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Avant l'aube ~ Eiric & Eibhlin

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Avant l'aubeCHAPITRE UN : BÉNIS SOIENT LES CHAMPIONS DU CRÉATEUR

Type de RP classique
Date du sujet 9 Vendangien, 5:12 des Exaltés
Participants Eiric et Eibhlin Byrne
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Résumé Eibhlin et Eiric discutent des évènement de la veille au lever du jour.

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CHAPITRE UN : BÉNIS SOIENT LES CHAMPIONS DU CRÉATEUR

La veille avait été une journée des plus mouvementées, riche en rebondissements émotionnelles, ce qui ne lui était pas tellement recommandé d'ailleurs, mais comment faire autrement ? Comme faire autrement lorsque l'on revoit son père pour la première fois depuis un an et demi et qu'il n'a pas un mot, pas un regard pour soi ? Même pas quelques félicitations de mises pour cette naissance à venir, son propre sang. Et Mère alors ? Ce n'était guère mieux, en remplaçant les années par des mois. Navigant de déception en déception, le coup de grâce avait été donné tendrement par un mari trop occupé - c'est ce qu'il disait, lui qui n'aimait pas ce genre de repas. Eibhlin avait plutôt envie de l'accuser d'avoir saisie la première opportunité pour fuir, parce qu'elle avait envie, besoin d'en vouloir à quelqu'un qui saurait, si ce n'est se faire pardonner, au moins ne pas l'ignorer le moment venu. Qu'importe si ses raisons étaient bonnes ou mauvaises, elle lui en voulait.

Elle s'était couchée après le départ de ses invités, et avant qu'il ne soit rentré, n'avait pas l'intention de l'attendre d'ailleurs même si le grand lit faisait bien vide en son absence, qu'elle détestait. Plus le temps passait, et moins elle supportait qu'il ne soit pas à ses côtés la plupart du temps, son mari, son partenaire. C'était encore plus vraie depuis sa grossesse, ses grossesses, et surtout, depuis cette chute dans la Minantre. Comme si elle craignait son propre jugement et se fiait d'avantage au sien. Les débuts avaient été difficiles pourtant dans ce mariage mais elle était heureuse à présent, de se dire qu'elle ne s'était pas trompée en le choisissant lui, qu'ils pouvaient compter l'un sur l'autre et continuer à construire ensemble, tout en n'étant pas dupes : il y aurait d'autres moments difficiles, des choix plus ou moins bons à surmonter mais cela lui était plaisant de se dire qu'ils le feraient ensemble. Elle aimait l'avoir à ses côtés, quant à l'aimer lui, il ne manquait surement pas grand chose pour qu'elle l'admette et qu'importe ce que Lachlann ou Eugénie en pensaient. En attendant le lit était vide et froid, malgré les bouillottes installées par les serviteurs. Elle resta un long moment éveillée à ruminer et à s'énerver, tout en tremblant, et finit par sombrer dans le sommeil sans s'en rendre compte. Eiric rentra au milieu de la nuit, elle l'entendit mais ne bougea pas, protestation silencieuse. Elle lui offrait son dos, et en vain, sa mauvaise humeur.

Elle se réveilla une première fois avant l'aube, dure réalité de femme enceinte qui ne faisait que s'accentuer. Affronter l'air glacial du matin était le pire dans cette histoire. Elle eut besoin en premier réflexe de vérifier sa présence, et ceci fait, elle l'observa un moment, si paisible dans son sommeil. Elle se rendormi finalement jusqu'à ce que les premiers rayons solaires viennent la tirer définitivement de sa nuit. La journée serait peut-être meilleure que la veille de ce point de vue là aussi, peut-être emmèneraient-ils le Prince et sa suite dans une partie de chasse. Mais en attendant, Eibhlin était toujours boudeuse et n'adressa pas le moindre regard en direction de son mari cette fois, qu'il sache qu'elle lui en voulait ! En espérant qu'il ait l’œil ouvert pour s'en rendre compte, sinon malheureusement l'effet tombait à plat. Il finirait bien par s'en rendre compte, quand la plupart du temps ils partageaient à cette heure un moment privilégié, intime et tendre, pendant qu'ils pouvaient encore n'être que tous les deux Avant que le balai des domestiques ne viennent briser ces instants où Eiric pouvait voir sa femme comme personne d'autre n'en avait, ni n'en aurait l'occasion. Elle le punissait autant qu'elle se punissait elle-même, en réalité.

