Type de RP Classique
Chapitre concerné Chapitre 3
Date du sujet 15 Longnuage 5:13 des Exaltés
Participants  @Dorne Wiergender & Cadwell
TW Mention de pauvreté et maladie (cécité)
Résumé Dorne et Cadwell se rencontrent alors que ce dernier distribue de la soupe aux réfugiés de Cairnayr en compagnie d'une petite délégation du Couvent des murmures.
Pour le recensement

Code:

[code]<ul><li><en3>15 Longnuage</en3> : <a href="https://ainsi-tomba-thedas.forumactif.com/t1650-une-flamme-dans-le-crepuscule-dorne-cadwell">Une flamme dans le crépuscule</a></li></ul><p><u>Dorne Wiergender & Cadwell</u> Dorne et Cadwell se rencontrent alors que ce dernier distribue de la soupe aux réfugiés de Cairnayr en compagnie d'une petite délégation du Couvent des murmures.</p>[/code]

Ne crains pas les ombres, car Sa lumière te guidera de l'intérieur. Soeur Rosemary était aveugle et lorsque Cadwell, très jeune, lui avait demandé si elle ne craignait pas le noir, elle lui avait répondu ceci. Alors, quand il avait encore peur de s'endormir dans le noir complet, le jeune Cadwell imaginait une bougie. Sa flamme éclairait sa table de nuit et repoussait les ombres autour de son lit. Lorsqu'il fermait les yeux, elle était toujours là. Il croyait que c'était ce que Soeur Rosemary voyait et il avait mis quelques années à comprendre qu'elle lui parlait en réalité d'Andrasté.

Ce jour-là, Cadwell n'était pas de service au Cercle. Il s'était présenté au Couvent des murmures assez tôt dans la matinée, afin d'aider les Soeurs à préparer une partie de la soupe qui allait être distribuée aux réfugiés qu'elles avaient pu accueillir entre leurs murs. Malheureusement, ils n'étaient pas seuls à souffrir de la faim, la pauvreté ne faisant en réalité que s'aggraver avec l'Enclin, entre ceux qui avait déjà tout perdu et ceux qui n'arrivaient plus à payer leur droit d'enceinte. Beaucoup venaient chaque jour pour recevoir leur pitance. Quant à ceux qui ne pouvaient pas se déplacer, ceux-là, Soeur Rosemary venait à eux, et ce jour-là, elle demanda à Cadwell s'il accepterait de l'accompagner jusqu'à Cairnayr pour visiter également les réfugiés. C'est ainsi que, au début de l'après-midi, une petite délégation de soeurs du Couvent, accompagné de quelques bénévoles, s'installa dans les faubourgs de la cité.

Cadwell, en civil, faisait le lien entre la charrette qui avait servi à acheminer le matériel, et les tréteaux qui venaient d'être dressés pour y accueillir deux tables de fortune.

"Ne te brûle pas avec cette marmite, mon garçon !" lui recommanda sévèrement Soeur Denise, comme s'il était encore un enfant.
"Oui, Soeur Denise."

Le jeune templier saisit les deux anses en se protégeant d'un torchon et l'amena en soufflant sur la première table qui avait été érigée. Une pile de bols suivit, puis les bénévoles se répartirent derrière la table, mais aussi dans les rues pour alpaguer les réfugiés et apporter des bols fumants à ceux qui ne pouvaient pas se déplacer. Soeur Rosemary tendit un bol à Cadwell, en prit un autre et l'attrapa par le coude de sa main de libre :

"J'entends des enfants, là-bas. Allons voir s'ils ont faim."
"Bien, Soeur Rosemary."

Cadwell hocha la tête, réflexe militaire, même si Soeur Rosemary ne pouvait pas le voir, et la guida à travers la rue pour aborder une dame âgée accompagnée de deux enfants en bas âge.

"Oh, soyez bénis, et bénie soit Andrasté en ces temps sombres !" s'exclama la réfugiée.
"Ne craignez pas les ombres", sourit Soeur Rosemary, "car Sa lumière vous guidera de l'intérieur. Et cette soupe vous réchauffera de même !"

Cadwell sourit, attendri. Après que Rosemary eut échangé quelques mots avec la petite famille, il la guida à nouveau vers le stand de soupe. Tandis qu'ils servaient deux nouveaux bols, il vit s'approcher un homme d'une vingtaine d'années, l'air bien apprété. Il n'avait certes par l'allure d'un réfugié, mais Cadwell le héla tout de même par politesse :

"Un bol de soupe, messer ?"

Une nouvelle journée venait de commencer pour le jeune noble Névarran. Et qui disait un nouveau jour, prônait une nouvelle aide. Il avait de nouveau demandé de l'aide à sa femme, et bien qu'il s'attendait à une réaction négative de sa part... Edana avait pour le coup été relativement neutre cette fois-ci. Peut-être était-ce parce qu'elle était pressée à rejoindre un déjeuner mondain avec le gratin de Starkhaven. Ou bien car elle n'avait tout simplement pas le désir de se battre aujourd'hui. Ou car elle pensait finalement que ça pouvait être une bonne idée finalement de donner un peu plus de relâche au collier du fils Wiergender pour qu'il "s'amuse" en apportant un peu d'aide aux démunis, et donc, fasse un peu briller son rang par son altruisme. Quoi qu'il en soit, le don que lui avait fait sa moitié était un peu plus conséquents cette fois-ci. Certainement pas de quoi nourrir l'intégralité des réfugiés, ce qui ruinerait sans nul doute la maisonnée après tout, mais en gérant un peu mieux l'argent il pourrait peut-être doubler les aliments qu'il avait apporté il y a deux jours de cela.

C'est ainsi, en étant un peu plus confiant sur ce qu'il pouvait apporte à son prochain, que l'érudit s'était déplacé de nouveau dans le quartier marchand de Starkhaven, remplit ses sacs de nombreuses types de provisions avant de repartir de nouveau vers les faubourgs avec un nouveau cheval. L'ancien étant après tout... L'on ne sais où. Et bien que cela embêtait terriblement notre protagoniste, il fallait faire avec mauvaise fortune bon coeur! Cette fois-ci, les aspirations négatives ne se firent pas aussi présent que d'habitude dans l'esprit du jeune Névarran. Ses précédentes rencontres et le pessimisme moins présent de sa femme aidant à cela après tout. Il pouvait bien mieux apprécier la vie, se sentant presque utile, finalement. Il ne lui fallut pas longtemps avant d'arriver en pleine journée à Cairnayr et ses nombreux réfugiés. Et si d'habitude Dorne préféré l'obscurité, il s'était donné comme défis d'affronter le monde de jour, cette fois-ci. Comme une preuve de sa progression. Et sautant de son cheval, sans se louper heureusement, il prit ces deux sacs de provisions, qui pesaient un sacré poids d'ailleurs, avant de les transporter avec une certaine difficulté jusqu'aux premiers réfugiés.

