

- « Je .. je n’ai pas été entièrement honnête avec toi, la dernière fois. Il faut dire que le Créateur a un sacré sens de l’humour, mais ce n’est pas le sujet. Je ne m’attendais pas à te voir dans cette ville. Mais .. mais on se connaît. Enfin. T’étais très jeune, je ne sais pas si tu t’en rappelles vraiment. »

Ils se connaissaient? Cette sensation était donc véridique. Miche ne mentait pas. Ça se voyait dans ses yeux. Le regard de Dorne s'intensifia, perdu entre la contemplation du visage de son protecteur, tout en farfouillant les recoins de son esprit. Il avait souligné la jeunesse pour cet ancien temps qui les avait vu réuni pour la dernière fois. Très jeune... Il fallait remonter plus loin que bien des souvenirs. Avant son entrée dans l'armée. Avant l'odeur des cendres. Il y avait bien... Cette silhouette? Y penser, c'était comme affronter le brouillard. Imaginer des traits, des couleurs, c'était comme essayer de peindre quelqu'un éblouit par le soleil. On ne voyait qu'une forme sombre. Une forme qui était présente il y a de cela plus de vingt années... Cette ombre avait pourtant les mêmes yeux que Miche... Une voix quasiment identique, mais celle du passé sonnait comme déformée par le vide.

Une forme rassurante. Un regard bienveillant qui parfois semblait si triste. Une voix encourageante qui semblait pourtant brisée par moment. Mais il y avait plus que cela. Quelque chose de plus grand, de fondamental. Oui, il le reconnaissait, mais c'était encore si flou.

- « J’ai préféré ne rien dire parce que j’ai simplement pensé que c’était mieux comme ça. Je continue de le penser. Mais .. j’ai l’impression que ta mère a des plans dangereux te concernant, alors .. Disons .. je n’ai pas envie de prendre le moindre risque, alors .. »

La douleur devenait presque difficile à supporter. En plus d'inquiéter Dorne dont le regard voyait de plus en plus flou face à cette tentative de comprendre, de se remémorer. Sa mère, avoir des plans dangereux? Et pourquoi ce silence initial de Miche? Pourtant, il restait encore quelque chose. Un élément pour résoudre cette affaire. Quelque chose qui semblait des plus difficile à avouer de la bouche de Miche qui semblait pouvoir se briser en deux à tout moment.

- « Je .. C’est moi. C’est Mikaal. »

Mikaal.
Mikaal, l'homme qui semblait s'effondrer en larme devant lui.
Mikaal, ce nom qui était écrit dans son livre aux questions à côté d'un petit mot d'encouragement.
Mikaal, cette ombre forte et fière qui le gardait alors qu'il était un tout jeune et minuscule enfant.
Mikaal, celui que la famille Wiergender avait nommé parrain de Dorne pour le protéger.
Mikaal... Ce prénom que sa famille avait banni, oublié.
Mikaal.

Le regard de Dorne s'était figé. Son corps s'était immobilisé. La seule chose qui montrait qu'il était encore en vie, c'était sa poitrine qui se levait et se rabaissait, preuve qu'il respirait encore. Avoir en face de lui Mikaal, c'était comme voir un fantôme. Tout se recollait parfaitement, comme une figure d'un verre brisé que l'on remettait parfaitement en place. Toute cette brume, ces souvenirs enfouis en Dorne, tout ressurgissait d'un coup. C'était une explosion de sentiments à contrôler. Tristesse. Colère. Joie. Le tout couplé à cet alcool consommé qui n'aidait pas spécialement à supporter ce torrent qui brûlait son cœur. En face du jeune Wiergender, sur ce visage du passé se trouvait un sourire, étiré, marqué par les années...

- Je...

Un premier mot, pour commencer. C'était toujours mieux que le silence. Prenant une profonde respiration, l'érudit vint à frotter ses deux mains contre son visage tout en expirant. Espérant alors redonner un petit coup de force à son esprit. En retirant ses mains, son regard avait retrouvé son éclat habituel. Avec toujours cette même note de tristesse présente. Observant droit dans les yeux Miche.

- Je ne te comprends pas... Pourquoi penser que c'était mieux pour moi? Pourquoi penser POUR moi? Comme Mère, comme Père...

Se relevant alors, Dorne ne quitte pas le visage de son protecteur. Montrant alors un visage prêt à craquer.

- Pourquoi tu voulais continuer de me cacher cela? Sans cette lettre, tu aurais gardé ce petit mystère encore longtemps? Jusqu'a ta mort?

Pas de colère dans la voix, pourtant il y avait bien une émotion qui prenait le dessus, déraillant ses mots. La tristesse.

- Cela n'a aucun sens... Pourquoi garder ce secret mais tout de même venir à mon secours? Venir boire une bière avec moi? Discuter avec moi?! Tu pensais qu'en apprenant ce nom d'un autre temps, je t'aurais repoussé? Je me serais mis à te détester?

Sur le visage de Dorne, une profonde incompréhension, une certaine détresse. Comme si les fils de son esprit se mélangeaient face aux révélations, aux sentiments contraires et à l'alcool. De nouveau, le jeune homme se mit à voir floue. Mais à cause de la tristesse, à cause des larmes qui se formaient dans ses yeux.

- Je vais te dire un truc. Ce sourire que tu peux afficher sur ton visage. Cette foutue tendresse que tu me montres...

Ce fût au tour de Dorne, cette fois-ci de poser sa phrase. Prenant alors une profonde inspiration, fermant les yeux avant de passer sa manche beaucoup trop longue pour son bras nettoyer ses yeux. Une fois cela fait, il pût alors expirer, pour cracher tout les sentiments qu'il avait encore en travers de la gorge.

- Je suis si heureux de les revoir... Bordel...

Même après avoir essuyé une première vague de larmes, impossible d'arrêter toutes celles qui restaient encore à venir. S'appuyant sur la table, le jeune homme se mit à pleurer, essayant de garder la tête haute, se fichant bien de ce que d'autres pouvaient penser de lui. Lui-même s'en fichait bien actuellement.

- Tu as eu tort, de me cacher ça… J'ai grandi, je suis plus l'enfant qui tournait autour de toi en te donnant un surnom ridicule. On aurait put en discuter… Tu sais qu'ils ont essayé de te supprimer de ma mémoire? En la salissant? En essayant de me faire haire ce seul nom qui comptait pour moi... Mais jamais je pourrais te détester. Bon sang, tu sais que j'ai encore ton foutu carnet de questions quelque part...

Dorne senti une légère faiblesse dans ses jambes qui vinrent à lui faire perdre l'équilibre. Utilisant la table pour garder appuie, il lui fallut quelques instants pour se ressaisir. Ses larmes continuant de tomber.

- Mikaal. Tu es mon premier ami. Mon parrain. Mon protecteur. Oui, tu as disparu. Oui, ce fut douloureux. Mais y a toute une vie qui s'est écoulée. Je suis juste heureux de revoir le guerrier bienveillant qui était la seule personne qui pouvait être fière de moi. Même si ma protection n'était qu'une étape dans ta vie. Être ton protégé une étape dans la mienne... Que ce soit un souvenir d'un passé lointain... Je... Je...

Ce fût au tour de Dorne de sourire, léger, timide, mais présent. Se sentant soulagé d'un lourd poids. Cela faisait quelque temps déjà qu'il ne se sentait plus seul en Starkhaven. Mais pouvoir se souvenir du premier visage ayant été une source d'encouragement, c'était totalement autre chose.

- Je peux espérer que l'on reparte sur de nouvelles bases? Que tu fasses de nouveau partie de ma vie? J'aurai surement toujours besoin d'un protecteur... S'il te plaît...


Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente

Je peux voir chaque lettre de mon prénom parcourir ses yeux. Comme une lumière qui se promène là où bon lui semble, sans se soucier des tourments qu’elle peut réveiller. Comme les premiers souffles qui agitent la mer, qui tordent le ciel pour en tirer sa plus dévastatrice tempête. Je la vois arriver, mais je dois y faire face. Je dois y faire face pour lui.

Le petit est tout simplement figé, comme s’il avait cherché des yeux trop longtemps la source de toute sa misère, et qu’enfin dévoilée, le transforme en statue de sel. Figé sous le poids de sa propre réalité qui se brise, de ses certitudes balayées en un mot.

Il essaie de retrouver don de parole. Je le soutiens du regard. C’est alors que la tempête s’envole.

- « Je ne te comprends pas... Pourquoi penser que c'était mieux pour moi? Pourquoi penser POUR moi? Comme Mère, comme Père… »

Me voilà mis face à mes propres échecs, face à mes propres peurs. Naturellement. Chacune des décisions que j’ai prises, aussi égoïstes et mauvaises soient-elles, font sens à mes yeux. Elles ont leur défaut, c’est indéniable. J’espère seulement qu’il comprendra.

Mais cette comparaison me brise le cœur en silence. Comparaison justifiée, mais qui me prouve une fois de plus que je ne vaux pas mieux qu’eux. Que nous sommes tous sur une même hauteur, aussi vertigineuse soit-elle. Que si je leur souhaite l’enfer, la douleur, le malheur, je ne suis pas exempt à mes propres désirs de justice.