Têtue comme une mule, elle se releva doucement pour s'asseoir sur le côté du lit et tirer son chaud peignoir pour l'enfiler, puis ses chaussons. Elle défit sa tresse puis réarrangea ses cheveux sur ses épaules. Elle s'apprêtait à se lever et à quitter la chambre sans un mot, la mine sombre.

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CHAPITRE UN : BÉNIS SOIENT LES CHAMPIONS DU CRÉATEUR

Est-ce que tout va bien ? Il devait se moquer d'elle, non ? Ou le faire exprès. Dans sa contrariété, elle avait envie qu'il comprenne sans dire un mot, sans s'exprimer, comme si c'était si simple... C'était sa façon d'être bougonne, mais s'il continuait ainsi, elle finirait par craquer bien sûr. Elle referma sa robe de chambre autour de sa taille et en noua la ceinture d'un geste qui se voulait agacé, mais dont l'effet ne prenait surement pas. Sans se retourner, elle répondit cependant, car elle savait que derrière cette question se cachait une inquiétude plus profonde et qui méritait d'être levée : « Tout va très bien, oui. » L'enfant, elle, physiquement elle se sentait bien et tout allait bien de ce côté là. Son ton était sec pourtant, incapable de cacher sa frustration et sa contrariété, ce qui dénotait complètement avec sa réponse : tout n'allait pas bien, non, en réalité, mais cela restait dérisoire en comparaison de ce qui serait si cette grossesse tournait mal.

Elle se leva alors et tira les rideaux pour laisser pleinement entrer ce soleil matinale. Et le ciel était beau, d'un joli bleu clair et sans nuages - pour le moment du moins. La lumière vive l'aveugla elle-même, et elle s'en voulut un peu de lui infliger ça... Mais n'était-il pas son mari ? Et composer avec sa mauvaise humeur et son sale caractère ne faisait-il pas partie de ses promesses ? Surtout quand il osait demander comment la soirée à laquelle il n'avait pas assistée c'était passée. Eibhlin hésita un instant sur sa réponse tout en regardant dehors, tout en sachant qu'elle serait sèche : elle pouvait y répondre tout en lui donnant un indice de ce qui la contrariait - s'il n'avait pas encore compris - ou se montrer plus dur encore en l'envoyant paître. Mais peut-être parce qu'elle se retourna et jeta un regard noir dans sa direction, elle lui offrit la version la moins dure, celle où elle répondait effectivement à sa question. Même fâchée, toute la tendresse qu'elle avait pour cet homme l'emportait sur sa contrariété.

« La soirée s'est très bien passée, ce que tu saurais si tu avais été là. »

Elle se sentait ridicule mais elle n'allait pas faire marche arrière en si bon chemin, et sans un regard de plus, ne lui offrant que son profil fier et furibond, elle marchait en direction de la porte, prête à quitter la chambre tout en priant pour qu'il la retienne. Sinon elle devrait gérer elle-même sa mauvaise humeur, composer avec et qui sait ce qu'elle pourrait croiser dans les couloirs d'encore plus contrariants, comme sa mère par exemple.

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CHAPITRE UN : BÉNIS SOIENT LES CHAMPIONS DU CRÉATEUR

Son regard noir, ses yeux légèrement plissés vinrent se loger dans les siens, puis se dérobèrent. Elle avait posé sa main à l'intérieur de son bras, d'avantage par réflexe que par tendresse, mais aussi pour s'ancrer à lui parce qu'elle espérait bien qu'il la retienne et la cajole. Elle n'était pas moins énervée pour autant et elle secoua la tête tout en soupirant. Aider un forgeron, alors, voilà ce qu'il avait fait toute la soirée ? C'était agaçant, mais typique et sans doute s'était-elle fait une raison. Elle était aussi fière que son mari se soucie et aide les villageois, tout comme elle-même passe du temps au Couvent des Murmures, seulement il y avait des moments pour le faire et en cela, Eiric semblait toujours choisir les plus mauvais.

« Pas une urgence alors... Mais au moins es-tu sincère... » Elle ne le regardait pas, son ton était toujours aussi sec, mais elle ne commenta pas plus. Alors il continua sur un ton plus léger, se permettant même d'évoquer le repas. Parfois cela suffisait effectivement à désamorcée une Eibhlin en colère, parfois cela faisait tout le contraire. Cette fois, elle le foudroya du regard et s'éloigna pour faire les cents pas dans la pièce. Que n'avait-elle pas fait ou dit pour qu'il ne comprenne pas à quel point ce repas était important pour elle ?

