Type de RP classique
Chapitre concerné Chapitre 3
Date du sujet 19 Floraison 5:13
Participants Lachlann Vaël, @Elendîs
TW Blessures, violence non-explicite
Résumé Suite aux lettres qu'ils ont échangées, Lachlann veut profiter d'une visite à Vera pour voir Elendîs. On lui annonce pourtant que celle-ci ne peut pas le recevoir...
Pour le recensement

Code:

[code]<ul><li><en3>19 Floraison 5:13</en3> : <a href="https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1826-porte-fermee">Porte fermée</a></li></ul><p><u>Lachlann Vaël, Elendîs</u> Suite aux lettres qu'ils ont échangées, Lachlann veut profiter d'une visite à Vera pour voir Elendîs. On lui annonce pourtant que celle-ci ne peut pas le recevoir...</p>[/code]

Les bruits si familiers du Laurier la berçaient dans une torpeur presque reposante à ce stade. Car Elendîs ne parvenait plus vraiment à dormir depuis les événements de la veille mais au moins, le calme tout relatif du dortoir alors que toutes ses collègues étaient au front ce soir-là lui permettait d’aller et venir entre un état de semi-sommeil apaisant et un éveil irritant. En effet, dès qu’elle était éveillée, les circonstances qui l’avaient menée à être au repos forcé lors d'une soirée agitée lui repassaient sans cesse en mémoire, comme une pièce de théâtre de piètre qualité. Ce n’était pas sa faute, non, non, non…

Dîs était donc parvenue à se relaxer, perdue dans les limbes sans vraiment dormir, quand un coup à la porte la fit violemment sursauter jusqu’à s’asseoir dans son lit avec un sifflement de douleur. Non, pas un coup à la porte, se rassura-t-elle immédiatement. On avait poliment toqué plutôt. Ce qui était très étrange, d’ailleurs. Ses collègues ne toquaient pas et les autres employés du Laurier, homme ou femme, même s’il toquait par politesse, entraient souvent juste après ou bien s’annonçaient. Mais aucune voix ne suivit les petits bruits.

Dîs hésita un bref instant. Elle ne voulait plus de problème, non… S’il-vous plaît, qu’on la laisse en paix pour quelques jours… Mais une intuition la fit se lever. N’avait-elle pas oublié quelque chose? Son épaule marbrée de mauve protesta contre le mouvement mais elle drapa un châle qui traînait sur le lit d’une autre fille par-dessus la robe de nuit à bretelles qu’elle était la seule à pouvoir supporter sur sa peau malmenée.

« J’arrive… », fit-elle, sans vraiment faire porter sa voix, le simple fait de parler ravivant la douleur de sa lèvre inférieure fendue et gonflée. Elle traversa cependant rapidement la pièce, le bras de son épaule blessée pendant lamentablement à son côté, et ouvrit la porte de quelques centimètres pour voir qui se tenait là.

« Messer?! »
Une simple impulsion et la porte s’ouvrit plus grand. Puis sa main valide vint resserrer les pans du châle autour de sa petite figure et elle baissa le visage vers le sol. C’était probablement trop tard, mais elle ne voulait pas qu’il voit plus que nécessaire la pommette lacérée elle aussi, le dessous de l’œil violacé et gonflé, le front meurtri. Quand elle s’était vue dans le miroir ce matin-là, elle s’était dit que le violet de son œil, en étrange contraste avec ses yeux d’émeraude, pourrait faire une belle encre, dans d’autres circonstances. Elle s’était même dit qu’elle aurait une ou l’autre chansons, emplies de douleurs et de violences, qui en profiteraient grandement.

Mais surtout, elle ne voulait pas qu’il voit les larmes qui lui étaient montées aux yeux à la seconde où elle avait reconnu l’Enchanteur sur le pas de la porte. Elle ne savait pas s’il était là pour la réprimander ou s’inquiéter, et aucune de deux options ne lui plaisait vraiment. La veille, alors que Miche la remettait sur ses pieds, c’était l’une des premières choses à laquelle elle avait pensé: elle serait mise au repos et ne pourrait pas accueillir le mage alors qu’il l’avait prévenu de sa visite, qu’elle avait pour ainsi dire indiqué qu’elle l’attendrait. Le Prince déshérité ne serait probablement pas ravi qu'on lui fasse ainsi faux bon... Et puis, de son côté, elle avait tant de questions à lui poser après leurs lettres, qu'il faudrait remettre à plus tard s'il acceptait encore un contact. Connaissait-il Ielvin? Se souvenait-il de lui? Et comment sa sœur avait-elle exactement réagi au cadeau? Avait-elle vraiment apprécié?

Ensuite, comme pour se protéger de l’énervement supplémentaire, elle avait totalement oublié le mage, comme s'il avait été oblitéré de sa mémoire, pour se focaliser sur sa guérison. Jusqu'à ce qu'il toque à la porte.