Dorne se relève. Les yeux fendus de douleur. Les mains tremblantes. Son visage se crispe à son tour, comme si lui aussi tentait de garder son être entier encore un peu. Mais la destruction est inévitable, n’est-ce pas ? Il n’y a aucune façon d’éviter la Vérité. Elle vous rattrapera toujours tôt ou tard, et si j’ai beaucoup prié après mon honteux départ, si j’ai tant de nuits prié pour lui, pour sa sécurité, pour son bonheur, je me suis souvent surpris à prier pour mon propre salut. Pour ce pardon que je ne mérite pas. Pour cette clémence qui ne devrait pas exister.

- « Pourquoi tu voulais continuer de me cacher cela? Sans cette lettre, tu aurais gardé ce petit mystère encore longtemps? Jusqu'a ta mort? »

Oui. C’était plus facile. Plus honteusement facile. Plus sûr.

- « Cela n'a aucun sens... Pourquoi garder ce secret mais tout de même venir à mon secours? Venir boire une bière avec moi? Discuter avec moi?! Tu pensais qu'en apprenant ce nom d'un autre temps, je t'aurais repoussé? Je me serais mis à te détester? »

Mon cœur rate un autre battement, tandis que je constate toute la bonté et la naïveté que Dorne possède toujours. Il ne sait pas toute l’histoire. Je lui donnerai de bonnes raisons. Les vraies. Les seules qui comptent vraiment.

Pourquoi je suis resté, malgré le fait que je l’ai reconnu ? Pourquoi je suis resté, alors que j’aurais pu tant de fois disparaître à nouveau ? Ne rester qu’un inconnu ? Me retenir de prendre de ses nouvelles, de le voir fleurir ?

Un bête instinct, j’imagine. Celui qui s’impose, peu importe la situation. Celui qui veut s’assurer que le petit aille bien. Celui qui veut s’assurer que peu importe où il est, peu importe ce par quoi il passe, le petit sera en sécurité, et certainement pas seul avec ses démons. Un bête instinct que je n’ai pas entièrement repoussé, volontairement ou non.

Je ne sais pas pourquoi je suis resté malgré tout. Malgré les dangers, malgré la réaction de sa mère si elle savait. Peut-être que je voulais simplement m’assurer qu’il aille bien. Qu’il sache qu’il mènera cette nouvelle vie avec brio. Qu’il en est capable. Que son passé tumultueux ne définira jamais son destin.

Craignais-je réellement sa réaction ? Absolument. Pas parce que je ne la comprends pas, pas parce qu’elle m’enverra six pieds sous terre définitivement, non. Mais bien parce que je ne voulais pas briser ces doux, bien que rares, souvenirs qu’il porte encore en lui. Est-ce égoïste que de vouloir être remémoré dans le cœur de ses proches comme étant quelqu’un de bien ? Est-ce égoïste que de vouloir les protéger tous de l’abominable vérité ?

Peut-être bien, en fin de compte. Car ces larmes qu’il s’apprête à verser ne sont que les simples conséquences de mes précautions. D’une douleur que j’ai moi-même causée.

- « Je vais te dire un truc. Ce sourire que tu peux afficher sur ton visage. Cette foutue tendresse que tu me montres… »

Je ne le quitte pas des yeux, même si je n’y vois plus grand chose. Même s’il m’en coûte que de le regarder aussi malheureux par ma faute. Je n’oublie pas l’urgence de cette révélation, pourquoi je la fais. Je m’en fiche des conséquences à mon sujet. Mais j’ai un petit à protéger, et il doit avoir en mains toutes les cartes pour s’en sortir. Même les plus honteuses. Même les plus atroces. Les plus terrifiantes. Les plus abjectes.

Dis-le. Vas-y.

Mais ce ne sont pas les mots de haine pourtant évidentes que j’entends. Mon souffle se bloque.

- « Je suis si heureux de les revoir... Bordel… »

C’est à ce terrible moment que je réalise mon erreur. Que je réalise tout ce que je lui ai retiré en disparaissant dans les ténèbres du monde. Ce n’est pas seulement un enfant qui retrouve une connaissance après une vingtaine d’années. C’est un enfant qui revoit son parrain à nouveau vivant. Qu’après certainement des années de deuil, de souffrance, de solitude, il réalise avec un certain soulagement qu’en vérité il avait été dupé.

Mes yeux quittent les siens. C’est trop.

Ma main tremblante revient couvrir mes lèvres à nouveau, tandis que ma posture se recroqueville un peu. Mes épaules se secouent à nouveau. Je pensais bien faire. Je pensais lui éviter le pire, mais qu’est-ce qui est pire que la mort ? Cette finalité qui apporte paix à sa victime certes, mais qui détruit les cœurs, engloutit les espoirs. Il n’y a rien de pire que de perdre espoir. Et j’y ai contribué.

Je ne sais plus quoi penser.

Que puis-je penser, de toute façon ? Me voilà propulsé dans cette ancienne vie que j’ai banni de mes souvenirs depuis plusieurs années, déjà. La peur au ventre. L’envie de fuite constante. L’incompréhension des autres. La solitude qu’elle a engendrée. Le piège mortel dans lequel j’étais confiné pendant plusieurs années. Mais surtout, sa lumière. Son sourire des plus enthousiastes lorsque je venais lui rendre visite. Ses grands yeux qui avalaient le monde alors qu’il ne parlait même pas encore, mais ces deux grandes billes bleues qui avaient tant à dire. Tant d’amour et de joie à donner. Ces deux grandes billes bleues qui ne demandaient qu’à être aimées. Ses étreintes chaleureuses à me revoir, qui ont disparu plus vite que je ne l’aurais soupçonné. Amer constat, à ne pouvoir qu’observer sa dégradation progressive, sans pouvoir y faire quoi que ce soit. Fuir ? Mais où ? Qu’aurait-il advenu de nous ? De lui ?

- « Tu as eu tort, de me cacher ça… J'ai grandi, je suis plus l'enfant qui tournait autour de toi en te donnant un surnom ridicule. On aurait put en discuter… Tu sais qu'ils ont essayé de te supprimer de ma mémoire? En la salissant? En essayant de me faire haire ce seul nom qui comptait pour moi... Mais jamais je pourrais te détester. Bon sang, tu sais que j'ai encore ton foutu carnet de questions quelque part… »

Je ne suis pas le seul à contempler tous ces souvenirs, même s’il ne s’en rappelle probablement pas la moitié. Et chaque évocation en tire un rire muet, fatigué, à bout de souffle, noyé dans toutes ces larmes et ces soubresauts. Ce surnom n’était pas ridicule. Tu n’arrivais pas à très bien parler au début, alors t’as improvisé. Le “R” était un peu difficile d’accès, alors “parrain” était devenu “pain”. Ses parents s’en moquaient, mais pas moi. Alors à chaque fois, de le voir déborder d’énergie et courir partout, à crier de toute sa joie “pain”, cette définition même du bonheur me redonnait toujours le sourire. Encore aujourd’hui, d’ailleurs : rien que d’y penser, mon sourire s’élargit. Cela faisait longtemps que je n’osais plus y repenser. Que j’avais fermé pour de bon ce chapitre de ma vie. Les petits bonheurs que l’on pouvait trouver dans cet océan de misère.

Mon “carnet de questions” était un dernier cadeau avant de partir en guerre, accompagné d’un livre que j’aimais beaucoup et que je lui avais confié. Je savais qu’il avait certaines difficultés, de par la solitude dont il était victime malgré lui, et tout le reste. J’avais donc écrit dans un petit carnet quelques conseils pour plus tard. Dans l’état dans lequel j’étais avant ce départ finalement décisif, je ne savais pas dans quel état je rentrerais, ni dans quel état il serait. Les menaces de sa mère s’étaient une fois de plus intensifiées, alors dans le cas où je ne pourrai jamais lui revenir, je lui avais fait ce présent. Quelques conseils sur comment interagir avec les gens ; sur le respect ; sur l’importance de la gentillesse, sans pour autant tolérer se faire marcher dessus ; sur la confiance en soi, même si je n’étais pas réellement un champion dans ce domaine ; toutes ces petites choses, pourtant si cruciales. Et il me dit qu’il l’a encore ? Par quel miracle ?

Ma surprise est cependant inexistante vis-à-vis de ma réputation après ma “mort”. Evidemment qu’ils voulaient lui pourrir la vie jusqu’à l’os. Mais il a toujours su rester fort, n’est-ce pas ? Il a toujours su se préserver, et n’a jamais laissé le comportement infâme de ses parents déteindre sur lui, n’est-ce pas ? Je voulais le croire, même si on n'échappe jamais vraiment aux comportements toxiques. D’une façon ou d’une autre, ils nous seront toujours transmis, fardeau travesti en héritage.

Son appui sur la table me ramène au présent brutalement. Je sursaute, en perds ce sourire de nostalgie, et constate la flagrance de sa transformation. Cette misère qu’il ose enfin montrer, alors qu’à l’époque, il souriait même au bord des larmes, même s’il avait mal, et me disait que tout allait bien. Il ne voulait probablement pas m’inquiéter, ou alors il voulait simplement profiter des bons moments.