« Tu crois que nous avons mangé tout le gâteau, à seulement quatre pour sept couverts prévus ? Une bénédiction que ma sœur soit venue, d'ailleurs, au final. Quand tu m'as dit que tu partais, j'ai bien cru que je dinerais seule avec Lachlann. Ce qui n'aurait pas été grave, juste décevant. Tout comme ce n'était pas grave que tu ne sois pas là, j'aurais juste aimé... »

... que tu en aies envie.
Une main d'abord posé sur la colonne du lit, elle vint s'asseoir au bord de celui-ci.

« C'était la première fois que nous étions tous les quatre réunis. »

Cela tient presque du miracle.
En disant cela, elle réalisait bien que c'était une bonne chose aussi qu'ils aient pu passer cette soirée entre frères et sœurs, même si elle aurait adoré qu'ils apprennent à le connaître. Surtout Lann, dont elle ne comprenait pas ce qu'il lui reprochait. C'est finalement plus suppliante qu'elle leva le regard en direction d'Eiric, pour aborder ce qui était sans doute le problème de fond.

« Dis-moi au moins que tu savais que mes parents se désisteraient avant de décider de partir ? Leur as-tu parlé hier, après mon départ ? Tu es rentré si tard... »

Elle lui avait dit lorsqu'il était passé en début de soirée, juste un saut pour s'assurer qu'elle allait bien avant de repartir et il lui semblait qu'il avait déjà pris sa décision. Est-ce qu'il l'aurait laissé seule affronter ses parents pendant toute une soirée ? Le retour du Prince, son discours, l'échange rapide qu'elle avait eu avec lui étaient des sujets qu'ils devaient abordés. Elle avait bien conscience d'avoir ignoré sa question pour le moment, mais le programme de la journée attendrait alors qu'elle avait besoin avant tout de lui parler. Depuis son départ du tournoi, elle voulait lui parler et il avait fallu repousser encore et encore ce moment.

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CHAPITRE UN : BÉNIS SOIENT LES CHAMPIONS DU CRÉATEUR

Cette promesse lui suffit pour finir d'apaiser sa colère, elle ne savait pas lui en vouloir trop longtemps de toute et puis il avait suffisamment confiance en son époux pour savoir que ce n'était pas des paroles en l'air. Elle regrettait juste de ne pas lui avoir fait comprendre plus tôt, avant le diner mais elle avait la fâcheuse tendance de croire qu'il lisait dans ses pensées. Enfin, elle comprenait qu'il ait choisi de fuir face à sa famille si peu fonctionnel... Qui rêvait d'un repas en compagnie des Vaël ? Probablement pas grand monde hormis les lèches-bottes de la ville et d'ailleurs. Cependant, Eiric était sa force et son inspiration dans sa volonté d'améliorer les relations familiales, comment y arriver si lui-même fuyait ?

Elle serra sa main entre ses doigts fins, heureuse qu'il décide de la rejoindre et rassurée aussi. C'est donc un regard beaucoup plus doux et apaisé qu'elle leva vers lui, même si quelque peu mélancolique, s'approchant pour se blottir contre lui, loger son visage contre son épaule - sans le quitter des yeux. « N'ai-je jamais été autre chose que déçue les concernant ? » Malgré la dureté des mots, Eibhlin souriait doucement puisqu'après tout ils en avaient discuté, elle lui avait fait part de ses craintes, savait pertinemment comment cela allait se passer.  Elle avait tout fait pour ne s'attendre à rien de particulier, et en ressortait tout de même déçue, comme à chaque fois. Comme si elle était incapable de ne pas espérer, ni d'être incorrigible ; même si l'habitude rendait la chose un peu moins dramatique. « J'ai beau le savoir... C'est toujours aussi... douloureux. Même après un an et demi sans me voir, mon père n'avait pas le moindre regard à m'accorder, même pas un mot pour cet enfant à naître... Il a décidé de revenir en tant que Prince, et père d'un seul enfant... Je devrais me faire une raison...» Une personne normale aurait revu ses enfants avant une apparition public. Une personne normale ne se serait pas enfermée et cachée pendant un an et demi...

Elle soupira.