Pourtant, elle ne pleurerait pas, non, non, s’il-vous plait, elle ne voulait plus pleurer. Mais l’émotion était bien différente de la veille. Ce soir-là, elle avait à nouveau pleuré de rage et de douleur. Là, maintenant, elle n’était pas sûre elle-même… Surprise qu’il soit venu la voir, même si c’était pour la blâmer? Apaisée par sa seule présence, même s’il était énervé ? Parce que de leurs échanges, si la courtisane avait retenu une chose du mage, c'était que ce ne serait pas lui qui la frapperait pour un oui ou pour un non. Et les images de la veille lui étaient revenues en pleine face à cette pensée avec une violence accrue. Après toutes ses années, elle n'était pas encore fichue d'éviter ceux qu'il fallait.

« Je… suis désolée… de ne pas avoir pu accueillir aujourd’hui… », prononça-t-elle enfin un peu difficilement à cause de sa lèvre douloureuse, les larmes ravalées et le regard perdu quelque part vers ses pieds.

« Ce n’est pas de ta faute »

Une larme s’échappa et roula le long de sa joue. Non… Pas sa faute… Pas sa faute… C’était bien le mantra qu’elle se répétait depuis la veille au soir, comme à chaque fois. Sans grand succès pourtant. Mais l’entendre dire par quelqu’un qui ne savait rien des circonstances de la veille (sinon il n’aurait pas été aussi surpris en la voyant ainsi) et la connaissait juste un tout petit peu, elle, avait quelque chose de convaincant. Lachlann avait décrété que ce n’était pas sa faute. Et c’était peut-être aussi bien comme ça.

L’Enchanteur supérieur demanda alors pour rester un instant et l’Elfe hésita, se crispant légèrement, les doigts de son bras valide se resserrant sur le châle.

Il venait d’ordinaire au Laurier, comme n’importe quel client d’ailleurs en cela, et peut-être en cela seulement, pour quelque chose qu’elle n’était pas en mesure de lui donner ce soir. Enfin, pas en mesure… Techniquement, si. Mais Elendîs n’avait vraiment pas envie de faire son travail ce soir. Non. La boutique était fermée.

Mais il y avait quelque chose dans la façon qu’il avait d’éviter de la regarder qui lui fit dire que ça n’avait même pas traversé l’esprit du mage. Alors, elle n’était peut-être pas de très bonne composition mais, en réalité, un peu de compagnie ne lui ferait pas de mal. Et qui d’autre serait capable de la distraire comme Lachlann? Ça faisait des années qu’elle n’avait pas rencontré quelqu’un d’aussi intéressant. Oh, probablement qu’il y avait bien d’autres profils aussi brillants, mais ils ne prenaient généralement pas la peine de lui répondre…

Bon… Elle pouvait toujours essayer. Il n’avait pas l’air énervé…

« Entrez… », fit-elle tout bas, en lui tenant la porte ouverte pour qu’il puisse entrer pleinement dans la pièce avant de la refermer derrière lui. « Juste… Ne vous en vantez pas, s’il-vous plaît… » Un secret de plus entre eux, qu’est-ce que ça changerait? En soit, sa visite n’était pas prohibée. Mais si elle pouvait éviter que ça jase…

Elendîs retourna alors à son lit, la démarche lente d’essayer de limiter les mouvements de son épaule en se déplaçant. Mais elle y parvint sans trop grimacer et se rassit sur son matelas, pressée près de son oreiller, pour s’adosser au mur derrière elle. Rabattant la couverture sur ses jambes, elle replia celles-ci vers sa poitrine dans une attitude qu’elle savait défensive. Elle ne se sentait pourtant pas en danger en présence de l’Enchanteur, c’était même plutôt le contraire. Mais elle n’était quand même toujours pas très à l’aise. Il lui fallait généralement quelques jours pour accepter de nouveau des hommes dans son entourage après ce genre d’épisodes, à l’exception de Miche et de ses collègues bien sûr. C’était donc déjà un miracle.

« Venez… »
Il y avait suffisamment de places, dans un dortoir. Au pied de son lit, sur le lit d’en face,… Il n’avait que l’embarras du choix. Elle fit également un petit signe de la main vers la table de chevet entre les deux lits sur laquelle se trouvait un petit plateau amené par Ysna dans la soirée. Quelques biscuits, un verre de… cidre?… auquel elle n’avait pas encore touché.

« Je m’excuse pour… ça. L’on ne vient pas au Laurier pour assister à tel spectacle. Votre visite m’était un peu sortie de la tête, je suis désolée, j’aurais dû demander à l’hôtesse de vous prévenir…»

Sauf que demander à l'hôtesse de prévenir Lachlann aurait impliqué qu'elle soit au courant de sa visite à l'avance, ce qui n'aurait pas manqué de soulever quelques questions. Mh, non... Ça n'aurait peut-être pas été mieux.

Le mage entra et garda une distance confortable entre eux. Suffisante pour qu’elle soit apaisée, mais pas non plus tant qu’elle laisserait transparaître une quelconque gêne. Le pied du lit, c’était très bien.