Ce constat me fait réaliser à quel point cet échange était finalement nécessaire. A quel point il a besoin d’entendre cette explication pour pouvoir se construire pour de bon. Non que je comptais le lui cacher : par orgueil de ne pas me sentir mieux que ce couard de Hendrick, ou que ma propre sœur. Je savais qu’il en aurait besoin pour se construire convenablement, et pas sur une montagne de mensonges, mais je suis parti trop tôt, bien trop tôt. Je comptais attendre l’adolescence pour le faire, disons la quinzaine, car c’est cette période où tout change, où on commence à forger son propre opinion. Je lui aurais appris à se défendre, à se préserver face à l’abus. J’aurais pu être là pour le défendre, j’aurais pu le sortir de sa misère à mesure que le temps passe, et qu’il devienne un adulte épanoui, non sans lourdes cicatrices.

Tant de choses auraient changé si j’étais rentré, n’est-ce pas ?

Ou plutôt, si je n’étais jamais parti.

- « Mikaal. Tu es mon premier ami. Mon parrain. Mon protecteur. Oui, tu as disparu. Oui, ce fut douloureux. Mais y a toute une vie qui s'est écoulée. Je suis juste heureux de revoir le guerrier bienveillant qui était la seule personne qui pouvait être fière de moi. Même si ma protection n'était qu'une étape dans ta vie. Être ton protégé une étape dans la mienne... Que ce soit un souvenir d'un passé lointain... Je... Je… »

Mon corps se tend, se prépare au choc. Peu importe ce qu’il dira, je sais que la claque sera monumentale. Mais je dois être fort. Je dois être fort pour lui. Pour son avenir. Pour son épanouissement. Pour sa sécurité. Maintenant que je sais qu’il en a un d’avenir, je compte bien tout faire pour qu’il le préserve. Quitte à partir de sa vie pour de bon s’il l’exige.

- « Je peux espérer que l'on reparte sur de nouvelles bases? Que tu fasses de nouveau partie de ma vie? J'aurai surement toujours besoin d'un protecteur... S'il te plaît… »

Lorsque je repose à nouveau mes yeux surpris et embrumés de larmes sur lui, ce sourire que j’entrevois m’agite davantage. Chaque mot perce mes os, ou ces tourments qui ont pris leur place. Je ferme les yeux un moment, tentant de me calmer un minimum. Je ne dois pas faillir. Je dois rester fort. Lui dire l’entière vérité. Il ne peut pas désirer pareille folie sans savoir dans quel enfer il était en réalité embarqué. Il ne peut pas prendre pareille décision sans en connaître les conséquences, ou les causes. Un rire sans joie s’envole de mes lèvres, un rire amer, un rire déçu de lui-même. Je tente presque vainement de retrouver le contrôle de mon souffle, pour délier ma langue avec plus de facilité.

- « Dorne ..  »

Je cherche la bonne formulation, car je ne veux pas le faire davantage souffrir par maladresse, ou égoïsme. Un soupir de plus se perd dans la taverne qui s’agite toujours plus de festivités. Drôle de contraste.

- « Il y a autre chose que tu dois savoir, avant de me demander pareille chose. Je ne peux pas revenir dans ta vie, ou la quitter définitivement, sans la vérité. Et .. et en fonction, tu trancheras comme tu veux.  »

Cette vérité-là, c’est comme déterrer un corps qui y gît depuis des décennies. L’odeur est immonde, la chair est dévorée, les habits ont terni ou se sont déchirés. Une corvée insoutenable, mais qui pourtant doit être fait. Si je sais que jamais je ne trouverai la paix dans cette vie, je me dois au moins de lui apporter la sienne. Quitte à tout détruire. C’est la bonne chose à faire.

Mais je ne sais pas par où commencer. Alors, nerveux, je bois un peu de ma bière encore, comme avant, pour me redonner un sens de faux courage face au désastre que je m’apprête à relâcher dans la nature.

- « Il .. il y a une raison si tout ce qui est arrivé .. est arrivé. Il y a une raison à pourquoi ta vie a été aussi difficile, aussi injuste, aussi douloureuse. »

Une pause, une malencontreuse pause.

- « C’est à cause de moi. »

Des regrets qui m’ont toujours accompagné, des remords qui m’ont à jamais hanté. Il n’y a pas un jour où le passé n’écrasait pas mes épaules. Il n’y a pas un jour où, dans la tourmente de mes nuits, je n’ai pas songé à changer les choses, à regretter certaines décisions pourtant inévitables. Pas le moindre répit, même si je n’en mérite aucun. A en devenir malade, à en perdre la raison. Pour éviter toutes ces questions, toutes ces incertitudes, toutes ces peurs, tous ces scénarios qui ne se produiront jamais, tous ces démons qui m’empêchaient de dormir en plus du reste, pour les éviter tous je m’étais forcé à croire qu’il était mort pour de bon. Que jamais je ne pourrai le revoir. Qu’il n’y avait plus de questions à se poser, puisqu’il n’était plus. Que les conséquences de mes propres actions avaient enfin fini par l’emporter. Et que jamais, ô grand jamais, je ne pourrai réparer tout ça. Que jamais je ne serai autre chose que ce danger, que cette folie. Que jamais plus je ne serai ce saint que je voulais tant croire que j’étais. Ou au moins, quelqu’un de bien. Avec le moindre sens moral.

Il n’y a pas un jour où je ne pensais pas au petit et à ce sort que je lui avais infligé.

- « C’est aussi une longue histoire, donc .. mais je veux que tu écoutes attentivement. Je sais que tu auras des questions, et j’y répondrai, mais je veux pouvoir dire ce que j’ai à dire avant, d’accord ? »

Commencer par le plus difficile, ou ce qui fait le plus de sens. Le plus facile à comprendre. Le résumé fatidique d’une vie injuste.

- « Si les Wiergender se comportent ainsi avec toi Dorne, c’est parce que .. c’est parce que tu n’es pas un Wiergender. Et que tu dois porter les conséquences de mes propres actions. »

Je marque une pause, l’observe un peu, m’assure qu’il puisse entendre toute l’histoire. Car il est temps de briser le silence.

- « J’ai rencontré ta mère j’avais dix-sept ans à peine. Elle était mariée et malheureuse, et l’amour a fait son œuvre, j’imagine. Au début tout était beau et véritable, mais les choses ont rapidement changé. »

Je me redresse dans mon assise, les bras croisés contre ma poitrine, le regard dans le vague, fixant un point sur la table.

- « Je ne me suis jamais marié, je n’aimais pas cette idée. Mais elle devenait de plus en plus insistante dans sa demande de la faire divorcer de son époux pour que nous partions ensemble, vivre notre vie heureuse, ce genre de choses. Et j’y croyais, mais tu connais les alliances familiales, et les Wiergender sont de fervents alliés des Pentaghast : c’était donc impossible pour moi de faire pareille chose sans en payer de lourdes conséquences. Mais .. elle avait d’autres plans. Face à ses demandes insistantes, parfois à la frontière de la menace ou du chantage, je ne savais pas trop quoi faire, alors je me suis réfugié dans l’armée. Dans les aventures héroïques. Ça me donnait un sentiment de contrôle sur ma vie, alors que tout dérapait gentiment. »

En vérité, je n’étais pas un héros, je ne l’avais jamais été. Je n’avais fait que fuir, que manquer de courage et de fermeté, et surtout, que manquer à mes responsabilités. Mais lorsque l’on atteint à peine la vingtaine pour un homme, est-ce surprenant de fuir pareil dilemme, pareil fardeau ?

- « C’est difficile à expliquer, et je ne veux pas rentrer dans les détails, mais .. Elle avait un plan qu’elle jugeait irréfutable en tête. Son amour avait tourné à l’obsession, et je pensais sincèrement qu’avec le temps et la distance, les choses se calmeraient, mais comme cette lettre l’atteste, c’est tout sauf le cas. Elle s’est donc arrangée pour tomber enceinte de moi, alors que je faisais pourtant très attention avec ce genre de choses. J’ai une vision très traditionnelle et noble de la famille, je ne m’en suis jamais caché. Un mariage est un contrat, s’il y a de l’amour dedans c’est tant mieux, s’il n’y en a pas c’est tant pis. Un contrat a ses points à respecter, et la descendance en fait partie. Mais elle était prête à tout, j’imagine. »

Conter cette histoire est étrange. Enfin dire ces mots qu’on avait enfoui au fond de soi-même, en plus de les dire à Dorne en particulier, était aussi terrifiant que libérateur. Repenser à cette sombre période de ma jeunesse me fait serrer des dents, mais je ne me laisse pas m’éparpiller. Pas maintenant. J’ai commencé, je dois finir.

- « Elle était donc enceinte. C’est là qu’elle m’a lancé un ultimatum pour la demander en mariage, sinon elle se tuerait, ou tuerait l’enfant. J’étais reparti en vadrouille à ce moment-là, et la peur a repris le dessus. J’étais terriblement inquiet pour elle, mais à qui en parler ? Qui pourrait croire qu’un soit-disant héros comme moi aurait une crainte plus grande que la mort elle-même, et ce sous les traits d’une femme ? Qui pourrait croire qu’un homme de ma trempe, au caractère fort et généralement impulsif, se laisserait faire face à “juste” une jeune femme ? Personne. Et me voilà, les jours passant, les semaines passant, les mois passants .. »

Personne ne m’aurait cru, mais surtout, personne ne m’aurait défendu.