Peut-être était-ce un nouveau coup de chance, ou car il était déjà venu une fois de manière amicale, mais rien ne se passa réellement du côté du troisième des Wiergender. Il se souvint de certains visages, essaya de se remémorer des nouveaux. Mais une chose était sûr, ses provisions partaient avec une certaine vitesse alors qu'il déambulait avec difficulté dans ce lieu qui pleurait la tristesse et l'abandon. Bien entendu, le jeune noble savait qu'il n'était pas le seul à aider les nécessiteux... Mais il savait, en voyant toute cette douleur, qu'il n'y avait pas assez qui était fait. Un nouveau soupir sortait alors de la bouche de l'érudit qui venait de donner le dernier aliment qui se trouvait dans le premier sac. Mais il lui en restait encore un à moitié remplis. La chose rassurante c'est que c'était nettement moins lourd à porter. Faisant alors craquer tout les muscles de son dos et de ses bras, il était prêt à repartir. Mais seulement quelque pas plus tard, quelqu'un l'interpella alors.

"Un bol de soupe, messer ?"

Un bol de... Quoi?

Pensa alors le plus jeune de sa fratrie avant de tourner le regard, interloqué en direction de la voix qui l'appelait. C'était après tout une proposition quelque peu particulière à faire à un inconnu. Mais alors que Dorne affronta le regard de son interlocuteur, il fut... Perturbé. Ce dernier semblait afficher un visage si innocent et pure... Comme un impact mignon qui dérouta quelque peu le jeune homme. Qui dût alors s'y remettre à plusieurs fois en se frottant les yeux, observant aussi un peu plus autours de cet étrange personnage aux habits des protecteurs de la chantrie. Chantrie qui justement se trouvait présente. C'est ce qui frappa en second le Névarran, il était alors en présence de bons samaritains qui devaient sûrement donné un repas simple, comme de la soupe, aux réfugiés. Simple certes, mais non moins nourrissant. C'était beau de voir ainsi de l'entraide pour les plus démunis. Et alors qu'il releva de nouveau le regard, il tombait encore sur celui qui l'avait alpagué, toujours aussi charmant, attendant. Essayant de sortir quelque chose de sa bouche, le noble ne sût trop quoi dire.

- Euh... Non... Enfin une soupe de v...

Dorne, réfléchit mieux bon sang... Tu n'as pas fait autant d'écrits et de réflexion pour flancher sur une soupe bon sang.

- Je... Non, ça ira, m- Merci... Pas de... Pas de soupe.

Il lui fallait dégager alors son regard de celui de l'interlocuteur. C'était, il semblerait, la seule solution. Après tout il avait gardé tout ces moyens quand il observait les alentours. Basculant alors le regard vers le côté droit, là où se trouvait la soupe, Dorne reprit un peu plus confiance. Se demandant si, malgré sa non appartenance à la Chantrie, qu'il n'appréciait cependant guère, il pouvait aider. Jetant un rapide coup d'oeil à son sac, ce dernier semblait encore assez remplit, mais pour faire une bonne soupe? Difficile de le savoir.

- Je... Euh...

Relevant cependant la tête vers l'inconnu afin de ne pas paraitre trop impolie, il fallut quelques respirations à notre jeune protagoniste pour retrouver un meilleur flot de paroles.

- J'ai quelques ingrédients si vous... Enfin si cela ne dérange pas... Pour peut-être aider à faire une... Enfin, une soupe? Si vous me permettez d'aider, bien entendu...

S'exprima timidement Dorne, comme si toute sa timidité était revenu alors qu'il n'avait aucune réelle menace en face de lui, hormis un sourire ravageur, comme le plus adorable des petits chiots. C'était cependant sur ces paroles confuses, le regard encore à moitié fuyant, que notre jeune Névarran ouvrit le sac pour montrer ce qu'il lui restait, dans une certaine attente.

Cadwell attendit patiemment que l'homme lui réponde, mais pendant quelques instants, il crut qu'il ne l'avait pas entendu, ou pire, que sa proposition l'avait vexée. Il avait certes l'air très bien habillé et en bonne santé, mais Cadwell ne voulait pas juger les gens à leur apparence. Ce n'était peut-être pas un réfugié, dans tous les cas, et même si la soupe leur était destinée, Andrasté ne faisait pas de différence entre ses enfants et toute offrande était bonne à faire, quel que soit le destinataire. Si un citoyen de Starkhaven s'était approché du stand pour demander un bol, les Soeurs ne l'auraient pas refusé. Cela aurait été un peu long à expliquer, cependant, alors il fut soulagé que l'homme ne paraisse pas vexé, juste dérouté.

"Euh... Non... Enfin une soupe de v…"

"De ?" l'encouragea Cadwell, toujours souriant.

"Je... Non, ça ira, m- Merci... Pas de... Pas de soupe."

Le jeune homme hocha la tête, avant de reporter son attention sur les bols, que Soeur Denise empilait méthodiquement en deux piles : propres et sales. Elle claqua légèrement la main de Cadwell lorsqu'il voulu l'aider.

"Je m'en occupe, surveille le feu."
"Je... Euh…"

Cadwell se retourna immédiatement, bien content d'avoir une excuse pour ne pas se retrouver entre les pattes de la sévère Soeur Denise. C'était l'homme qu'il venait de héler… Il semblait hésitant. Le jeune templier remarqua alors le sac qu'il tenait près de lui, et comprit petit à petit qu'il était là pour les mêmes raisons qu'eux.

"Bien sûr !" s'exclama Cadwell, la voix un peu trop forte dans son enthousiasme, ce qui attira l'attention de Soeur Denise.

Il s'attendait à ce qu'elle lui coupe la parole, le contredise ou prenne les rênes de la conversation, mais elle n'en fit rien. Elle l'observait. Cadwell fit de son mieux pour ignorer son regard inquisiteur tandis qu'il se retournait vers l'inconnu :

"Toute aide sera la bienvenue ! Soeur Rosemary, qui est là-bas, est en train de cuisiner une deuxième soupe. Venez, je vais vous la présenter…"

Il lui désigna l'autre côté de la table, où se trouvait un chaudron sur le feu. Soeur Rosemary supervisait l'organisation tandis qu'une autre Soeur et un bénévole coupaient des légumes avant de les glisser dans la préparation. De temps en temps, la plus âgée touillait et goûtait le mélange, avant de conseiller d'ajouter telle ou telle épice ou du bois sur le feu. Cadwell l'approcha en posant une main sur son épaule pour lui signaler sa présence.

"Il y a quelqu'un qui…" commença-t-il, avant de réaliser qu'il ne connaissait pas son nom.  Il tendit la main à l'inconnu : "Je m'appelle Cadwell, et vous ?"
"Les amis de Cadwell sont toujours les bienvenus", chantonna Soeur Rosemary en souriant dans la direction d'où venaient leurs voix, "et puis, ça sent les légumes frais, je me trompe ?"