En réalité, elle n’avait pas pensé aux amis de Lachlann. Elle s’en moquait un peu, tant que rien ne parvenait aux oreilles d’Ithildir. C’était plutôt les autres filles et leurs tendances au mélodramatique qui l’inquiétaient parfois.

Pas pour donner un tel spectacle, mh? N'était-ce pas un tantinet naïf de la part de l'Enchanteur?
« Vous seriez surpris… Il y en a toujours pour se croire au-dessus des règles et, apparemment, je les attire. »
Au fil des ans, ses collègues et elle avaient fini par théoriser qu’il y avait quelque chose dans son attitude qui faisait penser aux profils problématiques qu’elle était une cible facile. Et ce n’était pas faux, elle était une cible facile, elle le savait bien… Mais peut-être était-ce ce même quelque chose qui en poussait d’autres à lui révéler leurs secrets les plus défendus.

« En ça, la bénédiction du Laurier est peut-être ma malédiction aussi… Ça n’arrive plus si souvent et j’ai perdu l’habitude. »
Quand ce genre de choses arrivaient régulièrement, elle avait bâti des murs autour de sa conscience, destinés à la protéger en permanence de ces occurrences. Elle subissait, guérissait, et reprenait ensuite le cours de sa vie comme si rien ne s'était passé. Elle n'avait pas le choix, si elle voulait continuer à survivre. Mais, alors qu’au Laurier elle s’était sentie de plus en plus en sécurité et soutenue, elle avait baissé ces murs et sa capacité à prendre de la distance s’était désagrégée avec eux.

« Ironiquement, celui-ci n’avait pas vraiment l’intention de me faire du mal. Enfin, je pense… Il a réagi violemment - », elle montra sa pommette et sa lèvre blessées d’un doigt tendu,  « mais il avait sincèrement l’air surpris après. Vous me direz: il ne faut pas être très malin pour imaginer qu’une femme de ma stature pourrait encaisser un coup d’un homme qui fait une bonne tête de plus. L’armoire m’a rattrapée - », elle montra cette fois son front, « et la commode a terminé de ralentir ma chute. »
Son doigt pointa cette fois son épaule, qu’il n’avait heureusement pas vue. Présentée comme ça, la scène était presque cocasse, se rendit-elle compte. Si on faisait abstraction des marques laissées sur son petit corps. La réalité avait été bien plus fulgurante. Et effrayante.

La courtisane ressassait un peu, admit-elle. Peut-être avait-elle besoin d’en parler. Pas forcément à Lachlann, mais à n’importe qui. Pour se distraire. Pour ne pas être seule avec son esprit fatigué et orageux. Et elle voulait l’entendre parler, lui aussi. Se laisser porter par sa voix grave et mettre tout le reste en sourdine.

« Racontez-moi, s’il-vous plait… L’anniversaire de votre sœur… Comment ça s’est passé? »

Elendîs pouvait voir que son interlocuteur était contrarié, mais elle préférait imaginer que ce n’était pas contre elle.

« Il y en a tant pour lesquels luxure, dominance et violence ne font qu’un… Et ce n’est pas toujours évident d’identifier ceux qui seront capables de se contenir. Mais heureusement, comme vous le dites, ce ne sont pas les seuls que j’attire. »

Elle sourit un peu, autant que sa lèvre fendue le lui permettait. Parce qu’à chaque goujat, Dîs comptait aussi un type décent. Lachlann ne faisait pour autant même pas partie du lot. Elle ne l’avait pas attiré. Au contraire, ils s’étaient croisés sans vraiment se voir pendant près de trois ans avant que d’étranges circonstances ne les réunissent.

«  Je ferai part de la suggestion à Vera. », ajouta-t-elle, avec une pointe d’humour retrouvé. « Mais elle fait déjà tellement pour nous, vous savez?… Ailleurs… Ailleurs, on est bien seule. Quand ce genre de choses arrivent, on peut juste… attendre que ça s’arrête. Depuis que je suis au Laurier, ce n’est plus vrai. Il y a toujours quelqu’un pour intervenir. Ça n’a pas de prix. »

La courtisane se détendait doucement, au fur et à mesure qu’elle admettait que la présence du mage ne la mettait pas plus mal à l’aise, non. Que du contraire. Lachlann ne lui ferait pas de mal. Et qu’on vienne donc lui chercher des noises en sa présence, tiens…

Petit à petit, alors qu’il commençait à lui raconter la journée d’anniversaire de sa sœur, elle se laissa donc un peu aller contre la paroi qui faisait le coin, appuyant sa tempe contre le mur tout en gardant ses yeux posés sur l’Enchanteur.