- « Et puis, tu es venu au monde. J’avais fui ses menaces. J’avais fui tout court, en vérité. De nombreuses fois, je lui avais dit de mettre un terme à la grossesse, ou de déposer l’enfant dans une Chantrie pour lui éviter des problèmes, mais tu constates évidemment qu’elle n’a jamais songé à ce genre d’échappatoire. Elle avait plus sinistre en tête. Pourquoi me nommer parrain, selon toi ? Pourquoi me garder dans les parages, aussi proche d’elle, ou de toi pour être plus précis, et t’affliger toutes ces horreurs ? Elle voulait que je paie, évidemment. Et si j’aurais simplement pu disparaître pour de bon, j’ai décidé d’entrer dans son jeu. Je n’allais pas te laisser seul dans tant de malheur, non plus, surtout que t’avais rien demandé. J’ai décidé de rester dans ta vie au mieux, de remplir mon rôle au mieux, dans le silence, dans l’incertitude, dans la peur. »

Je marque une pause, termine ma pinte de bière d’une traite. Ma gorge en était devenue sèche à force de parler, d’expliquer, de justifier, ou simplement d’exposer les faits.

- « Les premières années étaient les pires. Si une servante s’occupait de toi au début, il y avait des jours où ta mère t’enfermait à double tour dans une des pièces de la demeure. Tu devais avoir deux ans à peine .. Elle t’y enfermait parfois pendant plus de 24h, sans te nourrir. J’ai dû me prendre la tête avec Berthoald pour qu’il agisse sur les comportements de sa femme. Que t’étais qu’un gosse. Que t’avais rien demandé. Et honnêtement je pensais que rien d’autre ne se produirait. »

D’y repenser me rend presque malade. Sentir la terreur tordre mes tripes, mes muscles se tendre à la moindre menace, ne plus savoir ce qui est sincère ou non, ce qui est réel ou non, perdre pied. Mais c’est toujours le même visage qui me ramène un peu sur terre.

- « C’était une période où j’étais davantage présent, alors je passais un maximum te voir, tout en évitant soigneusement ta mère. Des fois elle me tendait des pièges, faisait mine de vouloir faire un truc les trois, pour finir par tenter de rallumer la flamme si j’ose dire. Je prenais davantage de précautions après ses sauvages tentatives. Sa colère montait, mais je la croyais suffisamment civilisée pour la garder pour moi. C’est là que j’ai constaté au fil du temps que tu devenais de moins en moins tactile, que çà et là tu avais quelques bleus, des petites griffures, et au fil du temps, tout s’était terriblement amplifié. J’ai tenté de la confronter dans une correspondance, car j’étais reparti sur le terrain, et tu sais ce qu’elle m’a répondu ? »

Un rire amer secoue mes épaules, renforce mon désarroi. Ça fait étrangement du bien de pouvoir enfin vider son sac, qu’on soit cru ou non. Ça fait du bien de simplement expier tout ce merdier verbalement, avec quelqu’un pour écouter.

- « “Ça ne serait pas arrivé si tu acceptais notre amour. J’ai tout essayé, c’est toi qui es sourd à nos cœurs.” C’est là que j’ai compris pour de bon que ça ne cessera jamais, mais surtout que je n’étais pas le fou dans l’histoire, et encore moins l’agresseur, si on peut dire comme ça. Et peu de temps après, je suis parti en guerre une fois de plus. Mais j’ai pris soin de ne pas te laisser sans rien, dans le cas où je ne reviendrai pas, ou dans le cas où je ne pourrai pas revenir à cause d’elle. »

Je m’arrête un moment, le regard qui vagabonde toujours. Je passe une main sur mon visage, notamment pour retirer ces larmes qui m’empêchent de pleinement voir, je me concentre un peu sur mon souffle pour ne pas bêtement craquer devant lui, car il mérite mieux. Il mérite tellement mieux qu’un couard comme père.

- « Je ne te demande pas de me pardonner. Je .. pense que c’est trop tard pour ça. Je suis désolé de ne te l’apprendre que maintenant.  »





"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Invité
Invité
Invité
avatar
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détenteSe séparer pour mieux se retrouver



Pardonner pour mieux avancer, c'était une chose importante après tout, non? Certes Mikaal avait fuit, mais c'était son parrain, non? Juste un parrain. Est-ce que Dorne peut rejeter tout le fardeau de sa propre vie à quelqu'un qui n'est pas lié à lui par le sang? Par la vie? Bien entendu, la douleur était présente dans son cœur. Mais cette personne face à lui, cet homme vieillissant qui fuyait parfois du regard et affichait sa culpabilité... N'était-ce pas déjà une certaine preuve de ce regret? Après tout, il était revenu, il lui avait sauvé la vie. Les deux discutaient après tout, non? Un nouveau départ, n'était-ce pas ce qui pouvait le plus s'envisager? Après tout, l'érudit était très loin d'être un homme sans défaut, bien au contraire. Que celui des deux qui n'avaient jamais fuit jette la première pierre non? Pendant trois longues foutues années il n'avait pas été présent pour Edana, pour sa propre femme. Alors oui, c'était certes un mariage arrangé mais... Ils étaient liés maintenant et devant le Créateur dans un sens.

Alors encore une fois, si lui avait fuit aussi, si lui même était loin d'être un parangon de la justice... Pourquoi est-ce qu'il en voudrait à son parrain? Pain, même pour l'intimité stupide d'un gosse et de son protecteur. C'était facile, il l'avait fait, il l'avait pardonné, il lui avait même proposé un nouveau départ. Une personne forte, importante dans sa vie pour l'accompagner. Tout pouvait bien recommencer, partir sur de nouvelles bases, non? Toute cette cruelle tapisserie pouvait bien enfin filer droit hein? Ce visage empli de larmes qui lui faisait face était digne de confiance, celui de son parrain, celui de son protecteur, rien à craindre, n'est ce pas? Alors pourquoi... Pourquoi...

- « Dorne ..  »

Pourquoi me donnes tu l'impression de tout vouloir briser?

Il y avait quelque chose derrière ce Dorne. Pas la simple utilisation que l'on faisait d'un prénom pour savoir s'il souhaitait plutôt du gibier ou du poisson. Non. On pouvait sentir un poids dans la façon dont il était prononcé, même pour l'imbécile que pouvait être le dernier des Wiergender face aux discussions avec un autre être vivant. C'était loin d'être terminé. Cela aurait été trop facile sinon. -

« Il y a autre chose que tu dois savoir, avant de me demander pareille chose. Je ne peux pas revenir dans ta vie, ou la quitter définitivement, sans la vérité. Et .. et en fonction, tu trancheras comme tu veux.  »

Ais-je vraiment envie de savoir tout cela, Mikaal? Le moment n'est-il pas déjà assez intense comme cela? N'ais-je pas déjà tranché une première décision?

Que des pensées. Aucun mot pour sortir de la bouche de l'érudit. Une certaine dualité s'affrontent dans son cœur. L'émotion était déjà lourde, pour de telles retrouvailles, alors pourquoi enfoncer encore plus au bélier une porte déjà défigurée? Mais, c'était pour la vérité. Et le Névarran avait à cœur la sincérité des faits. La question cependant, c'était jusqu'où cela irait, et à quel point ça allait faire mal alors que cinq minutes à peine il pleurait déjà comme un enfant qui venait de se faire mal. Jusqu'où la douleur ira cette fois-ci?

- « Il .. il y a une raison si tout ce qui est arrivé .. est arrivé. Il y a une raison à pourquoi ta vie a été aussi difficile, aussi injuste, aussi douloureuse. »

La raison je la connais déjà, Miche... Car la famille Wiergender est pourris jusqu'à la moelle dans sa façon d'éduquer, car ma mère et mon père m'ont toujours détestés, car mes frères sont des abrutis car...

- « C’est à cause de moi. »

Le flot de pensée de Dorne s'arrêta d'un coup face à cette auto-accusation. Comment ça, "A cause de moi"? Que pouvait bien avoir à faire son parrain dans la difficulté qu'avait eu le noble dans sa croissance face à sa famille? Certes en restant, il aurait peut-être pu empêcher certaines choses, mais pas toutes. Sans peine de créer un incident diplomatique entre leurs familles. Et même, il ne vivait pas tout le temps avec eux. Alors qu'est ce qui en faisait une cause?

- « C’est aussi une longue histoire, donc .. mais je veux que tu écoutes attentivement. Je sais que tu auras des questions, et j’y répondrai, mais je veux pouvoir dire ce que j’ai à dire avant, d’accord ? »

Comme seule réponse, le Névarran hocha la tête à l'affirmatif. Il n'avait de toute façon pas prononcé un mot depuis sa demande. Comme s'il en avait trop dit, comme si, depuis qu'il avait retrouvé l'usage de la parole il préférait rester de nouveau dans ce mutisme, pour écouter. A quoi bon interrompre une histoire de toute façon par des phrases qui n'auraient aucune utilité? Il avait la pensée, il avait la possibilité de discuter dans sa tête... Et d'y souffrir plus efficacement...

Pourquoi je sens mon cœur se resserrer plus fort à chaque seconde?