Cadwell n'osa pas la contredire tout de suite - il était loin d'avoir des amis aussi bien habillés - préférant laisser à l'inconnu le plaisir de se présenter et d'expliquer lui-même ce qu'il venait généreusement leur apporter. Il se recula un peu pour leur laisser de l'espace, et croisa les mains dans le dos, par réflexe. Même sans son armure, il avait du mal à se défaire de sa posture militaire. Sous l'oeil inquisiteur de Soeur Denise, son dos se redressa encore légèrement, si bien qu'au final, il avait l'air d'un soldat aux aguets plutôt que d'un garçon qui profitait simplement de son jour de repos pour se rendre utile.

Il était tout de même incroyable de voir à quel point parler pouvait être aussi... Difficile parfois. Souvent en fait. La moindre contrariété, la moindre perturbation pouvait provoquer un certain arrêt de l'esprit et embrouiller tout ce que l'on souhaiterait dire. Parfois cela pouvait-être à cause d'un malaise. De la peur... Ici, part un sourire sur un minois attendrissant. Et même par l'encouragement de cet inconnue à cracher le morceau si, oui ou non, Dorne souhaitait un bol de soupe, sortir le moindre mot, la moindre phrase cohérente était bien trop compliqué pour ce que ça devait être. Mais pourtant, il y arriva enfin, non sans mal, et avec une certaine gêne sur le visage, légèrement couvert de honte. S' il devait exprimer la noblesse, il donnait une image bien particulière de cette dernière... Mais pourtant, son interlocuteur ne semblait absolument pas le juger, au contraire. Il était même retourné directement s'occuper de ses affaires, enfin, s'occuper de ses soupes aux côtés d'une sœur chantriste. Mais l'érudit ne voulait pas en rester là. Il ne voulait pas que cette discussion s'arrête sur un moment de trouble. Et puis, si il ne faisait rien, comment pourrait-il apporter sa contribution, aider les réfugiés avec plus qu'un simple sac d'aliment?

Il espérait être de nouveau remarqué, et ce fût le cas. L'homme qu'il avait en face de lui avait même compris le message à travers les gestes du troisième fils Wiergender. Le "Bien sûr !" enthousiaste de ce dernier vint même à faire sursauter le noble qui ne s'attendait pas à autant d'énergie pour des provisions et une aide à faire de la soupe. Mais étrangement, c'était quelque chose de rassurant et de chaleureux d'être ainsi accepté à une tâche faite pour aider les autres. Restant encore sur place, jouant avec le tissu de son sac, Dorne observa rapidement le regard bougeant de son interlocuteur qui reprit la conversation.

"Toute aide sera la bienvenue ! Soeur Rosemary, qui est là-bas, est en train de cuisiner une deuxième soupe. Venez, je vais vous la présenter…"

- Mer- Merci infiniment d'accepter mon aide...

Exprima alors, encore un peu hésitant, le jeune érudit au templier avant de s'approcher de la table de préparation. Il avait cependant honte de l'admettre encore mais... Il n'avait jamais rien préparé de sa vie. Tout du moins, d'un point de vue alimentaire. Si ce n'est mettre par-dessus un bout de pain un morceau de fromage ou de viande séché, ce qui était loin d'être de la cuisine, et encore moins "préparé" pour faire un plat. Mais il avait déjà vu ses domestiques préparer une soupe, pour eux-même. Si Dorne était capable un minimum d'éplucher des légumes, il pourrait alors être utile. S'il y arrivait, bien entendu... Suivant son interlocuteur jusqu'aux côtés d'une autre sœur, le Névarran regarda autour de lui tout ce qu'il se passait. C'était une véritable chorégraphie organisée au millimètre ici! Découpage, préparation, nettoyage, et servir la soupe. Chaque membre du groupe semblait s'en donner à cœur joie pour aider les nécessiteux et les plus démunis. Dans le petit cœur du Wiergender, c'était quelque chose de simple, mais de magnifique. Quelque chose qu'il espérait faire tous les jours, aider son prochain.

"Il y a quelqu'un qui…" Encore une fois, la voix du templier le sortit de sa réflexion. Décidément, la moindre observation était suffisante pour que le noble ne se perde dans ses pensées... Changera t'il un jour réellement? Sûrement pas. Voyant la main tendue de son comparse de cuisine pour ce jour. La question qui suivit, elle, semblait évidente, mais il était vrai que les présentations ne s'étaient pas encore effectuées. "Je m'appelle Cadwell, et vous ?"

Alors qu'il venait à serrer la main de son interlocuteur, avec une certaine vigueur juvénile de pouvoir aider les gens, Dorne fût stoppé dans son envie de prendre la parole par une des sœurs présentes. Chantonnant ses paroles, exprimant sa joie d'être aider par un ami deCadwell, ainsi était-ce donc son prénom, tout en sentant les légumes frais. Un sacré odorat qui fût surpris au point de lâcher la main qu'il serrait quelque peu dubitatif face à la situation. Dorne n'était point ami de grand monde, à sa profonde tristesse, décalant son regard sur le sol, se pinçant une lèvre avant de reprendre, retrouvant la vigueur d'aider.

- Oh euh, quel rustre je suis, j'allais encore oublier de me présenter... Dorne Wiergender, de la maison Wiergender. Et même si je suis au regret de vous annoncer que je ne connaissais point... Cadwell... Dit-il alors en essayant de prononcer correctement le prénom, lançant un regard en direction du premier concerné qui se retrouvait à être aussi droit qu'une statue. Ce dernier a accepté ma demande de vous aider. J'ai... Un sac entier de légumes et produits frais du marché de ce matin. Je donnais de base les aliments brute aux gens, mais je suis persuadé qu'ainsi, ils offriront un meilleur plaisir aux gens...

Puis, avec un air un peu plus timide...

- Ce serait d'une grande joie d'apprendre à... Faire une soupe... Je suis plutôt... Malhabile la plupart du temps... Mais, euh... Je ferais de mon mieux pour aider dans cette quête.

S'exprima t'il, au fur et à mesure qu'il parlait il retrouva de la confiance. Se tournant même vers Cadwell sur la fin, un grand sourire chaleureux dans sa direction.

- Encore merci, d'avoir accepté mon aide. Cadwell. Je ferais de mon mieux pour être plus une aide, qu'un poids.

Cadwell... Cadwell... Cadwell... En le répétant ainsi, dans sa tête et à voix haute, il espérait ne pas oublier ce personnage au sourire enchanteur. Mais aussi qui semblait doté d'un profond altruisme, puisque lui aussi, était présent en tant qu'assistant soupe. Quelqu'un de bien, sans aucun doute.

Soeur Rosemary avait tourné son visage aveugle en direction du nouveau venu, dont la voix mal-assurée dissimulait une grande bonté. Elle hochait la tête à chacune de ses paroles, comme pour l'encourager à continuer ses explications. Il sembla retrouver un peu d'assurance à mesure qu'il parlait, et le sourire de la vieille dame s'élargit davantage.