« J'ai pu leur parler hier, leur faire savoir ce que je pensais de tout ça... » Son visage se durçit, et elle n'avait même pas vérifié son bras mais il devait probablement y avoir quelques ecchymoses là où son père l'avait attrapé la veille. « Tu me connais, je ne mâche pas mes mots et cela ne leur a guère plu. Je me demande parfois de qui je tiens tant de franchise. » Elle sourit à nouveau, un éclat de rire fugace et sans joie. « Alors en guise de félicitations j'ai eu le droit à des reproches, comme quoi je devrais déjà attendre notre quatrième enfant. » Elle savait que leur décision de ne pas rester pour le dîner n'avait rien à voir avec cette discussion, qu'elle était déjà prise, mais ça n'avait dû que les conforter. Elle toisa Eiric à nouveau, sans trop savoir ce qu'elle y cherchait, alors que les mots de Lachlann résonnaient dans sa tête et une autre promesse qu'elle avait faite au Prince, sans jamais en avoir parlé à son époux. Tout se bousculait dans sa tête, les difficultés de cette dernière année, ses nombreuses craintes et angoisses qui continuaient de la poursuivre, en témoignait cette nouvelle remarque de son père. Elle ne s'était pas trompée, cette pression qu'elle s'était mise ne venait pas de nulle part. Eiric avait beau être incroyablement compréhensif et attentif, et surtout pas patient, il ne pouvait pas complètement lui enlever cette épine du pied. Et l'histoire d'Eibhlin faisait qu'elle n'y arriverait probablement jamais... Il ne devait certainement pas avoir oublié sa tête la première fois qu'elle lui avait annoncé être enceinte, elle s'était mise dans un état de détresse profonde et avait fondu en larmes comme rarement. La fausse-couche n'avait tardé à suivre, de façon plutôt naturelle et sans heurt, si bien qu'elle en avait été soulagée, et il lui avait semblé que lui aussi. Cela leur avait laissé quelques mois pour discuter et aborder plus sereinement la suivante.

Sans s'en rendre compte, elle avait posé sa main sur sa joue et caressait son visage avec douceur et tendresse. Les expressions de son visage avaient suivi le fil de ses pensées, montrant à la fois beaucoup et si peu de choses lisibles à son mari, mais en cet instant il redevint sérieux car elle s'adressait cette fois au noble et au conseiller.

« Et toi ? Qu'as tu pensé de son grand retour ? Et de ce discours ? » Une question un peu piégeuse, et surtout très politique. Avait-elle été trop loin dans ses reproches au Prince ? Car elle avait évoqué la position de la famille Byrne, et sans le moindre tact ce qui avait déclenché sa colère. Cela lui semblait parfaitement légitime, mais Eiric avait-il eu le même ressenti qu'elle ou s'était-t-elle trop avancé ? Elle avait d'autres sujets qu'elle souhaitait aborder, plus joyeux, mais autant en finir maintenant avec cette histoire du retour du Prince et du tournoi.

La colère semblait loin désormais, ce point là pourtant était particulièrement périlleux.

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Elle acquiesça doucement, l'air de dire « tu connais ma relation avec mes parents. » Cependant, aussi brutal que cela puisse être, ça ne l'atteignait plus autant qu'avant. Elle savait ces remarques cruelles assez creuses, dîtes sur le coup de la colère plus que réellement pensées... Quoique pour celle là... Son père avait une telle vision des femmes qu'il devait certainement y croire, heureusement qu'Eiric n'avait jamais été comme ça. Elle serra sa main pour le rassurer, c'était blessant certes, mais aussi facile et l'avis du Prince restait mineur par rapport à celui de son époux dans cette histoire. Même si, si elle le lui avait raconté, c'était sûrement pour qu'il la réconforte et apaise ses doutes.

« Je n'ai pas été très tendre non plus... Même si ça ne justifie pas tout. »

Le regard d'Eiric logé dans le sien, Eibhlin se sentait belle et forte, capable d'absolument tout. Elle lui sourit tendrement et fièrement. « Moi aussi je suis heureuse, j'espère que tu le sais. » Ce n'était certes pas Orlaïs ou Tévinter, mais c'était tout ce dont elle avait toujours rêvé : fonder une famille avec un homme aimant, et Corintamh était un endroit magnifique. Elle sentait dans son regard quelque chose de plus pesant pourtant, et elle comprit grâce à la fin de sa phrase qu'il ne parlait pas que de leur vie ensemble, mais de sa vie à elle. Elle fût touchée. Elle avait eu peur de mourir à plusieurs reprises mais elle était là, et elle se battrait de toutes ses forces pour continuer à l'être. Sa main vint trouver le visage de son mari, tendrement. Non elle n'était plus en colère, ne lui en voulait plus, elle avait eu les réponses qu'elle voulait et n'avait eu aucunes intentions de lui en vouloir très longtemps ; d'autant qu'une belle journée les attendait tous deux, sans obligations particulières pour une fois.