- « Si les Wiergender se comportent ainsi avec toi Dorne, c’est parce que .. c’est parce que tu n’es pas un Wiergender. Et que tu dois porter les conséquences de mes propres actions. »

Non. Non non non non non... Ne dit plus rien... Pas ce genre d'histoire, pas ce genre de vérité...

Crie dans la tête. Silence dans la bouche. Peur dans le cœur. Le dernier des Wiergender... Enfin, aux dires de Miche pas tant que cela, affichait un regard mélangeant terreur et incompréhension. L'érudit n'était pas un idiot. Il avait déjà lu tellement de récits magnifiques et tragiques qui contenaient ce genre de paroles. Ne pas être fils de... Porter les conséquences des actions d'un autre  homme... Ce n'était que le début de la vérité et pourtant cela semblait déjà bien trop difficile à porter pour entendre ce qui devait encore arriver. Mais il fallait faire preuve de force et de courage. Impossible de fuir... Ou tout du moins, qu'est ce que fuir apporterait de mieux?

- « J’ai rencontré ta mère j’avais dix-sept ans à peine. Elle était mariée et malheureuse, et l’amour a fait son œuvre, j’imagine. Au début tout était beau et véritable, mais les choses ont rapidement changé. »

La main du Névarran vint à se poser sur son visage, frottant d'abord ses deux yeux de son pouce et son index avant de la frotter sur la partie droite de son visage. Comme une façon d'essayer de se retrouver face à la réalité des choses. Ce n'était malheureusement pas un rêve. Encore moins un cauchemar. Que ce soit l'un ou l'autre, à un moment cela s'arrêtait. Mais c'était la vie, sa vie, et la fin n'arriverait que le jour de sa mort... Pas à la fin de cette histoire. Dorne ne pût s'empêcher de terminer alors sa nouvelle bière dont il ne restait plus beaucoup de volume avant d'en commander une autre. Il aurait besoin d'alcool pour tenir. De beaucoup, beaucoup d'alcool si ça continuait dans le sens logique de ce genre d'histoire...

- « Je ne me suis jamais marié, je n’aimais pas cette idée. Mais elle devenait de plus en plus insistante dans sa demande de la faire divorcer de son époux pour que nous partions ensemble, vivre notre vie heureuse, ce genre de choses.

Arrête...

- Et j’y croyais, mais tu connais les alliances familiales, et les Wiergender sont de fervents alliés des Pentaghast : c’était donc impossible pour moi de faire pareille chose sans en payer de lourdes conséquences. Mais ..

Cette histoire...

- Elle avait d’autres plans. Face à ses demandes insistantes, parfois à la frontière de la menace ou du chantage, je ne savais pas trop quoi faire, alors je me suis réfugié dans l’armée.

Me donne envie de fuir...

- Dans les aventures héroïques. Ça me donnait un sentiment de contrôle sur ma vie, alors que tout dérapait gentiment. »

Aventures héroïques? Coucher avec la femme d'un autre était-elle aussi une aventure héroïque?

Plus Miche parlait, plus l'esprit de Dorne en faisait autant là où ses lèvres ne bougeaient pas. L'esprit agissant bien plus que ce faciès. Le cerveau brûlait, critiquait, demandait grâce... Là où le cœur souffrait, pleurait et demandait à être achevé. Au centre, une bouche silencieuse, un visage perdu, des yeux fuyants. Que dire de plus après tout? Pour le moment rien. On n'interrompait pas une histoire en plein milieu, même la pire. Mais savoir que le Protecteur qui l'aidait dans sa toute jeune enfance couchait avec sa mère dans une relation qui semblait des plus malsaines... C'était douloureux. Oh, bien entendu, la première critique allait à Miche, il était face à lui après tout. Mais que Frieda soit ainsi après lui avoir rabaché l'importance de la fidélité filiale au sein de la noblesse? C'était sûrement la plus grande plaisanterie de ce foutu âge. Age des Exaltés? Il en aurait été Exaltés de rire même si l'information n'était pas aussi perturbante...

- « C’est difficile à expliquer, et je ne veux pas rentrer dans les détails, mais .. Elle avait un plan qu’elle jugeait irréfutable en tête. Son amour avait tourné à l’obsession, et je pensais sincèrement qu’avec le temps et la distance, les choses se calmeraient, mais comme cette lettre l’atteste, c’est tout sauf le cas. Elle s’est donc arrangée pour tomber enceinte de moi, alors que je faisais pourtant très attention avec ce genre de choses. J’ai une vision très traditionnelle et noble de la famille, je ne m’en suis jamais caché. Un mariage est un contrat, s’il y a de l’amour dedans c’est tant mieux, s’il n’y en a pas c’est tant pis. Un contrat a ses points à respecter, et la descendance en fait partie. Mais elle était prête à tout, j’imagine. »

Encore une fois... Pourquoi parler de contrat que tu souilles toi même? La tromperie est-elle aussi une tradition, de ta vision?

Pas une personne pour rattraper l'autre dans ce couple d'amoureux hors des sentiers du Névarra. Finalement, pas difficile de savoir pourquoi lui aussi était hors du sentier et d'où pouvait venir une bonne partie de ses propres défauts... Il valait aussi mieux que Dorne garde ses pensées pour lui, quitte à en attraper une maladie cardiaque ou un ulcère. Les mots font plus mal que les poings il paraît... Mais nul doute que l'envie d'utiliser les deux devenait urgente, ou le deviendrait.

- « Elle était donc enceinte.

De toi. Et c'était moi, le maudit rejeton hein?

- C’est là qu’elle m’a lancé un ultimatum pour la demander en mariage, sinon elle se tuerait, ou tuerait l’enfant. J’étais reparti en vadrouille à ce moment-là, et la peur a repris le dessus. J’étais terriblement inquiet pour elle, mais à qui en parler ? Qui pourrait croire qu’un soit-disant héros comme moi aurait une crainte plus grande que la mort elle-même, et ce sous les traits d’une femme ?

Un sois disant héros, ce sont les mots justes, oui.

- Qui pourrait croire qu’un homme de ma trempe, au caractère fort et généralement impulsif, se laisserait faire face à “juste” une jeune femme ? Personne. Et me voilà, les jours passant, les semaines passant, les mois passants .. Et puis, tu es venu au monde.

Un bâtard. Un bâtard est venu au monde.

- J’avais fui ses menaces. J’avais fui tout court, en vérité. De nombreuses fois, je lui avais dit de mettre un terme à la grossesse, ou de déposer l’enfant dans une Chantrie pour lui éviter des problèmes, mais tu constates évidemment qu’elle n’a jamais songé à ce genre d’échappatoire. Elle avait plus sinistre en tête. Pourquoi me nommer parrain, selon toi ?

Comment une personne peut-elle ainsi utiliser son propre enfant pour torturer une autre personne?

- Pourquoi me garder dans les parages, aussi proche d’elle, ou de toi pour être plus précis, et t’affliger toutes ces horreurs ? Elle voulait que je paie, évidemment. Et si j’aurais simplement pu disparaître pour de bon, j’ai décidé d’entrer dans son jeu. Je n’allais pas te laisser seul dans tant de malheur, non plus, surtout que t’avais rien demandé. J’ai décidé de rester dans ta vie au mieux, de remplir mon rôle au mieux, dans le silence, dans l’incertitude, dans la peur. »

Plus l'histoire avançait, et pire était la tournure que cela prenait. On passait d'une sordide affaire de tromperie à l'utilisation d'un pauvre enfant comme poids pour maintenir un amant fuyant. De puissants haut le cœur remontaient jusqu'à la bouche de Dorne qui avait envie de vomir tellement il était écœuré de cela. Comment un être humain pouvait-il seulement se regarder dans une glace après cela? Et pourtant, nul doute que Frieda utilisait souvent, très souvent un miroir depuis cette époque. Elle n'était pas du genre à abandonner quoi que ce soit, si Berthoald, le faux père du tout aussi faux Wiergender était un homme puissant, il n'avait rien à envier à l'esprit de son épouse. Absolument rien.

Toute cette histoire me dégoûte... Mère... Toi... Les Wiergender... Tout...

- « C’était une période où j’étais davantage présent, alors je passais un maximum te voir, tout en évitant soigneusement ta mère. Des fois elle me tendait des pièges, faisait mine de vouloir faire un truc les trois, pour finir par tenter de rallumer la flamme si j’ose dire.

T'entendre parler de cet amour me dégoute tellement... Père.

- Je prenais davantage de précautions après ses sauvages tentatives. Sa colère montait, mais je la croyais suffisamment civilisée pour la garder pour moi. C’est là que j’ai constaté au fil du temps que tu devenais de moins en moins tactile, que çà et là tu avais quelques bleus, des petites griffures, et au fil du temps, tout s’était terriblement amplifié. J’ai tenté de la confronter dans une correspondance, car j’étais reparti sur le terrain, et tu sais ce qu’elle m’a répondu ? »

Entendre ensuite que les douleurs physiques dataient de bien plus tôt que sa jeune enfance vint à bousculer mentalement Dorne qui dût utiliser la table pour ne pas s'écrouler. Des bleues? Des griffures? Le rire amer de Miche ne faisait que renforcer ce puissant malaise qui s'instaure toujours plus profondément dans cette discussion.

