Cher cousin, chère cousine ~ Islan
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Mar 23 Mai - 14:53
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Mar 23 Mai - 14:55
Elle s’agrippe à un tronc et descend la pente raide qui se dessine devant-elle. La journée aurait été affreusement tranquille et ordinaire si l’orage ne se rapprochait pas. Le troupeau ne doit pas être très loin de cette clairière, repère qu’ils connaissent bien et affectionnent. L’eau lui dégouline à présent du visage et elle se frotte les yeux avant de les rouvrir à la recherche de ces silhouettes si caractéristiques – mais aucune ne se dessine, même camouflée dans un fourré. Pas de brame non plus, aucun chant, aucune plainte. Le pouls de la Maîtresse s’emballe et elle reprend sa course. Un peu plus loin, des marques de sabot dans le sol humide indiquent un mouvement, départ hâtif. Encore frais. Ellowen lâche un bref soupir de soulagement, interrompu net dans un sursaut quand l’explosion retentit et que le monde tremble de plus belle. Beaucoup trop près. Elle doit faire vite.
La zone vers laquelle est parti son troupeau l’inquiète un peu plus chaque instant. D’ordinaire, la dalatienne fait de tout son possible pour éviter la lisière de la forêt, surtout si proche de Corintamh. Elle préfèrerait de loin de retrouver face à un ours mal luné qu’à un groupe de chasseurs shemlen, ces enfants de putain ne pouvant être tués qu’en cas de stricte légitime défense en vertu des accords entre les Tanassavir et la noblesse locale. Comme bien souvent, ils n’hésiteraient sûrement pas à abattre quelques hahls pour leur peau et leur ramure et s’esclafferaient à l’idée de tuer l’âme de son peuple, ses enfants les plus sacrés. Ellowen jure entre ses dents pour interdire à son corps de se plaindre, les muscles en feu et le souffle court, le palpitant qui panique dans la poitrine. Ils ont besoin d’elle, elle souffrira plus tard.
Ils sont là, les vingt-sept hahls de son troupeau, serrés les uns contre les autres comme pour se protéger des éléments. La mine basse, l’effroi dans leur regard faisant écho au sien. Elle rit doucement de soulagement alors, remerciant Ghilan'nain de les avoir protégé et de veiller sur eux comme elle veille sur ses enfants – et son rire se fige en hoquet comme la surprise sur son visage quand elle réalise qu’une silhouette se tient non loin de là. Elfe, allure masculine, adulte. De longs cheveux de jais, trempés eux aussi, une tenue de citadin. Pas de valasslin, naturellement. Son cœur se sert en voyant l’épée portée sur le côté. S’il attaquait à l’instant, ses muscles tétanisés l’empêcheraient de prendre les devants et la confrontation ne serait qu’à son désavantage. Pire, ses frères et sœurs risquaient également la morsure d’acier.
Deux mains tremblantes se lèvent, bien au clair malgré la pluie qui continue de tomber drue. « Andaran atish’an ». Entre ici en paix. Dans le cas contraire, je te ferai payer chaque geste jusqu’à ce que ton souffle soit trop douloureux et que tu me supplies de te renvoyer vers les tiens. « Est-ce une visite ou une intrusion, cousin ? » Le dernier mot est malgré elle teinté de mépris. Elle ne pardonnera jamais aux citadins de renier leur héritage en ployant face à leurs oppresseurs.