Cadwell observa leur échange en silence. Ainsi, cet homme se prénommait Dorne Wiergender, et à sa façon de se présenter, on pouvait aisément supposer qu'il était d'origine noble. Cadwell avait déjà connu des nobles généreux. Quelques fois, il avait vu les donateurs du Couvent se promener entre les allées et observer les orphelins jouer ou étudier avec la satisfaction du devoir accompli. Le plus souvent, ils ne représentaient que des noms, des non-dits mêmes, généreux anonymes dont on ne mentionnait la famille qu'à demi-mot lorsqu'ils ne souhaitaient pas ébruiter leurs affaires. Cadwell avait toujours pensé que ceux-là étaient les plus altruistes, puisqu'ils ne retiraient aucune gloire de leurs dons. Mais jusque là, il n'avait jamais vu de noble donner directement de sa personne.

La présence de Dorne Wiergender était d'autant plus surprenante que sa noble action contrastait avec son comportement timide et mal-assuré. Presque comme s'il avait honte d'aider. Ou comme s'il était arrivé accidentellement par ici. Pourtant, il était venu bien préparé. Il ne faisait aucun doute qu'il savait ce qu'il faisait. Cadwell en conclut que c'était non seulement quelqu'un de généreux, mais aussi d'humble, deux qualités qui le touchaient et qu'il respectait énormément. Lorsque l'homme eut fini de parler, Soeur Rosemary lui adressa son sourire le plus chaleureux :

"Andrasté te bénisse, mon enfant, ton aide généreuse est plus que bienvenue !"
"C'est à nous de vous remercier", renchérit le jeune templier, "il est très généreux de votre part de donner de votre temps. Vous devez être très occupé."

C'était bien pour cela que les autres nobles ne se montraient pas en dehors de Starkhaven, encore moins aux réfugiés, n'est-ce pas ? Ils avaient beaucoup d'argent, certes, mais aussi beaucoup de devoirs à remplir. Des obligations que Cadwell n'était pas à même d'imaginer, lui qui n'avait pas grandi dans un milieu privilégié. Et de grands privilèges impliquaient de grandes responsabilités... quelque chose comme ça. Ils confièrent le sac de provisions de Dorne à Soeur Rosemary qui, avec ses assistants, commencèrent à trier les ingrédients. Pendant ce temps, Cadwell conduisit leur nouvel ami derrière la table de travail.

"Je vais vous montrer comment nous procédons. Ne vous en faites pas, ce n'est pas difficile."

Un des bénévoles déposa devant eux quelques légumes prêts à être épluchés et découpés. Cadwell s'empara de deux couteaux, tendit l'un à Dorne, et prit le sien pour s'attaquer à une carotte. Il commença rapidement, par habitude, clac, clac, clac, avant de ralentir pour s'assurer que le jeune noble suivait son rythme.

"Peut-être... peut-être préféreriez-vous éplucher les pommes de terre ?"

S'il débutait dans le domaine de la cuisine, Cadwell préférait qu'il commence par quelque chose qui le mettait à l'aise, sans risquer de se couper...

"Pourquoi pas lui proposer d'enfiler des gants, pendant que tu y es !" le rabroua Soeur Denise.

Avec son franc-parler, elle aurait pu être beaucoup plus cassante, mais elle savait se contenir en présence de ses supérieurs, et cela incluait Soeur Rosemary. Cela dit, la présence de cette dernière ne l'empêchait pas de jeter un long regard désapprobateur à Cadwell. Parce qu'elle ne pouvait pas la voir.

Ce dernier faillit tenir sa langue. Vraiment. Mais il avait passé des années à marmonner des approbations sous le regard sévère de Soeur Denise. Quitter le Couvent des murmures pour le monastère des templiers lors de sa formation lui avait appris qu'il y avait pire autorité qu'une soeur qui le reprenait sèchement comme s'il avait encore 10 ans.

"Je vous remercie de me rappeler la prudence, Soeur Denise, des gants seraient une bonne idée. Je ne doute pas que le Couvent se retrouverait dans une position délicate si messer Wiergender se coupait un doigt en épluchant des patates, imaginez alors ce que nous devrions faire pour nous excuser auprès de sa famille."

Cadwell trancha méthodiquement sa carotte sans quitter Soeur Denise du regard, le sarcasme suintant à chaque syllabe de sa tirade, et chaque mouvement sec de la lame sur le légume-racine, clac, clac, clac.

"Cela dit, je pense que messer Wiergender saura me dire lui-même dans quelles conditions il préfère travailler."

Clac.

Soeur Denise soutenait toujours son regard, mais Cadwell se détourna sans plus de cérémonie pour se concentrer sur leur généreux invité.

"Wiergender... est-ce originaire du Névarra, ou peut-être des Anderfels ?" reprit-il sur le ton de la conversation, toute trace de sarcasme évaporée.

Ce faisant, il signifiait à son ancienne supérieure que la discussion était close. Celle-ci finit par hausser les épaules avant de se remettre au travail. Quand à Soeur Rosemary, elle n'avait rien dit, ce qui conforta Cadwell dans sa réaction. Elle était peut-être légèrement disproportionnée, mais il fallait parfois mettre rapidement un terme à une confrontation pour l'empêcher d'aller trop loin. Cela, il ne l'avait pas appris avec ses instructeurs au monastère... plutôt de ses camarades. À force, Cadwell avait appris à mettre rapidement un terme aux railleries de ses pairs. Alors, si Soeur Denise le traitait comme un enfant, il pouvait lui parler d'égal à égal. Cette conviction s'ancra plus profondément en lui à mesure qu'il continuait de travailler, sans qu'elle ne l'interrompe plus, et il sentit sa confiance redoubler, presque rayonner. Il essayait de ne pas sourire, mais c'était difficile. Même Soeur Rosemary sembla le remarquer.

"Vous faites du très bon travail, tous les deux", sourit-elle en passant auprès d'eux.

Elle ne pouvait pas le voir, mais elle pouvait le sentir.

Ceci pouvait-être étrange, mais le simple fait d'être écouté sans mauvaise pensée, et même encouragé à continuer avec de délicats sourires malgré sa façon de bredouiller était un immense soulagement pour le noble. Il fallait dire qu'habituellement, le fait de bredouiller lui apportait... Beaucoup de problèmes et de tracas, hélas. Cela dit, encore une fois, il pouvait se rendre compte à quel point le monde était si différent une fois que l'on s'éloignait de la noblesse. Personnes du peuple, Gardes des Ombres, membre de la Chantrie... Pour Dorne qui n'appréciait pas spécialement cette dernière branche, il devait au moins approuver qu'ils semblaient bien plus agréables que ses confrères de la fameuse Haute. Ou bien Starkhaven lui réservait encore d'autres surprises même dans cette branche là si on excluait son épouse?