C’était un peu étrange…, se dit-elle, de se trouver ainsi avec un client du Laurier, sur son lit et sans que le compteur ne tourne. Il ne parlait pas pour combler quelques blancs entre d’autres activités, elle ne l’écoutait pas parce qu’elle était payée pour le faire. Il était là parce qu’ils le voulaient tous les deux. Dîs ne se souvenait même pas d’avoir été autant habillée en sa présence. Entre sa robe de nuit, le châle et les couvertures, il y avait peu de choses à voir. Et sa longue chevelure avait exceptionnellement été relevée par Ysna en un haut chignon aux mèches folles, chose qu’elle ne se serait jamais autorisée devant des clients. Mais elle s’en moquait. Effet secondaire de son humeur changeante ou de l’attitude sensible du mage?

Les descriptions l’enchantaient et elle devait se faire violence pour ne pas l’interrompre sans cesse pour poser des questions et en apprendre plus, toujours plus. À quoi ressemblait le jardin ? Et le manoir ? Quelle toilette sa sœur, une princesse, avait-elle porté pour son jour spécial?

« Qu’avez-vous donc mangé?! En voilà du suspens! », s’autorisa-t-elle tout de même lorsqu’il attisa son intérêt d’un ‘tu ne devineras jamais’.

La vision purement imaginaire de la famille princière rassemblée autour d’un petit bout joyeux avait quelque de… réconfortant. Totalement chimérique. Mais réconfortant quand même.

« Bien sûr, chaque cadeau… Et comme elle y a réagi… Le vôtre, surtout! », répondit-elle à sa question, l’enthousiasme colorant sa voix. Elle voulait poser plus de questions sur le parfum. Comment était l’artisan? Qu’avait-il senti, lui, en allant chercher le parfum? Mais elle se contint et le laissa raconter à sa guise.

Des cerises… Bien sûr. Elendîs avait hésité avec des oranges…

« J’ose espérer que le poisson en pâté de la maison Byrne met bien mieux en valeur les cerises que ma pauvre tarte… », commenta-t-elle, amusée de l’anecdote.

La description de Lachlann quant à la réaction de la princesse la fit à nouveau largement sourire, mouvement qui fut immédiatement suivi d’une mince grimace de douleur. Le mage tenait à sa petite sœur, c’était assez évident. On ne mettait pas tant d’affect à parler de gens que l’on apprécie pas. Et sans même avoir jamais vu la Dame Eibhlin, l’image d’une jeune femme ressemblant très vaguement à Lachlann, absolument radieuse avec un nourrisson dans les bras, s’imposa à son esprit. Quel beau tableau.

Mais c’était aussi terriblement attendrissant, de voir l’Enchanteur supérieur aussi fier de son cadeau et de sa famille.

« Je suis vraiment ravie que votre cadeau ait ainsi plu. Il comportait quand même un risque… Le résultat a l’air presque… magique. Qu’avez-vous pensé de l’artisan? », interrogea-t-elle, curieuse. Elle n’avait fait qu’entendre parler de l’Elfe. Alors, dalatien ou artiste de génie?

Le mage se mit alors à chercher quelque chose dans sa poche, s’agitant un peu, et la courtisane resta posément à sa place en essayant de mettre en sourdine les signaux d’alerte qui s’étaient activés aux mouvements un peu brusques. Non, non… Tout va bien…

Elle était quand même un peu plus crispée quand Lachlann sortit ce qui apparaissait comme du bric-à-brac de sa poche. Et la crispation s’évanouit quand il déposa une boite et des sachets entre eux. L’Elfe se redressa alors pour mieux voir et baissa ses jambes, les croisant en tailleur sous les couvertures. Se penchant légèrement en avant, l’incrédulité marquant ses traits, elle lança d’abord un regard étonné à Lachlann - pourquoi avait-il amené tout ceci? - puis étendit sa main vers l’assortiment.

« Qui… Mais qui a offert ça à votre sœur? », demanda-t-elle, la lunette au bout des doigts. « Aurait-elle une quelconque affinité pour l’astronomie? »

C’était ce qui avait d’abord attiré son attention et ses yeux d’émeraude continuèrent à courir sur les objets. Les tissus avaient l’air d’excellente qualité et les perles brillaient de mille feux. Mais probablement pas de quoi transcender une princesse, effectivement. La vue des bonbons éveilla alors sa dent sucrée et elle retint difficilement une expression envieuse.

« Cet Elfe dont votre sœur a dessiné le portrait… Le domestique… Vous vous souvenez de lui? », demanda-t-elle enfin, ses doigts fins caressant distraitement un morceau de brocart vert.

Audacieux, c’était le mot…

« Effectivement, il fallait oser… »

Et bien évidemment qu’il n’avait pas parlé de la prostituée qui lui avait soufflé l’idée de cadeau à sa princesse de sœur… Elle ne s’était jamais attendue à ce qu’il le fasse.

« De rien. Et, bien entendu… Je préfère l’ombre et la discrétion de toute façon. », fit-elle d’un ton bon enfant.
Fut un temps où elle avait rayonné elle aussi, aux côtés de son père et sous l’œil attentif d’Ithildir, et où les ombres ne faisaient même pas partie de son vocabulaire. Elle se demanda un instant si l’Enchanteur aurait trouvé un quelconque intérêt à cette Elendîs-là, la fille du Hahren. Soeur d’apostat, la question ne se posait même pas… Oh, comme elle craignait le jour où il arriverait à lui extraire cette information… Parce qu’il y arriverait, elle n’en doutait pas une seule seconde.