- « “Ça ne serait pas arrivé si tu acceptais notre amour. J’ai tout essayé, c’est toi qui es sourd à nos cœurs.” C’est là que j’ai compris pour de bon que ça ne cessera jamais, mais surtout que je n’étais pas le fou dans l’histoire, et encore moins l’agresseur, si on peut dire comme ça. Et peu de temps après, je suis parti en guerre une fois de plus. Mais j’ai pris soin de ne pas te laisser sans rien, dans le cas où je ne reviendrai pas, ou dans le cas où je ne pourrai pas revenir à cause d’elle. »

L'esprit de Dorne c'était vidé, de plus en plus alors que les explications s'enchaînent. N'arrivant pas à imaginer un seul instant qu'une mère puisse s'attaquer à son propre bébé. Mais, et même si c'était bien entendu la pire des choses, la personne en face de lui qui séchait ses larmes... Ces personnes qui parlaient..

- « Je ne te demande pas de me pardonner. Je .. pense que c’est trop tard pour ça. Je suis désolé de ne te l’apprendre que maintenant.  »

Cette personne qui l'avait abandonné, qui s'excusait... A défaut d'être pire... Le méritait-il, d'être pardonné? Bien entendu, Dorne pouvait excuser le départ de son parrain... Mais pardonner un père ayant volé dans un sens la femme d'un autre, puis avoir abandonné vingt-et-une années son fils en sachant les traitements subis? Est-ce que cela était tout bonnement excusable?

Non

Essayant de trouver un minimum de courage pour retrouver la parole, le jeune Névarran prit la pinte qui était face à lui, avant de la descendre cul-sec. Bon sang, l'amertume n'était peut-être pas si forte que ça avec une blonde, mais elle faisait tout de même mal enchaîné comme cela. Mais pas question de s'arrêter avant la dernière foutu goutte. Quand le verre se posa enfin, vide, le regard de Dorne laissait de nouveau couler des larmes. Trahison. Abandon. Horreur. Pourtant, une légère pensée vint à faire rire Dorne, un rire jaune, mais un rire profond. Et plus il riait, plus il pleurait. Il faut quelques secondes avant de se ressaisir. Essayant alors de parler, avec quelques hoquet de rire.

- Pardon... Pardon... Mais c'est amusant... ça doit être dans les gènes en fait... Chez les hommes Névarrans, d'abandonner les autres... Hahaha... Toi, Berthoald à mon sujet... Moi avec Edana... Si ce n'était pas aussi pathétique on pourrait définitivement en rire tous ensemble!

Le cœur de Dorne saignait, avec abondance. L'alcool ayant en plus commencé à retirer les filtres qui le faisait passer pour ce doux agneau innocent. Ces nombreuses années de souffrances, d'abandons... Issues d'une foutu histoire d'amour et de tromperies ayant mené à encore plus de douleurs? Que dira son épouse en sachant qu'elle était mariée à un bâtard? Tout cela pour... Pour...

- La faute du père se transmet au fils. C'est ça, hein? Tu as décidé de voler la femme d'un autre homme, malgré toute tes précautions tu as fais un foutu bâtard et des années après tu fuis car cela devient trop difficile et c'est à moi de continuer à endurer cette souffrance?

On pouvait lire une pointe de haine dans le regard de Dorne. Mais ce serait injuste de dire qu'elle n'était dirigée que vers Miche. Elle était aussi dirigée vers Frieda. Mais à l'heure actuelle, il n'y avait malheureusement qu'une personne en face du jeune homme.

- Qu'un parrain fuit, je peux l'entendre, mais... Mais...

Il l'avait dit dans sa tête, en pensée. Mais le dire à haute voix? C'était beaucoup plus difficile. Mais c'était la réalité. Qu'il le veuille ou non.

- Qu'un... Qu'un père abandonne son enfant en le sachant maltraité... Tu voulais me laisser quoi d'utile bon sang à mon âge? J'avais cinq ans! Et un carnet de questions! Tu sais ce que J'AI enduré, pendant que tu étais au loin à t'occuper d'un bordel ou à guerroyer je ne sais où, père?

Serrant son poing gauche, Dorne prit une profonde inspiration. Une inspiration qui avait une drôle d'odeur. Celle des cendres. Celle d'un jour tragique dont, finalement, la seule bonne nouvelle qu'il pouvait tirer de tout cela, c'était cette odeur de brûlé qui lui montrait qu'il était encore en vie... En vie, mais seul.

- Ils se sont mis à quatre pour me faire regretter mon existence. Car je m'intéressais à quelque chose d'interdit, car je voulais aider les autres. Car je n'étais pas un combattant comme eux. J'ai presque senti mon coeur s'arrêter de battre face aux coups de Siegfried. Ils ont foutu le feu à tous mes écrits, à tous mes livres. J'allais faire quoi? Leur poser une question sur leurs fleures préférés? Connaître la solitude, être forcé de subir la solitude d'une famille qui n'est qu'en partie la mienne? La souffrance d'une famille dont mon sang coule à peine dedans hormis une mère aussi cruelle que diabolique?

Essayant de contrôler sa voix pour ne pas avoir à parler trop fort, le ton que prenait Dorne allait parfois dans les aigus pour essayer de se maîtriser, avec un succès mitigé. Pour lui, c'était vraiment une épreuve des plus complexes de déballer ce qu'il avait aussi sur son cœur. Comme vingt longues années de souffrances dirigées vers un responsable. Un seul, sur de nombreux, qui hélas devait prendre plus que les autres. Car la vérité était vraiment des plus difficiles à digérer pour Dorne "Wiergender".

- J'ai été obligé de rejoindre l'armée sous les ordres d'un frère... Non, d'un abruti qui me déteste. Sous les ordres d'un homme qui pourrait me tuer de ses propres mains. De subir les humiliations à la chaîne. Finalement je comprends pourquoi j'ai été banni quand il a perdu son bras! J'étais enfin à ma place! Rejeté, éloigné de tout! Qui voudrait d'un bâtard aussi minable, Père? Qui voudrait d'un bâtard abandonné par son père. Utilisé par sa mère. Et martyrisé par son demi sang?

Les larmes continuaient de couler. Finalement, depuis qu'il savait que Mikaal était de retour dans sa vie, avait-il cessé de pleurer depuis? Non, ce n'était qu'un torrent qui asséchait ses yeux petit à petit. Mais pourtant la colère elle ne quittait pas ce cœur qui saignait. Elle était trop présente, trop de rancœur, trop difficile à avaler. Trop d'informations finalement, comment faire pour un pauvre jeune homme qui se rendait compte qu'une immense partie de ses malheurs résidait dans un adultère malsain? Hochant négativement la tête, Dorne soupira.

- Tu vaux peut-être mieux que Frieda pour avoir essayé... Mais... Je te faisais confiance. J'ai toujours eu l'espoir enfouis de te revoir... Mais savoir ça, c'est trop pour moi... Je ne peux espérer un jour être moi-même père avec deux si tragiques exemples...

Un nouveau soupir. Il se rend compte que depuis qu'il parle, il n'a été que mauvaise langue. Ne prenant que le mauvais côté des choses pour cracher sa haine. Mérite t'il cela? Sûrement. Mérite-t'il tout? Non.

- Je... Je ne sais même pas si j'ai au moins envie de te remercier de cette vérité... Encore moins de te pardonner... Mais... Seul le temps le dira... Mikaal... Miche... Père. Nous porterons au moins ce fardeau à deux dans cette ville.

Parfois, pardonner ne permettait pas d'avancer, c'était une chose qui pouvait-être douloureuse après tout, non? Mikaal avait fui, alors que c'était son père. Pas juste un parrain. Est-ce que Dorne peut-il rejeter tout le fardeau de sa propre vie à quelqu'un qui est lié à son sang? Par la vie? Bien entendu qu'il le pouvait, qu'il le voulait. La douleur était présente dans son cœur.  Elle était présente dans son sang. Elle était présente dans ses yeux.

Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente

Ma plus grande crainte est en train de se produire. L’issue de tous ces cauchemars qui me gardait le plus réveillé possible, l’issue qui a demandé le plus grand nombre de coups de fouet, et que même après la douleur, elle persistait.

Il ne m’aime plus. Il me hait.

Et je me tiens devant lui, avec chaque mot, chaque souffle, comme un pieu que je plonge dans son cœur. Mon propre fils. Dont les larmes brûlent ses joues. Dont les dents se serrent. Dont les lèvres tremblent de colère et de douleur. Mais je dois persister, continuer de planter ce pieu gigantesque dans ce cœur trop gros. Chaque souffle, chaque seconde qui passe, ce temps insupportable qui pèse sur nos épaules, sur ses épaules. Je ne peux que réceptionner cette souffrance, le regarder droit dans les yeux pour ne rien manquer de mes fautes, des erreurs fatales que j’ai commises dans une jeunesse trop insousciante et stupide. L’apogée de ces cauchemars sans fin, le gouffre au-delà, même. Les enfers qui s’ouvrent devant moi.

Si la guerre m’a mortellement blessé, c’est bien ce doux regard brisé qui me tue.