Dans tous les cas, lorsqu'il finit de parler, et même s'il avait été encouragé par un silence et des sourires encourageant, difficile pour le fils Wiergender de ne pas ressentir un minimum de honte. Après tout, il aurait pu finir son discours bien plus rapidement et efficacement s'il n'avait pas autant bloqué. Il espérait fort intérieurement qu'on ne lui en veuille nullement, ou pire, que l'on puisse penser à mal de sa famille. Heureusement, tout doute s'envola face à, d'une part, le sourire chaleureux de la Soeur ainsi que ses douces paroles. Mais l'érudit tourna sa tête presque aussitôt en entendant la voix du templier. Voix qui réchauffa amplement le cœur au vue des paroles employées. Même si, il fallait admettre, le sujet d'être une personne très occupée vient à faire détourner légèrement le regard du jeune noble qui ne pût s'empêcher de se gratter délicatement l'arrière du crâne. Edana, sa femme, était très occupée oui. Après tout, c'était elle qui dirigeait tout dans le couple. Lui... N'était qu'un simple habitant qui écrivait, lisait et maintenant essayait d'aider les plus nécessiteux. On était très très loin de "Très occupé". Mais une des choses qui qualifiait malgré tout notre Névarran, c'était son intégrité. Même si c'était pour être à son avantage, il n'aimait pas qu'on ait une mauvaise idée de lui.

"Oh vous savez... C'est bien plus ma femme qui est occupée. Moi... J'essaye de trouver un sens à bien des choses, mais aussi d'aider mon prochain du mieux que je le puisse."

Dit-il alors, avec une voix oscillant encore avec un timbre quelque peu timide en regardant ses pieds. Avant de se ressaisir un minimum et de lever son regard, un léger sourire bienheureux sur son visage. Allons, il n'y avait nul honte à parfois montrer ses points faibles, même si son frère disait le contraire. Il était là pour aider, et il en était fier, c'est ce qu'il devait montrer avant tout. En plus, il semblait être bien entouré pour cette première mission. Donnant alors son sac d'ingrédient, il se rangea rapidement aux côtés de son compagnon d'épluchage et de découpe, impatient de commencer. En plus de ses propres ingrédients, il semblait déjà y avoir beaucoup d'éléments sur la table, cela en était assez beau. Il y avait de quoi nourrir de nombreux démunis. La Chantrie semblait en effet faire beaucoup pour soutenir les nombreuses personnes en difficulté. Ce qui commençait à faire changer petit à petit d'avis le jeune Névarran sur ce qu'il pensait d'eux, de façon positive bien entendu. Les paroles de Cadwell sortirent rapidement Dorne de ses rêveries, reprenant un certain sérieux en voyant la maîtrise et la dextérité de son compagnon de légumes tout en observant la découpe sans perdre la moindre miette du spectacle qui s'offrait en face de lui, comme aspirée par la chose. Le voir manier la lame avec rapidité, puis lenteur pour montrer plus efficacement montrait à quel point il savait gérer le couteau. Nul doute qu'il était un maître du légumes et qu'il aurait bien des choses à apprendre au fils Wiergender qui n'avait salit ses mains qu'avec de... L'encre.

"Votre maîtrise du légume est incroyable, Cadwell. J'espère un jour être capable de manier le couteau aussi bien que vous. Déjà que j'ai bien du mal à tenir correctement une épée malgré de l'entraînement..."

S'exprima alors le jeune homme, avec une pointe d'amusement. Se moquant en partie de lui-même face à cette terrible vérité, restant impressionné par ce qu'il voyait. Nul doute que même les domestiques dans la demeure d'Edana n'avaient pas un aussi beau tranché. La question sur le fait de préférer couper les pommes de terres de la part du templier déstabilisa un instant Dorne, qui pencha délicatement la tête pour mieux observer le plan de travail de son compagnon du jour. Les pommes de terres? Il est vrai que cela semblait bien plus facile à gérer. Une prise en main plus ferme, plus de surface certes à découper mais il pouvait sûrement gérer le tout. Alors qu'il allait répondre, il fût interrompu par le ton cassant d'une autre sœur. Oh non, pas ça. Une dispute. Avec lui au milieu de tout cela. Certes l'érudit n'était pas spécialement habile de ses dix doigts... Ni habile tout court finalement, mais il n'avait pas peur de se couper, il avait subi bien pire après tout. Tournant alors délicatement la tête vers son voisin de découpe, le fils Wiergender ne savait pas trop comment les choses allaient évoluer. Ne sachant pas spécialement si Cadwell réagirait positivement ou négativement. Et au vue de ses paroles pleines de sarcasmes, sans nul doute que ce n'était pas très très positif.

" Euh vous savez je-"

Ce ne fût qu'une toute petite voix qui sortit de sa bouche, à peine audible alors que le templier repris de plus belle dans sa découpe des légumes qui cachait le moindre son de la bouche de l'érudit. Au moins cela semblait avoir méchamment cloué le bec de la Soeur. Même si l'idée de se couper un doigt n'était pas très joyeuse, il ne risquait pas quelque chose d'aussi violent hein? Il ferait attention, et il n'avait qu'à suivre et apprendre de son supérieur de la soupe. Bien que les paroles de Cadwell ne contenait aucune question directe sur la façon de travailler de Dorne, il n'était pas difficile que c'était entièrement destiné vers lui, et c'était certain que le noble allait, un minimum, le suivre.

" Je m'occuperai des pommes de terre, n'ayez nulle crainte. Et puis ce serait dommage de gâcher la moindre paire de gants! Regardez, je vais y arriver..."

Prenant la première pomme de terre dans sa main gauche, la stabilisant, il vint récupérer un couteau dans la main droite. Commençant alors à éplucher délicatement le produit. C'était difficile, il n'y était pas habitué, mais il savait se concentrer sur une tâche à accomplir. Il n'avait qu'à suivre ce que faisait Cadwell, ce que faisaient ses domestiques dans ses souvenirs. Accompagner les deux objets pour retirer la peau. Capable de se concentrer sur plusieurs objectifs à la fois, l'érudit entendit alors la question sur son nom de famille de la bouche du templier. Affichant alors un demi-sourire sur son faciès concentré, le fils Wiergender reprit alors avec douceur pour faire écho à son camarade.

" Névarran, vous avez visé juste! Je suis le troisième enfant d'une fière lignée de combattant marié à une noble de Starkhaven. Si vous n'avez jamais visité, je vous promets que ça vaut le détour. J'espère y retourner bientôt d'ailleurs, revoir Mère et Père..."

Alors qu'il parlait, le jeune homme avait enfin terminé de retirer un maximum de peau de son légume, maintenant il pouvait...