Il lui parla alors des artisans et la courtisane enfouit Ithildir au fond de sa conscience. C’était toujours dans les moments où elle était la plus vulnérable, comme lorsqu’elle était blessée, qu’elle repensait à lui. Et la présence de Lachlann et sa possible proximité avec son frère n’aidait pas.

« C’est tout de même très étonnant… Ça l’est presque encore plus si le processus est dénué de toute magie, vous ne trouvez pas? Vous vous êtes demandé, ce qu’un parfum conçu pour vous pourrait bien sentir? »

Elle l’observait avec curiosité, tentant de composer ledit parfum dans sa tête tout en posant sa question. Ce serait facile pour elle, de composer un parfum pour le mage. Mais il serait forcément très réducteur. Elle savait peu de choses de lui au final tout en s’ étant vue offrir une petite fenêtre sur sa vie. Aussi, elle avait parfois l’impression qu’il la laissait voir des aspects de sa personnalité dont peu étaient témoins. Pourquoi donc ?

Les explications sur la lunette ne la surprirent pas. Le cadeau était aussi inadapté qu’elle l’avait imaginé. Mais elle pouvait aussi comprendre qu’il ne soit pas si évident de trouver quelque chose qui puisse plaire à Dame Eibhlin. Le fait qu’elle ait pu mettre Lachlann sur une piste intéressante l’emplissait d’ailleurs d’un brin de fierté.

L’Enchanteur répondit alors à son interrogation sur le domestique et le regard de Dîs se perdit un instant vers le torse du mage alors que l’évocation de Ielvin la ramenait à un autre temps. Puis elle se reprit, ses doigts jouant avec un beau ruban bleu.

« C’est un… ami? » Elle ne savait jamais trop comment qualifier l’Elfe. « Ielvin m’a aidée, il y a plusieurs années. Je travaillais dans un établissement… différent, à l’époque. Il n’y avait qu’un vigile en service et il était occupé ailleurs quand un client complètement saoul a commencé à poser problème dans la salle. Il devenait dangereux avec les plus jeunes filles. J’ai réussi à le ramener jusqu’à l’entrée mais pas moyen de le mettre dehors… Il faisait un scandale sur le pas de la porte… Ielvin est intervenu et ils ont fini par se disputer en pleine rue. Le poivrot est parti, mais pas avant d’avoir blessé Ielvin au passage. J’étais inquiète alors il est repassé me voir quelques jours plus tard, pour me montrer qu’il avait guéri. Et puis il a continué à venir, on s’entendait bien. C’est lui qui m’a parlé du Laurier et de sa réputation, et m’a convaincue de tenter ma chance avec Vera. C’est aussi lui qui m’a accompagnée jusqu’ici. Il passe encore dire bonjour, parfois. Et il n’a jamais parlé d’une quelconque expérience au Palais… »

La raison pouvait toutefois paraitre assez claire. Un Elfe en service au Palais...Cela n'avait pas dû plaire. Bien qu'Elendîs ait enfermé tout ce qu’elle savait du Bascloître et de ses coutumes dans un petit coin de son esprit pour toujours essayer d’y penser le moins possible, ça lui paraissait assez évident. Un poste au Palais… Cela avait même dû poser problème. Et elle était bien placée pour savoir comment ses pareils pouvaient réagir à ce qu’ils identifiaient comme de la trahison.

« J’imagine… Que ça n’a pas dû très bien se passer dans son entourage, à l’époque, et qu’il préfère ne plus y penser. Il avait l’air très jeune sur le portrait que vous m’avez montré! »

Son regard, qui s’était de nouveau un peu voilé tandis qu’elle réfléchissait à voix haute, se focalisa à nouveau et elle chercha les yeux de glace de Lachlann.

« Ce ne serait peut-être pas très délicat de lui en parler, s’il préfère oublier, mh? Et en même temps, j’ai l’impression d’avoir appris l’un de ses secrets dans son dos et que ce serait malhonnête de ne pas le lui faire savoir… »

« J’y ai pensé, oui… », répondit-elle à sa question avec un air un peu pensif. « Mais j’ai l’impression que, qu’importe le point de vue, le résultat sera toujours un peu faussé, non? Qui nous connaît réellement, au final? Peut-être que ce que l’on retient d’une relation ou d’un passé commun n’est pas le même pour chacun. »

Dîs prit une petite inspiration en reposant le ruban, ses doigts évitant consciemment le sachet de bonbons. Elle n’avait rien mangé de très sérieux depuis la veille et céder maintenant à son envie irrésistible de sucre ne serait pas une bonne idée.