Sa main glissa doucement sur sa gorge, puis sa poitrine alors qu'il parlait avant de revenir trouver sa main. Elle aimait ces moments tendres, malheureusement elle avait choisi un sujet assez peu plaisant et si Eiric n'avait pas tout à fait répondu à ses interrogations, elle commençait elle-même à en avoir marre. Elle voulait le voir sourire, et non, le contrarier une fois de plus, même si ce n'était pas de son fait. Elle hésita à ajouter quelque chose, sur cette façon qu'avait eu le Prince de revenir comme si de rien n'était, comme si ce tournoi n'était pas un caprice qu'il leur avait imposé et ce sans jamais les remercier, autant eux que les villageois. Mais Eiric changea de sujet et elle l'accueillit avec un léger sourire.

Elle se tourna alors un peu plus vers lui, repliant sa cuisse sur le lit pour se rapprocher d'avantage. Elle prit sa main et la posa à un endroit précis sur son ventre et attendit, jusqu'à ce qu'un nouveau coup se fasse sentir. Elle lui sourit, radieuse, car c'était la première fois qu'ils pouvaient le sentir bouger.

« Notre enfant n'a pas apprécié que sa mère fasse un repas si copieux... Il n'a pas arrêté cette nuit. » Ces mots... Enfant... Mère... Ils étaient si émouvants, tout comme cette vie qui grandissait en elle. Elle prit donc le temps de reprendre sa respiration avant de lui répondre. « Je vais bien, Eiric, nous allons bien. Je te promets de te le dire s'il y avait quoique ce soit. J'ai eu si peur de le perdre, et le sentir bouger, si vivant à l'intérieur de mon ventre... » Elle en avait des frissons... « Je l'aime déjà tellement. Fille ou garçon, peu m'importe... » Elle qui craignait tant de ne pas savoir aimer son enfant, de reproduire ce qu'elle avait vécu... Par contre elle commençait à s'inquiéter de l'accouchement désormais, mais était-ce utile de le formuler à voix haute ? Ils savaient tous deux que ce serait un moment difficile, qu'il pourrait la perdre, ou perdre l'enfant. Rien n'était gagné, jamais. Elle préféra continuer sur ses appréhensions, dans le scénario où tout se passerait bien. « J'ai toujours peur d'être une mauvaise mère, malgré les nombreuses tentatives de tout le monde pour me rassurer... Mais... Je sais que tu seras là, époux et père merveilleux, pour me guider. »

Son cœur battait plus vite, sa main remonta le long de son bras, et elle l'aurait embrassé si elle n'avait pas terriblement envie de lui poser une autre question.

« Et toi, as-tu des attentes vis-à-vis de cet enfant ? Seras-tu déçu si c'est une fille ? » Et si jamais nous n'avions d'héritiers ?

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CHAPITRE UN : BÉNIS SOIENT LES CHAMPIONS DU CRÉATEUR


Je sais.
Trois ans qu'ils vivaient ensemble et qu'ils avaient appris à s'appuyer l'un sur l'autre, à s'épauler, à se comprendre et qu'ils continuaient de le faire. Non sans heurts bien sûr, car la compréhension mutuelle était toujours imparfaite mais parfois ils n'avaient besoin de se parler pour se dire des choses : les pensées, les regards suffisaient.

Il serait là, et c'était grâce à cette certitude qu'elle tenait le coup, qu'elle avait de l'espoir. Même s'il allait trop loin en affirmant que tout se passerait bien, car il n'en savait rien, s'inquiéter n'aidait en rien, et l'expérience avait prouvé que cela pouvait même faire du mal. Eibhlin chassait donc ses angoisses du mieux qu'elle pouvait, confiant sa vie et celle de son enfant au destin, au Créateur, qu'elle priait très souvent pour qu'il se montre clément.