Tac tac tac

Couper, avec force et d'un coup sec. Plusieurs fois. Le tout pour en faire plusieurs morceaux même s'ils étaient plutôt irréguliers. Il devait sûrement rester quelques maigre morceaux de la peau sur la pomme de terre, en plus d'avoir des morceaux de tailles... Intéressantes. Il se tourna alors vers Cadwell, un sourire fier sur son visage.

" Bon, on est loin de votre technique, mais je pense qu'avec quelques autres légumes je peux obtenir un résultat acceptable!"

Dit-il alors, une immense joie dans la voix, un sourire presque enfantin sur son visage fier de lui. Il avait commencé par fournir simplement des légumes, et le voilà maintenant à aider à leur transformation en soupe. Quand on partait de loin, on pouvait faire bien du chemin! Alors qu'il prit une seconde pomme de terre qu'il commença à préparer, les compliments de la Soeur motiva d'autant plus le Névarran à se donner avec plus d'ardeur. Tout en continuant ainsi à éplucher et découper des légumes, Dorne tourna un oeil en direction de Cadwell, un léger sourire en coin de bouche.

" Oh d'ailleurs, vous savez, ici je suis loin de tout ce qui peut se rapprocher de mon titre ou d'une quelconque terre. En Starkhaven je ne possède presque rien. Alors si vous le souhaitez, vous pouvez juste m'appeler Dorne. C'est toujours plaisant d'être nommé par son propre prénom! Je me sens mal d'un tel rapport alors que je ne suis qu'un simple apprentie aux côtés d'un maître du légumes!"

Même si le ton de Dorne se voulait léger voir même amusé, il y avait une grande part de vérité là dedans. Pour sûr, c'était bien plus plaisant d'entendre son prénom que d'être nommé par son nom de famille. Nom d'une famille bien, bien horrible...

Soeur Rosemary tapota l'épaule et Cadwell et celle de Dorne en passant derrière eux, avant de les laisser s'atteler à leur tâche :

"Quelle chance nous avons que vous soyez venu ici aujourd'hui."

Par réflexe Cadwell lui sourit, avant de se concentrer sur la découpe des légumes. Ils commencèrent tranquillement. Ils n'étaient pas pressés, il y avait déjà une soupe sur le feu et la distribution battait son plein. De ce côté-ci, c'était plus calme. Cadwell n'avait jamais travaillé dans des cuisines, où l'ambiance était probablement moins détendue. Au mieux avait-il donné un coup de main au Couvent, au pire avait-il été de corvée de vaisselle au monastère. Alors même si le compliment du noble le surprit, Cadwell se dit que c'était normal : il était toujours plus facile d'apprendre à faire quelque chose quand il n'y avait pas de pression, pas d'enjeux derrière. On pouvait s'entraîner à son rythme et, quand le geste devenait sûr, accélérer la cadence. C'était effectivement peu différent du maniement des armes, même si la finalité était tout autre.

"Ce n'est pas grand-chose. Un peu de pratique..." Il réalisa que, comme Dorne, il se dépréciait un peu. "On ne peut pas être bon partout, il faut savoir, hum... concentrer son énergie sur ce que l'on peut faire, ce qui nous sert au quotidien."

Il se disait que si son vis-à-vis ne savait pas manier l'épée, il ne servait à rien de s'acharner ; il pouvait utiliser son temps dans les domaines qu'il maîtrisait - Cadwell ne doutait pas qu'il y en avait, même s'il n'y connaissait rien : à quoi les nobles passaient-ils leur temps ? Il aurait bien aimé lui poser la question, mais il avait peur que ce soit indiscret et maladroit. Comme son opinion à ce sujet. Celle à propos de Soeur Denise, en revanche, Cadwell ne la retint pas. Il était conscient que leur échange pouvait mettre les gens autour d'eux mal à l'aise, mais il perdait trop de temps à se soucier de l'image qu'il renvoyait de lui en temps normal ; quand il était agacé, ces considérations inutiles passaient au second plan. Et il était encore trop fier pour s'excuser de l'embarras causé ; il préféra ignorer le malaise qu'il avait causé. Il observa, un peu inquiet, comment le jeune noble s'en sortait avec sa première pomme de terre. S'il lui assurait qu'il pouvait la couper, Cadwell devait lui faire confiance. Il était plus âgé que lui, il n'allait quand même pas le materner... Il surveilla tout de même attentivement ses premiers gestes et, quand il fut assuré que tout se passerait bien, il hocha la tête avec un sourire encourageant.

"C'est vrai ?" demanda-t-il quand son interlocuteur lui assura que le Nevarra valait le détour. "J'y songerais, si l'occasion se présente de quitter Starkhaven un jour..."

Il ajouta cela sur un ton léger, bien qu'intérieurement, il songeait que l'Enclin ne leur laisserait probablement pas le choix. Dans un sens ou dans l'autre... Soit ils devraient fuir la ville assiégée, soit ils se battraient jusqu'au bout. Quant aux autres nations, on ne pouvait espérer qu'elles s'en sortiraient mieux qu'Antiva. Cadwell ne pouvait imaginer avoir de la famille ou des amis en dehors des Marches libres, pour lesquels il craindrait à tout moment de voir débarquer l'archidémon et ses sbires. Évidemment, il n'allait pas dire cela à Dorne. Ses parents étaient en Nevarra. Une nation reconnue pour la puissance de son armée... Espérons que cela soit suffisant.

"Ah, vous voyez, serah ! Je vous trouve déjà plus à l'aise maintenant. Encore quelques légumes et nous pourrons rivaliser de vitesse !" plaisanta le jeune templier.

Dorne Wiergender semblait plus à l'aise avec sa technique, et cela se reflétait sur lui également ; Cadwell pouvait presque voir émaner du noble une confiance dissimulée jusqu'à présent. Son visage s'éclairait, il souriait, et il plaisantait, même. Le templier, qui aimait observer les autres en silence, avait toujours beaucoup de plaisir à apercevoir ce moment particulier où ils s'ouvraient. Un étranger reconnaissant à qui on donnait le chemin, la boulangère qui souriait quand on avait complimenté son pain, une connaissance avec qui vous discutiez toute la nuit et qui, au petit matin, était devenue votre amie... Cadwell sourit pour lui-même.

"C'est entendu, serah... je veux dire, Dorne."

Il se retint de dire "et vous pouvez m'appeler Cadwell", par réflexe, mais évidemment, il s'était déjà présenté. Et il n'avait pas d'autre nom à ajouter. Il n'était que Cadwell. Même si son interlocuteur semblait penser qu'il était également un grand maître dans l'art de la découpe des aliments ! Un petit rire lui échappa.

"Je crois que vous sous-estimez mes capacités... Il existe des maîtres bien plus habiles que moi."