La terreur. L’envie de fuir. Aussi opposées sommes-nous dans nos rôles dans cette histoire – moi le narrateur stupide, lui le public coincé avec mes paroles –, nos yeux se reflètent sans peine. Moi aussi, je voudrais fuir, Dorne. J’ai fui toute ma putain de vie. Sans me retourner. Un héros qui se proclame ainsi n’est qu’un imposteur, et je connais ma place. Mais pour rien au monde, quitte à ce que la vérité te brise, mon garçon, je ne laisserai cette femme te mentir davantage, te tourmenter davantage, et en finir avec toi.

Il me hait.

Mais la terreur se transforme, au fond des yeux qu’il tient de sa mère. Une lueur que j’ai déjà vu dans ceux de cette harpie, et qui me fait toujours autant froid dans le dos. De la colère. De la haine. Evidemment. Comment lui en vouloir, alors que j’ai saboté sa vie entière avant même sa naissance ? Un frisson parcourt mes épaules. Je l’observe boire comme si sa vie en dépendait, mais en-dehors du récit, aucune inquiétude n’a la place de s’exprimer. Je n’ai plus cette place. Je l’ai troquée pour cette lourde vérité.

Il me hait ..

Mais après une telle tempête dans son crâne, il ne reste plus rien. Son visage retrouve sa neutralité, ses yeux se vident.

J’aurais dû mourir à Vitria.

Son visage se décompose petit à petit, comme je l’ai imaginé tant de fois dans mes rêves. Ceux fiévreux où le sang coule encore sur mes mains. Ceux sur le champ de bataille, avec la poussière mêlé aux larmes, à la sueur et aux larmes écarlates. Ceux où le soleil ne se lève plus jamais, où cet enfant – mon enfant – me regarde, le même vide dans ses yeux. Il resserre son doudou contre son petit corps trop petit, il me regarde patauger dans l’herbe morte et écrasée. Pas un mot. Un silence éternel, car telle est ma sentence ; le silence, le froid, l’oubli.

J’aurais dû. Mourir. A Vitria.

Mais un rire se propage. Un rire sinistre, et l’espace d’un battement de cils, ce n’est pas Dorne que j’entends. C’est ce Tévintide désabusé qui m’a trouvé. Qui rit. Qui se moque de la grandeur que je pensais avoir. De l’ironie de cet enfer. De ce drame irréel. Mais c’est bien Dorne qui rit, qui pleure, l’amertume coule des yeux de sa mère.

- « Pardon... Pardon... Mais c'est amusant... ça doit être dans les gènes en fait... Chez les hommes Névarrans, d'abandonner les autres... Hahaha... Toi, Berthoald à mon sujet... Moi avec Edana... Si ce n'était pas aussi pathétique on pourrait définitivement en rire tous ensemble! »

Mon poil se hérisse sur la nuque. Je me redresse, un regard de choc et de confusion posé sur ses deux épaules. Pourquoi rit-il ?

Pourquoi ?

- « La faute du père se transmet au fils. C'est ça, hein? Tu as décidé de voler la femme d'un autre homme, malgré toute tes précautions tu as fais un foutu bâtard et des années après tu fuis car cela devient trop difficile et c'est à moi de continuer à endurer cette souffrance? »
- « Je .. »

Je n’ai certainement pas dit ça.

Mes yeux s’agrandissent encore d’un choc que je ne peux plus contenir. Les mots m’échappent, ma gorge s’assèche, et je ne peux que l’observer, attendre que ce fils devenu bourreau n’abatte sa sentence.

Pour la première fois entre ces murs, je me sens différent. Ce n’est plus le terrifiant Miche du Laurier. Pour la première fois de ma vie, je me sens comme un vieillard épuisé qui n’a fait que rater sa vie.

Un vieillard.

A le regarder, j’ai vraiment l’impression de converser avec mon moi du passé. Celui insolent, impulsif, qui prenait des risques et n’assumait rien derrière. Et surtout, celui qui n’aurait jamais compris le désarroi qui hante mon cœur depuis toutes ces années de misère volontaire.

Putain, qu’il ressemble à son père.

- « Qu'un parrain fuit, je peux l'entendre, mais... Mais… »

Non, ne le dis pas.

- « Qu'un... Qu'un père abandonne son enfant en le sachant maltraité... Tu voulais me laisser quoi d'utile bon sang à mon âge? J'avais cinq ans! Et un carnet de questions! Tu sais ce que J'AI enduré, pendant que tu étais au loin à t'occuper d'un bordel ou à guerroyer je ne sais où, père? »

Père.

Un frisson parcourt ma peau. Une partie de moi a envie de se justifier. D’expliquer les horreurs que j’ai vues .. que j’ai commises. La folie des idéaux qui nous dépassent. Que je ne pouvais plus me permettre de rentrer après pareille faute. Que la pire chose qui puisse m’arriver serait de le décevoir. Qu’il réalise quel monstre lui a donné vie sans le désirer.

L’autre partie de moi a simplement envie d’accepter et de disparaître. D’encaisser. De mourir.

Le sol tangue. Une main s’agrippe au bois de la table, comme un navire en train de chavirer dans la tempête. Une tempête de larmes, de regrets, de dilemmes impossibles. Ce n’est pas l’alcool, non, c’est pire.

La Peur. La vraie. Celle qui forge l’Homme. Les Légendes. Ou les détruit.

- « Ils se sont mis à quatre pour me faire regretter mon existence. Car je m'intéressais à quelque chose d'interdit, car je voulais aider les autres. Car je n'étais pas un combattant comme eux. J'ai presque senti mon coeur s'arrêter de battre face aux coups de Siegfried. Ils ont foutu le feu à tous mes écrits, à tous mes livres. J'allais faire quoi? Leur poser une question sur leurs fleures préférés? Connaître la solitude, être forcé de subir la solitude d'une famille qui n'est qu'en partie la mienne? La souffrance d'une famille dont mon sang coule à peine dedans hormis une mère aussi cruelle que diabolique? »

Je soutiens son regard malgré les larmes. Je soutiens son regard malgré cette nausée qui compresse mes tripes. Je soutiens son regard malgré la laideur, malgré la lâcheté, malgré les erreurs impardonnables, malgré l’épouvantable. Malgré la vérité. Celle que personne n’aime regarder en face. Mes dents se serrent, mes lèvres tremblent, mes paupières papillonnent, mon nez se retrousse par à-coups, mes mains se serrent et se desserrent ; mais je soutiens son regard malgré tout. Je dois le faire. S’il veut vivre, je dois le faire.

- « J'ai été obligé de rejoindre l'armée sous les ordres d'un frère... Non, d'un abruti qui me déteste. Sous les ordres d'un homme qui pourrait me tuer de ses propres mains. De subir les humiliations à la chaîne. Finalement je comprends pourquoi j'ai été banni quand il a perdu son bras! J'étais enfin à ma place! Rejeté, éloigné de tout! Qui voudrait d'un bâtard aussi minable, Père? Qui voudrait d'un bâtard abandonné par son père. Utilisé par sa mère. Et martyrisé par son demi sang? »

Il y a toujours quelqu’un, aussi misérable puisse-t-on être.

Je repense à mon arrivée au Laurier Carmin, il y a plusieurs années déjà. A cette indifférence, ce dégoût même face à l’apparence de vieillard sans-abri que je dégageais. Cette moue qu’elle avait effectué ce jour-là et, dans son sophistiqué rigoureux désormais habituel, ne m’avais même pas laissé le temps de parler qu’elle avait refusé ma candidature. Mais le bon événement au bon moment avait complètement changé les choses. Il n’avait suffi que d’une personne. Et cette étrangère hautaine et trop ambitieuse pour son propre bien est aujourd’hui la soeur la plus précieuse que je possède dans mon entourage. Je peux mourir pour elle. Je peux me tuer pour elle.

Il trouvera les siens.

Ce cauchemar enfin réel m’apporte un certain mais étrange espoir. Celui que Dorne, qui sait enfin tout après toutes ces années, puisse faire la part des choses, comprendre enfin ce par quoi il est passé, et s’en défaire pour enfin commencer sa propre vie. Quitte à devoir disparaître dans les ténèbres de la mienne à nouveau. Une étrange consolation amère de me dire que j’ai certes brisé sa vie aujourd’hui – cette vie qu’on lui a attribuée –, pour qu’il puisse construire la sienne. Comme de Mikaal je suis passé à Miche. Une étrange consolation de me dire que je vais quitter sa vie, qu’il me hait, mais qu’il vivra. Il cessera de simplement survivre.

Cela semble sans cœur, mais après-tout, mon sang n’est-il pas de l’impitoyable Névarra ? Un sourire tordu s’étire sur mes lèvres. Normalement, je devrais penser quelque chose comme “mais moi je veux de toi enfin, je t’aime Dorne.” Mais je connais ma place. Elle n’est pas à ses côtés. Et je m’en voudrais de l’y contraindre alors que j’ai foutu en l’air sa vie entière. Je sais déjà que je vais devoir le laisser partir. A quoi m’attendais-je ? Qu’il accepte toutes ces horreurs à bras ouverts, et que tout se finisse bien ?

Balivernes.

- « Tu vaux peut-être mieux que Frieda pour avoir essayé... Mais... Je te faisais confiance. J'ai toujours eu l'espoir enfouis de te revoir... Mais savoir ça, c'est trop pour moi... Je ne peux espérer un jour être moi-même père avec deux si tragiques exemples… »

Je hoche de la tête en silence, défait. Une pensée pour mes propres parents. Un père distant et cruel, une mère distante et moins cruelle. Il a peut-être raison : c’est sûrement de famille.