« Peut-être que c’est ce qui plaît tant, dans ces parfums. Pas vraiment de voir à quel point l’autre nous connaît mais de voir ce qu’il a retenu de nous ? »

Oh, comme la question avait tournoyé dans son esprit quand Lachlann lui avait écrit avoir passé la commande. Elle avait l’impression que seuls son père et son frère savaient suffisamment de choses d’elle que pour composer un parfum digne de ce nom. Mais même eux l’avaient quittée depuis tellement longtemps qu’il y avait tout un pan de sa vie, qui faisait pourtant partie intégrante d’elle maintenant, qu’elle le veuille ou non, dont ils n’avaient pas connaissance. Il pourrait rendre l’enjouée et innocente Elendîs. Mais pas celle qu’on avait brisée répétitivement et qui s’était relevée. À chaque fois.

« Je pense en tout cas que ceux qui auraient pu composer un parfum intéressant ne sont plus à mes côtés aujourd’hui. »

La courtisane eut un petit sourire, un peu mélancolique peut-être. Mais les années passaient et la douleur s’amoindrissaient. Heureusement. Elle avait même éclaté de rire, toute seule dans son coin comme une démente, quand, en réponse à ses évocations d’Ithildir dans leur correspondance, Lachlann avait mentionné ‘son homme’. S’il savait, seulement…

Sa main s’arrêta sur un autre sachet et, comme le mage n’avait encore rien dit sur son exploration des objets ainsi exposés, elle y piocha une perle et ses yeux se perdirent dans l’observation de son chatoiement - elle ne se souvenait pas d’avoir tenu une vraie perle un jour - alors qu’il réagissait à ses réflexions sur Ielvin.

« Héroïque, je ne sais pas… C’était plutôt maladroit, pour être honnête. Mais ça n’enlève rien à la bienveillance de son acte. »

Ielvin était intervenu sans rien attendre en retour. Et de ce qu’Elendîs savait, il ne fréquentait même pas les prostituées comme ça.

« Vous avez raison, j’imagine. Ça ne coûte rien de lui en toucher un mot. », rebondit-elle en lâchant enfin la perle des yeux pour observer à nouveau Lachlann, sa reconnaissance de s’être vu enlever cette épine du pied bien visible dans ses yeux verts. Bon, il y avait le risque que l’Elfe se braque pour une raison qui lui était inconnue. Mais qui ne tente rien n'a rien. Il faudrait aussi contourner la question de savoir comment elle était entrée en possession de cette information. Mh. Ça se compliquait… Il était temps de changer de sujet.

Une perle roulant toujours entre ses doigts fins, Dîs se laissa tout doucement basculer à nouveau vers l’arrière pour s’adosser au mur en retenant une grimace quand son épaule entra en contact avec la surface dure. C’était étrange pourtant, à quel point la douleur de l’articulation, pourtant bien plus forte, la dérangeait moins que celle de son visage, qui irradiait de sa lèvre et de sa pommette à chaque fois que Lachlann la faisait sourire. Peut-être parce que l’une était accidentelle, alors que l’autre lui avait été infligée tout à fait consciemment.

« Qu’en est-il de ces faux livres, que vous avez vus à Clattercraft? Ça m’intrigue beaucoup… Vous pensez que je pourrais y dissimuler… mon carnet par exemple? », demanda-t-elle. Et pas que le carnet, en réalité. Car c’était à l’arrière de celui-ci qu’elle conservait toutes les lettres du mage, et elle ne tenait pas à ce qu’on tombe un jour dessus.  

Comment lui expliquer? Comment exprimer à l’Enchanteur supérieur que oui, Ysna aurait certainement une vision intéressante (surtout depuis qu’elle l’aidait à entretenir une correspondance clandestine…) mais qu’elle ne serait tout de même que la représentation d’une ombre, faible et vacillante. La réflexion d’une moitié d’âme qui s’accrochait à ce qui lui restait de vie après avoir retrouvé un semblant de calme au Laurier. Et que cette réflexion ne serait plus jamais la même, déchue et abattue, que celle que Taralen et Ithildir, les seules personnes dont elle n’avait jamais douté d’un réel et pur amour, avaient un jour serré dans leur bras.

C’était dans des moments comme celui-ci, dans les méandres de réflexions qu’elle évitait d’ordinaire à tout prix, que le manque de son jumeau se faisait le plus sentir et qu’une étrange sensation, comme si leur lien flétri grattait dans sa poitrine, la démangeait.

À part dans ses chansons, et toujours à demi-mots, Dîs n’avait jamais exprimé le désespoir qui l’avait soufflée lors de la disparition d’Ithildir. Elle ne savait pas comment l’expliquer, alors que la relation entre des jumeaux était déjà très difficile à décrire. Peut-être à un autre jumeau, un jour?

Le regard un peu assombri et de nouveau fixé sur la perle brillante, Elendîs hésitait, en son for intérieur. Elle appréciait beaucoup l’Enchanteur. Il lui offrait une fenêtre sur plusieurs mondes auxquels elle n’aurait jamais accès, avec une bienveillance inespérée. Prendrait-elle le risque de le perdre en dévoilant quelques vieux secrets inavouables? Car parler de sa famille, c’était le mettre sur la piste de Taralen.