Aurait-il raté sa vocation ? Il n'osa pas plaisanter ironiquement avec le noble, il ne le connaissait pas encore assez bien pour déterminer si son second degré serait bien perçu. Mais comme il faisait également preuve de légèreté, le templier se sentait plus à l'aise pour continuer sur cette lancée :

"Mais ensemble, nous sommes plus efficaces ! Nous pourrions sans problème démarrer une nouvelle vie dans l'art culinaire, qu'en dites-vous, Dorne ? Empruntons une des charrettes et partons sur les routes vendre de la soupe. Soeur Rosemary sera notre mascotte !" ajouta-t-il joyeusement.

Elle passait derrière lui à ce moment, raison pour laquelle Cadwell l'avait inclue dans ses bêtises. Elle était aussi plus sensible à son humour que Soeur Denise... Cette dernière, heureusement, ne l'entendait pas.

"Tant que vous ne me laissez pas conduire..." souffla Soeur Rosemary dans un petit rire, visiblement amusée par l'idée saugrenue de son ancien pensionnaire.

Le tapotement sur l'épaule de Dorne vint à légèrement le crisper. Plus par surprise que par réel malaise. Les contacts physiques de tout sorte, s'ils étaient rapide, n'étaient pas spécialement un problème malgré sa gêne la dessus. Mais de l'autre côté le noble était quelqu'un qui se faisait facilement surprendre par la moindre des choses au vue de sa capacité à être tête en l'air où juste de se concentrer sur une chose, profondément, à la fois. Cela ne lui demanda cependant qu'une petite seconde pour se reconcentrer entièrement sur Cadwell, penchant alors délicatement la tête sur le côté alors qu'il expliquait l'importance de concentrer ses efforts sur ce qui était important à notre quotidien. Il marquait un point, c'était sûr. Le jeune Nevarran avait perdu tellement de temps et d'énergie par moment à se disperser sur tant de choses inutiles. Hochant alors vigoureusement la tête positivement, le fils Wiergender répondit alors, presque comme un apprentie comprenant la leçon de son maître.

- Très bien... La concentration sur l'essentiel... Sur ce qui est faisable... Il doit bien y avoir après tout une ou deux choses qui sont amplement réalisables par ma personne!

Il s'exclama, positivement. Dorne était souvent quelqu'un qui n'avait pas confiance en lui ou en ses capacités. C'était un mauvais combattant. Un noble totalement aux fraises et un érudit un peu trop perdu sur tant de sujets différents. Mais sur ce dernier point, il savait qu'il avait un peu de talent. Il lui manquait juste un vrai coup de pouce... De même, comme il espérait de tout cœur faire la différence pour aider un peu mieux les gens en difficultés. Et ça, il en avait totalement l'occasion actuellement en faisant les meilleures soupes possibles. Enfin, il fallut cependant rester un instant légèrement décalé de la discussion légèrement froide entre son coéquipier de légumes et une des Sœurs présente. Au moins tous les milieux avaient ce genre de... Tensions électriques. Pas que la noblesse ou dans le domaine privé familiale. Même si bon, pour le pauvre érudit, en être un des facteurs était quelque chose d'un peu moins agréable à force de l'avoir été sur de bien nombreux sujets avec les Wiergender, se remémorant légèrement l'odeur des cendres à cet instant... Au moins cela n'avait pas duré très longtemps et tout le monde pût recommencer où il en était, dont la conversation sur les origines. Son coéquipier des légumes semblant songer à ce déplacement, faisant sourire légèrement Dorne.

- Je peux vous le confirmer oui! Niveau architecture et décorations, ça a son charme. Après... Dit-il, penchant la tête tout en se concentrant sur sa découpe, une voix un peu plus neutre. J'espère que vous aurez l'occasion de suivre vos envies Cadwell.

Après tout, si le Nevarran était là, ce n'était pas par ses envies personnelles, mais bien parce qu'il avait été forcé à bouger ainsi. Ainsi, avait-il plus l'envie que le Templier puisse vraiment visiter autre chose que cette Cité par ses propres moyens et non en y étant forcé. Ou au contraire être forcé de rester dans ces murs. Même si après tout, vue la situation catastrophique au nord avec l'Enclin, les choses seront sûrement forcés à cause du destin. Il fallait juste prier pour que tout finisse bien, soupirant dans sa tête Dorne se demandant bien ce qui découlerait de tout cela. S'il était lui-même aspirer par ce cataclysme comment réagirait ses parents hormis l'indifférence la plus totale voir la joie? Et comment s'en sortirait sa merveilleuse terre natale? Ce fût la plaisanterie de Cadwell qui vint totalement supprimer ces idées de sa tête. Rivaliser avec la vitesse du Templier en découpe de légumes? Il lui faudra tout de même plus que quelques légumes pour cela. Sourire amusé au niveau de la bouche, le fils Wiergender fit simplement en sorte de continuer sa découpe plus avec précision que rapidité.

- Oh, si par quelques légumes vous parlez d'une ou deux centaines je suis parfaitement d'accord, après cela je serais au moins aussi à l'aise avec un couteau qu'une plume et un encrier! Donnez moi quoi... Dix jours et nous pourrons sûrement concourir dans la même course!

Un léger rire s'échappa de la bouche de l'érudit qui retrouvait tout de même une certaine douceur de son corps. Plus il rencontrait de personnes avec une certaine douceur dans leurs cœurs et dans leurs façons d’interagir avec lui, plus, peut-être, que le jeune homme se rendait compte qu'il n'était pas juste un ennuyeux parasite, mais finalement un être humain un poil mieux que ça. La légère "faute" directement rattrapé pour être appelé par son prénom vint à faire rire de nouveau le jeune homme tout souriant. Rien à dire, les jeux pompeux de l'étiquette et des titres étaient une épreuve bien ennuyeuse pour l'érudit qui aimait la simplicité. Converser avec quelqu'un était déjà suffisamment difficile avec toutes les règles de la bienséance, pourquoi rajouter autant de titres ou autre? De toute façon, encore une fois, lui-même avait ses propres difficultés quand à cette fichue étiquette...

- Je vous remercie de cette attention, Cadwell.

Il vint à le regarder alors droit dans les yeux, s'arrêtant de couper un instant pour baisser légèrement le visage en signe de respect, le tout avant de reprendre sa découpe méticuleuse des légumes. Entendant alors la douceur du rire du templier qui vint avancer le fait qu'il existait d'autres maîtres du légumes plus talentueux que lui. Ah, le fait de dire qu'il existait toujours meilleurs que soi faisait sourire Dorne. Bon, il n'allait pas dire le contraire juste par esprit de contradiction, car le noble n'avait pas rencontré l'intégralité des découpeurs de légumes, mais tout de même!

- Haha, je vous accorde ce point là. Mais sachez qu'au moins vous êtes le meilleur que je connaisse.