Et si je n’ai pas interrompu ou répondu au moindre propos énoncé, aussi brutal puisse-t-il être – mais justifié –, ses dernières paroles froncent mes sourcils. Ferment mon visage.

- « Je... Je ne sais même pas si j'ai au moins envie de te remercier de cette vérité... Encore moins de te pardonner... Mais... Seul le temps le dira... Mikaal... Miche... Père. Nous porterons au moins ce fardeau à deux dans cette ville. »
- « Non. »

La voix est rauque, comme si je n’avais plus parlé depuis des années. Un mot bref, sombre, d’une colère froide. Je me redresse.

- « Je ne t’ai pas dit tout ça pour que tu en souffres davantage. Je l’ai dit pour que tu aies toutes les cartes en mains, Dorne. »

Je me rappelle de la raison qui a mené à autant de douleurs autour de cette table. Je termine ma pinte d’une traite. Essuie mes yeux d’un geste vif de la main.

- « Cette lettre est un avertissement. Je suis convaincu que ta mère va non seulement tenter de me retrouver pour me garder dans ses filets, mais aussi qu’elle va .. Je soupire, pince l’arête de mon nez. Elle ne reculera devant rien, n’est-ce pas ? Mais aussi qu’elle va te tuer. Tu ne connais pas sa folie aussi bien que moi, pour moi c’est une certitude. »

Je marque une pause, passe une main sur mon visage. Respire lentement.

- « Ne me remercie pas. Ne me pardonne pas. Mais laisse-moi me charger d’elle. C’est tout ce que je te demande. Après, tu ne me reverras plus jamais. »

Une autre pause. Une autre hésitation. Une autre peur enfouie loin, si loin, qui gronde.

- « Le seul moyen de s’occuper de son cas est d’apprendre la vérité à son époux. Car il pense que je l’ai .. Créateur .. “Agressée”. Mais j’ai conservé toutes mes correspondances avec elle. J’ai toutes les preuves pour la faire tomber, rétablir la vérité dans cette famille, et t’offrir la paix et cette vie que t’attends depuis des années. »

Puisque je ne suis bon qu’à détruire, alors autant tout détruire. Tout. Pour qu’il puisse faire ce que je n’ai jamais su faire : construire.

- « C’est la seule chose que je puisse faire pour rattraper cet immense merdier dans lequel je nous ai tous entraînés. Et puis je disparais de ta vie. C’est tout ce que je demande. »

Ensuite, je partirai de ta vie, et tu seras enfin heureux.





"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Miche
Miche
Garde du corps de l'Acanthe
Garde du corps de l'Acanthe
Miche
Personnage
Illustration : Love is the poison and the antidote.

Peuple : humain
Âge : 48 ans depuis Auguste
Pronom.s personnage : Il/lui
Origine : Névarra
Occupation : Vigie, garde du corps de Vera
Localisation : Laurier Carmin majoritairement
Pseudo : Adamant
Pronom.s joueur.euse : Il/lui
Crédits : Dan Mora pour le vava, Mitch Mohrhauser pour l'illu
Date d'inscription : 30/12/2022
Messages : 144
Autres personnages : Copper, Alzyre de Launcet, Tiaru Tohopka
Attributs : CC : 20
CT : 12
End : 16
For : 18
Perc : 15
Ag : 16
Vol : 18
Ch : 9

Classe : Civil, niveau 2
Feuille
Joueur

 

https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1524-miche-i-will-do-
Un simple moment
de détente


Suite au départ du joueur du forum, voici la conclusion de ce rp.

Son souffle se suspend un instant, tandis que son regard tantôt éventré, tantôt endurci, passe d’une pupille ambre à une autre. Une résignation s’affiche alors sur ses traits épuisés, une conclusion fatale que j’attendais depuis des années et des années.

Dorne est un homme à présent, marié de surcroît. C’est toujours un bien étrange constat. Durant cette vingtaine d’années d’absence, son image me paraissait toujours sous ces traits d’enfant joyeux ou triste, figé dans une époque si lointaine, à présent. Et soudainement, depuis quelques mois, le voici en homme qui doit apprendre à prendre sa vie en mains sans le moindre guide. Défier sa famille qui n’a eu de cesse de l’abattre. Je ne peux pas laisser ce fardeau sur ses épaules.

Ma supplique demeure sans réponse, les réflexions de Dorne sont si nombreuses et intenses qu’il me semble les voir au coin de l'œil. Un silence tranchant qui coupe mon souffle, plante mon cœur à mon tour.

Comme j’aimerais lui dire que je l’aime.

Comme j’aimerais lui dire que je suis fier de lui. Que je suis heureux de le retrouver. Que je suis heureux de le savoir en vie et loin de sa famille. En sécurité. Comme j’aimerais tout reprendre de zéro, réapprendre à le connaître, m’intéresser à ce qui le passionne, passer du bête temps avec lui, même pour ne rien dire. Profiter de sa présence après tant d’années à me déchirer l’âme sur son état hypothétique. Découvrir ses lectures préférées, ce qu’il aime manger, parler du pays tantôt pour s’en moquer, tantôt pour la réminiscence de ce bonheur noyé dans une bien terrible tempête. Me promener à ses côtés dans cette ville certes imparfaite, mais que tous deux sommes forcés d’appeler “maison”. Essayer quelques tavernes et quelques alcools. Voir sa tête se friper sous son premier shot de jäger. Ne pas briser tout ce en quoi il se raccrochait.

J’aurais tué pour le voir grandir. L’aider dans ses études. Être bien trop exigeant au départ avant de réaliser trop tard que ce n’est pas la bonne approche à avoir. L’entraîner à l’épée et à la lance. L’entendre me parler d’amour ou de conneries. Le consoler dans les moments difficiles. Lui apprendre à monter à cheval et le laisser partir pour la première fois de lui-même, avant de terminer dans un galop hors de contrôle, puis dans la boue la tête la première. Assister à son mariage. Rencontrer sa nouvelle épouse, et l’apprécier. Ou non. Constater que l’armée n’est pas faite pour lui, m’agacer car l’armée a été la demi-solution à tous mes problèmes, mais finalement accepter ses envies et revoir ce sourire sur ses lèvres après une énième dispute. J’aurais tué pour avoir une chance d’être son père. Pour avoir une chance d’être à ses côtés. Pour avoir une chance d’accomplir mon devoir. Pour avoir une chance de le confronter à la vie, d’être détesté par un adolescent en crise car “je ne comprends rien”, puis de me réconcilier avec lui quelques années après car il en comprend la complexité.

Mais je le vois dans ses yeux. Je n’aurai jamais cette chance, et je dois l’accepter. C’est trop tard. J’ai merdé. Et je dois en payer les conséquences le reste de ma misérable et trop longue vie.

Après un long silence. Après une tempête de songes qui dévaste son crâne. Les lèvres de Dorne se décollent l’une de l’autre, pour abattre sa sentence.

- « Tu veux que j’aie “toutes les cartes en mains”, père, alors que tu les as toujours eues enfouies au fin fond d’une poche… » Son visage se ferme pour de bon. Ses iris disparaissent. Sa voix tremble d’une sombre émotion. « Pourquoi avoir attendu…? »

Sa voix se brise sur les dernières syllabes. Mes yeux se ferment à leur tour, comme pour accueillir le choc de cette question à mi-mots. Pourquoi avoir attendu toutes ces années, alors que j’aurais pu abréger son enfer ? Pourquoi suis-je resté passivement à côté à regarder sa famille – les Wiergender – agir de la sorte ? Mes deux mains emboîtent mon visage, tandis que cette question se grave au fer rouge contre ma vieille peau usée. Le bois grince, quelques objets métalliques rebondissent contre la table, mais mes mains demeurent, glissant le long de mes paupières, de mes joues, de ma mâchoire, avant de relever des yeux noyés de regrets et d’amertume sur les deux épaules renforcées de ma chair et de mon sang.

- « Je... Je vais rentrer. Ma femme doit s’inquiéter. »

Le ton est sec, froid, malgré la douceur caractéristique de Dorne qui les enveloppe. Sans un regard de plus, le voici qui repart avec ses achats, le pas maladroit tant à cause de l’alcool que du poids qu’il transporte sur ses épaules et sur son cœur. Je n’ai pas la force de me lever. Je l’observe me quitter sans rien dire, sans aucune réaction, avant de m’affaisser dans mon siège, me pinçant l’arête du nez. Je dois contenir cette détresse. Je ne dois pas le retenir. Mais surtout, je dois m’occuper de ce merdier au plus vite.

Pourquoi ai-je attendu toutes ces années pour lui dire la vérité ? Car je suis un lâche. Car j’ai fui toute ma putain de vie. Et il semblerait que même au pied du mur, je continue à gratter la terre.


@"Dorne Wiergender"



"Il n'est pas de naissance qui ne rappelle une mort,
pas de victoire qui n'évoque une défaite."

--G. Brooks

Miche s'exprime de rares fois en #666666
Contenu sponsorisé
Contenu sponsorisé
Personnage
Feuille
Joueur

 

Un simple moment de détente - Miche