« Ysna, oui… Ca pourrait être intéressant. Biaisé et réducteur, mais intéressant. Nous ne nous connaissons pas depuis très longtemps, elle n’est là que depuis quelques mois. Mais c’est vrai que le Laurier forme une sorte de seconde famille. On ne la choisit pas plus que la première, personne ne travaille vraiment dans ce milieu par choix, mais nous sommes dans le même bateau par nécessité. »

Le même sourire mélancolique étira ses lèvres blessées, puis elle s’autorisa, enfin, une petite confidence. Le mage en ferait ce qu’il voudrait.

« Je n’ai plus aucun lien avec ma vie… d’avant. Tous ceux qui comptaient pour moi sont partis, les autres m’ont abandonnée. C’est comme si cette Elendîs là avait disparu sans que personne ne se souvienne d’elle… Un bien piètre parfum en perspective. »

La remarque sur le trompe l’oeil l’amusa un peu et elle répondit, sur un faux ton de confidence:

« Ne regardez surtout pas sous les lits, Messer… Vous n’avez pas idée… »

Se redressant à nouveau doucement (elle ne tenait pas en place), elle reposa délicatement et à contre cœur la perle dans le petit sachet (il était temps, sinon elle allait finir par la garder) puis pointa du doigt vers le maigre espace entre le matelas et le mur, qui permettait tout juste de passer une main fine.

« Il est là derrière, sous le matelas, quand je ne l’ai pas sur moi. Ce n’est pas très sécurisé… Je me demande si un livre commun, rangé comme tous les autres sous les lits, ne serait pas plus discret. Qui ouvre encore… la Légende de Calenhad par exemple, de nos jours ? », questionna-t-elle sans aucun aspect rhétorique, son avis comptant clairement pour elle.

Un sentiment de pure peur traversa Elendîs lorsqu’elle réalisa, en entendant son propre nom franchir les lèvres de l’Enchanteur supérieur pour la première fois, qu’elle le lui avait donné dans un moment d’égarement. Le nom d’Elendîs avait peu à peu disparu au sein du Laurier, bien que connu de tout le personnel et de certains clients, pour ne laisser résonner que son diminutif et cela avait toujours très bien joué son jeu de voir son identité s’effacer. Et voila qu’elle avait été assez stupide pour le lâcher elle-même. Les Elendîs ne courraient pas le Bascloître… Il serait désormais facile de découvrir le pot aux roses, pour quelqu’un qui savait qu’il y avait quelque chose à chercher. Juste en posant quelques questions au bon endroit.

Pendant un bref instant, elle hésita à le supplier de ne rien en faire. D’oublier ce nom maudit, de ne pas chercher à en apprendre plus sur elle. Mais serait-ce juste? Alors qu’il lui avait toujours semblé si honnête et si ouvert? Ne méritait-il pas de savoir à qui il racontait ses histoires? A qui il parlait si ouvertement de sa magie? A qui il écrivait en cachette?

Mais alors, ne serait pas encore plus juste de tout lui avouer d’elle-même? Là, maintenant?

Sauf que la courtisane ne s’en sentit pas la force. Déjà blessée et meurtrie, les risques qu’un tel aveux comportait la terrifiaient. Elle ne se sentait pas capable d’essuyer sa colère ou son dégoût, ce soir. De le voir partir en claquant la porte, l’abandonnant lui aussi. Alors qu’elle était si faible et si esseulée, et que sa présence lui apportait un apaisement inattendu.

C’était peut-être très égoïste. Elle espérait qu’il pourrait le lui pardonner. Et elle se tut.

L’éclair de terreur qui avait frappé ses traits se mua alors en acceptation. S’il voulait faire ses recherches, qu’il les fasse donc. Elle accepterait son jugement. Qu’il ne vienne plus la voir, qu’il ne lui écrive plus… Mais juste… Pas maintenant. Elle s’accrocha donc à son sourire et au compliment voilé pour lui renvoyer son propre sourire peu convaincu.

La discussion sur le trompe-l’œil lui apporta le changement de sujet rêvé. Et la mention d’un jeune Templier lisant la Légende de Calenhad lui arracha même un petit rire.

« Me voila en train d’imaginer un Templier en armure en train de ramper sous les lits… », répondit-elle avec amusement. « Mais oui, je pense que ce genre de titres ferait l’affaire. Ou quelque chose de similaire. Un classique. »

Mais… Aller l’acheter? Elle-même?

La petite Elfe se crispa et sa main se porta instinctivement à la sa pommette, comme pour essuyer du sang qui n’en coulait pourtant plus. Aller à Clattercraft? D’un côté, elle en avait envie. Fut un temps où elle avait adoré le quartier des artisans. Ses personnages, ses boutiques, ses couleurs, ses trésors,… Mais cette simple pensée la terrorisait aujourd’hui. Trop dangereux. Tout, partout, était devenu trop dangereux.  