Dit-il alors, léger sourire aux lèvres alors qu'il continuait sur une nouvelle pomme de terre. Finalement c'était presque un jeu d'enfant! Mais s'il voulait continuer de s'entraîner sur la découpe de légumes, ce serait de toute façon dans un lieu différent de chez lui, ou tard la nuit. Nul doute que les domestiques seraient mal à l'aise de voir leur seigneur en train de découper au milieu d'eux, ou alors ce serait sûrement une énième chose sur laquelle Edana pourrait l'humilier sur le fait qu'il ressemble bien plus à un membre du peuple qu'un vrai noble. Et alors? Pour Dorne, ce n'était pas une insulte, c'était même mieux si c'était pour ressembler à ses parents par exemple. Surpris cependant par la proposition joviale de parcourir le monde à vendre de la soupe, chose qui était sans aucun doute parfaitement une plaisanterie, garda le Nevarran légèrement immobile, la bouche ouverte dans une certaine surprise. Même la sœur qui était d'une grande gentillesse vient plaisanter là dessus. Imaginant la scène, un petit rire s'échappa de la bouche de l'érudit. Puis il ne pût s'empêcher de rire un peu plus fort. Ce serait sans aucun doute magique. Un noble, un templier et une sœur sur la route à découper des légumes et vendre de la soupe à travers tout Thédas sur une charrette? Une fois calme, essuyant une larme de bonheur d'un de ses yeux, il fallut encore quelques secondes pour qu'il reprenne un souffle plus calme.

- J'adore l'idée. Nul doute que tout Thédas nous enviera notre recette et notre talent! L'occasion de parfaire notre art et notre découpe auprès de grands cuisiniers d'Orlaïs ou des Anderfels! Chaque région nous permettra de faire une spécialité différente! Et notre slogan ce sera "Soupe-irer de plaisir"!

Peut-être un peu trop pris dans la chose, Dorne imaginait des scénarios amusants, mais plus pour continuer de surfer sur la chose. A côté de cela, il était surtout content, loin de tout son poids habituel sur les épaules. C'est d'ailleurs avec cette même légèreté qu'il reprit alors.

- Merci, Cadwell. Je passe un moment vraiment amusant, je n'aurai jamais crue que cuisiner avec quelqu'un de bien serait aussi agréable.

Tac Tac Tac Tac

Et une nouvelle pomme de terre pour la soupe. Et un nouveau sourire pour le cœur. Et une nouvelle douceur pour l'esprit.

Cadwell n'avait jamais quitté les environs de Starkhaven, en-dehors de sa formation de templier au monastère - dont il n'avait franchi les murs qu'une fois, à l'aller, et une fois, au retour. Cairnayr était sa destination la plus exotique. Et au train où allaient les choses, il ne risquait pas de découvrir les Marches libres ou ses voisins avant longtemps, si ce n'était un jour. Cela ne le dérangeait pas. Depuis qu'il était revenu en ville, il y avait retrouvé ses repères familiers, et il ne rêvait plus d'aventures comme le petit garçon qu'il avait été. Ce petit garçon n'était pas réellement mû par la découverte de pays lointains, Cadwell le savait, mais par celle de ses origines. À présent qu'il était adulte, peu lui importait. Il savait qui était sa mère, et il n'était plus naïf au point de croire que son père, cet inconnu, débarquerait pour l'emmener vers un avenir brillant. Cet avenir-là, Cadwell était déterminé à le construire lui-même. Le ton soudain sérieux de Dorne lui rappela cet objectif, et le visage du jeune templier se fit à son tour moins amusé, plus pensif :

"Si mes envies rejoignent mon devoir, alors j'en serais heureux."

Il était certes plus libre que les mages dans ses déplacements, mais son devoir était lié à ces derniers. Si ses supérieurs décidaient de l'envoyer escorter un mage hors de Starkhaven, Cadwell se plierait à leur volonté sans protester. Peut-être même apprécierait-il la balade. Mais il y avait fort à parier que cette dernière ne soit plus très plaisante à mesure que l'Enclin avançait, ou, plus probablement, qu'on le cloisonnerait plutôt au Cercle jusqu'à ce que la menace soit écartée...

"En attendant, je profite de mon temps libre pour me rendre utile là où je le peux", conclut-il plus sereinement.

La découpe méthodique des légumes avait le mérite de vous éloigner des pensées déplaisantes, comme les monstres, les archidémons ou la fin du monde. Et Cadwell était content qu'ils puissent plaisanter plus ouvertement. Suite à la réponse du noble, il sourit : dix jours ?

"Rien n'est impossible. J'ai vu des initiés apprendre à manier l'arc ou l'épée en deux fois plus de temps que cela", rétorqua-t-il.

Il ne jugeait pas ses camarades sur ce point, lui-même étant un combattant relativement moyen, mais il se disait que si Dorne considérait dix jours comme un défi, alors il avait peut-être bien plus confiance en lui qu'il ne le croyait. Il espérait que son compliment transparaîtrait à travers cette réponse amusée. De son côté, Cadwell acceptait d'être aux yeux du noble un grand maître du maniement du couteau, pour ce qui était de la découpe de légumes en tous cas. Il avait presque envie de frimer, pour rire, mais il n'avait pas envie d'attirer l'attention de Soeur Denise en ayant l'air de trop s'amuser. Après tout, ils étaient là pour quelque chose de sérieux. De très sérieux. Une grande carrière dans la distribution de soupe ambulante les attendaient peut-être ! Oh, au diable Soeur Denise. Cadwell ne pouvait s'empêcher de rire à l'unisson avec Dorne, tandis que même Soeur Rosemary entrait dans leur jeu. Quel plan d'avenir merveilleux ! Et ce slogan ? Une exclamation à mi-chemin entre le rire et l'étouffement mourut dans la gorge de Cadwell, qui dut poser son couteau le temps de se calmer. Il posa ses mains sur la table et se plia légèrement en deux pour contenir le rire qui le secouait en silence.

"Oh, si j'avais l'âme créative, j'en ferais une chanson ! Ainsi nous entonnerions notre slogan depuis notre charrette, pour attirer tous les passants."

Il savait encore chanter, certes, mais il n'était pas musicien. Cela dit, même si la qualité de la mélodie laisserait à désirer, l'idée était hilarante et il fallut encore de longues minutes à Cadwell pour se calmer complètement. D'ailleurs, il n'arrivait pas tout à fait à regarder Dorne en face, sans qu'un fou-rire incontrôlé naisse aux coins de ses lèvres. C'est donc en se concentrant à nouveau sur ses légumes qu'il répondit :

"C'est moi qui vous remercie. Il est toujours agréable d'aider au Couvent, mais je ne pensais pas faire de nouvelles rencontres ici, ni que ce serait aussi amusant."

Il manqua ajouter : ni rencontrer un noble ici, en plus de cela ! Mais Cadwell sentait que si l'association d'un jeune templier et d'un noble un peu plus âgé était étrange aux yeux extérieurs, tous autour l'avaient remarqué, et personne ne semblait trouver quoi que ce soit à y redire ; pas quand ces deux étrangers riaient ensemble comme de vieux amis qui venaient de se retrouver.