La main d'Eibhlin retrouva le visage de son époux alors qu'elle se sentit fondre face à son regard, réveillant désir et affection. Elle lui sourit chaleureusement, il savait combien c'était important pour elle qu'il la rassure sur ce point précis. Ils avaient déjà abordé la question, mais cette fois la grossesse se concrétisait, tout devenait plus réel et son avis aurait pu changer. Eibhlin, elle, souhaitait un fils, qu'au moins cela soit fait et qu'elle n'ait plus de questions à se poser. Aussi parce qu'elle croyait encore pourvoir parvenir à obtenir l'attention de son père en lui offrant un petit fils. Évidemment, elle rêvait aussi d'une petite fille qu'elle aimerait plus que tout au monde, comme elle aurait voulu que sa mère l'aime. Quoiqu'il en soit, Eibhlin espérait bien avoir plusieurs enfants, mais avoir un fils maintenant lui ôterait pour sûre une certaine pression qu'elle se mettait elle-même.

L'arrivée de l'enfant devenait sérieuse et la question d'Eiric s'imposait naturellement, pourtant cela crispa instantanément Eibhlin. Elle se raidit, retrouvant une position assise plus stricte et plus conventionnelle, tout en reprenant sa main pour elle, fermant doucement ses doigts. Son regard fuyant se logea sur les aspérités du mur de pierre, et son visage s'éteignit le temps d'y réfléchir. Après quelques longues secondes, sa réponse parut surprenante.

« Oui, tu as raison... » Le cœur n'y était pas, bien qu'elle avait envie de le faire, de se lancer. Etait-ce trop tôt ? Est-ce que cela pourrait leur porter malheur ? Mais Eibhlin n'était pas superstitieuse, et un nom ne changerait probablement rien, ni au destin, ni à leur peine si malheur devait arriver, alors  elle se convainquit tant bien que mal de poursuivre dans sa direction malgré ses craintes.



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Elle serra alors son mari dans ses bras, logeant son visage un peu au-dessus du sien, leur enfant entre eux était toujours aussi vivace ce jour-là. Elle avait plein de choses à discuter avec lui, plus ou moins personnel, mais rien qui ne pouvait attendre quelques heures, ou quelques jours. Son estomac, lui, grondait, affamé pour deux. Et Eibhlin finit par y céder, à sa manière, car son esprit passait d’une pensée à l’autre sans prévenir personne. Qui disait repas, disait salle à manger et table partagée, or ils avaient des invités… Pas forcément de ceux qu’ils préféraient recevoir. La crainte de les croiser (et l’envie de prolonger cet instant) surpassait encore largement la faim, néanmoins, la jeune femme se sentait de bien meilleure humeur après cette discussion, surtout en étant dans les bras de son époux. Assez pour ironiser un peu de la situation…

« Crois-tu que quand nous sortirons de cette chambre, ils seront déjà partis ? »

Ou peut-être étaient-ils en train de se plaindre de leur absence, de critiquer gratuitement leurs qualités d'hôtes. La perspective qu'ils puissent être déjà partis étaient assez heureuse. Au moins auraient-ils du temps devant eux, de la tranquillité aussi, pour profiter l'un de l'autre.
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Allons le découvrir.

S'il le faut.
Elle aurait pu rester là encore longtemps, mais le devoir les appelle et elle n'est pas de ceux qui rechignent à le faire, même si c'est Eiric qui lance le mouvement. Elle le suit, heureuse, et tombe bien vite des nues lorsque celui-ci s'arrête pour lui faire ce qui s'apparente à des remontrances.

Eibhlin plisse légèrement des yeux, sa poitrine monte, ses mâchoires se serrent et puis... Elle ravale sa fierté. Pour elle, il exagère, ils avaient eu tout le temps de s'engueuler plus tôt alors que le ton n'était pas trop monté finalement. Pourquoi maintenant ? Mais elle sait aussi être en tort sur ce sujet précis, qu'il ne vaut donc mieux pas qu'elle lance et s'emporte juste parce que la remarque lui déplaît, le ton aussi, en bonne guerre d'égo. Elle a très bien compris toute la dimension de cette phrase, qu'il ne s'agit pas que de sa chute mais aussi des apparitions publiques, des trajets, et tout ce qui occupe ses journées : elle ne sait pas s'arrêter, elle ne peut pas en réalité : Même enceinte, elle n'a pas le droit de montrer la moindre faiblesse. Mais il a raison, deux vies en dépendent, et ça ne l'amuse pas plus que lui.

« J'essaye Eiric, tu le sais bien. »

Ce qui la meurtri le plus, c'est de n'avoir toujours pas retrouvé sa pleine confiance et de prendre conscience qu'elle ne l'aura sûrement pas tant que l'enfant ne sera pas né.
Mais pourquoi ce matin-là ?

Fin du RP.
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