« Ce… Et bien… Ce serait beaucoup demander au vigile », admit-elle, fataliste mais aussi un peu attristée à l’idée de devoir abandonner son petit stratagème. « M’accompagner aux alentours du Laurier pour prendre un peu l’air, c’est une chose… Clattercraft, c’en est une autre. »

Dîs ne put s’empêcher de pouffer. Maintenant, elle s’imaginait toute une cohorte de Templiers en armures rutilantes en train de ramper sous les lits poussiéreux des apprentis. Quel beau spectacle…

La proposition de l’Enchanteur supérieur amena alors une douce rougeur aux joues de l’Elfe. La voila qui était gênée… Et il en fallait beaucoup de nos jours, pour confondre la jeune courtisane. Le mage avait en effet déjà étendu cette proposition dans ses lettres mais elle avait pensé qu’il s’agissait d’une simple marque de politesse glissée hâtivement dans une correspondance sans aucune conséquence.

Se voir offrir cette opportunité à nouveau, et de vive voix… C’en était presque touchant.

Elendîs était pourtant tiraillée entre l’envie de sortir, de profiter de quelques instants hors du Laurier avec une douce compagnie, et la peur qui lui tiraillait d’ordinaire le ventre dès qu’elle devait mettre un pied dehors.

Cela n’avait pas tant de lien avec son statut, au fond. Pour un homme, faire remarquer une prostituée dans la rue, c’était se déclarer haut et fort comme client… Ce n’était donc presque jamais arrivé à Dîs, du temps où elle se débrouillait comme elle pouvait là bas, dehors. Les épouses revanchardes par contre, c’était plus fréquent.

Non, ce qui inquiétait plutôt la jeune Elfe à Clattercraft, c’était sa proximité avec le Bascloître et donc une présence elfique plus accrue. En réussissant à se faire engager au Laurier, à Goldhead, elle était parvenue à mettre autant de distance que possible entre elle et ses congénères. Mais en plein quartier des artisans, juste à côté du Bascloître, les chances que quelqu’un reconnaisse la fille de Taralen étaient plus élevées. Et les réactions imprévisibles également.

Mais Dîs s’emballait, pas vrai? Entretemps, Lachlann aurait découvert son passé. Il ne voudrait probablement plus rien à voir avec elle et tout plan de promenade serait abandonné… Alors… Pourquoi ne pas rêver un peu?

« Vous seriez vraiment d’accord? De m’accompagner? Ça fait tellement longtemps que je n’ai plus vu Clattercraft… », demanda-t-elle, le regard un peu brillant. Ça fait tellement longtemps que je n’ai pas vu à plus de cinq rues du Laurier, aurait été plus exact mais…

Le sourire d’Elendîs s’accentua autant que sa blessure le permettait. C’était bêtement flatteur de se faire accompagner par l’Enchanteur supérieur, mais c’était peut-être aussi l’option la plus sensible si elle voulait que l’achat reste discret: y aller elle-même était exclu, mais y envoyer Lachlann tel un simple coursier l’était tout autant.

« Merci, Messer… Faites-moi savoir quand vous serez disponible. Si vous pouviez juste me laisser au moins quelques jours pour… » Elle laissa sa phrase en suspens, la ponctuant simplement d’un vague geste de la main vers son propre visage blessé. Elle n’avait aucune contrainte de temps si ce n’était d’attendre d’être guérie, et se plierait volontiers à l’emploi du temps probablement plus chargé du mage. Et puis, la possibilité qu’il change d’avis entre-temps s’il décidait de suivre la piste qu’elle lui avait offerte sur un plateau sans le vouloir était toujours bien présente. Il était donc peut-être judicieux de ne pas programmer plus avant. Annuler serait d’autant plus douloureux… S’il le voulait toujours, il savait où et quand trouver Ysna.

Le mage s’anima alors pour se préparer au départ, ses mouvements, son regard et son ton emplis d’une précaution touchante, et Dîs l’observa calmement. Elle ne s’était pas attendu à sa visite, ni à ce qu’il reste aussi longtemps. Et malgré la réserve initiale de l’Elfe, chaque seconde avait finalement été comme une petite bouffée d’air frais. Le miasme dans lequel elle se trouvait avant son arrivée s’était estompé. Une pointe d’angoisse l’avait remplacée à l’idée que Lachlann découvre son identité mais, dans l’ensemble, elle se trouvait particulièrement apaisée et rassurée par ces quelques instants partagés avec le mage et sa bienveillance. Le sourire lumineux qu’elle lui offrit donc en réponse était tout ce qu’il y avait de plus sincère tandis qu’elle restait blottie sur le lit, confiante qu’il devinerait son besoin de limiter ses mouvements.

« Ça ira beaucoup mieux maintenant, Messer. Merci infiniment pour votre visite. J’espère que vous passerez une bonne soirée. »
Ce qu’il en ferait, de sa soirée, ne la regardait pas. Qu’il aille voir Vera ou retrouver une autre fille l’importait peu. Elle avait eu droit à son petit moment et se sentait maintenant suffisamment calme que pour trouver enfin le sommeil.